Date : 20020911
Dossier : IMM-4787-01
Référence neutre : 2002 CFPI 965
Toronto (Ontario), le mercredi 11 septembre 2002
EN PRÉSENCE DE MONSIEUR LE JUGE KELEN
ENTRE :
JASWINDER KAUR DHALIWAL
demanderesse
- et -
LE MINISTRE DE LA CITOYENNETÉ ET DE L'IMMIGRATION
défendeur
MOTIFS DE L'ORDONNANCE ET ORDONNANCE
[1] Il s'agit d'une demande de contrôle judiciaire visant la décision par laquelle
la Section du statut de réfugié (la SSR) de la Commission de l'immigration et du statut de réfugié a refusé, en date du 20 août 2001, de reconnaître à la demanderesse le statut de réfugié au sens de la Convention.
[2] La Cour est convaincue que la demanderesse a été victime de la violence physique
et psychologique terrible exercée par son mari et que la SSR a considéré qu'elle était un témoin crédible à cet égard.
[3] La Cour constate que la SSR a interrompu le témoignage de la demanderesse sur
la violence dont elle avait été victime pendant plusieurs années en indiquant que, comme elle le jugeait crédible, il n'était pas nécessaire que la demanderesse le poursuive.
[4] La Cour constate aussi que la SSR a ensuite rejeté le témoignage de la
demanderesse sur la violence dont elle avait été victime après le prononcé du divorce, en 2000, même si elle avait interrompu le témoignage de la demanderesse au sujet de la continuation de cette violence parce qu'il n'était pas nécessaire.
[5] Après avoir interrompu la description chronologique de la violence, la SSR a
indiqué dans sa décision :
Le tribunal conclut que la revendicatrice n'a pas été suivie, attaquée ou menacée par son conjoint après 1998, et ce, jusqu'à son départ de l'Inde, en septembre 2000, une période d'environ deux ans. Par conséquent, le tribunal conclut que la revendicatrice n'éprouve pas une crainte fondée d'être persécutée par son ancien conjoint en Inde présentement.
[6] Il est contraire à la justice naturelle de mettre fin au témoignage de la
demanderesse concernant la violence qu'elle a subie dans le passé et de considérer ensuite que son témoignage sur la continuation de cette violence n'est pas crédible. La demanderesse a le droit d'avoir une possibilité raisonnable de présenter son témoignage en entier sur l'existence d'une « crainte fondée de persécution » . Si elle n'avait pas mis fin au témoignage de la demanderesse sur la violence que lui avait fait subir son mari, la SSR aurait pu conclure que celle-ci était un témoin crédible non seulement au regard des événements survenus entre 1995 et 1998, mais aussi au regard des événements survenus après 1998.
[7] En outre, la Cour estime que la décision de la SSR de considérer que la
demanderesse était un témoin crédible pour ce qui est de sa crainte de persécution jusqu'à la fin de 1998, mais non en 1999 et 2000, est déraisonnable.
[8] Le Formulaire de renseignements personnels de la demanderesse, daté du
12 décembre 2000, indiquait expressément que le mari [traduction] « ... était toujours en colère contre moi et n'arrêtait pas de me menacer en disant qu'il me tuerait et qu'il ne me laisserait pas épouser quelqu'un d'autre » après le divorce, en février 2000. La demanderesse a confirmé dans son témoignage que les menaces s'étaient poursuivies. Elle a ajouté qu'elle avait décidé de s'enfuir de l'Inde parce que son mari voulait toujours la tuer pour l'empêcher d'épouser quelqu'un d'autre. En conséquence, elle avait peur de sortir de chez elle. La SSR a considéré que ce témoignage n'était pas crédible parce qu'il contredisait les documents de divorce, et elle l'a rejeté. Ces contradictions sont compréhensibles étant donné que les positions des parties au sujet du divorce ont changé avec le temps. En outre, le document de divorce est un document juridique technique que la demanderesse ne comprenait pas, et qui ne reflétait pas les différentes positions adoptées par les parties au cours de la procédure de divorce. La Cour n'est pas convaincue que les contradictions entre le témoignage de la demanderesse et le jugement de divorce constituent un motif raisonnable de conclure que le témoignage de la demanderesse concernant la poursuite des menaces à sa vie après le divorce n'était pas crédible.
[9] Par conséquent, la Cour conclut que la demanderesse a droit à une nouvelle
audience au cours de laquelle elle aura la possibilité de présenter son témoignage au sujet de la violence physique et psychologique sur laquelle est fondée sa revendication du statut de réfugié au sens de la Convention. La SSR doit être convaincue, selon la prépondérance des probabilités, que le demanderesse craignait avec raison d'être persécutée par son mari en 2000, l'année de son divorce et l'année au cours de laquelle elle aurait décidé de s'enfuir de l'Inde à cause de cette persécution.
ORDONNANCE
LA COUR ORDONNE :
1. Que la présente demande de contrôle judiciaire soit accueillie et que l'affaire soit
renvoyée à un tribunal différemment constitué de la SSR aux fins d'une nouvelle audition. Les deux avocats ont convenu que la présente demande ne soulève aucune question grave de portée générale. La Cour étant aussi de cet avis, aucune question n'est certifiée aux fins d'un appel.
« Michael A. Kelen »
Juge
Traduction certifiée conforme
Suzanne M. Gauthier, trad. a., LL.L.
COUR FÉDÉRALE DU CANADA
SECTION DE PREMIÈRE INSTANCE
AVOCATS INSCRITS AU DOSSIER
DOSSIER : IMM-4787-01
INTITULÉ : JASWINDER KAUR DHALIWAL
- et -
LE MINISTRE DE LA CITOYENNETÉ ET DE L'IMMIGRATION
LIEU DE L'AUDIENCE : Toronto (Ontario)
DATE DE L'AUDIENCE : Le mardi 10 septembre 2002
MOTIFS DE L'ORDONNANCE
ET ORDONNANCE : Monsieur le juge Kelen
DATE DES MOTIFS : Le mercredi 11 septembre 2002
COMPARUTIONS :
Lorne Waldman POUR LA DEMANDERESSE
Mielka Visnic POUR LE DÉFENDEUR
AVOCATS INSCRITS AU DOSSIER :
Waldman & Associates POUR LA DEMANDERESSE
Avocats
281, avenue Eglinton est
Toronto (Ontario)
M4P 1L3
Morris Rosenberg POUR LE DÉFENDEUR
Sous-procureur général du Canada
COUR FÉDÉRALE DU CANADA
Date : 20020911
Dossier : IMM-4787-01
ENTRE :
JASWINDER KAUR DHALIWAL
demanderesse
- et -
LE MINISTRE DE LA CITOYENNETÉ ET DE L'IMMIGRATION
défendeur
MOTIFS DE L'ORDONNANCE
ET ORDONNANCE