Date : 20210707
Dossier : T‑644‑20
Référence : 2021 CF 718
[TRADUCTION FRANÇAISE]
St. John’s (Terre‑Neuve‑et‑Labrador), le 7 juillet 2021
En présence de madame la juge Heneghan
ENTRE :
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CHEF AARON SOCK ET CONSEILLERS BARRY AUGUSTINE, JONATHAN AUGUSTINE, STEPHEN AUGUSTINE, CAMERON FRANCIS, JOSEPH FRANCIS, LANA FRANCIS, ROBERT FRANCIS, DEAN LEVI, MARY LEVI, JOSEPH MILLIEA, JONATHAN SOCK ET PETER SOCK, EN LEUR PROPRE NOM ET AU NOM DES MEMBRES DE LA PREMIÈRE NATION D’ELSIPOGTOG
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demandeurs
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et
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LE PROCUREUR GÉNÉRAL DU CANADA
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défendeur
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ORDONNANCE ET MOTIFS
[1]
Par un avis de requête daté du 18 juin 2021, déposé en vertu de l’article 369 des Règles des Cours fédérales, DORS/98‑106 (les Règles), le procureur général du Canada (le défendeur) sollicite un jugement dans une demande de contrôle judiciaire déposée à l’égard d’une décision rendue le 20 février 2020 par la Commission d’appel provisoire (la Commission d’appel provisoire) des services à l’enfance et à la famille des Premières Nations (SEFPN) de Services aux Autochtones Canada.
[2]
Dans son avis de requête, le défendeur demande une ordonnance :
[traduction]
1. autorisant la demande de contrôle judiciaire de la décision du 20 février 2020 de la Commission d’appel provisoire des services à l’enfance et à la famille des Premières Nations (SEFPN) de Services aux Autochtones Canada au motif que le décideur était saisi d’un dossier incomplet, ce qui constituait une atteinte prima facie à l’équité procédurale;
2. annulant la décision du 20 février 2020 de la Commission d’appel provisoire des services à l’enfance et à la famille des Premières Nations (SEFPN) de Services aux Autochtones Canada;
3. renvoyant l’appel du demandeur pour réexamen par la Commission d’appel intérimaire nouvellement constituée par les SEFPN dans un délai de 20 jours;
4. enjoignant au défendeur d’informer le demandeur de la date de l’audience de réexamen par la Commission d’appel provisoire des SEFPN;
5. enjoignant aux demandeurs de fournir au défendeur tout nouvel élément de preuve au moins cinq jours avant l’audience;
6. mentionnant que le défendeur consent aux dépens du contrôle selon le tarif B des Règles des Cours fédérales, à compter de la date de la présentation de la présente requête.
[3]
À l’appui de son avis de requête, le défendeur a déposé l’affidavit de Dany Basque et des observations écrites.
[4]
Le chef Aaron Sock et les conseillers Barry Augustine, Jonathan Augustine, Stephen Augustine, Cameron Francis, Joseph Francis, Lana Francis, Robert Francis, Dean Levi, Mary Levi, Joseph Milliea, Jonathan Sock et Peter Sock, en leur propre nom et au nom des membres de la Première Nation d’Elsipogtog, sont les demandeurs (les demandeurs) en l’espèce. Dans l’avis de demande de contrôle judiciaire déposé le 16 juin 2020, les demandeurs demandent la réparation suivante :
[traduction]
a) une ordonnance de la nature d’un certiorari;
b) une déclaration selon laquelle le ministre a l’obligation d’assurer l’équité procédurale dans la prise d’une telle décision, ce qui comprend la possibilité d’être entendu, en assurant la fourniture d’un comité d’examen impartial;
c) une déclaration selon laquelle le ministre n’a pas tenu compte du fait que la fonction de l’Elsipogtog Child and Family Services Agency était de fournir des services de bien‑être aux membres de la bande d’Elsipogtog, une activité réglementée par la province, et ce, d’une manière conforme aux normes provinciales et aux lois provinciales;
d) une déclaration selon laquelle la décision du ministre, telle qu’elle a été communiquée aux demandeurs, n’était pas justifiée, transparente et intelligible;
e) Toute autre réparation que la Cour pourrait juger appropriée et juste dans les circonstances.
[5]
Dans ses observations écrites, le défendeur reconnaît que la décision faisant l’objet de la demande de contrôle judiciaire a été rendue en l’absence d’un dossier complet, ce qui a donné lieu à un manquement à l’équité procédurale. Il soutient que le règlement rapide de cette instance par la Cour servira les intérêts de la justice et de l’économie judiciaire, comme l’exige l’article 3 des Règles.
[6]
Les demandeurs reconnaissent que le défendeur a accepté que la décision faisant l’objet du contrôle ait été rendue d’une manière qui a donné lieu à un manquement à l’équité procédurale, mais ils s’opposent à la requête en vue d’obtenir un jugement au motif que la réparation proposée par le défendeur ne répond pas à leur demande en vue d’obtenir certaines déclarations.
[7]
En réponse aux observations du demandeur, le défendeur soutient que les déclarations demandées par les demandeurs n’auraient aucun effet pratique et, de toute façon, exigeraient une conclusion de fait, ce qui n’est pas le rôle de la Cour au moment du contrôle judiciaire, mais une question relevant du mandat du décideur.
[8]
Je souscris aux observations du défendeur en l’espèce.
[9]
Premièrement, je renvoie à l’article 3 des Règles, qui prévoit ce qui suit :
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Je suis d’accord avec le défendeur pour dire que la disposition proposée de la demande de contrôle judiciaire des demandeurs répond aux objectifs de l’article 3, c’est‑à‑dire « une solution au litige qui soit juste et la plus expéditive et économique possible »
.
[11]
Deuxièmement, je fais remarquer qu’en vertu du paragraphe 18.1(3) de la Loi sur les Cours fédérales, LRC 1985, c F‑7, la réparation dans le cadre d’une demande de contrôle judiciaire relève entièrement de la discrétion de la Cour :
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Il est raisonnable de s’attendre à ce qu’une cour de révision annule la décision de la Commission d’appel provisoire si elle est convaincue que le dossier révèle un manquement à l’équité procédurale. Il est tout aussi raisonnable de prévoir qu’une cour de révision ordonnerait le réexamen de l’affaire en cause par un autre décideur.
[13]
Compte tenu des documents présentés par le défendeur, il semble qu’une nouvelle commission d’appel ait été constituée.
[14]
Après avoir examiné l’affidavit déposé par le défendeur et les observations écrites des parties, je suis convaincue que la requête du défendeur devrait être accueillie. Il est clair que le dossier dont était saisi le décideur, c’est‑à‑dire la Commission d’appel provisoire, était incomplet. Je conviens que cette lacune donne lieu à un manquement à l’équité procédurale et que la décision devrait être annulée.
[15]
Il est dans l’intérêt de la justice et de l’économie judiciaire d’accueillir la requête du défendeur.
[16]
Une ordonnance sera émise en conséquence, et les dépens sont accordés aux demandeurs selon le tarif B des Règles, à compter de la date de présentation de la requête du défendeur.
ORDONNANCE dans le dossier T‑644‑20
LA COUR ORDONNE que la requête soit accueillie selon les conditions suivantes :
la demande de contrôle judiciaire de la décision du 20 février 2020 de la Commission d’appel provisoire des services à l’enfance et à la famille des Premières Nations (SEFPN) de Services aux Autochtones Canada est accueillie au motif que le décideur était saisi d’un dossier incomplet, ce qui constituait une atteinte prima facie à l’équité procédurale;
la décision du 20 février 2020 de la Commission d’appel provisoire des SEFPN est annulée;
l’appel des demandeurs est renvoyé pour nouvelle décision par la Commission d’appel intérimaire nouvellement constituée des SEFPN dans les 20 jours suivant la présente ordonnance;
le défendeur doit informer les demandeurs de la date de l’audience de réexamen par la Commission d’appel provisoire des SEFPN;
Les demandeurs doivent enjoints de fournir au défendeur tout nouvel élément de preuve au moins cinq jours avant l’audience;
le défendeur paiera les dépens du présent contrôle judiciaire selon le tarif B des Règles des Cours fédérales, DORS/98‑106, à compter de la date de présentation du présent avis de requête.
« E. Heneghan »
Juge
Traduction certifiée conforme
Claude Leclerc
COUR FÉDÉRALE
AVOCATS INSCRITS AU DOSSIER
DOSSIER :
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T‑644‑20
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INTITULÉ :
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LE CHEF AARON SOCK ET LES CONSEILLERS BARRY AUGUSTINE, JONATHAN AUGUSTINE, STEPHEN AUGUSTINE, CAMERON FRANCIS, JOSEPH FRANCIS, LANA FRANCIS, ROBERT FRANCIS, DEAN LEVI, MARY LEVI, JOSEPH MILLIEA, JONATHAN SOCK ET PETER SOCK, EN LEUR PROPRE NOM ET AU NOM DES MEMBRES DE LA PREMIÈRE NATION D’ELSIPOGTOG c LE PROCUREUR GÉNÉRAL DU CANADA
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REQUÊTE ÉCRITE EXAMINÉE À ST. JOHN’S (TERRE‑NEUVE‑ET‑LABRADOR) EN VERTU DE L’ARTICLE 369 DES RÈGLES DES COURS FÉDÉRALES
ORDONNANCE ET MOTIFS :
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Le juge Heneghan
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DATE DES MOTIFS :
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Le 7 juillet 2021
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OBSERVATIONS ÉCRITES :
Stewart C. Paul
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POUR LES DEMANDEURS
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Kelly A. Peck
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POUR LE DÉFENDEUR
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AVOCATS INSCRITS AU DOSSIER :
Stewart C. Paul
Avocat
Perth‑Andover (Nouveau‑Brunswick)
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POUR LES DEMANDEURS
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Procureur général du Canada
Halifax (Nouvelle‑Écosse)
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POUR LE DÉFENDEUR
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