Date : 20020530
Référence neutre : 2002 CFPI 619
Toronto (Ontario), le jeudi 30 mai 2002
EN PRÉSENCE DE MADAME LE JUGE HENEGHAN
ENTRE :
VIGNESWARAN KANDIAH
demandeur
- et -
LE MINISTRE DE LA CITOYENNETÉ ET DE L'IMMIGRATION
défendeur
MOTIFS DE L'ORDONNANCE ET ORDONNANCE
[1] M. Vigneswaran Kandiah (le demandeur) cherche à obtenir le contrôle judiciaire d'une décision, en date du 3 avril 2001, de la Section d'appel de la Commission de l'immigration et du statut de réfugié (la Section d'appel). Celle-ci a, dans sa décision, rejeté l'appel interjeté à l'encontre de la décision de rejeter la demande parrainée de résidence permanente présentée par Thevaki Vigneswaran, la femme du demandeur.
[2] Le demandeur est né au Sri Lanka le 26 décembre 1958. En 1992, il est entré au Canada et a revendiqué le statut de réfugié au sens de la Convention. Il a vécu à Montréal de 1992 à 1999, avant de déménager à Toronto.
[3] Après son arrivée à Montréal, le demandeur a vécu dans une maison avec plusieurs autres personnes, dont Mme Sugantee Makanda, une soeur de sa femme.
[4] En 1994, le demandeur a dit à Mme Makanda qu'il était intéressé à épouser sa soeur. On a informé la famille au Sri Lanka, conformément aux coutumes sociales, et on a finalement organisé le mariage du demandeur et de Thevaki Vigneswaran.
[5] Le demandeur s'est marié au Sri Lanka le 27 juillet 1997. Il est resté pendant un mois avec sa femme, puis est revenu au Canada, en août 1997. Sa femme est demeurée dans son pays, où elle travaillait comme professeur.
[6] En mars 1998, le demandeur a commencé les démarches de parrainage de sa femme en vue de son admission au Canada. Le 14 octobre 1999, un agent des visas a fait subir une entrevue à la femme du demandeur au sujet de sa demande de résidence permanente au Canada. Il lui a, entre autres, posé des questions au sujet de sa connaissance du Canada, de ce qu'elle savait des antécédents personnels de son mari et de la situation de celui-ci et du laps de temps entre leur mariage et la demande de parrainage.
[7] Se fondant sur les réponses de la femme à l'entrevue, l'agent des visas n'a pas été convaincu qu'il existait une relation véritable entre le demandeur et sa femme. Il a consigné ses impressions dans ses notes et a décidé de rejeter la demande de résidence permanente. Cette décision défavorable a été communiquée à la femme dans une lettre datée du 26 octobre 1999. C'est ce refus qui a été porté en appel devant la Section d'appel.
[8] L'audition devant la Section d'appel a eu lieu le 25 janvier 2001. Le demandeur y a témoigné, ainsi que sa belle-soeur, Mme Makanda, et le mari et ami d'enfance de celle-ci, M. Jindran Subramanian. La femme du demandeur n'a ni témoigné ni déposé d'affidavit aux fins de l'instance devant la Section d'appel. Le dossier de la Section d'appel contenait cependant les notes de l'entrevue avec l'agent des visas et les documents justificatifs produits devant l'agent des visas.
[9] La Section d'appel a rejeté l'appel sur le fondement que, selon la prépondérance des probabilités, le mariage du demandeur avait principalement eu pour objectif d'obtenir l'admission au Canada de Mme Vigneswaran à titre de parent et que celle-ci n'avait pas l'intention de résider en permanence avec le demandeur. La Section d'appel a conclu que la femme du demandeur était exclue en tant que parent. La Section d'appel a dit que, dans l'ensemble, la preuve avait peu de force probante, même si elle n'a pas expressément tiré de conclusion défavorable au sujet du demandeur ou de ses témoins.
[10] La présente demande de contrôle judiciaire conteste le bien-fondé de la décision de la Section d'appel sur le fondement que les conclusions de fait sont manifestement déraisonnables et qu'il y a eu erreur de droit en raison d'une mauvaise interprétation de la preuve.
[11] Le défendeur plaide que les prétentions du demandeur visent directement la manière dont la Section d'appel a évalué la preuve et que cette question relève exclusivement de la compétence de cette dernière. Selon les motifs qu'elle a exposés, la Section d'appel a apprécié la preuve et a raisonnablement conclu que la femme du demandeur n'avait pas démontré son intention de vivre en permanence avec son mari.
[12] La Section d'appel devait décider si la femme du demandeur était un parent au sens du paragraphe 4(3) du Règlement sur l'immigration, DORS/93-44, qui est rédigé comme suit :
La catégorie des parents ne comprend pas le conjoint qui s'est marié principalement dans le but d'obtenir l'admission au Canada à titre de parent et non dans l'intention de vivre en permanence avec son conjoint.
[13] Dans la décision Canada (Ministre de la Citoyenneté et de l'Immigration) c. Heera, [1994] A.C.F. no 1594, le juge Noël, qui siégeait alors à la Section de première instance, a examiné le rôle de la Section d'appel dans les demandes portant sur le paragraphe 4(3) du Règlement et a dit :
[...] [L]a section d'appel a mal interprété son mandat légal en décidant que la croyance de l'intimée que son mari parrainé avait l'intention de vivre avec elle de façon permanente au Canada tranchait la question dont la section était saisie. La tâche première de celle-ci consistait à vérifier cette affirmation par rapport aux faits pertinents et à déterminer si elle pouvait avoir un fondement objectif. [...]
[14] Cela signifie que, pour décider si une personne est un conjoint au sens de la catégorie des parents, la Section d'appel doit examiner l'intention de cette personne de vivre en permanence avec son conjoint. Autrement dit, le décideur ne doit pas, dans des affaires semblables, principalement examiner les intentions de l'autre conjoint et de tiers.
[15] En l'espèce, la Section d'appel avait comme éléments de preuve, en ce qui concerne l'authenticité du mariage du demandeur et son intention de vivre de façon permanente avec sa femme une fois qu'elle entrerait au Canada, les témoignages du demandeur, de sa belle-soeur et du mari de cette dernière. La Section d'appel disposait aussi d'éléments de preuve au sujet des intentions de la femme du demandeur : les impressions de l'agent de visas et la lettre de refus datée du 26 octobre 1999 témoignent de ces intentions. Selon ces éléments de preuve, la femme du demandeur ignorait des éléments fondamentaux au sujet de son mari, dont sa caste, son ethnie et son salaire. Elle a aussi été incapable d'expliquer le retard du demandeur à commencer les démarches de parrainage, étant donné que leur mariage a eu lieu en août 1997 et que la demande de parrainage n'a été présentée qu'en mars 1999.
[16] La Section d'appel a, dans la présente affaire, expressément conclu que la femme du demandeur n'est pas un parent. À mon avis, la preuve permettait à la Section d'appel de tirer cette conclusion et la Cour n'est pas fondée à intervenir à cet égard.
[17] La demande de contrôle judiciaire est rejetée. Les avocats ont avisé la Cour qu'ils ne présenteraient pas de question aux fins de certification.
ORDONNANCE
1. La demande de contrôle judiciaire est rejetée.
« E. Heneghan »
Juge
Traduction certifiée conforme
Sandra Douyon-de Azevedo, LL.B.
COUR FÉDÉ RALE DU CANADA
SECTION DE PREMIÈRE INSTANCE
AVOCATS INSCRITS AU DOSSIER
DOSSIER : IMM-2055-01
INTITULÉ : VIGNESWARAN KANDIAH
demandeur
- et -
LE MINISTRE DE LA CITOYENNETÉ ET DE
L'IMMIGRATION
défendeur
LIEU DE L'AUDIENCE : TORONTO (ONTARIO)
DATE DE L'AUDIENCE : LE MARDI 28 MAI 2002
MOTIFS DE L'ORDONNANCE
ET ORDONNANCE : LE JUGE HENEGHAN
DATE DES MOTIFS : LE JEUDI 30 MAI 2002
COMPARUTIONS : M. Lorne Waldman
pour le demandeur
Mme Amina Riaz
pour le défendeur
AVOCATS INSCRITS AU DOSSIER : Jackman, Waldman & Associates
Avocats
281, avenue Eglinton Est
Toronto (Ontario)
M4P 1L3
pour le demandeur
Morris Rosenberg
Sous-procureur général du Canada
pour le défendeur
COUR FÉDÉ RALE DU CANADA
Date : 20020530
Dossier : IMM-2055-01
ENTRE :
VIGNESWARAN KANDIAH
demandeur
- et -
LE MINISTRE DE LA CITOYENNETÉET DE L'IMMIGRATION
défendeur
MOTIFS DE L'ORDONNANCE
ET ORDONNANCE