Date : 20010323
Dossier : T-1948-00
Référence neutre: 2001 CFPI 234
Entre :
LE MINISTRE DE LA CITOYENNETÉET DE L'IMMIGRATION
Demandeur
Et :
SADI WASSIF CHEIKH
Défendeur
LE JUGE ROULEAU
[1] Il s'agit d'un appel en vertu du paragraphe 14(5) de la Loi sur la citoyenneté d'une décision du juge de la citoyenneté, Jeannine Beaubien, rendue le 22 août 2000 approuvant la demande de citoyenneté de Sadi Wassif Cheikh.
[2] M. Cheikh est né en 1945 au Cameroun. Il possède la citoyenneté française. Il est devenu résident permanent du Canada le 17 juillet 1987 avec son épouse et ses trois enfants.
[3] M. Cheikh a déposé sa demande de citoyenneté le 4 septembre 1999. Eu égard à la période de 4 ans entre le 4 septembre 1995 et le 4 septembre 1999, M. Cheikh aurait été absent du Canada pendant 1231 jours.
[4] Le 22 août 2000, le juge de la citoyenneté a accordé la citoyenneté à M. Cheikh.
[5] Le demandeur recherche une ordonnance cassant la décision du juge de la citoyenneté car il prétend que M. Cheikh ne remplissait pas les conditions en vertu de la règle d'interprétation de la présence physique au Canada puisqu'il lui manquait 865 jours pour atteindre les 1095 jours requis par la Loi. Le demandeur soutient aussi que l'analyse du juge de la citoyenneté ne respecte pas les principes découlant de la jurisprudence car les liens de M. Cheikh avec le Canada durant la période où il était à l'extérieur du pays étaient minimes et que l'analyse du juge ne tient pas compte de la preuve versée au dossier. Le fait d'avoir installé sa famille au Canada n'est pas une démonstration que lui-même a centralisé son mode de vie au Canada.
[6] À mon avis, il est clair que le juge de la citoyenneté a appliqué l'approche libérale introduite par l'affaire Re: Papadogiorgakis, [1978] 2 C.F. 208 (1ère inst.) lorsqu'elle a décidé d'accorder la citoyenneté à M. Cheikh car il ne remplit manifestement pas la condition de présence physique au Canada.
[7] Ceci étant dit, la décision du juge de la citoyenneté n'est pas suffisamment étoffée afin de démontrer le bien-fondé de sa conclusion que M. Cheikh avait ses racines bien fixées au Canada. Les pièces déposées par M. Cheikh, plus particulièrement le permis de conduire et la carte d'assurance sociale, servent uniquement à démontrer qu'on lui avait octroyé un permis et un numéro d'assurance sociale. La preuve documentaire de l'achat d'une résidence ainsi que le paiement de primes d'assurance et de taxes ne démontrent aucunement, en l'espèce, que M. Cheikh s'est « établi en pensée et en fait, ou conserve ou centralise son mode de vie habituelle avec son cortège de relations sociales, d'intérêts et de convenances, au lieu en question » .
[8] Je reconnaît que certaines des absences du Canada sont motivées par le fait que M. Cheikh exerce le métier spécialisé d'hydro-foreur. Cependant, la décision du juge de la citoyenneté ne fait aucune allusion à ce fait et cette preuve n'est pas concluante en soi pour confirmer que M. Cheikh avait établi un véritable lien avec le Canada.
[9] Il s'ensuit que, d'après la preuve insuffisante afin de démontrer que M. Cheikh avait des liens considérables avec le Canada et la carence de l'analyse de la preuve, la demande de citoyenneté était prématurée et donc l'appel est accueilli.
JUGE
OTTAWA, Ontario
Le 23 mars 2001
COUR FÉDÉRALE DU CANADA SECTION DE PREMIÈRE INSTANCE
NOMS DES AVOCATS ET DES AVOCATS INSCRITS AU DOSSIER
No DE LA COUR: T-1948-00
INTITULÉ: Ministre de la citoyenneté et de l'immigration c. Sadi Wassif Cheikh
LIEU DE L'AUDIENCE: Montréal,Québec
DATE DE L'AUDIENCE: Le 08 mars 2001
MOTIFS DE JUGEMENT DU Juge Rouleau
EN DATE: Le 23 mars 2001
COMPARUTIONS:
Me Daniel Latulippe POUR LE DEMANDEUR
Monsieur Sadi Wassif Cheikh DÉFENDEUR AGISSANT POUR SON PROPRE COMPTE
AVOCATS INSCRITS AU DOSSIER:
Me Morris Rosenberg Sous-procureur général du Canada Ottawa, Ontario POUR LE DEMANDEUR