Date : 20041012
Dossier : IMM-4388-03
Référence : 2004 CF 1397
Ottawa (Ontario), le 12 octobre 2004
EN PRÉSENCE DE MADAME LA JUGE HENEGHAN
ENTRE :
PANCHALINGAM NAGALINGAM
demandeur
et
LE MINISTRE DE LA CITOYENNETÉ ET DE L'IMMIGRATION
défendeur
MOTIFS DE L'ORDONNANCE ET ORDONNANCE
[1] M. Panchalingam Nagalingam (le demandeur) sollicite le contrôle judiciaire de la décision de la Section de l'immigration de la Commission de l'immigration et du statut de réfugié (la Commission) en date du 28 mai 2003. Dans sa décision, la Commission a conclu que le demandeur était interdit de territoire au Canada en application de la Loi sur l'immigration et la protection des réfugiés, L.C. 2001, ch. 27 (la LIPR).
[2] Le demandeur, un citoyen du Sri Lanka, a obtenu le droit d'établissement au Canada le 13 mars 1997, après s'être vu reconnaître le statut de réfugié au sens de la Convention dans ce pays. Au moment où sa demande a été entendue par la Commission, il était le conjoint de fait de Mme Seuranie Persaud, avec qui il a eu un fils né le 10 décembre 1999.
[3] Le demandeur a fait l'objet d'un rapport recommandant la tenue d'une enquête établi sous le régime de l'alinéa 27(1)a) de l'ancienne loi, la Loi sur l'immigration, L.R.C. 1985, ch. I-2, modifiée (l'ancienne loi). Une instruction a été émise en vertu du paragraphe 27(3) de l'ancienne loi. Conformément à l'article 193 de la LIPR, au paragraphe 321(1) et à l'alinéa 321(2)f) du Règlement sur l'immigration et la protection des réfugiés, DORS/2002-227, modifié (le Règlement), l'enquête sur l'admissibilité qui a été instituée sous le régime de l'ancienne loi a été continuée sous le régime de la LIPR et des Règles de la Section de l'immigration, DORS/2002-229 (les Règles).
[4] La question dont était saisie la Commission était de savoir si le demandeur était interdit de territoire au Canada parce qu'il appartenait à une catégorie non admissible, soit celle des personnes se livrant au crime organisé, en application de l'alinéa 37(1)a) de la LIPR. La Commission a conclu qu'il appartenait à cette catégorie de personnes, et plus précisément qu'il existait des motifs raisonnables de croire qu'il était membre d'un groupe tamoul connu sous le nom de _ A.K. Kannan _.
[5] Dans ses motifs, la Commission a clairement dit qu'elle s'est appuyée en grande partie sur la pièce 4, qui correspond à une transcription d'une déclaration après mise en garde faite à deux détectives du Service de police de Toronto par un individu nommé P.A. Lors de l'interrogatoire en question, qui a eu lieu le 22 février 2001, P.A. a dit que le demandeur était un membre de A.K. Kannan. Selon P.A., A.K. Kannan était une bande connue, et le demandeur avait la réputation d'être l'homme de main du groupe.
[6] Quelques mois plus tard, P.A. a prétendu rétracter les déclarations qu'il avait faites aux agents de police lors de l'interrogatoire. Un affidavit signé par lui, daté du 6 décembre 2001, a été déposé en preuve lors de l'enquête sur l'admissibilité du demandeur devant la Commission. La Commission n'a accordé aucune importance à cet élément de preuve, et P.A. n'a pas été appelé à comparaître.
[7] De même, la Commission n'a pas ajouté foi aux témoignages du demandeur et de Mme Persaud au sujet de la prétendue appartenance du demandeur à la catégorie non admissible de personnes membres d'une organisation criminelle. Elle a rejeté les arguments avancés par l'avocat du demandeur concernant la crédibilité de ces témoignages et a qualifié la preuve qu'ils ont fournie de _ contradictoire, extrêmement intéressée et tout à fait dépourvue de crédibilité _.
[8] Le demandeur soutient que même si la Commission a retenu le bon critère juridique pour déterminer s'il appartenait à une organisation criminelle, le critère a été incorrectement appliqué. Le demandeur fait valoir que la Commission a commis une erreur susceptible de contrôle en omettant de tenir compte de l'affidavit de P.A. Cet affidavit constituait un élément de preuve qui jetait un doute sur la preuve contenue dans la transcription de l'interrogatoire qui avait été mené par la police le 22 février 2001.
[9] Deuxièmement, le demandeur fait valoir que la Commission a commis une erreur en omettant de donner des motifs clairs et suffisants pour justifier son rejet des témoignages du demandeur et de Mme Persaud concernant l'appartenance du demandeur à une bande.
[10] Troisièmement, le demandeur soutient que la Commission a omis de tenir compte d'un élément de preuve émanant d'un tiers désintéressé, à savoir de la déclaration solennelle de Ramanathar Sethukavalar. De plus, le demandeur fait valoir que la Commission a commis une erreur en ne tenant pas compte d'éléments de preuve tendant à montrer qu'A.K. Kannan n'était pas une bande ni une organisation criminelle. Enfin, le demandeur reproche à la Commission d'avoir omis de motiver clairement ses conclusions.
[11] Le défendeur soutient que la Commission pouvait retenir les éléments de preuve qu'elle voulait et décider du poids qu'il convenait de leur accorder. Le défendeur fait valoir qu'il était loisible à la Commission de tirer les conclusions auxquelles elle est parvenue et que ses conclusions sont étayées par le dossier.
[12] C'est le pouvoir que lui confèrent les articles 172 et 173 de la LIPR qui a servi de fondement à la décision de la Commission. Ces articles sont rédigés comme suit :
172. (1) La Section de l'immigration se compose du directeur général, des directeurs et des commissaires, nommés conformément à la Loi sur l'emploi dans la fonction publique, nécessaires à l'exercice de sa juridiction. (2) Le directeur général et les directeurs peuvent exercer les fonctions des commissaires de la Section de l'immigration. |
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172. (1) The Immigration Division consists of the Director General and other directors and members necessary to carry out its functions and who are employed in accordance with the Public Service Employment Act. (2) The Director General and the directors of the Immigration Division have all the powers and may carry out the duties and functions of members of the Division.
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173. Dans toute affaire dont elle est saisie, la Section de l'immigration : a) dispose de celle-ci, dans la mesure du possible, par la tenue d'une audience; b) convoque la personne en cause et le ministre à une audience et la tient dans les meilleurs délais; c) n'est pas liée par les règles légales ou techniques de présentation de la preuve; d) peut recevoir les éléments qu'elle juge crédibles ou dignes de foi en l'occurrence et fonder sur eux sa décision. |
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173. The Immigration Division, in any proceeding before it, (a) must, where practicable, hold a hearing; (b) must give notice of the proceeding to the Minister and to the person who is the subject of the proceeding and hear the matter without delay; (c) is not bound by any legal or technical rules of evidence; and (d) may receive and base a decision on evidence adduced in the proceedings that it considers credible or trustworthy in the circumstances. |
[13] Les arguments avancés par le demandeur touchent principalement la manière dont la Commission a traité la preuve qui lui a été soumise. Ainsi qu'il ressort de l'article 173 reproduit ci-dessus, il s'agit précisément d'un rôle qui relève de la Commission. Il était loisible à cette dernière de rejeter les témoignages du demandeur et de Mme Persaud, ainsi que l'affidavit de P.A. et les déclarations solennelles présentées pour le compte du demandeur.
[14] Après avoir examiné le dossier, et plus particulièrement la pièce 4, je suis d'avis que la Commission disposait d'un nombre suffisant d'éléments de preuve pour lui permettre de conclure que le demandeur avait des liens avec le crime organisé, c'est-à-dire avec la bande A.K. Kannan. La Commission n'a commis aucune erreur dans la manière dont elle a traité la preuve qui lui avait été soumise.
[15] De plus, contrairement à ce qu'affirme le demandeur, la Commission s'est acquittée de son obligation de formuler des motifs clairs et cohérents à l'appui de sa décision.
[16] Il s'ensuit que la Cour n'a aucune raison d'intervenir dans la décision de la Commission, et la présente demande de contrôle judiciaire est rejetée. Les avocats ont indiqué que l'affaire ne soulevait aucune question devant être certifiée.
ORDONNANCE
La demande de contrôle judiciaire est rejetée. Il n'y a aucune question à certifier.
_ E. Heneghan _
Juge
Traduction certifiée conforme
Aleksandra Koziorowska, LL.B.
COUR FÉDÉRALE
AVOCATS INSCRITS AU DOSSIER
DOSSIER : IMM-4388-03
INTITULÉ : PANCHALINGAM NAGALINGAM
c.
LE MINISTRE DE LA CITOYENNETÉ ET DE L'IMMIGRATION
LIEU DE L'AUDIENCE : TORONTO (ONTARIO)
DATE DE L'AUDIENCE : LE 27 SEPTEMBRE 2004
MOTIFS DE L'ORDONNANCE
ET ORDONNANCE : LA JUGE HENEGHAN
DATE DES MOTIFS : LE 12 OCTOBRE 2004
COMPARUTIONS :
Krassina Kostadinov POUR LE DEMANDEUR
Pamela Larmondin POUR LE DÉFENDEUR
AVOCATS INSCRITS AU DOSSIER :
Krassina Kostadinov POUR LE DEMANDEUR
Waldman & Associates
Avocats
281 Eglinton Avenue East
Toronto (Ontario) M4P 1L3
Morris Rosenberg POUR LE DÉFENDEUR
Sous-procureur général du Canada
COUR FÉDÉRALE
Date : 20041012
Dossier : IMM-4388-03
ENTRE :
PANCHALINGAM NAGALINGAM
demandeur
et
LE MINISTRE DE LA CITOYENNETÉ ET DE L'IMMIGRATION
défendeur
MOTIFS DE L'ORDONNANCE
ET ORDONNANCE