Date : 20021205
Dossier : IMM-700-01
Toronto (Ontario), le jeudi 5 décembre 2002
EN PRÉSENCE DE MADAME LE JUGE SNIDER
ENTRE :
HUANG HAO WEN
demandeur
- et -
LE MINISTRE DE LA CITOYENNETÉ ET DE L'IMMIGRATION
défendeur
ORDONNANCE
La demande de contrôle judiciaire est rejetée.
« Judith A. Snider »
Juge
Traduction certifiée conforme
Claude Leclerc, LL.B.
Date : 20021205
Dossier : IMM-700-01
Référence neutre : 2002 CFPI 1262
ENTRE :
HUANG HAO WEN
demandeur
- et -
LE MINISTRE DE LA CITOYENNETÉ ET DE L'IMMIGRATION
défendeur
MOTIFS DE L'ORDONNANCE
LE JUGE SNIDER
[1] Il s'agit d'une demande de contrôle judiciaire d'une décision rendue par une agente de Citoyenneté et Immigration Canada (l'agente). Le 19 janvier 2001, l'agente a rendu une décision défavorable en réponse à la demande de visa d'étudiant faite par le demandeur.
LES FAITS
[2] Le demandeur réside à Guangzhou (province de Guangdong) en République populaire de Chine. Après avoir obtenu son diplôme d'école secondaire de deuxième cycle en 1998, il a travaillé comme vendeur pendant un an. En 1999, il s'est inscrit au programme de comptabilité du collège d'agriculture et d'administration de Guangdong. Par la suite, en juillet 1999, le demandeur a été admis au Seneca College of Applied Arts & Technology (le collège Seneca) dans un programme d'une durée de deux ans décrit dans la lettre d'admission comme étant un [traduction] « programme préparatoire à la langue anglaise » et un [traduction] « programme général d'arts et sciences » . Le demandeur a demandé un visa d'étudiant le 28 septembre 2000.
[3] La demande a été rejetée sans entrevue. Cette décision a été communiquée par une lettre type dans laquelle figurait la note applicable suivante :
[traduction] « Selon la Loi sur l'immigration du Canada et ses règlements d'application, une demande de visa d'étudiant doit démontrer que l'étudiant a véritablement l'intention de rester temporairement au Canada, c.-à-d., que le demandeur est un visiteur au sens de la Loi sur l'immigration du Canada et qu'il n'est pas un immigrant. Comme demandeur vous devez convaincre l'agent des visas que vous quitterez le Canada, que vous n'occuperez pas un emploi sans autorisation ou ne commencerez pas d'études autres que celles prévues et ne tenterez pas de rester au Canada en permanence. Nous avons soigneusement examiné les renseignements qui figurent dans votre demande et nous concluons que vous ne remplissez pas les conditions susmentionnées. Par conséquent, vous appartenez à la catégorie non admissible de personnes visées à l'alinéa 19(2)d) de la Loi et votre demande a été refusée » .
[4] Dans une déclaration assermentée dans le cadre de la présente demande de contrôle judiciaire, l'agente a déclaré qu'elle avait conclu que le demandeur n'était pas un véritable étudiant qui cherchait à séjourner temporairement au Canada. Elle a souligné que la lettre du collège Seneca mentionnait que le demandeur était inscrit à [traduction] « (i) un programme préparatoire - English Language Institute - deuxième module et à (ii) un programme de formation professionnelle - programme général d'arts et sciences » . Elle a conclu que le demandeur n'avait pas été admis au programme d'informatique du collège Seneca et que [traduction] « rien n'indique qu'il sera admis dans l'avenir » .
[5] L'agente a déclaré que le programme général d'arts et sciences du collège Seneca semblait être [traduction] « plus ou moins la même chose que le cours d'études supérieures collégiales de deux ans du collège d'agriculture et d'administration de Guangdong [...] » et qu'[traduction] « il ne faisait aucun sens qu'il veuille abandonner ses études maintenant, sans avoir d'abord compléter son cours d'études supérieures » .
[6] L'agente a déclaré qu'elle a tenu compte, sans le trouver convaincant, de l'argument voulant que les parents du demandeur avaient des économies importantes et que sa tante et son oncle l'aideraient. L'agente a conclu qu'étant donné que le demandeur avait commencé à travailler immédiatement après avoir terminé l'école secondaire de deuxième cycle, sa famille n'avait pas les moyens de lui payer des études supérieures. Si sa famille avait eu des économies, le demandeur aurait vraisemblablement commencer ses études immédiatement après avoir terminé l'école secondaire de deuxième cycle.
LES QUESTIONS EN LITIGE
[7] Les questions en litige en l'espèce sont les suivantes :
(1) L'agente a-t-elle commis une erreur en droit en omettant de tenir compte des explications du demandeur concernant les études qu'il avait l'intention d'entreprendre au collège Seneca?
(2) Le demandeur s'est-il vu refuser le droit à l'équité procédurale du fait qu'il n'a pas eu le droit de réfuter les doutes de l'agente quant au fait qu'il n'a pas commencé ses études supérieures immédiatement après avoir terminé ses études secondaires de deuxième cycle?
LES PRÉTENTIONS
Les prétentions du demandeur
[8] Le demandeur a renvoyé à l'explication de l'expert-conseil de C & C Immigration Service (Canada) Inc. (C & C) quant à la raison pour laquelle la lettre d'admission du collège Seneca mentionnait que le demandeur était inscrit dans un programme général d'arts et sciences plutôt que dans un programme en informatique. En particulier, C & C a déclaré que les étudiants qui font une demande d'admission au collège Seneca et qui n'ont pas réussi les examens de la connaissance de l'anglais, sont inscrits au programme général d'arts et sciences et ne sont pas tenus de choisir un programme tant qu'ils n'ont pas réussi l'examen de la connaissance de l'anglais. Comme l'agente n'a pas fait mention de cette explication, le demandeur a prétendu qu'elle avait omis de tenir compte de cet élément de preuve important et que, par conséquent, elle avait commis une erreur de droit susceptible de contrôle judiciaire.
[9] Le demandeur a prétendu qu'on ne lui a pas donné la possibilité de réfuter les suppositions non fondées de l'agente concernant la situation financière des citoyens chinois qui vont directement sur le marché du travail après avoir terminé leurs études secondaires de deuxième cycle. L'agente a déclaré ce qui suit :
[traduction] « Je remarque que le demandeur mentionne dans son affidavit que ses parents ont des économies importantes et qu'il recevra de l'aide de la part de sa tante et de son oncle qui vivent au Canada. J'ai tenu compte de ces prétentions et je ne les ai pas trouvées convaincantes. Les principales raisons (mais non exclusives) pour lesquelles les citoyens chinois ne cherchent pas à faire des études supérieures après avoir obtenu leur diplôme d'études secondaires de deuxième cycle sont les suivantes : leur famille n'a pas les moyens de financer des études supérieures et qu'elle s'attend à ce que l'étudiant commence à travailler et à contribuer au revenu familial; la famille ne peut financer la poursuite des études que d'un seul enfant; l'étudiant ne réussissait pas bien à l'école et n'a pas été accepté dans un collège d'enseignement postsecondaire ou une université » .
[10] L'agente a conclu que c'est en raison de la situation financière de ses parents que le demandeur est entré sur le marché du travail après avoir terminé ses études secondaires de deuxième cycle. Comme les parents sont dans la même situation aujourd'hui, l'agente a conclu que le demandeur n'était pas un véritable étudiant entrant au Canada à des fins temporaires. Le demandeur a invoqué la décision rendue par la Cour dans Yue c. Canada (M.C.I.) [2002] A.C.F. no 1299. Dans cette décision, le juge Kelen a décidé que le demandeur s'était vu refuser le droit à l'équité procédurale parce qu'on ne lui avait pas donné l'occasion de s'exprimer en rapport avec un doute important. En l'espèce, avant de rendre sa décision, l'agente aurait dû faire part au demandeur de sa « compréhension générale » des raisons pour lesquelles les étudiants éventuels ne poursuivent pas d'études supérieures.
Les prétentions du défendeur
[11] Le défendeur a prétendu qu'à la lumière des faits, il était loisible à l'agente de conclure comme elle l'a fait. Le défendeur a prétendu que [traduction] « le demandeur n'a pas réussi à s'acquitter du fardeau qui lui était imposé de démontrer qu'il était véritablement un étudiant qui séjournerait au Canada à des fins temporaires » . Accepter les prétentions du demandeur équivaudrait à [traduction] « renverser le fardeau que le législateur a clairement imposé au demandeur lui-même » .
[12] Selon les prétentions du défendeur, l'agente n'était pas tenue de faire part de ses doutes à l'étudiant. Contrairement à la situation visée par Mittal, l'agente ne s'est pas fondée sur des éléments de preuve extrinsèques.
L'ANALYSE
[13] 1) Omission de tenir compte d'un élément de preuve pertinent
Je suis d'avis qu'il était raisonnablement loisible à l'agente de conclure comme elle l'a fait, compte tenu de la preuve qui lui a été soumise. Par conséquent, l'agente n'a pas commis d'erreur susceptible de révision.
[14] Une conclusion fondamentale tirée par l'agente qui a mené au rejet de la demande est que le demandeur [traduction] « n'a pas été admis dans un programme d'informatique au collège Seneca et que rien n'indique qu'il sera admis dans l'avenir » . Cette conclusion repose sur le fait que la lettre d'admission du collège Seneca ne faisait mention que d'un programme général d'arts et sciences. Bien que l'expert-conseil du demandeur, C & C, ait déclaré que le collège Seneca traite automatiquement les candidats qui ne parlent pas couramment l'anglais comme des candidats au programme général d'arts et sciences pour des raisons pratiques, il est clair et non équivoque que l'admission ne concernait pas un programme de formation en informatique. Il était raisonnable que l'agente déclare ce qui suit : [traduction] « J'avais des doutes quant au programme auquel le demandeur s'était inscrit malgré son intention déclarée de s'inscrire éventuellement à un programme de formation en informatique » .
[15] (2) Déni d'équité procédurale
Vu les circonstances de l'espèce, je ne crois pas que l'agente était tenue de donner l'occasion au demandeur de réfuter ses doutes.
[16] Dans Li c. Canada (Ministre de la Citoyenneté et de l'Immigration), 2001 CFPI 791, le juge Muldoon a examiné l'étendue des protections procédurales qui existent dans le contexte d'une demande de visa d'étudiant. Le juge Muldoon a conclu que les exigences procédurales ne sont pas « strictes » et qu'il n'existe aucune exigence claire de permettre à un demandeur de réfuter les doutes d'un agent au fur et à mesure qu'ils se présentent. De plus, selon moi, il est raisonnable de s'attendre à ce que les agents se servent de leur propre expérience et de leur propre compétence pour juger les demandes qui leur sont soumises.
[17] Dans Yue c. Canada (M.C.I.), le juge Kelen a déclaré que [traduction] « [m]ême si les agents des visas peuvent en droit se servir de leur propre expérience lorsqu'ils rendent une décision [...] ils ne peuvent pas appliquer à un demandeur un stéréotype fondé sur cette expérience » . Il ne s'agit pas en l'espèce d'un cas de stéréotype. L'agente s'est fiée à sa propre expérience mais elle a aussi soigneusement évalué la situation personnelle du demandeur. Elle avait le droit d'agir ainsi.
[18] Le demandeur a aussi invoqué Mittal (tuteur à) c. Canada (Ministre de la Citoyenneté et de l'Immigration), (IMM-2751-97, IMM-2752-97, le juge Lutfy, maintenant juge en chef adjoint). La présente décision se distingue de Mittal car dans celle-ci, l'agente s'était fondée sur un élément de preuve extrinsèque, alors qu'en l'espèce, l'agente a simplement tiré des conclusions défavorables de la preuve qui lui a été soumise.
[19] En l'espèce, l'agente ne s'est pas fondée sur des éléments de preuve extrinsèques, mais s'est plutôt fondée sur sa propre expertise et sur son analyse de l'ensemble des éléments de preuve qui lui ont été fournis.
CONCLUSION
[20] Pour ces motifs, la demande de contrôle judiciaire est rejetée.
[21] Les parties n'ont soumis aucune question à la certification.
« Judith A. Snider »
Juge
Toronto (Ontario)
Le 5 décembre 2002
Traduction certifiée conforme
Claude Leclerc, LL.B.
COUR FÉDÉRALE DU CANADA
SECTION DE PREMIÈRE INSTANCE
AVOCATS INSCRITS AU DOSSIER
DOSSIER : IMM-700-01
INTITULÉ : HUANG HAO WEN
-et-
LE MINISTRE DE LA CITOYENNETÉ
ET DE L'IMMIGRATION
LIEU DE L'AUDIENCE : Toronto (Ontario)
DATE DE L'AUDIENCE : Le jeudi 5 décembre 2002
MOTIFS DE L'ORDONNANCE : MADAME LE JUGE SNIDER
DATE DES MOTIFS : Le jeudi 5 décembre 2002
COMPARUTIONS :
Max Chaudhary POUR LE DEMANDEUR
Ann Margaret Oberst POUR LE DÉFENDEUR
AVOCATS INSCRITS AU DOSSIER :
Chaudhary Law Office POUR LE DEMANDEUR
18 Wynford Drive
bureau 707
North York (Ontario)
M3C 3S2
Morris Rosenberg POUR LE DÉFENDEUR
Sous-procureur général du Canada
COUR FÉDÉRALE DU CANADA
Date : 20021205
Dossier : IMM-700-01
ENTRE :
HUANG HAO WEN
demandeur
-et-
LE MINISTRE DE LA CITOYENNETÉ ET DE L'IMMIGRATION
défendeur
MOTIFS DE L'ORDONNANCE