Dossier : IMM-6518-19
Référence : 2021 CF 493
Ottawa (Ontario), le 28 mai 2021
En présence de madame la juge St-Louis
ENTRE :
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ADAM DARDARI, mineur représenté par son tuteur à l’instance, ABDELAZIZ DARDARI
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demandeur
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et
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LE MINISTRE DE LA CITOYENNETÉ ET DE L’IMMIGRATION
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défendeur
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JUGEMENT ET MOTIFS
I.
Introduction
[1]
Le demandeur, M. Adam Dardari [Adam], mineur représenté par son tuteur à l’instance, M. Abdelaziz Dardari [M. Dardari], sollicite le contrôle judiciaire de la décision rendue par le Service des visas de l’ambassade du Canada au Maroc le 11 octobre 2019, rejetant sa demande de visa de résident temporaire.
[2]
Pour les raisons qui suivent, la demande de contrôle judiciaire sera rejetée.
II.
Contexte
[3]
Le 19 février 2018, M. Abdelaziz Dardari et son épouse, Mme Hanane Hasni, [les tuteurs] obtiennent du Tribunal de Première Instance de Tanger un Ordre d’attribution de Kafala d’un enfant abandonné en faveur de l’enfant dénommé Adam Aqalay. Ils obtiennent ensuite le changement de nom de l’enfant pour Adam Dardari.
[4]
En avril 2018, une première demande de visa de résident temporaire est présentée au nom d’Adam, citoyen du Maroc, afin de lui permettre de voyager au Canada avec les tuteurs, le temps de régulariser les démarches avec les autorités du Canada.
[5]
Le 16 avril 2018, cette première demande de visa de résident temporaire est refusée, tel qu’il apparaît des notes provenant du Système mondial de gestion des cas (SMGC) où il est consigné:
Text: Baby born 2017. "Adoptive parents" would like him to travel with them to Cda, where they are CC/PRs who work. (note - of Moroccan origin). They have kafala doc from Moroccan govt, but this is not equivalent to adoption doc. They will have to go through adoption process/sponsorship of child as immigrant. Noted this in refusal ltr. Refused
[6]
Le 24 septembre 2019, une seconde demande de visa de résident temporaire est déposée pour Adam auprès du Service des visas du Canada au Maroc.
[7]
Cette seconde demande consigne notamment que l’adresse d’Adam est au Québec et que la durée planifiée de la visite au Canada est de 6 mois. La demande de visa contient les formulaires requis, accompagnés de (1) la confirmation de l’assurance-voyage d’une durée de 6 mois, qui confirme aussi que la résidence d’Adam est au Québec; (2) des déclarations sous serment de M. Dardari et Mme Hasni datées du 19 septembre 2019, et une déclaration conjointe datée du 23 septembre 2019, dans lesquelles ils affirment notamment qu’ils exercent les droits et obligations d’Adam dans le respect des lois applicables au Canada en matière d’immigration, et qu’ils ont mandaté un avocat afin de les accompagner dans leur démarches; (3) une lettre d’invitation de M. Dardari et Mme Hasni datée du 19 septembre 2019 confirmant l’invitation faite à Adam de séjourner avec eux, le fait qu’ils en sont les tuteurs légaux, le fait qu’ils ont introduit une demande de résidence pour Adam mais que les autorités d’immigration les ont informés que la Kafala n’est pas reconnue au sens de l’adoption, et leur souhait de passer le temps des fêtes au Canada et de présenter Adam à leur famille; (4) l’ordre d’attribution de Kafala; et (5) la copie du passeport marocain et les photos d’Adam.
[8]
Dans l’intervalle, le 3 octobre 2019, la demande de citoyenneté canadienne présentée pour Adam est refusée, car il ne rencontre pas les exigences de l’alinéa 5.1(3)(a) de la Loi sur la citoyenneté (LRC 1985, ch C-29 [la Loi sur la citoyenneté]). L’autorité du Québec responsable de l’adoption internationale n’a pas déclaré par écrit qu’elle estime l’adoption conforme aux exigences. L'agent de la citoyenneté conclut en effet : « D'après les renseignements fournis dans votre demande, l'enfant ne répond donc pas aux exigences de l'alinéa 5.1(3)(a) de la Loi sur la citoyenneté car l'autorité québécoise responsable des adoptions internationales a déclaré par écrit que l'ordre d'attribution Kafala de l'enfant Dardari, Adam n'est pas conforme aux exigences du droit québécois régissant l'adoption. »
[9]
Le 11 octobre 2019, l’agent chargé d’examiner la seconde demande de visa de résident temporaire consigne des notes dans le SMGC. Il y indique : « Enfant de 2 ans. Kafala judiciaire au dossier, adopté le 2017/12/21 par Abdelaziz Dardani et Hanane Hasni, couple CC. Pas de dossier de parrainage en cours. La Kafala n’est pas reconnu au Cda pour l’adoption. Les parents étant établis au Cda, je ne crois pas que l’enfant y séjournera de façon temporaire »
.
[10]
Le même jour, le Service des visas rejette la seconde demande de visa de résident temporaire. L’agent n’est pas convaincu qu’Adam quittera le Canada à la fin de la période de séjour à titre de résident temporaire en vertu de l’alinéa 179(b) du Règlement sur l’immigration et la protection des réfugiés (DORS/2002-227 [le Règlement]), compte tenu de la raison de la visite.
[11]
La lettre de refus du 11 octobre 2019 indique : «
Je rejette votre demande pour les raisons suivantes : Je ne suis pas convaincu que vous quitterez le Canada à la fin de votre période de séjour à titre de résident temporaire en vertu de l'alinéa 179(b) du Règlement sur l'immigration et la protection des réfugiés, compte tenu de la raison de votre visite. Veuillez noter qu'il faut suivre le processus de parrainage pour un enfant adoptif. Veuillez consulter le site web: https://www.canada.ca/fr/immigration-refugies-citoyennete/services/canadiens/adopter-enfant-autre-pays.html.
»
III.
Arguments des parties
[12]
Le demandeur n’a pas déposé de mémoire additionnel, tel qu’il pouvait le faire. Par le biais d’un plan d’argumentation transmis à la Cour en amont de l’audience, et lors de l’audience même, le demandeur a soulevé des arguments nouveaux qui ne sont pas dans son mémoire. Conformément à la jurisprudence établie, la Cour ne considèrera pas ces arguments.
[13]
Dans son mémoire, le demandeur invoque les articles 3(1) et 22(1) de la Loi sur l’immigration et la protection des réfugiés, LC 2001, ch 27 [la Loi] et l’article 179 du Règlement.
[14]
Le demandeur cite le cadre d’analyse en contrôle judiciaire en vertu de la norme de la décision raisonnable, tel qu’établi par la Cour suprême du Canada dans l’arrêt Canada (Ministre de la Citoyenneté et de l’Immigration) c Vavilov, 2019 CSC 65 [Vavilov] et il soumet que la décision de l’agent ne rencontre pas (1) les impératifs d’intelligibilité et de transparence; et (2) les contraintes factuelles et juridiques applicables.
[15]
En lien avec les impératifs d’intelligibilité et de transparence, le demandeur soutient essentiellement que (a) l’affirmation en relation avec le parrainage et la non-reconnaissance de la Kafala est non pertinente, voir sans utilité, dans le dossier; (b) la demande de séjour temporaire n’a aucun lien de connexité avec le dossier de parrainage fondé sur l’adoption; (c) la demande de séjour temporaire avait pour unique finalité de pouvoir voyager au Canada dans le strict respect des lois et règlements en matière d’immigration; (d) M. Dardani a retenu les services d’un avocat.
[16]
Le demandeur soumet donc que la décision de l’agent des visas ainsi que les motifs qui en sont le fondement sont inintelligibles. Il ajoute que les motifs invoqués reposent sur des prémisses non pertinentes et qui, au demeurant, font l’objet de démarches d’immigration complétements distincts.
[17]
En lien avec les contraintes factuelles et juridiques applicables, le demandeur soumet que l’agent a tiré une inférence du fait que les parents sont établis au Canada pour conclure ne pas croire que l’enfant y séjournera de manière temporaire. Le demandeur ajoute que cette inférence est une opinion personnelle qui laisse entendre que les tuteurs ne respecteront pas la loi et la règlementation en matière d’immigration, et qu’elle contredit sans aucun motif une preuve versée au dossier.
[18]
Le demandeur souligne que M. Dardani et Mme Hasni ont signé une déclaration sous serment dans laquelle ils s’engagent à respecter toutes les dispositions légales et règlementaires en relation avec le séjour temporaire de l’enfant.
[19]
S’appuyant sur le paragraphe 15 de la décision de la Cour dans Oliinyk c Canada (Citoyenneté et Immigration), 2016 CF 756 [Oliinyk], le demandeur soumet que l’agent a omis de tenir compte ou même de mentionner l’élément de preuve qui contredit sa conclusion. Le demandeur ajoute que, dans le présent dossier, il n’existe aucune trace de certains des éléments de preuve soumis par le tuteur et il existe par ailleurs une preuve qui contredit la conclusion de l’agent.
[20]
Le demandeur demande à la Cour d’intervenir, soutenant que la décision ne tient manifestement pas compte de tous les éléments pertinents qui ont été mis en preuve.
[21]
Le ministre de la Citoyenneté et de l'Immigration [le Ministre] répond que toutes les dispositions législatives prévoient expressément que l’agent des visas doit être satisfait que le demandeur veut s’établir au Canada sur une base temporaire. Il ajoute qu’il incombe au demandeur de réfuter la présomption légale selon laquelle l’étranger qui cherche à entrer au Canada, est présumé être un immigrant et doit convaincre l’agent des visas qu’il quittera le Canada à la fin de la période autorisée (Kwasi Obeng c Canada (Citoyenneté et Immigration), 2008 CF 754 au para 20 [Kwasi Obeng]).
[22]
Le Ministre soutient que la décision de l’agent ne porte aucun jugement ou sous-entendu selon lequel les tuteurs du demandeur ne respecteraient pas la loi. Il ajoute que l’agent est présumé avoir considéré l’ensemble de la preuve et n’est pas obligé de faire mention de chacun des éléments de preuve soumis par le demandeur (Kotanyan c Canada (Citoyenneté et Immigration), 2014 CF 507).
[23]
Le Ministre soumet qu’il était pertinent pour l’agent de constater l’absence de parrainage car la possibilité de passer par ce processus a été notée dans le cadre du refus de la première demande de visa de résident temporaire. Le Ministre ajoute que ce processus d’immigration est un de deux processus offerts aux parents désireux d’obtenir un statut au Canada pour leur enfant adopté.
[24]
Le Ministre souligne que la demande de citoyenneté d’Adam a été refusée le 3 octobre 2019, car il ne rencontrait pas les exigences de l’alinéa 5.1(3(a) de la Loi sur la citoyenneté. Cependant, les tuteurs auraient pu procéder par le processus d’immigration et invoquer l’article 25 de la Loi.
IV.
Norme de contrôle
[25]
En ce qui concerne la norme de contrôle, il existe une présomption d’application de la norme de la décision raisonnable et les parties s’entendent qu’elle s’applique en l’espèce (Ngalamulume c Canada (Citoyenneté et Immigration), 2009 CF 1268).
[26]
Le contrôle judiciaire selon cette norme est à la fois rigoureux et adapté au contexte (Vavilov au para 67). Dans l’arrêt Société canadienne des postes c Syndicat des travailleurs et travailleuses des postes, 2019 CSC 67, la Cour suprême énonce ce qui est exigé pour conclure qu’une décision est raisonnable et ce, qui est attendu d’un tribunal qui applique la norme de la décision raisonnable :
[31] La décision raisonnable « doit être fondée sur une analyse intrinsèquement cohérente et rationnelle et est justifiée au regard des contraintes juridiques et factuelles auxquelles le décideur est assujetti » (Vavilov, par. 85). Par conséquent, lorsqu’elle procède au contrôle d’une décision selon la norme de la décision raisonnable, « une cour de révision doit d’abord examiner les motifs donnés avec “une attention respectueuse”, et chercher à comprendre le fil du raisonnement suivi par le décideur pour en arriver à [l]a conclusion » (Vavilov, par. 84, citant Dunsmuir, par. 48). Les motifs devraient être interprétés de façon globale et contextuelle afin de comprendre « le fondement sur lequel repose la décision » (Vavilov, par. 97, citant Newfoundland Nurses).
[32] La cour de révision devrait se demander si la décision dans son ensemble est raisonnable : « ce qui est raisonnable dans un cas donné dépend toujours des contraintes juridiques et factuelles propres au contexte de la décision particulière sous examen » (Vavilov, par. 90). Elle doit se demander « si la décision possède les caractéristiques d’une décision raisonnable, soit la justification, la transparence et l’intelligibilité, et si la décision est justifiée au regard des contraintes factuelles et juridiques pertinentes qui ont une incidence sur celle‑ci » (Vavilov, par. 99, citant Dunsmuir, par. 47 et 74, et Catalyst Paper Corp. c. North Cowichan (District), 2012 CSC 2, [2012] 1 R.C.S. 5, par. 13).
[33] Lors d’un contrôle selon la norme de la décision raisonnable, « [i]l incombe à la partie qui conteste la décision d’en démontrer le caractère déraisonnable » (Vavilov, par. 100). La partie qui conteste la décision doit convaincre la cour de justice que « la lacune ou la déficience [invoquée] [...] est suffisamment capitale ou importante pour rendre [la décision] déraisonnable » (Vavilov, par. 100). En l’espèce, ce fardeau incombe au Syndicat.
[27]
Tel que l’écrivait mon collègue le juge Gascon dans sa décision Sharma c Canada (Citoyenneté et Immigration), 2020 CF 381 au para 21 :
Lors du contrôle selon la norme de la décision raisonnable, la cour de révision doit accorder une « attention respectueuse [...] à l’expertise établie » et aux connaissances spécialisées du décideur, tel qu’en font foi les motifs de ce dernier (Vavilov au para 93). La norme de la décision raisonnable est ancrée dans le principe de la retenue judiciaire. La cour de révision doit faire preuve de déférence envers le décideur, car cette déférence « repose sur le choix du législateur de confier à un tribunal administratif spécialisé la responsabilité d’appliquer les dispositions législatives, ainsi que sur l’expertise de ce tribunal en la matière » (Edmonton (Ville) c Edmonton East (Capilano) Shopping Centres Ltd, 2016 CSC 47 au para 33; Dunsmuir aux para 48 et 49). Dans le cadre d’un contrôle selon la norme de la décision raisonnable, lorsqu’une question mixte de fait et de droit relève directement du champ d’expertise d’un décideur, le rôle de la cour de révision n’est pas d’imposer l’approche de son choix (Canada (Commission canadienne des droits de la personne) c Canada (Procureur général), 2018 CSC 31 au para 57). Évidemment, une cour de révision doit s’assurer que la décision faisant l’objet du contrôle est justifiée au regard des faits pertinents, mais la déférence envers un décideur comporte plus particulièrement une déférence à l’égard de ses conclusions et de son appréciation de la preuve. Les cours de révision devraient éviter « de soupeser et d’apprécier à nouveau la preuve prise en compte par le décideur » (Société canadienne des postes au para 61; Vavilov au para 125). Telle est la situation en l’espèce.
V.
Cadre juridique
[28]
Le paragraphe 11(1) de la Loi prévoit que l’étranger doit, préalablement à son entrée au Canada, demander à l’agent les visas et autres documents requis par règlement.
[29]
Par ailleurs, une demande de visa de résident temporaire est régie par l’alinéa 20(1)(b) de la Loi, ainsi que par le paragraphe 7(1) et l’article 179 du Règlement. L’alinéa 20(1)(b) de la Loi prévoit que :
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Le paragraphe 7(1) et l’article 179 du Règlement prévoient quant à eux que:
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[31]
Les dispositions applicables prévoient clairement que l’agent des visas doit être satisfait que le demandeur quittera le Canada à la fin de la période autorisée de son séjour.
[32]
De plus, la Cour a confirmé qu’il existe une présomption légale selon laquelle l’étranger qui cherche à entrer au Canada est présumé être un immigrant, et qu’il lui appartient de réfuter cette présomption. Le demandeur doit prouver à l’agent des visas qu’il n’est pas un immigrant et qu’il quittera le Canada à la fin de la période autorisée qu’il sollicite (KwasiObeng; Danioko c Canada (Ministre de la Citoyenneté et de l’Immigration), 2006 CF 479).
VI.
Décision
[33]
Le demandeur ne m’a pas convaincue que la décision de l’agent ne rencontre pas les impératifs d’intelligibilité et de transparence ou les contraintes factuelles et juridiques applicables.
[34]
Quant aux impératifs d’intelligibilité et de transparence, d’abord, la mention en relation avec le parrainage et la non-reconnaissance de la Kafala ne peut être taxée de non pertinente ou d’inutile, compte tenu de l’historique de la demande et du contexte dans lequel elle est présentée et particulièrement compte tenu que ce processus avait été noté dans le cadre du refus de la première demande de visa de résident temporaire.
[35]
Au surplus, et à tout évènement, même si elle était inutile ou non pertinente, le demandeur n’a pas démontré que ce constat, en soi, entacherait la décision de façon à justifier l’intervention de la Cour.
[36]
Le demandeur ne m’a pas convaincue que le fait qu’il ait déclaré avoir retenu les services d’un avocat, ou que le visa avait pour unique finalité de pouvoir voyager au Canada dans le strict respect des lois et règlements en matière d’immigration, rend la décision de l’agent inintelligible.
[37]
En lien avec les contraintes factuelles et juridiques applicables, l’agent pouvait considérer que les parents sont établis au Canada. Au surplus, je souscris à la position du Ministre que la décision de l’agent ne porte aucun jugement ou sous-entendu selon lequel ses tuteurs ne respecteraient pas la loi et la réglementation applicable en matière d’immigration.
[38]
Le demandeur allègue aussi que la décision n’est pas suffisamment motivée, car il n’y aurait aucun commentaire de l’agent concernant certains éléments de preuve déposés par ses tuteurs. Le demandeur réfère particulièrement à la lettre d’invitation et aux déclarations que les tuteurs ont signées et dans lesquelles ils confirment qu’ils respecteront la loi et qui contrediraient la conclusion de l’agent que le demandeur n’a pas démontré qu’il quittera le Canada.
[39]
À cet égard, la jurisprudence confirme que l’agent est présumé avoir considéré l’ensemble de la preuve et n’est pas obligé de faire mention de chacun des éléments de preuve soumis par le demandeur (Florea c Canada (Ministre de l’Emploi et de l’Immigration), [1993] ACF No 598 (CAF); Ahmed c Canada (Citoyenneté et Immigration), 2013 CF 1083 au para 34). En outre, l’agent n’est pas tenu de faire référence à chaque élément de preuve qui est contraire aux conclusions de sa décision, et les motifs donnés ne doivent pas être examinés à la loupe (Cepeda-Gutierrez c Canada (Citoyenneté et Immigration), [1998] ACF No 1425 au para 16). Au surplus, la preuve à laquelle le demandeur réfère ne contredit pas la conclusion de l’agent puisque cette preuve ne traite pas de la question de «
quitter le Canada à la fin de la période de séjour
»
.
[40]
Enfin, même si elle en traitait, le demandeur n’a soumis aucune autorité pour soutenir qu’une simple déclaration suffit comme fondement à une demande de visa de résident temporaire et pour satisfaire les exigences réglementaires. La décision Oliinyk ne s’applique pas en l’instance compte tenu des faits.
[41]
Enfin, l’agent n’a pas ici, tiré de conclusion de crédibilité. Il a simplement constaté, essentiellement, que la preuve était insuffisante pour démontrer que le demandeur quittera le Canada à la fin de la période de séjour autorisée. Voir à cet effet Ibabu c Canada (Citoyenneté et Immigration), 2015 CF 1068, où j’ai déclaré ce qui suit au paragraphe 35 :
[35] Une conclusion défavorable sur la crédibilité est différente d’une conclusion quant à l’insuffisante de la preuve ou quant au défaut du demandeur de s’acquitter du fardeau de la preuve. Comme la Cour l’a déclaré dans Gao c. Canada (Ministre de la Citoyenneté et de l’Immigration), 2014 CF 59, au paragraphe 32, et l’a réaffirmé dans Herman c. Canada (Ministre de la Citoyenneté et de l’Immigration), 2010 CF 629, au paragraphe 17, « [o]n ne peut toutefois pas présumer que, lorsque l’agente conclut que la preuve ne démontre pas le bien‑fondé de la demande du demandeur, l’agente n’a pas cru le demandeur ». Ce principe a été repris sous une forme différente dans Ferguson c. Canada (Ministre de la Citoyenneté et de l’Immigration), 2008 CF 1067, au paragraphe 23, dans lequel le juge Zinn a déclaré que, même si un demandeur s’est acquitté de sa charge de présentation de la preuve parce qu’il a présenté des éléments de preuve pour chaque fait essentiel, il pourrait ne pas s’être acquitté de la charge de persuasion parce que la preuve présentée n’établit pas les faits requis, selon la prépondérance de la preuve.
[42]
Compte tenu du contexte et du dossier, la décision de l’agent n’est pas déraisonnable.
VII.
Conclusion
[43]
En dépit de la sympathie qu’inspire la situation, la Cour doit rejeter la demande de contrôle judiciaire. Le refus, par l’agent, d’approuver la demande de visa de résident temporaire n’est pas déraisonnable compte tenu des dispositions législatives et de la jurisprudence. La décision est fondée sur une analyse intrinsèquement cohérente et rationnelle, et elle est justifiée au regard des contraintes juridiques et factuelles auxquelles l’agent est assujetti.
JUGEMENT dans IMM-6518-19
LA COUR STATUE que :
La demande de contrôle judiciaire est rejetée;
Aucune question n’est certifiée.
« Martine St-Louis »
Juge
COUR FÉDÉRALE
AVOCATS INSCRITS AU DOSSIER
DOSSIER :
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IMM-6518-19
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INTITULÉ :
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ADAM DARDARI, mineur représenté par son tuteur à l’instance, ABDELAZIZ DARDARI c LE MINISTRE DE LA CITOYENNETÉ ET DE L’IMMIGRATION
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LIEU DE L’AUDIENCE :
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Québec, Québec – par vidéoconférence
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DATE DE L’AUDIENCE :
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LE 13 mai 2021
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JUGEMENT ET motifs :
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LA JUGE ST-LOUIS
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DATE DES MOTIFS :
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LE 28 mai 2021
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COMPARUTIONS :
Me Elhadji Madiara Niang
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Pour le demandeur
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Me Thi My Dung Tran
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Pour le défendeur
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AVOCATS INSCRITS AU DOSSIER :
Me Elhadji Madiara Niang
Québec (Québec)
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Pour le demandeur
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Procureur général du Canada
Montréal (Québec)
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Pour le défendeur
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