Date : 20010131
Dossier : IMM-2350-00
Entre :
SYED ANJUM AHMED
demandeur
et
LE MINISTRE DE LA CITOYENNETÉ
ET DE L'IMMIGRATION
défendeur
MOTIFS DE L'ORDONNANCE ET ORDONNANCE
(Prononcés à l'audience le 23 janvier 2001,
à Vancouver (Colombie-Britannique))
Le juge Muldoon
[1] J'ai lu ce dossier hier soir jusqu'à ce que je m'endorme et, à mon réveil ce matin, je l'ai lu à nouveau. Je suis arrivé à la conclusion que ce dossier est traité au plus serré, tellement qu'il serait imprudent de rejeter la demande. Je vais donc accueillir la demande, ce qui donnera au défendeur le temps de réexaminer la question.
[2] Je ne veux pas dire ici que le défendeur doit changer d'avis. Je ne peux savoir ce que le défendeur fera, puisque la Cour n'est pas le défendeur. Mais la Cour doit être convaincue que le défendeur a fait tout ce qu'il devait faire et examiné tout ce qu'il fallait examiner, ce qui n'est pas le cas.
[3] On trouve dans ce dossier trop d'occasions où l'agent des visas déclare qu'il n'a pas examiné ceci, n'a pas fait cela; il y en a vraiment trop pour qu'on puisse se sentir à l'aise. C'est trop serré. Il pourrait s'agir d'une affaire à trancher au fil du rasoir et, dans un tel cas, il semble que l'agent des visas devait examiner l'impact du paragraphe 11(3). Il est vrai que ce texte n'est pas impératif : « L'agent des visas peut délivrer » , ou « refuser un visa » , selon la rédaction du paragraphe 11(3) :
« ... peut
a) délivrer un visa d'immigrant à un immigrant qui n'obtient pas le nombre de points d'appréciation requis par les articles 9 ou 10 ou qui ne satisfait pas aux exigences des paragraphes (1) ou (2), ou
b) refuser un visa d'immigrant à un immigrant qui obtient le nombre de points d'appréciation requis par les articles 9 ou 10,
s'il est d'avis qu'il existe de bonnes raisons de croire que le nombre de points d'appréciation obtenu ne reflète pas les chances de cet immigrant particulier et des personnes à sa charge de réussir leur installation au Canada et que ces raisons ont été soumises par écrit à un agent d'immigration supérieur et ont reçu l'approbation de ce dernier.
[4] C'est là le droit et, il semble qu'on ne l'a pas respecté. Nous avons donc une bonne raison d'infirmer la décision ou de l'annuler.
[5] Il suffit que l'examen soit sérieux. Si c'est les cas, il est probable qu'on ne pourra le contester. Mais il faut être convaincu que ce qui devait être fait a été fait. À ce sujet, la Cour prend note de la décision de Madame le juge Reed dans l'affaire Paramveer Jain c. Ministre de la Citoyenneté et de l'Immigration, où elle déclare, aux paragraphes 4 et 5 :
« L'avocat du demandeur soutient que l'agent des visas n'a pas évalué celui-ci au regard de toutes les professions qu'il faisait valoir, en particulier celle de technologue en chimie appliquée. Le technologue en chimie appliquée a des responsabilités plus lourdes qu'un technicien en chimie appliquée. Il a reconnu toutefois qu'une évaluation au regard de cette profession pourrait se traduire par une note totale ne dépassant pas 67 points, et non par le minimum de 70 points requis pour la délivrance du visa.
Il se fonde sur la décision Uy c. Canada (Ministre de l'Emploi et de l'Immigration) (1991), 12 Imm. L.R. (2d) 172 (C.A.F.), pour soutenir que quand bien même une réévaluation ne produirait pas un total de 70 points, il est des cas où il conviendrait de renvoyer l'affaire pour nouvelle instruction de la demande, parce que les agents des visas tiennent du paragraphe 11(3) du Règlement sur l'immigration le pouvoir discrétionnaire d'accorder le visa même si le total des points d'appréciation est inférieur à 70 points. »
Il me semble qu'à tout événement, cela est bien suffisant pour la Cour.
[6] On a demandé à l'agent des visas s'il avait tenu compte de cet aspect et il a déclaré ceci : [traduction] « L'ai-je fait? Non, je ne l'ai pas fait. » Il tombe donc sous l'emprise du lion judiciaire bien connu que le juge Reed a traqué et sur lequel elle a mis le grappin dans Paramveer Jain.
[7] Il n'y a donc pas lieu que la Cour se plonge dans la masse de détails de la présente affaire. La Cour est convaincue qu'on n'a pas fait une évaluation suffisante en l'instance et qu'il y a lieu de renvoyer l'affaire à un agent des visas différent pour une évaluation appropriée. La Cour n'a pas à se préoccuper en l'instance de savoir si le demandeur aura gain de cause ou non. Il peut avoir gain de cause ou non, mais il a droit à une évaluation appropriée dans laquelle l'agent des visas tient compte des facteurs appropriés.
ORDONNANCE
La demande de Syed Anjum Ahmed est accueillie, la décision de l'agent des visas est annulée et la demande est renvoyée à un agent des visas différent de la même ambassade pour qu'on l'évalue correctement selon le droit applicable.
« F.C. Muldoon »
J.C.F.C.
Le 31 janvier 2001
Vancouver (Colombie-Britannique)
Traduction certifiée conforme
Suzanne M. Gauthier, LL.L., Trad. a.
COUR FÉDÉRALE DU CANADA
SECTION DE PREMIÈRE INSTANCE
AVOCATS INSCRITS AU DOSSIER
No DU GREFFE : IMM-2350-00
INTITULÉ DE LA CAUSE : Syed Anjum Ahmed
c.
MCI
LIEU DE L'AUDIENCE : Vancouver (Colombie-Britannique)
DATE DE L'AUDIENCE : le 23 janvier 2001
MOTIFS DE L'ORDONNANCE
ET ORDONNANCE PAR : MONSIEUR LE JUGE MULDOON
DATE DES MOTIFS : le 31 janvier 2001
ONT COMPARU :
M. Peter A. Chapman pour le demandeur
Mme Emilia Pech pour le défendeur
AVOCATS INSCRITS AU DOSSIER :
Chapman & Company
Avocats et procureurs
Vancouver (C.-B.) pour le demandeur
Morris Rosenberg
Sous-procureur
général du Canada pour le défendeur