Date : 20040414
Dossier : IMM-3374-04
Référence : 2004 CF 555
ENTRE :
JUDE KODEESWARAN BENEDICT
demandeur
et
LE SOLLICITEUR GÉNÉRAL DU CANADA
défendeur
[1] La Cour expose ici les motifs de l'ordonnance qu'elle a décernée en rejetant la demande qui lui était adressée de surseoir à l'exécution d'une mesure de renvoi. Le demandeur demandait de surseoir à l'exécution de son renvoi vers les États-Unis prévu pour 9 h, le mardi 13 avril 2004, soit le jour suivant le congé de Pâques. Sa demande de sursis a été déposée le jeudi précédant la longue fin de semaine de Pâques et a été entendue le lundi 12 avril 2004 par téléconférence.
[2] La demande du statut de réfugié du demandeur, un citoyen du Sri Lanka, a été rejetée en novembre 2001. Il a marié une citoyenne canadienne en décembre 2002 alors que son statut d'immigrant était, au mieux, incertain. Lui et son épouse ont ensuite acheté un condominium et souscrit une hypothèque considérable qui nécessitait leurs deux revenus.
[3] L'épouse du demandeur a parrainé sa demande de prise en compte de considérations d'ordre humanitaire en août 2003. Cette demande est en attente et pourrait le rester pendant encore 24 mois.
[4] Il est prévu que l'épouse du demandeur recevra des soins chirurgicaux pour résoudre ses problèmes d'infertilité, de sorte qu'elle et le demandeur pourront mettre à exécution leur plan d'avoir une famille.
[5] Le 17 février 2004, l'examen des risques avant renvoi (ERAR) s'est conclu de façon défavorable. La date à laquelle le demandeur a véritablement reçu cette décision est le 25 février 2004. Le même jour, une mesure de renvoi a été prise pour 9 h, le 13 avril 2004.
[6] Malgré que le demandeur savait à quoi s'en tenir quant à l'ERAR et à la mesure de renvoi, il a attendu jusqu'au jeudi 8 avril pour déposer sa demande d'autorisation relative à la décision d'ERAR et pour déposer la demande de sursis en cause.
[7] Depuis la date de l'ordonnance de renvoi, le demandeur a présenté trois demandes de report. Le sursis en cause a trait à sa dernière demande de report.
[8] Le demandeur affirme :
a) que la question sérieuse a trait au défaut de l'agent d'ERAR de prendre en considération la preuve portant sur la situation dans le pays et le fait que ces conditions ont changé depuis que l'ERAR a été effectué;
b) que le demandeur est son épouse subiront un préjudice irréparable du fait qu'ils perdront leur condominium et qu'ils ne pourront pas fonder une famille s'il est renvoyé au Sri Lanka (vraisemblablement par les États-Unis);
c) que, vu la probabilité que le parrainage de son épouse soit accepté, l'absence de criminalité et le fait qu'il occupe actuellement un emploi, la prépondérance des inconvénients favorise l'acceptation de la demande de sursis du demandeur.
[9] Bien que le fait que la présente demande ait été présentée à la dernière minute ne soit pas déterminant quant à une décision sur le fond, cet état de fait est un facteur qui jette un doute quant à la bonne foi et la Cour doit en tenir compte dans l'exercice de son pouvoir discrétionnaire.
[10] Pour l'analyse de la présente demande, la Cour accepte, sans pour autant tirer quelque conclusion, qu'il existe une question sérieuse.
[11] En ce qui concerne le préjudice irréparable ayant trait à leur condominium, il ne s'agit pas là d'un type de préjudice qui justifie un sursis. En outre, le demandeur est l'auteur de sa propre situation. Il s'est marié et s'est endetté en sachant très bien qu'il n'avait aucun statut au Canada.
[12] Cela a été dit à maintes reprises dans d'autres décisions, une partie ne peut pas créer les circonstances donnant lieu à un préjudice pour ensuite s'appuyer sur ce préjudice pour demander un sursis.
[13] Par son argument sur la planification familiale, le demandeur soulève un moyen assez nouveau quant à la possibilité de subir un préjudice. Le demandeur affirme que son épouse doit soigner son infertilité afin de pouvoir concevoir avant que son horloge biologique lui en enlève toute possibilité. Pour ce faire, le demandeur affirme que sa présence est essentielle. Son renvoi causerait un préjudice irréparable à leur possibilité de fonder une famille parce que la demande de parrainage prendra deux ans, délai au-delà duquel il se pourrait bien que son épouse ne puisse plus concevoir.
[14] Si important et souhaitable que puisse être le projet de fonder une famille, sa non-réalisation ne peut être invoquée comme préjudice irréparable. Le préjudice est tout au plus une conjecture étant donné que l'objectif poursuivi dépend à la fois du succès de l'opération et des efforts faits en vue de la conception.
[15] Par conséquent, comme je conclus que le demandeur n'a pas prouvé qu'il subirait un préjudice irréparable, sa demande doit être rejetée.
« Michael L. Phelan »
Juge
Ottawa (Ontario)
Le 13 avril 2004
Traduction certifiée conforme
Jacques Deschênes
COUR FÉDÉRALE
AVOCATS INSCRITS AU DOSSIER
DOSSIER : IMM-3374-04
INTITULÉ : JUDE KODEESWARAN BENEDICT
c.
LE SOLLICITEUR GÉNÉRAL DU CANADA
LIEU DE L'AUDIENCE : OTTAWA (ONTARIO)
DATE DE L'AUDIENCE : LE 12 AVRIL 2004
MOTIFS DE L'ORDONNANCE : LE JUGE PHELAN
COMPARUTIONS :
Steve W. Rosenbaum POUR LE DEMANDEUR
Lorne McClenaghan POUR LE DÉFENDEUR
AVOCATS INSCRITS AU DOSSIER :
Riverdale Law Centre POUR LE DEMANDEUR
Toronto (Ontario)
Morris Rosenberg POUR LE DÉFENDEUR
Sous-procureur général du Canada
Toronto (Ontario)