Date : 20041001
Dossier : IMM-6897-03
Référence : 2004 CF 1320
ENTRE :
CARLOS WILFREDO FLORES VILLANUEVA
Partie demanderesse
- et -
MINISTRE DE LA CITOYENNETÉ
ET DE L'IMMIGRATION
Partie défenderesse
MOTIFS DE L'ORDONNANCE
LE JUGE PINARD
[1] Il s'agit d'une demande de contrôle judiciaire d'une décision de la Section de la protection des réfugiés de la Commission de l'immigration et du statut de réfugié(la CISR) rendue le 6 août 2003, statuant que le demandeur n'est pas un « réfugié » au sens de la Convention, ni une « personne à protéger » selon les définitions données aux articles 96 et 97 respectivement de la Loi sur l'immigration et la protection des réfugiés, L.C. 2001, ch. 27.
[2] Carlos Wilfredo Flores Villanueva (le demandeur) est un citoyen du Pérou qui allègue craindre la persécution dans son pays par le Parti communiste du Pérou (PCP), aussi nommé le Sentier lumineux, en raison d'opinions politiques qui lui sont imputées. Le demandeur allègue aussi être une personne à protéger.
[3] La CISR a conclu que le demandeur n'est pas un « réfugié » au sens de la Convention, ni une « personne à protéger » parce qu'il n'a pas établi l'incapacité de l'État péruvien de le protéger.
[4] Selon le demandeur, la CISR n'a pas correctement examiné la question de la protection de l'État parce qu'elle n'a pas évalué les éléments de preuve pertinents, tels que la preuve démontrant que son épouse et ses filles ont été victimes de menaces et d'intimidation depuis son départ du Pérou et la preuve au sujet des activités du PCP entre 2002 et 2003. Cependant, il existe une présomption à l'effet que toute la preuve a été considérée par la CISR et celle-ci n'est pas tenue de toute la mentionner dans ses motifs (Florea c. Canada (M.E.I.), [1993] A.C.F. no 598 (C.A.F.) (QL)). Une lecture des notes sténographiques de l'audience démontre en outre que la CISR a évalué la preuve soumise au sujet des menaces reçues par l'épouse et les filles du demandeur. En l'espèce, le demandeur ne m'a donc pas convaincu que la CISR a effectivement ignoré les éléments de preuve.
[5] Je suis aussi d'avis que le demandeur n'a pas démontré que la CISR a commis une erreur dans son analyse relative à la protection qui lui a été offerte par l'État péruvien. Selon l'arrêt Zhuravlvev c. Canada (M.C.I.), [2000] 4 C.F. 3, lorsque l'agent persécuteur n'est pas l'État, l'absence de protection étatique doit être appréciée du point de vue de la capacitéde l'État d'assurer une protection plutôt que du point de vue de l'efficacité de l'appareil local de fournir une protection dans un cas donné. Le dossier révèle que le demandeur a déposé des plaintes au sujet des menaces qu'il a reçues et que les autorités ont entrepris les démarches nécessaires et raisonnables pour le protéger (voir les dénonciations du demandeur aux pages 157, 162, 172, 188 et 192 du dossier du tribunal). De plus, selon l'article de journal traitant du cas du demandeur, les autorités ont adopté plusieurs mesures afin d'initier des enquêtes pour identifier le persécuteur (page 184 du dossier du tribunal). Toutefois, rien ne vient appuyer les allégations du demandeur à l'effet que les menaces provenaient des membres du PCP; de plus, les autorités n'avaient que des informations vagues et imprécises au sujet de l'identité de l'agresseur du demandeur. Ce dernier n'a fourni aucune preuve que les autorités policières sont incapables d'assurer une protection aux citoyens contre le PCP. Comme l'affirme le juge Gibson dans l'arrêt Smirnov c. Canada (Secrétaire d'État), [1995] 1 C.F. 780, à la page 786 :
. . . Notre Cour ne devrait pas imposer à d'autres pays une norme de protection « efficace » que malheureusement la police de notre propre pays ne peut parfois qu'ambitionner d'atteindre.
[6] Comme par ailleurs ma révision de la preuve ne me permet pas de conclure que la décision de la CISR est fondée sur une conclusion de fait erronée, tirée de façon abusive ou arbitraire ou sans tenir compte des éléments à sa disposition (alinéa 18.1(4)d) de la Loi sur la Cour fédérale, L.R.C. 1985, ch. F-7), il ne m'appartient pas de substituer ma propre appréciation des faits à celle qui a été faite par ce tribunal spécialisé.
[7] Pour toutes ces raisons, la demande de contrôle judiciaire est rejetée.
JUGE
OTTAWA (ONTARIO)
Le 1er octobre 2004
COUR FÉDÉRALE
AVOCATS INSCRITS AU DOSSIER
DOSSIER : IMM-6897-03
INTITULÉ : CARLOS WILFREDO FLORES VILLANUEVA c. MINISTRE DE LA CITOYENNETÉ ET DE L'IMMIGRATION
LIEU DE L'AUDIENCE : Montréal (Québec)
DATE DE L'AUDIENCE : Le 18 août 2004
MOTIFS DE L'ORDONNANCE : Le juge Pinard
DATE DES MOTIFS : Le 1er octobre 2004
COMPARUTIONS :
Me Francine V. Marion POUR LA PARTIE DEMANDERESSE
Me Lyne Lazaroff
Me Caroline Cloutier POUR LA PARTIE DÉFENDERESSE
AVOCATS INSCRITS AU DOSSIER :
Beauchemin, Paquin, Jobin,
Brisson & Philpot POUR LA PARTIE DEMANDERESSE
Montréal (Québec)
Morris Rosenberg POUR LA PARTIE DÉFENDERESSE
Sous-procureur général du Canada
Montréal (Québec)