Date : 20050615
ENTRE :
LE CHEF SIMON SAMUEL ET LES CONSEILLERS JEROME DENECHEZHE,
SARAH SAMUEL, DONALD TSSESSAZE, SIMON DENECHEZHE
ET NAPOLEON DENECHEZHE,
EN LEUR NOM PERSONNEL ET AU NOM DE LA BANDE INDIENNE NORTHLANDS, ET LE CHEF STEVEN THORASSIE ET LES CONSEILLERS ERNIE BUSSIDOR, ALBERT THORASSIE ET CHARLIE TOM, EN LEUR NOM PERSONNEL ET AU NOM DE LA BANDE INDIENNE DE FORT CHURCHILL, MAINTENANT CONNUE SOUS LE NOM DE PREMIÈRE NATION SAYISI DENE
et
SA MAJESTÉ LA REINE, LE MINISTRE DES AFFAIRES INDIENNES ET DU NORD CANADIEN, NUNAVUT TUNNGAVIK
INCORPORATED ET LE GOUVERNEMENT DES TERRITOIRES DU NORD-OUEST, REPRÉSENTÉ PAR LE LEADER DU GOUVERNEMENT
MOTIFS DE L'ORDONNANCE
(Prononcés à l'audience à Ottawa (Ontario),
le vendredi 10 juin 2005)
LE JUGE HUGESSEN
[1] Compte tenu de l'urgence de l'affaire, j'ai accepté de tenir une audience cet après-midi, et ce, malgré les imperfections qui ressortiront sans aucun doute des présents motifs. J'estime également qu'il est important de trancher l'affaire sans délai étant donné que l'on se propose de communiquer au début de la semaine prochaine des renseignements que la présente requête vise à tenir confidentiels.
[2] L'action elle-même se rapporte à une revendication territoriale autochtone concernant deux bandes indiennes du nord du Manitoba dont les territoires sont situés à la frontière de cette province et de ce qui est maintenant le Nunavut ou près de cette frontière. Les défendeurs dans l'action sont la Couronne, NTI, qui est une organisation représentant les Inuit à Nunavut, et le gouvernement des Territoires du Nord-Ouest (maintenant le Nunavut).
[3] Je suis responsable de la gestion de l'instance depuis que j'ai été nommé à la Cour, soit, si j'ai bonne mémoire, depuis 1997.
[4] Les parties ont entamé des négociations en vue d'arriver à un règlement de l'action ainsi que des revendications des bandes demanderesses. Ces négociations ont été assujetties à un contrôle fort restreint de la part de la Cour, qui n'y a pas activement participé ou tenté de les surveiller. La Cour s'est en fait contentée de s'assurer que les négociations avaient lieu et d'ajourner l'action de temps en temps, de façon à permettre à toutes les parties de conserver pour ainsi dire leurs recours.
[5] Après le début des négociations, les parties ont conclu une entente que la Couronne, partie requérante, qualifie d'entente de confidentialité et que la partie intimée NTI qualifie d'entente de communication. Je l'appellerai simplement l'entente. Aux termes de cette entente, NTI était invitée à participer activement aux négociations en vue d'un règlement et elle devait être informée du progrès de ces négociations ainsi que des renseignements ou des propositions qui étaient échangés.
[6] J'estime qu'il est important, pour les besoins des présents motifs, de signaler certaines parties de l'entente, mais puisque l'entente elle-même est confidentielle et qu'elle a été déposée sous scellé et puisque les présents motifs seront, selon toute probabilité, rendus publics, je me contenterai de faire mention du préambule ainsi que des paragraphes 1, 2, 5, 6, 7, 8, 9 et 12 sans reproduire le texte.
[7] Par la présente requête, la Couronne me demande de déclarer que la communication projetée par NTI à certains membres intéressés des communautés inuits touchées de la superficie exacte de terrain, au Nunavut, que la Couronne a offert de céder aux demandeurs en fief simple serait contraire aux dispositions de l'entente.
[8] La Couronne fait valoir que l'entente interdit cette communication. En effet, le paragraphe 5 de l'entente prévoit ce qui suit : [TRADUCTION] « Les renseignements ou documents communiqués dans le cours des négociations » seront tenus confidentiels [TRADUCTION] ( « ne seront pas communiqués de quelque façon que ce soit par une partie » ).
[9] Toutefois, la première phrase du paragraphe 8 permet la communication de renseignements généraux, alors que la deuxième phrase interdit la communication de [TRADUCTION] « documents et [d]'extraits de documents précis » . L'entente est bien loin d'être rédigée en des termes clairs, mais il importe de noter que la communication vise notamment à faciliter la consultation des groupes concernés, de façon que des négociations éclairées puissent avoir lieu.
[10] Je tiens ici à souligner que je ne cherche pas à savoir s'il est souhaitable ou opportun de permettre ou d'interdire la communication projetée. Je cherche uniquement à savoir si la communication projetée est ou serait contraire aux dispositions de l'entente.
[11] Je note que les parties ont récemment convenu d'avoir recours aux bons offices de l'honorable Peter Cory comme médiateur aux fins des négociations et que la première séance doit avoir lieu à Winnipeg dans une dizaine de jours. Je signale ce fait parce que la question de la communication ou de la non-communication par NTI de la superficie exacte de terrain que la Couronne a offerte dans ses négociations avec les demandeurs me semble être une question qui peut à juste titre être examinée dans le cadre de la médiation et que M. Cory peut bien trouver utile ou même nécessaire de donner des conseils et des directives aux parties au sujet de ce qui doit être communiqué et du moment où la communication doit avoir lieu. Comme je l'ai dit, je m'intéresse seulement à l'entente elle-même et, à cet égard, je ne doute pas que la communication projetée serait contraire aux dispositions de l'entente.
[12] Le paragraphe 5 établit la règle; il prévoit que ce qui se passe dans le cadre des négociations doit demeurer confidentiel. L'exception, au paragraphe 8, permet la communication restreinte de questions générales à un groupe restreint de personnes : [TRADUCTION] « les objectifs, le progrès, l'état, et les éléments généraux des négociations » . Puis, il y a une exception à l'exception en ce qui concerne certains [TRADUCTION] « documents et extraits de documents précis » dont la communication non autorisée, même au groupe restreint mentionné dans la première phrase, est prohibée. Si l'entente est interprétée d'une façon téléologique, il ne peut pas y avoir de « zone grise » , à mon avis, entre ce qui est prévu à la première phrase du paragraphe 8 et ce qui est prohibé à la deuxième phrase : tout ce qui est déclaré confidentiel au paragraphe 5 doit être soit communicable selon la première phrase du paragraphe 8 ou non-communicable selon la deuxième phrase.
[13] Je conclus qu'en communiquant le nombre exact de kilomètres carrés de terrain que l'on se propose de céder en fief simple, on communiquerait un détail précis d'un document, ce qui serait contraire aux dispositions de l'entente. Toutefois, comme je l'ai déjà mentionné, il s'agit d'une question qui peut à juste titre être assujettie à la médiation qui doit commencer devant l'ancien juge Cory, le 21 juin 2005.
[14] Par conséquent, je rendrai une ordonnance prévoyant que la communication projetée serait contraire aux dispositions de l'entente conclue entre les parties. Aucune ordonnance ne sera rendue au sujet des dépens.
« James K. Hugessen »
Juge
Ottawa (Ontario)
le 15 juin 2005
Traduction certifiée conforme
David Aubry, LL.B.
COUR FÉDÉRALE
AVOCATS INSCRITS AU DOSSIER
DOSSIER : T-703-93
INTITULÉ : LE CHEF SIMON SAMUEL ET AUTRES
c.
SA MAJESTÉ LA REINE ET AUTRES
LIEU DE L'AUDIENCE : OTTAWA (ONTARIO)
DATE DE L'AUDIENCE : LE 10 JUIN 2005
MOTIFS DE L'ORDONNANCE : LE JUGE HUGESSEN
DATE DES MOTIFS : LE 14 JUIN 2005
COMPARUTIONS:
A. Peltz POUR LES DEMANDEURS
Dougald Brown POUR LE DÉFENDEUR
LE NUNAVUT
John Tyhurst POUR LA DÉFENDERESSE
LA REINE
AVOCATS INSCRITS AU DOSSIER:
Gange, Goodman & Finch POUR LES DEMANDEURS
Winnipeg (Manitoba)
Nelligan Power POUR LE DÉFENDEUR
Ottawa (Ontario) LE NUNAVUT
John H. Sims, c.r. POUR LA DÉFENDERESSE
Sous-procureur général du Canada LA REINE
John Holden POUR LE DÉFENDEUR
Yellowknife (T.N.-O.) LE GOUVERNEMENT DES T.N.-O.