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Date : 20030306

Dossier : IMM-423-01

Référence neutre : 2003 CFPI 278

Ottawa (Ontario), le jeudi 6 mars 2003

EN PRÉSENCE DE MADAME LE JUGE DAWSON

ENTRE :

                                                           KAHKIJA SHARIEF

                                                                                                                                      demanderesse

                                                                          - et -

                LE MINISTRE DE LA CITOYENNETÉ ET DE L'IMMIGRATION

                                                                                                                                             défendeur

                             MOTIFS DE L'ORDONNANCE ET ORDONNANCE

LE JUGE DAWSON


[1]                 Kahkija Sharief est une citoyenne iraquienne d'origine kurde qui, avec quatre de ses enfants, a demandé l'admission au Canada à titre de personne de pays d'accueil en vertu du Règlement sur les catégories d'immigrants précisées pour des motifs d'ordre humanitaire, DORS/97-183 (le Règlement). La demande était accompagnée d'un engagement de parrainage pris par cinq personnes, dont un fils de Mme Sharief qui vit au Canada.

[2]                 Mme Sharief s'est présentée à une entrevue à l'ambassade canadienne à Damas le 24 novembre 1998. Au cours de l'entrevue, elle a présenté des cartes d'identité iraquiennes originales délivrées en 1997 pour chacun des enfants. Chaque carte indiquait notamment la date de naissance de l'enfant. Selon les notes versées au STIDI, l'agente des visas était persuadée, après avoir rencontré la famille, que la demande de Mme Sharief et de ses enfants était convaincante et que ceux-ci satisfaisaient à la définition de « personne de pays d'accueil » . La famille a donc été informée sur les examens médicaux auxquels elle devait se soumettre avant que le traitement de sa demande puisse se poursuivre.

[3]                 Les examens médicaux ont permis d'apprendre que les quatre enfants étaient peut-être plus âgés que ce qui était indiqué sur leurs cartes d'identité iraquiennes. L'agente des visas a finalement conclu que deux des enfants, Kasim et Monirah, satisfaisaient à la définition d'enfant à charge, mais pas les deux autres, Ahlam et Jasim. Elle a considéré également que Mme Sharief avait donné de fausses indications sur l'âge de ses enfants et que, de ce fait, elle n'avait pas répondu franchement aux questions qui lui étaient posées, contrairement au paragraphe 9(3) de la Loi sur l'immigration, L.R.C. (1985), ch. I-2 (la Loi). En conséquence, elle a rejeté la demande d'admission au Canada.


[4]                 La présente demande de contrôle judiciaire vise à obtenir l'annulation de cette décision.

[5]                 On prétend, pour le compte de Mme Sharief, que l'agente des visas a commis une erreur :

i)           en tenant compte de l'âge des enfants;

ii)          en considérant que de fausses indications avaient été données;

iii)          en rejetant la demande dans son ensemble.

L'âge des enfants était-il pertinent?

[6]                 Deux prétentions sont invoquées pour démontrer que l'agente a commis une erreur en tenant compte de l'âge des enfants. En premier lieu, l'engagement de parrainage concernait chacun des membres de la famille, de sorte que l'agente des visas était saisie en fait de cinq demandes. En conséquence, il n'était pas nécessaire que l'un ou l'autre des enfants soit considéré comme une personne à charge. En deuxième lieu, on prétend que, si les enfants étaient des personnes à charge, ils n'auraient pas dû être exclus en raison de leur âge, suivant l'interprétation qu'il convient de donner au paragraphe 4(4) du Règlement.


[7]                 Avec égards, j'estime que ces prétentions n'ont aucune valeur. Une seule demande de résidence permanente a été présentée. Dans cette demande, Mme Sharief s'est décrite comme la requérante principale et a nommé ses quatre enfants à titre de personnes à charge. Rien dans la preuve n'étaie donc la prétention selon laquelle l'agente des visas était saisie de cinq demandes.

[8]                 En ce qui concerne l'interprétation qu'il convient de donner au paragraphe 4(4) du Règlement, cette disposition prévoyait ce qui suit à l'époque pertinente :


4 (4) L'agent des visas ne peut délivrer un visa d'immigrant à la personne à charge qui accompagne la personne visée au paragraphe (1) que si :

4 (4) A visa officer shall not issue an immigrant visa to an accompanying dependant of a person referred to in subsection (1) unless

a) d'une part, au moment où un agent des visas reçoit la demande d'admission, cette personne à charge, autre que le conjoint, répond aux critères énoncés aux alinéas a), ou c) des définitions de « fils à charge » , selon le cas, au paragraphe 2(1) du Règlement sur l'immigration de 1978;

(a) at the time the application for admission is received by a visa officer, the accompanying dependant, except if the dependant is the person's spouse, meets the criteria set out in paragraph (a), (b) or (c) of the definition "dependent son" or "dependent daughter" in subsection 2(1) of the Immigration Regulations, 1978, as the case may be; and

b) d'autre part, au moment où le visa est délivré, cette personne à charge, autre que le conjoint, répond aux critères visés à l'alinéa a), sauf celui concernant l'âge énoncé à l'alinéa a) des définitions de « fils à charge » , selon le cas, au paragraphe 2(1) du Règlement sur l'immigration de 1978.

(b) at the time the visa is issued, the accompanying dependant, except if the dependant is the person's spouse, meets the criteria referred to in paragraph (a), except for the one respecting age set out in paragraph (a) of the definition "dependent son" or "dependent daughter" in subsection 2(1) of the Immigration Regulations, 1978, as the case may be.


[9]                 La définition de « fille à charge » qui était alors prévue au paragraphe 2(1) du Règlement sur l'immigration de 1978 se lisait comme suit :



« fille à charge » Fille :

a) soit qui est âgée de moins de 19 ans et n'est pas mariée;

b) soit qui est inscrite à une université, un collège ou un autre établissement d'enseignement et y suit à temps plein des cours de formation générale, théorique ou professionnelle, et qui :

(i) d'une part, y a été inscrite et y a suivi sans interruption ce genre de cours depuis la date de ses 19 ans ou, si elle était déjà mariée à cette date, depuis la date de son mariage,

(ii) d'autre part, selon l'agent d'immigration qui fonde son opinion sur les renseignements qu'il a reçus, a été entièrement ou en grande partie à la charge financière de ses parents depuis la date de ses 19 ans ou, si elle était déjà mariée à cette date, depuis la date de son mariage;

c) soit qui est entièrement ou en grande partie à la charge financière de ses parents et qui :

(i) d'une part, selon un médecin agréé, souffre d'une incapacité de nature physique ou mentale,

(ii) d'autre part, selon l'agent d'immigration qui fonde son opinion sur les renseignements qu'il a reçus, y compris les renseignements reçus du médecin agréé visé au sous-alinéa (i), est incapable de subvenir à ses besoins en raison de cette incapacité.

"dependent daughter" means a daughter who

(a) is less than 19 years of age and unmarried,

(b) is enrolled and in attendance as a full-time student in an academic, professional or vocational program at a university, college or other educational institution and

(i) has been continuously enrolled and in attendance in such a program since attaining 19 years of age or, if married before 19 years of age, the time of her marriage, and

(ii) is determined by an immigration officer, on the basis of information received by the immigration officer, to be wholly or substantially financially supported by her parents since attaining 19 years of age or, if married before 19 years of age, the time of her marriage, or

(c) is wholly or substantially financially supported by her parents and

(i) is determined by a medical officer to be suffering from a physical or mental disability, and

(ii) is determined by an immigration officer, on the basis of information received by the immigration officer, including information from the medical officer referred to in subparagraph (i), to be incapable of supporting herself by reason of such disability.


[10]            L'expression « fils à charge » était définie de la même façon.


[11]            Après avoir lu le libellé du paragraphe 4(4) du Règlement et les définitions de « fils à charge » et de « fille à charge » dans leur contexte et leur sens ordinaire, je suis convaincue que l'alinéa 4(4)a) exigeait d'un agent des visas qu'il refuse de délivrer un visa d'immigrant à une fille à charge ou à un fils à charge accompagnant le requérant, sauf si, au moment de la réception de la demande d'admission, la fille à charge ou le fils à charge répondait aux critères énoncés aux alinéas a), b) ou c) de la définition de « fille à charge » ou de « fils à charge » contenue au paragraphe 1(1) du Règlement. L'alinéa 4(4)b) exigeait quant à lui que la fille ou le fils accompagnant le requérant réponde, au moment où le visa était délivré (après que la demande avait été faite), aux critères visés à l'alinéa a) du paragraphe 1(1) du Règlement, sauf pour ce qui était de l'obligation d'avoir moins de 19 ans.

[12]            Par conséquent, l'agente des visas devait savoir si les quatre enfants étaient âgés de moins de 19 ans au moment de la réception de la demande d'admission. Ils pouvaient être admis au Canada en vertu du Règlement s'ils répondaient à ce critère.

L'agente des visas a-t-elle eu raison de conclure que Mme Sharief a donné de fausses indications sur l'âge de ses enfants?

[13]            Afin de déterminer si l'agente des visas a commis une erreur susceptible de contrôle en concluant que Mme Sharief avait donné de fausses indications sur l'âge de ses enfants, il faut examiner la preuve dont elle disposait.

[14]            Après que des doutes quant à l'âge des enfants eurent été soulevés, les médecins du ministre à Paris ont demandé que des tests soient effectués pour déterminer l'âge des enfants. Des radiographies ont été prises et un radiologiste a indiqué, sur la foi de ces radiographies, que l'âge des enfants était le suivant :


Ahlam - plus de 25 ans

Jasim - plus de 25 ans

Kasim - environ 16 ans

Monirah - environ 18 ans

[15]            Apprenant cela, le fils vivant au Canada qui parrainait sa mère, ses frères et ses soeurs a fourni deux autres rapports médicaux : un rapport général sur les traumatismes et le vieillissement et un rapport du président et chef du service de radiologie diagnostique du Health Sciences Center de London (Ontario). L'agente des visas a accordé peu de valeur au premier rapport. Quant au deuxième, qui renfermait des renseignements sur l'utilité des radiographies pour déterminer l'âge d'une personne, il mentionnait ce qui suit :

[traduction] La détermination de l'âge osseux par radiographie est généralement effectuée par l'examen du développement et de la fusion des extrémités croissantes des os - les épiphyses.

[...]

La fusion des épiphyses ne survient pas toujours au même âge. Cette variabilité peut être attribuable à de nombreux facteurs qui affectent la croissance en général ou à la maladie.

Le rapport des radiographies de Jasim Yasin révèle qu'il est probable que toutes les épiphyses examinées sont fusionnées, ce qui laisse croire que l'ossature a plus de 25 ans. Toutefois, ce résultat n'est pas nécessairement exact puisque, selon les radiographies, il pourrait s'agir aussi de l'ossature d'une personne n'ayant pas plus de 16 ans.

Il y a évidemment très peu de personnes dont l'âge réel correspond à la limite inférieure de l'âge osseux acceptable.

[16]            Le médecin a souligné qu'il n'avait pas pu vérifier la lecture des radiographies ni l'identification exacte de celles-ci.


[17]            Le fils répondant a ensuite convenu d'obtenir trois examens indépendants pour chacun de ses frères et soeurs. De nouvelles radiographies aux rayons X ont donc été prises et lues par un radiologiste du centre de diagnostic aux rayons X de Damas. Selon lui, l'âge des enfants était le suivant :

Ahlam - 18,5 ans

Jasim - 17 ans

Kasim - 13,5 ans

Monirah - 12,5 ans

[18]            Deux médecins, décrits comme des spécialistes de l'endocrinologie et du diabète, ont examiné chaque enfant, notamment le degré de fusion des cartilages. Chacun a estimé l'âge des enfants comme suit :

Ahlam - entre 17 et 20 ans; entre 17 et 20 ans;

Jasim - entre 16 et 18 ans; entre 16 et 18 ans;

Kasim - entre 13 et 16 ans; entre 13 et 16 ans;

Monirah - entre 13 et 15 ans; 12,5 ans.


[19]            Après avoir reçu cette preuve, les médecins agréés du ministre ont conclu que les nouveaux examens de l'âge osseux étaient totalement différents des premiers qu'ils avaient reçus. Toutes les radiographies ont ensuite été envoyées à Ottawa pour être examinées par un spécialiste.

[20]            L'expert d'Ottawa a conclu ce qui suit :

Ahlam : ossature mature. L'âge minimal de cette maturité est de 18 ans. Ahlam pourrait cependant avoir jusqu'à 28 ans.

Jasim : ossature mature. L'âge minimal de cette maturité est de 18 ans. Les radiographies combinées révèlent que l'âge osseux était de près de 19 ans.

Kasim : plus près de 15 ans, probablement entre 14 ans et 1 mois et 15 ans et 11 mois.

Monirah : plus près de 16 ans, probablement entre 15 ans et 1 mois et 16 ans et 11 mois.

[21]            Au moment des radiographies de 2000, Ahlam était prétendument âgé de 18 ans et un mois, Jasim de 16 ans et 10 mois, Kasim de 13 ans et 3 mois et Monirah de 11 ans et 2 mois.


[22]            En ce qui concerne la conclusion de l'agente des visas selon laquelle Mme Sharief avait donné de fausses indications sur l'âge de ses enfants, il faut se rappeler que, lorsqu'un agent des visas exerce de bonne foi et conformément aux principes de justice naturelle le pouvoir discrétionnaire qui lui est conféré par la loi et qu'il ne se fonde pas sur des considérations étrangères ou non pertinentes, un tribunal saisi d'une demande de contrôle judiciaire ne devrait pas intervenir. Voir Jang c. Canada (Ministre de la Citoyenneté et de l'Immigration), 2001 CAF 312; [2001] A.C.F. no 1575, au paragraphe 12.

[23]            En l'espèce, aucune preuve médicale ne démontrait que Monirah était âgée de 11 ans et 2 mois comme elle le prétendait lorsque les radiographies ont été prises en janvier 2000. Selon le spécialiste d'Ottawa, son âge osseux était plus près de 16 ans. Par ailleurs, deux des trois radiologistes ont conclu que Kasim n'avait pas 13 ans comme on le prétendait, mais plutôt 15 ou 16 ans, comme l'avaient indiqué les endocrinologues. De plus, deux des trois radiologistes qui ont examiné les radiographies de Jasim ont conclu que, contrairement à ce qu'il disait, il était âgé de plus de 16 ans et 10 mois en janvier 2000. Le premier radiologiste avait conclu que les radiographies prises en 1999 révélaient que Jasim avait plus de 25 ans, alors que le spécialiste d'Ottawa était arrivé à la conclusion, sur la foi des radiographies combinées, qu'il avait un âge osseux de 19 ans. Le bassin de Jasim démontrait une maturité osseuse pouvant être atteinte entre 18 et 30 ans. Enfin, Ahlam pouvait bien être âgée de 18 ans comme elle le prétendait, mais elle pouvait tout aussi bien avoir 28 ans selon le radiologiste d'Ottawa. Un radiologiste a conclu qu'elle avait plus de 25 ans.


[24]            À la lumière de cette preuve, je ne peux conclure que la conclusion de l'agente des visas selon laquelle des fausses indications ont été données sur l'âge des enfants reposait sur des considérations non pertinentes ou étrangères. En fait, la décision était étayée par la preuve présentée à l'agente, et on ne prétend pas que cette décision a été prise de mauvaise foi ou en violation des principes de justice naturelle. L'agente des visas aurait bien pu conclure que de fausses indications n'avaient pas été données sur l'âge compte tenu des différentes opinions, mais des éléments de preuve étayaient sa conclusion, et l'on ne m'a pas convaincue qu'elle a commis une erreur susceptible de contrôle en concluant que de fausses indications avaient été données sur l'âge des enfants.

[25]            Pour arriver à cette conclusion, j'ai examiné les prétentions, qui ont été présentées de manière compétente pour le compte de Mme Sharief, selon lesquelles aucune indication n'a de toute façon été donnée sur l'âge et l'agente des visas a commis une erreur susceptible de contrôle en ne tenant pas compte du fait que les cartes d'identité iraquiennes des enfants prouvaient leur date de naissance. En ce qui concerne la première prétention, la production de pièces d'identité a pour but, à mon avis, de démontrer l'exactitude des renseignements qu'elles renferment. Si des renseignements que l'on sait faux ou inexacts figurent dans les documents présentés au bureau des visas, il faut les corriger. Mme Sharief a aussi répété les dates de naissance des enfants dans la demande de résidence permanente qu'elle a signée. Par conséquent, j'estime qu'elle a donné une indication sur l'âge des enfants.


[26]            Comme je ne dispose d'aucune preuve relative à la fiabilité des documents iraquiens, je ne suis pas d'avis que l'agente des visas a commis une erreur susceptible de contrôle en se fiant à l'opinion de médecins qualifiés plutôt qu'aux renseignements figurant sur les cartes d'identité. Bien qu'un décideur soit légalement tenu de prendre en compte les éléments de preuve qui contredisent directement ses conclusions, je ne peux conclure, en l'absence de preuve relative à la fiabilité des documents iraquiens, que les documents en cause en l'espèce établissaient de manière tellement convaincante l'âge des enfants que l'agente a commis une erreur en ne parlant pas explicitement dans sa décision de l'incidence de ces documents. Il est bien établi en droit qu'un décideur n'a pas l'obligation de faire explicitement référence à chaque élément de preuve qui lui est présenté.

L'agente des visas a-t-elle eu tort de rejeter la demande dans son ensemble?

[27]            L'agente des visas a conclu que Kasim et Monirah étaient des personnes à charge qui accompagnaient Mme Sharief. L'âge de celle-ci n'avait aucune importance. D'après ce que l'agente a dit, elle a rejeté la demande de Mme Sharief et celle des deux enfants à charge pour la simple raison que, en donnant de fausses indications sur l'âge de ses enfants, Mme Sharief a enfreint le paragraphe 9(3) de la Loi. Cette disposition prévoit :



9 (3) Toute personne doit répondre franchement aux questions de l'agent des visas et produire toutes les pièces qu'exige celui-ci pour établir que son admission ne contreviendrait pas à la présente loi ni à ses règlements.

9 (3) Every person shall answer truthfully all questions put to that person by a visa officer and shall produce such documentation as may be required by the visa officer for the purpose of establishing that his admission would not be contrary to this Act or the regulations.


[28]            La Cour d'appel fédérale a statué que la violation du paragraphe 9(3) de la Loi peut justifier le refus de délivrer un visa, mais elle n'a pas pour effet de rendre automatiquement le requérant inadmissible. Voir Kang c. Canada (Ministre de l'Emploi et de l'Immigration), [1981] 2 C.F. 807.

[29]            Dans Mundi c. Canada (Ministre de l'Emploi et de l'Immigration), [1986] 1 C.F. 82, la Cour d'appel fédérale s'est demandé ce qui devrait arriver à l'auteur d'une demande qui avait produit un faux document pour prouver l'âge de son fils, Balwinder. La majorité de la Cour a écrit :

Je conviens également que le requérant est responsable d'avoir fourni un faux document et doit supporter toutes les conséquences juridiques découlant du fait qu'il a soumis le document en question comme preuve de l'âge de son fils.

[...]

J'estime toutefois que le défaut de convaincre l'agent des visas relativement à l'âge de Balwinder ne pouvait préjudicier à l'admissibilité du requérant ou à celle de son épouse et de ses filles que si le faux certificat relatif à l'âge de Balwinder présentait aussi un intérêt pour l'admissibilité du requérant.

À cette égard, la seule disposition qu'a invoquée l'agent des visas ou l'avocat de l'intimé pendant les plaidoiries à l'appui de la prétention selon laquelle le requérant n'était pas admissible à titre de membre de la catégorie de personne décrite à l'alinéa 19(2)d) est le paragraphe 9(3), qui est ainsi rédigé :

9. ...

(3) Toute personne doit répondre sincèrement aux questions de l'agent des visas et produire toutes les pièces qu'il réclame pour établir que son admission ne contreviendrait ni à la présente loi ni aux règlements.


On a soutenu que l'appelant ne s'est pas conformé à cette disposition en présentant le faux certificat. Toutefois, même si l'on présume que le requérant savait que le certificat était faux, j'estime que ce fait n'est pertinent qu'en ce qui a trait à l'admissibilité de Balwinder à titre de personne à charge du requérant et qu'il est étranger à la question de savoir si l'admission du requérant lui-même contrevenait aux conditions prévues par la Loi ou au Règlement. De plus, c'est au moment où l'admissibilité est déterminée que joue le paragraphe 19(2). Voir Kang c. Le ministre de l'Emploi et de l'Immigration [[1981] 2 C.F. 807 (C.A.)]. Je ne crois donc pas que le motif invoqué dans la lettre de refus permette de justifier ce refus. [non souligné dans l'original]

[30]            Si j'applique ces principes aux faits de l'espèce, toute fausse indication concernant l'âge d'Ahlam et de Jasim était pertinente au regard de leur admissibilité, mais non au regard de l'admissibilité de Mme Sharief, de Kasim et de Monirah. Comme dans Mundi, les motifs donnés par l'agente des visas ne pouvaient pas justifier le rejet de la demande de Mme Sharief.

[31]            L'affaire Manigat c. Canada (Ministre de la Citoyenneté et de l'Immigration), [2000] A.C.F. no 1052 (1re inst.), qui est invoquée par le ministre, est différente. Dans cette affaire, on a considéré qu'une épouse n'était pas admissible parce qu'elle n'avait pas convaincu l'agent des visas de son admissibilité en démontrant qu'elle et toutes les personnes à sa charge n'appartenaient pas à une catégorie de personnes non admissibles. En l'espèce par contre, l'admissibilité de Mme Sharief et de ses deux plus jeunes enfants n'a pas été mise en doute. La seule question qui était soulevée concernait l'incidence des fausses indications.

[32]            Par conséquent, l'agente des visas a eu tort de rejeter la demande dans son ensemble pour les motifs qu'elle a donnés. La demande devrait donc être renvoyée à un autre agent des visas pour nouvel examen.


[33]            Les avocats n'ont proposé aucune question à des fins de certification et, à mon avis, la présente affaire ne soulève aucune question devant être certifiée.

ORDONNANCE

[34]            LA COUR ORDONNE QUE

1.          la demande de contrôle judiciaire soit accueillie et que la décision rendue par l'agente des visas en date du 8 janvier 2001 soit annulée;

2.          l'affaire soit renvoyée à un autre agent des visas pour nouvel examen.

                                                                                                                        « Eleanor R. Dawson »         

ligne

                                                                                                                                                      Juge                          

Traduction certifiée conforme

Suzanne M. Gauthier, trad. a., LL.L.


                                               COUR FÉDÉRALE DU CANADA

                                          SECTION DE PREMIÈRE INSTANCE

                                            AVOCATS INSCRITS AU DOSSIER

DOSSIER :                                                   IMM-423-01

INTITULÉ :                                                  KAHKIJA SHARIEF

- et -

LE MINISTRE DE LA CITOYENNETÉ

ET DE L'IMMIGRATION

LIEU DE L'AUDIENCE :                          Toronto (Ontario)

DATE DE L'AUDIENCE :                        Le jeudi 30 janvier 2003

MOTIFS DE L'ORDONNANCE

ET ORDONNANCE :                                Madame le juge Dawson

DATE DES MOTIFS :                               Le jeudi 6 mars 2003

COMPARUTIONS :

Mendel Green                                                                  POUR LA DEMANDERESSE

Alexis Singer                                                                      POUR LE DÉFENDEUR

AVOCATS INSCRITS AU DOSSIER :

Mendel Green                                                                  POUR LA DEMANDERESSE

Green and Spiegel

Avocats

390, rue Bay

Bureau 2800

Toronto (Ontario) M5H 2Y2

Morris Rosenberg                                                              POUR LE DÉFENDEUR

Sous-procureur général du Canada

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