Date : 19990723
Dossier : IMM-4674-98
ENTRE :
HARJIT SINGH GREWAL,
demandeur,
et
LE MINISTRE DE LA CITOYENNETÉ ET DE L'IMMIGRATION,
défendeur.
MOTIFS DE L'ORDONNANCE
LA JUGE REED : (version révisée des motifs prononcés à l'audience)
[1] Il est clair que la simple appartenance à une organisation comme la police du Pendjab ne suffit pas à conclure qu'il y a des raisons sérieuses de penser qu'une personne a commis des crimes contre l'humanité. Comme nous l'a fait remarquer l'avocate, cette organisation a un objectif plus large et tout à fait légitime, celui de maintenir l'ordre et d'appliquer la loi.
[2] Par contre, la preuve démontre que certains membres de cette organisation ont commis de tels crimes. La question devient donc de savoir si le demandeur a un lien assez étroit avec les crimes commis pour qu'on puisse conclure à sa complicité. Je fais remarquer qu'il n'est pas nécessaire qu'il ait participé directement aux crimes, mais seulement qu'il ait été complice (par des gestes appuyant ou facilitant leur perpétration).
[3] À cet égard, les décisions Randhawa c. Canada (Ministre de l'Emploi et de l'Immigration) (1994), 93 F.T.R. 151, Cardenas c. Canada (Ministre de l'Emploi et de l'Immigration) (1994), 23 Imm. L.R. (2d) 244, et Sivakumar c. Canada (Ministre de l'Emploi et de l'Immigration) [1994] 1 C.F. 433, ne sont pas en contradiction avec Ramirez c. Canada (Ministre de l'Emploi et de l'Immigration) [1992] 2 C.F. 306. Ces décisions prolongent ou élaborent la décision dans Ramirez, disant le droit comme je l'ai déjà énoncé. La Commission n'a donc pas commis une erreur en se référant seulement à l'affaire Ramirez.
[4] La question est de savoir si les activités du demandeur au sein de la police du Pendjab, qui n'établissent pas une participation directe dans les actes de torture et les violations des droits de l'homme, sont de nature à appuyer une conclusion de complicité.
[5] Il suffit de se référer à trois extraits de la preuve. À la page 127 de la transcription, on trouve ceci :
[traduction]
Q. Maintenant, durant ces deux années [1985 à 1987], combien de fois étiez-vous présent pendant que l'on torturait quelqu'un?
R. J'ai vu cela plusieurs fois.
À la page 148 :
[traduction]
Q... Vous n'avez jamais arrêté qui que ce soit [des militants sikhs ou des présumés militants sikhs] au cours des descentes auxquelles vous avez participé durant toutes les années où vous étiez dans la police?
R - Seulement mes adjoints, plusieurs fois il y a eu des occasions où ils ont pris des gens et les ont arrêtés.
...
Q... comment traitiez-vous les familles des personnes qui n'étaient pas chez elles, les membres de la famille? Comment les traitiez-vous?
R. Cette partie du traitement des membres de la famille de cette personne en particulier était le fait du responsable. C'était lui qui les torturait...
À la page 168 :
[traduction]
Q. Vous déclarez aussi dans votre formule de renseignements personnels ... une fois que vous avez été nommé chef constable, vous ne vouliez pas participer à des séances de torture ... Vous avez dit poliment à SHO Prakash que votre description de tâches ne comprenait pas de telles choses.
Vous lui avez aussi dit qu'il devrait utiliser des constables plus jeunes pour ce travail, puisque votre santé ne pouvait tolérer cette rigueur.
....
R. À ce moment-là, il me demandait de pratiquer la torture ou de m'associer à lui dans des actes de torture ... en 1995 ...
[6] La décision de la Commission portant qu'il y a des [TRADUCTION] « raisons sérieuses de penser que le demandeur a été complice dans la perpétration de crimes contre l'humanité commis par la police du Pendjab » est solidement appuyée sur la preuve. Je ne peux conclure que cette décision était déraisonnable, ou, pour utiliser les termes de l'alinéa 18.1(4)d), fondée sur une « conclusion de fait erronée, tirée de façon abusive et arbitraire sans tenir compte des éléments dont il dispose » .
« B. Reed »
JUGE
TORONTO (ONTARIO)
Le 23 juillet 1999
Traduction certifiée conforme
Laurier Parenteau, LL.L.
COUR FÉDÉRALE DU CANADA
Noms des avocats inscrits au dossier
No DE GREFFE : IMM-4674-98
INTITULÉ DE LA CAUSE : HARJIT SINGH GREWAL
et
LE MINISTRE DE LA
CITOYENNETÉ ET DE
L'IMMIGRATION
DATE DE L'AUDIENCE : LE JEUDI 22 JUILLET 1999
LIEU DE L'AUDIENCE : TORONTO (ONTARIO)
MOTIFS DE L'ORDONNANCE DE Mme LA JUGE REED
EN DATE DU : VENDREDI 23 JUILLET 1999
ONT COMPARU : Mme Preevanda K. Sapru
pour le demandeur
M. Martin E. Anderson
pour le défendeur
AVOCATS INSCRITS AU DOSSIER: Max Berger & Associates
Barristers & Solicitors
1033, rue Street
pièce 207
Toronto (Ontario)
M5S 3A5
pour le demandeur
Morris Rosenberg
Sous-procureur général du Canada
pour le défendeur
COUR FÉDÉRALE DU CANADA
Date : 19990723
Dossier : IMM-4674-98
entre :
HARJIT SINGH GREWAL,
demandeur,
et
LE MINISTRE DE LA CITOYENNETÉ ET DE L'IMMIGRATION,
défendeur.
MOTIFS DE L'ORDONNANCE