Dossier : IMM‑3311‑19
Référence : 2020 CF 1094
[TRADUCTION FRANÇAISE]
Ottawa (Ontario), le 27 novembre 2020
En présence de monsieur le juge McHaffie
ENTRE :
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ANIKO PAZMANDI
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demanderesse
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et
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LE MINISTRE DE LA CITOYENNETÉ ET DE L’IMMIGRATION
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défendeur
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JUGEMENT ET MOTIFS
I.
Aperçu
[1]
Aniko Pazmandi demande à la Cour d’infirmer la décision par laquelle la Section d’appel des réfugiés (SAR) a rejeté sa demande d’asile. Cette demande était fondée sur sa crainte d’être persécutée en raison de son ethnicité rom et sur sa peur de subir un préjudice de la part de son père, qui l’a violée lorsqu’elle était adolescente. La SAR a conclu que Mme Pazmandi n’avait pas adéquatement prouvé son ethnicité rom, que les incidents qu’elle a invoqués pour attester son expérience d’une discrimination anti‑rom soulevaient des préoccupations en matière de crédibilité, que la Hongrie l’avait protégée à la suite de l’agression sexuelle, et que la preuve établissant que son père continuerait de tenter de la trouver pour lui nuire si elle repartait était insuffisante. La SAR a donc conclu qu’elle n’était ni une réfugiée au sens de la Convention ni une personne à protéger.
[2]
Mme Pazmandi soutient que chacune de ces conclusions était déraisonnable. Elle ajoute que la SAR n’a pas fait une évaluation des « raisons impérieuses »
au titre de l’article 108 de la Loi sur l’immigration et la protection des réfugiés, LR 2001, c 27 [LIPR] et qu’elle n’a pas dûment tenu compte des Directives numéro 4 du président de la Commission de l’immigration et du statut de réfugié : Revendicatrices du statut de réfugié craignant d’être persécutées en raison de leur sexe [Directives concernant la persécution fondée sur le sexe] lorsqu’elle a évalué la crédibilité.
[3]
J’estime que les conclusions de la SAR concernant la preuve de son ethnicité rom et le risque que son père lui fasse du mal étaient raisonnables, et que ces questions sont déterminantes au regard de la demande d’asile présentée par Mme Pazmandi au titre des articles 96 et 97 de la LIPR, et donc de la demande de contrôle judiciaire. Je conclus également que, dans les circonstances, la SAR n’était pas tenue de faire une évaluation au titre de l’article 108 de la LIPR.
[4]
Par conséquent, la demande de contrôle judiciaire est rejetée.
II.
Questions à trancher et norme de contrôle
[5]
Mme Pazmandi a soulevé sept motifs pour contester la décision de la SAR. Ces motifs visaient i) les conclusions de la SAR en matière de crédibilité; ii) ses conclusions en ce qui touchait son ethnicité et le risque auquel elle serait exposée à son retour en Hongrie; iii) la prise en compte de l’absence de documents corroborants; iv) l’analyse sur la protection de l’État; v) le défaut d’examiner la question de la discrimination cumulative équivalant à de la persécution; vi) le défaut d’évaluer convenablement si elle était une personne à protéger au sens de l’article 97 de la LIPR; vii) le défaut de faire une évaluation des raisons impérieuses au titre de l’article 108 de la LIPR. Certains de ces motifs sont interreliés. À mon avis, les questions déterminantes en l’espèce peuvent être formulées comme suit :
La SAR a‑t‑elle eu tort de conclure que Mme Pazmandi n’avait pas établi son ethnicité rom selon la prépondérance des probabilités?
La SAR a‑t‑elle commis une erreur lorsqu’elle a conclu que Mme Pazmandi n’avait pas établi que son père tenterait de lui nuire si elle devait retourner en Hongrie?
La SAR était‑elle tenue de faire une évaluation des raisons impérieuses au titre de l’article 108 de la LIPR?
[6]
Il n’est pas contesté que la décision de la SAR est soumise, à l’égard de ces questions, à la norme du caractère raisonnable : Canada (Ministre de la Citoyenneté et de l’Immigration) c Vavilov, 2019 CSC 65 aux para 16‑17, 23‑25. L’application de cette norme oblige la Cour à « tenir compte du résultat de la décision administrative eu égard au raisonnement sous‑jacent à celle‑ci afin de s’assurer que la décision dans son ensemble est transparente, intelligible et justifiée »
: Vavilov, au para 15. Une décision raisonnable doit être « fondée sur une analyse intrinsèquement cohérente et rationnelle »
et être « justifiée au regard des contraintes juridiques et factuelles auxquelles le décideur est assujetti »
: Vavilov, aux para 85, 90, 99, 105‑107.
[7]
Lorsqu’elle fait cette évaluation, la Cour doit se garder de pondérer ou d’évaluer à nouveau la preuve, et ne doit pas revenir sur les conclusions factuelles en l’absence de circonstances exceptionnelles : Vavilov, au paragraphe 125. Néanmoins, l’arrêt Vavilov souligne également qu’une décision doit être raisonnable à la lumière de la preuve versée au dossier, de la trame factuelle générale ayant une incidence sur la décision et des observations des parties : Vavilov, aux paragraphes 126‑128.
III.
Analyse
A.
La SAR a raisonnablement conclu que l’ethnicité rom n’avait pas été établie.
(1)
La preuve de Mme Pazmandi concernant son ethnicité rom
[8]
Suivant le premier motif fondant la demande d’asile de Mme Pazmandi, son ethnicité rom l’exposait à un grave risque de discrimination allant jusqu’à la persécution. Elle affirmait qu’elle était d’ethnicité rom parce que sa mère était rom, ce qui est fondamental au regard de ce motif.
[9]
Je souligne en passant que Mme Pazmandi se décrit dans ses observations comme étant [traduction] « à moitié rom »
, car son père n’est pas rom. Cependant, elle a affirmé qu’elle [traduction] « passe pour une Rom »
et a invoqué la preuve de discrimination subie par les personnes de cette ethnicité. La question de savoir si Mme Pazmandi était [traduction] « rom »
ou [traduction] « à moitié rom »
n’a eu aucune incidence, que ce soit dans la décision de la SPR ou dans celle de la SAR. Je mentionnerai donc simplement sa revendication de l’ethnicité rom.
[10]
La preuve de Mme Pazmandi portant qu’elle était rom reposait principalement sur son propre témoignage. Elle a également mentionné deux autres éléments de preuve : deux photographies produites à l’audition de sa demande d’asile, provenant selon elle de la page Facebook de sa mère, et le nom de famille de sa mère, Varga, connu selon Mme Pazmandi comme étant un nom rom.
[11]
En réponse aux questions de la SPR, Mme Pazmandi a déclaré qu’elle serait perçue comme une Rom en raison de son apparence, de son élocution et de sa façon de s’habiller. Priée toutefois de préciser ce qu’elle entendait par son élocution et son apparence, elle a répondu que c’était surtout sa manière de s’habiller. Questionnée par la SPR pour savoir si elle s’était procuré des papiers d’identité auprès de l’administration autonome rom de sa ville natale, elle a répondu qu’elle avait oublié de demander. Mme Pazmandi a également décrit durant son témoignage des événements en Hongrie durant lesquels elle avait été victime de discrimination et de persécution en raison de son ethnicité.
(2)
La conclusion de la SAR portant que Mme Pazmandi n’avait pas établi son ethnicité
[12]
La SAR a souligné que Mme Pazmandi était représentée par un conseil et qu’elle avait fourni des documents concernant son identité nationale et d’autres événements, montrant ainsi qu’elle était consciente de la nécessité de présenter des documents corroborants. La SAR a mentionné des éléments de preuve corroborants à même d’établir son ethnicité rom et qui auraient pu être fournis, comme des déclarations d’amis ou de parents, notamment de son conjoint de fait, ou des documents provenant d’organismes en Hongrie.
[13]
La SAR a examiné les photographies Facebook et a souscrit à l’opinion de la SPR selon laquelle elles ne pouvaient se voir accorder aucun poids, attendu a) qu’elles n’étaient accompagnées d’aucune donnée d’identification ni de renseignement provenant de la page Facebook sur laquelle elles étaient soi‑disant affichées, et b) qu’il était impossible de déterminer en les regardant « qui est cette personne et si elle est d’origine ethnique rom ».
La SAR a également souscrit à l’opinion de la SPR selon laquelle l’allégation portant que Varga était un nom assurément rom contredisait la preuve sur les conditions dans le pays indiquant qu’il n’était pas facile de distinguer les noms hongrois roms et non roms, et que Varga ne figurait pas sur la liste de noms associés à la population rom.
[14]
Quant au témoignage de Mme Pazmandi, la SAR a relevé des préoccupations touchant à sa crédibilité, puisqu’elle n’a pas pu se souvenir d’un incident de persécution significatif sans exhortation, qu’elle n’a pas mentionné dans l’exposé circonstancié de son formulaire Fondement de la demande d’asile (FDA) un incident avec les gardes hongrois qu’elle a décrit, et qu’elle n’avait mentionné ni les gardes hongrois ni la moindre crainte fondée sur son ethnicité rom durant son entrevue au point d’entrée (PE).
[15]
Lorsqu’elle a résumé la question, la SAR a souligné que Mme Pazmandi n’avait pas déposé de preuve corroborante probante devant elle ni devant la SPR, et que son propre témoignage manquait de crédibilité. La SAR a donc conclu que Mme Pazmandi n’avait pas établi son identité rom selon la prépondérance des probabilités.
(3)
La conclusion de la SAR était raisonnable.
a)
Les conclusions concernant les photographies et le nom de famille
[16]
Je ne vois aucune raison de revenir sur la conclusion factuelle de la SAR portant que les photographies n’établissaient pas qui était la personne qui posait, ni si elle était d’ethnicité rom. Mme Pazmandi soutient qu’aucune raison ne justifiait de douter de sa preuve portant que les photographies étaient de sa mère. Cependant, en plus d’ignorer la question de savoir si les photographies montraient que la personne qui posait était rom, peu importe de qui il s’agissait, l’argument de Mme Pazmandi crée une confusion quant à l’objet de la preuve corroborante. Les photographies ont été déposées pour corroborer les déclarations mêmes de Mme Pazmandi, c’est‑à‑dire pour appuyer la crédibilité de son affirmation portant que sa mère était rom. Cependant, comme les photographies elles‑mêmes ne comportaient aucun renseignement identificatoire, elles ne « corroboraient »
la preuve de Mme Pazmandi que dans la mesure où celle‑ci était jugée digne de foi, ce qui revient à tourner en rond. La conclusion de la SAR portant que ces photographies ne présentaient aucune valeur corroborante indépendante n’était pas déraisonnable.
[17]
Il en va de même du nom de Mme Varga, qui, d’après la preuve objective, n’est pas associé aux Roms en Hongrie. Encore une fois, la seule preuve établissant que Mme Pazmandi était rom ou qu’elle serait reconnue comme telle en raison du nom de sa mère était son propre témoignage, que la référence au nom était censée corroborer.
b)
L’absence de preuve corroborante
[18]
Mme Pazmandi soutient qu’il était déraisonnable de la part de la SAR de s’appuyer sur l’absence de preuve corroborante pour douter de son témoignage. Elle invoque l’arrêt Maldonado souvent cité à l’appui du principe suivant : « Quand un requérant jure que certaines allégations sont vraies, cela crée une présomption qu’elles le sont, à moins qu’il n’existe des raisons d’en douter »
: Maldonado c Canada (Ministre de l’Emploi et de l’Immigration), [1980] 2 CF 302 (CA).
[19]
S’inspirant de la présomption de l’arrêt Maldonado, une jurisprudence découlant de la décision rendue par le juge Teitelbaum dans la décision Ahortor, a conclu que l’absence de preuve corroborante ne justifie pas en soi de ne pas croire les allégations d’un demandeur d’asile : Ahortor c Canada (Ministre de l’Emploi et de l’Immigration), [1993] ACF no 705 aux para 35‑37, 45, 50; voir, par exemple, Amarapala c Canada (Ministre de la Citoyenneté et de l’Immigration), 2004 CF 12 au para 10; Poshteh c Canada (Ministre de la Citoyenneté et de l’Immigration), 2005 CF 1034 au para 7; Dundar c Canada (Citoyenneté et Immigration), 2007 CF 1026 aux para 19‑22; Ndjavera c Canada (Citoyenneté et Immigration), 2013 CF 452 aux para 6‑7; Nur c Canada (Citoyenneté et Immigration), 2019 CF 951 aux para 9‑10.
[20]
Ces principes, toutefois, coexistent avec l’article 106 de la LIPR et l’article 11 des Règles de la Section de la protection des réfugiés, DORS/2012‑256 [Règles de la SPR], qui ont été adoptés après l’arrêt Maldonado et la décision Ahortor : Ismaili c Canada (Citoyenneté et Immigration), 2014 CF 84 aux para 31‑35; Amarapala, aux para 8‑10; Dundar, aux para 19‑20; Dirie c Canada (Citoyenneté et Immigration), 2015 CF 1052 aux para 28‑31.
[21]
Selon l’article 106, la SPR prend en compte, s’agissant de crédibilité, les papiers d’identité du demandeur d’asile et(ou) l’explication qu’il avance pour justifier le fait qu’il n’en est pas muni :
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Compte tenu de l’exigence expressément prévue à l’article 106, il est difficile de voir comment les principes tirés de l’arrêt Maldonado et de la décision Ahortor peuvent s’appliquer, sans être modifiés, aux questions d’identité : voir par exemple, Katsiashvili c Canada (Citoyenneté et Immigration), 2016 CF 622 aux para 18‑20; Najam c Canada (Ministre de la Citoyenneté et de l’Immigration), 2004 CF 425 aux para 14‑16, 25.
[23]
Cependant, bien que la SAR et les parties aient mentionné l’[traduction] « identité ethnique »
et [traduction] « l’identité de Rom »
de Mme Pazmandi, je ne crois pas que ce soient là des aspects de « l’identité »
au sens où ce terme est employé à l’article 106. L’« identité »
de Mme Pazmandi, c’est‑à‑dire son identité personnelle et(ou) nationale, a été prouvée par des documents, notamment son passeport. Même si l’ethnicité, comme la religion, la sexualité ou d’autres caractéristiques personnelles fondamentales peuvent être considérées comme des composantes de l’identité, je ne crois pas que ces caractéristiques relèvent de l’« identité »
dont il est question à l’article 106. Cette disposition semble plutôt viser l’identité personnelle/nationale, la « pierre d’assise du régime canadien d’immigration »
: Bah c Canada (Citoyenneté et Immigration), 2016 CF 373; Kosta c Canada (Ministre de la Citoyenneté et de l’Immigration), 2005 CF 994 au para 26; Elmi c Canada (Citoyenneté et Immigration), 2008 CF 773 aux para 4, 22; Najam, au para 16.
[24]
L’article 11 des Règles de la SPR va au‑delà de l’identité, et prévoit qu’un demandeur d’asile doit fournir des documents « qui permettent d’établir son identité et les autres éléments de sa demande d’asile »
; s’il n’a pas pu le faire, il doit en donner la raison :
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Contrairement à l’article 106, l’article 11 des Règles de la SPR ne précise pas que la possession de documents acceptables doit être prise en compte dans l’évaluation de la crédibilité. Ce facteur demeure pourtant pertinent au regard de l’obligation pour un demandeur d’asile de prouver le bien‑fondé de sa demande. Aux paragraphes 31 à 55 de la décision qu’elle a rendue dans Ismaili, la juge Strickland de notre Cour a considéré de manière réfléchie le lien existant entre le principe issu de l’arrêt Maldonado et l’article 11 des Règles de la SPR. S’appuyant sur cette analyse, elle a approfondi la question dans la décision Luo c Canada (Citoyenneté et Immigration), 2019 CF 823 aux para 18‑22, et dégagé de la jurisprudence les principes suivants :
la preuve sous serment d’un demandeur d’asile est présumée véridique à moins qu’il n’existe des raisons de douter de sa véracité;
il est erroné de tirer une conclusion défavorable en matière de crédibilité en s’appuyant uniquement sur l’absence de preuve corroborante;
cependant, lorsqu’il existe une raison valide de douter de la crédibilité du demandeur d’asile, l’absence de preuve corroborante qui n’est pas expliquée de manière raisonnable peut être validement prise en compte dans l’évaluation de la crédibilité;
malgré le principe de véracité, une conclusion défavorable en matière de crédibilité peut être tirée si le demandeur d’asile ne produit pas la preuve dont le décideur estime raisonnablement qu’elle aurait pu être obtenue dans les circonstances, et qu’aucune explication raisonnable ne vient justifier son défaut de le faire.
[26]
La juge Strickland a résumé en ces termes les deux derniers points susmentionnés : « [L]e décideur […] n’est fondé à prendre en considération la non‑production de documents corroborants [1] que s’il a des motifs légitimes de douter de la crédibilité du demandeur d’asile, ou [2] s’il n’admet pas les explications par lesquelles celui‑ci essaie de justifier cette non‑production alors qu’il serait raisonnable de penser qu’il peut se procurer les documents en question ».
[J’ai rajouté les numéros] : Luo, au para 21. Je note que pour que la deuxième situation trouve à s’appliquer, deux conditions doivent être remplies : premièrement, le décideur doit raisonnablement conclure que la preuve documentaire devait pouvoir être obtenue, et, deuxièmement, il doit raisonnablement rejeter l’explication du demandeur d’asile quant à la raison pour laquelle il ne s’est pas procuré les documents en question. Ces limites empêchent l’exception de saper indûment la règle générale portant qu’il est erroné de tirer une conclusion défavorable en matière de crédibilité uniquement en raison de l’absence de preuve corroborante.
[27]
Chacune des deux situations décrites par la juge Strickland est applicable en l’espèce. La SAR a soulevé des préoccupations liées à la crédibilité de Mme Pazmandi en raison de sa preuve décrivant des incidents de persécution. Elle a également expliqué pourquoi elle s’attendait à ce que des éléments de preuve corroborants puissent être obtenus et pourquoi elle n’a pas accepté l’explication par laquelle Mme Pazmandi a tenté de justifier le fait qu’elle ne s’en était pas procurés. Cette dernière soutient que chacune de ces évaluations était en soi déraisonnable. Je ne suis pas de cet avis.
[28]
Je ne puis accepter l’argument de Mme Pazmandi portant que la SAR a considéré sa preuve comme un [traduction] « test de mémoire »
, en contravention du principe énoncé dans la décision Sheikh c Canada (Ministre de la Citoyenneté et de l’Immigration), 2000 CanLII 15200 au para 28. La SAR a plutôt conclu à l’absence de crédibilité en raison des contradictions relevées entre le témoignage que Mme Pazmandi a fourni à son audience devant la SPR et ses précédents comptes rendus personnels de persécution ethnique. Par exemple, ce n’est que lorsque la SPR l’a encouragée par ses questions que Mme Pazmandi a mentionné le seul incident dans lequel elle prétendait avoir été physiquement agressée en raison de son ethnicité rom, elle n’a pas évoqué de crainte de persécution ethnique durant son entrevue au PE, et l’exposé circonstancié de son FDA ne faisait aucune mention de l’incident avec les gardes hongrois soulevé à l’audience. Même s’il est possible que chacun de ces motifs ait été insuffisant à lui seul pour raisonnablement fonder le rejet de toute la preuve de Mme Pazmandi, je suis convaincu qu’ils suffisent cumulativement à constituer une « raison valide de douter »
de sa preuve, ce qui justifie de prendre en compte l’absence de corroboration.
[29]
Je n’accepte pas non plus l’argument de Mme Pazmandi selon lequel la SAR n’a pas dûment tenu compte des Directives concernant la persécution fondée sur le sexe au moment d’évaluer sa crédibilité. La SAR a fait un examen approfondi des directives en question, des antécédents personnels de Mme Pazmandi en tant que survivante d’une agression sexuelle et du contexte de l’audience devant la SPR. Selon la SAR, notre Cour a reconnu qu’« [i]l n’est pas possible de traiter les [Directives concernant la persécution fondée sur le sexe] comme si elles corroboraient un quelconque élément de preuve étayant la thèse de la persécution fondée sur le sexe, de sorte que le seul fait de témoigner suffise à prouver la véracité des propos tenus »
: Newton c Canada (Ministre de la Citoyenneté et de l’Immigration), 2000 CanLII 15385 au para 18. Même si, comme l’affirme Mme Pazmandi, les directives en question reconnaissent que l’âge, la nervosité causée par le témoignage, et les conditions psychologiques associées au trauma peuvent, entre autres facteurs, affecter la capacité du demandeur d’asile à considérer des événements et à s’en souvenir pendant une audience, cela ne veut pas dire que des conclusions touchant à la crédibilité ne peuvent raisonnablement tenir compte des omissions dans le témoignage, des comparaisons entre témoignages, de l’exposé circonstancié du FDA et de l’entrevue au point d’entrée. Encore une fois, même s’il aurait pu être déraisonnable de s’appuyer exclusivement par exemple sur le fait que Mme Pazmandi a dû être encouragée à fournir des détails sur l’agression physique, la décision de la SAR reposait sur une évaluation cumulative de la crédibilité dont cet élément faisait raisonnablement partie.
[30]
S’agissant de l’évaluation de la SAR portant qu’il était raisonnable de s’attendre à ce que des documents corroborants soient présentés, Mme Pazmandi soutient qu’il était déraisonnable de la part de la SAR de présumer qu’elle pouvait obtenir une confirmation de l’administration autonome rom en Hongrie, étant donné que lorsqu’elle a quitté le pays, elle avait 18 ans et vivait dans un foyer de groupe. Cet argument passe sous silence la preuve de Mme Pazmandi selon laquelle elle n’a pas obtenu les documents en question parce qu’elle avait [traduction] « oublié »
, et non parce qu’elle n’avait pas été en mesure de le faire. Mme Pazmandi fait valoir de même qu’il était déraisonnable de la part de la SAR de s’attendre à ce qu’elle obtienne des éléments de preuve de sa famille, étant donné qu’elle n’avait pas de contact avec des parents en Hongrie. Dans la mesure où une telle suggestion peut être dégagée des motifs de la SAR, elle concorderait avec la preuve de Mme Pazmandi portant qu’elle a deux frères et une belle‑sœur en Hongrie, et elle n’a pas déclaré qu’elle ne pouvait pas les contacter, seulement qu’elle ne l’avait pas fait.
[31]
Plus fondamentalement, même si la SAR a mentionné diverses sources potentielles d’éléments de preuve corroborants que Mme Pazmandi aurait pu invoquer, sa préoccupation tenait à l’absence de la moindre preuve corroborante, plutôt qu’à celle d’éléments précis en la matière. La SAR a noté qu’« [i]l est raisonnable de penser qu’elle aurait été en mesure d’obtenir des documents tels que des lettres, des courriels ou des affidavits de membres de la famille, d’amis ou d’organisations en Hongrie pour corroborer son identité ethnique »
et que Mme Pazmandi « avait accès à des témoins susceptibles de corroborer son identité, c’est‑à‑dire son conjoint de fait et les membres de la famille de celui‑ci ».
Ce n’est pas une évaluation déraisonnable dans les circonstances. Les arguments par lesquels Mme Pazmandi soulève des préoccupations particulières concernant la [traduction] « famille […] en Hongrie »
ou les documents de l’administration autonome rom ne remettent pas en cause l’idée plus générale selon laquelle elle n’a présenté aucune preuve corroborante alors qu’il aurait été raisonnable de s’attendre à ce qu’elle le fasse, et qu’elle n’a fourni aucune explication pour justifier son incapacité à le faire.
[32]
Je conclus donc qu’il était raisonnablement loisible à la SAR de s’appuyer sur l’absence de preuve corroborante et sur ses préoccupations quant à la crédibilité du témoignage de Mme Pazmandi, lorsqu’elle a globalement déterminé que celle‑ci n’avait pas adéquatement établi son ethnicité rom.
[33]
L’établissement de son ethnicité rom était essentiel aux fins de la demande d’asile de Mme Pazmandi fondée sur cette ethnicité, notamment pour ce qui est des arguments portant qu’elle serait exposée à une discrimination équivalant à de la persécution si elle devait retourner en Hongrie, ou qu’elle était une personne à protéger en raison de cette ethnicité. Sont également dépourvus de pertinence les arguments de Mme Pazmandi quant à l’adéquation de la protection de l’État offerte à la population rom en Hongrie contre la persécution dont celle‑ci est victime en raison de son ethnicité.
B.
La SAR a raisonnablement conclu que la probabilité que le père lui fasse du mal n’avait pas été établie.
[34]
Mme Pazmandi vivait avec son père, un Hongrois non rom, après que ses parents se sont séparés lorsqu’elle était enfant. Son père l’a violée lorsqu’elle avait 15 ans. (Mme Pazmandi a déclaré durant son témoignage qu’elle avait 14 ans, mais d’après sa date de naissance, elle était âgée de 15 ans au moment de l’agression en mars 2014. Cette différence ne prête pas à conséquence.) Cette agression a eu de graves conséquences sur la vie de Mme Pazmandi. Elle a quitté l’école, a déménagé de chez son père pour aller vivre chez sa belle‑sœur, et a vécu ensuite dans la rue et dans un foyer de l’État jusqu’à son départ pour le Canada.
[35]
Mme Pazmandi a signalé l’agression sexuelle à la police le jour suivant. Elle n’a été orientée vers un médecin que le lendemain, et vers un psychologue des mois après. M. Pazmandi a été accusé de l’agression et poursuivi en justice, sans toutefois être déclaré coupable. Vu ces événements et la manière dont elle a été traitée par les autorités, qui n’auraient pas cru sa version des faits, Mme Pazmandi a eu le sentiment que l’État ne l’avait pas adéquatement protégée, et elle nourrissait une méfiance à l’égard de la police hongroise. Par ailleurs, bien que l’État ait suspendu les droits de garde et d’éducation de M. Pazmandi et organisé le placement de sa fille dans un foyer, il n’a pris aucune disposition ni n’a informé Mme Pazmandi quant à la possibilité d’obtenir une ordonnance de non‑communication contre son père.
[36]
Dans sa demande d’asile, Mme Pazmandi affirmait craindre que son père ne lui fasse du mal et ne prenne son enfant, né au Canada, si elle retournait en Hongrie. Elle a déclaré durant son témoignage qu’après l’agression sexuelle, son père ne la laissait pas tranquille. Il a tenté en particulier de l’approcher et de lui parler un certain nombre de fois, mais elle prenait la fuite. Elle lui a parlé pour la dernière fois en 2015, il l’a alors saisie par le bras, mais elle a encore une fois réussi à s’échapper. Elle l’a vu pour la dernière fois dans la rue deux mois avant son départ pour le Canada, mais il ne l’a pas approchée cette fois‑là.
[37]
La SAR tout comme la SPR ont accepté la preuve de Mme Pazmandi concernant l’agression sexuelle. Cependant, la SAR a conclu qu’elle avait obtenu une protection de l’État après l’agression, malgré l’acquittement de son père, ajoutant que la preuve établissant que M. Pazmandi avait continué de tenter de la trouver pour lui nuire d’une quelconque façon était insuffisante. Mme Pazmandi conteste chacune de ces conclusions.
[38]
Je souligne à titre préliminaire que l’évaluation d’une demande d’asile au titre des articles 96 ou 97 de la LIPR est un exercice prospectif. « La question que soulève la revendication du statut de réfugié, en effet, n’est pas celle de savoir si le revendicateur a déjà eu, dans le passé, des motifs de craindre la persécution, mais bien celle de savoir s’il a aujourd’hui, au moment où l’on statue sur sa revendication, des motifs sérieux de craindre d’être persécuté dans l’avenir »
: Mileva c Canada (Ministre de l’Emploi et de l’Immigration), [1991] 3 CF 398 (CA) au para 8; AB c Canada (Citoyenneté et Immigration), 2015 CF 450 au para 29. Il en va de même de l’évaluation du caractère adéquat de la protection de l’État : Moran Gudiel c Canada (Citoyenneté et Immigration), 2015 CF 902 au para 30. L’évaluation par la SAR de la question de savoir si Mme Pazmandi a reçu une protection de l’État adéquate en réponse à l’agression sexuelle particulière commise par son père n’est donc pertinente que dans la mesure où elle établit la probabilité que les autorités hongroises la protègent à l’avenir contre lui. La SAR n’a tiré aucune conclusion à cet égard, puisqu’elle a déterminé que Mme Pazmandi n’avait pas prouvé que son père représentait une menace, déclarant que « la SAR conclut qu’il n’est pas nécessaire d’évaluer si l’État est en mesure de la protéger dans sa situation actuelle ».
[39]
En fin de compte, les arguments de Mme Pazmandi concernant l’analyse par la SAR de la protection de l’État qu’elle a reçue après avoir été violée par son père ne renvoient donc pas une conclusion déterminante de la SAR. Même si Mme Pazmandi soutient que cette dernière a eu tort de ne pas évaluer la preuve sur les conditions dans le pays en ce qui touche le caractère adéquat de la protection de l’État offerte aux victimes de violence familiale et sexuelle, l’analyse de la protection de l’État n’est pertinente que s’il est établi que le demandeur d’asile risque d’être persécuté ou qu’il doit autrement être protégé : Lasab c Canada (Citoyenneté et Immigration), 2015 CF 413 aux para 12, 14; Sman c Canada (Ministre de la Citoyenneté et de l’Immigration), 2002 CFPI 891 au para 22.
[40]
La conclusion de la SAR selon laquelle Mme Pazmandi n’a pas établi que son père cherchait continuellement à lui faire du mal était déterminante quant à cet aspect de la demande d’asile. Encore une fois, je ne puis estimer que les arguments de Mme Pazmandi établissent le caractère déraisonnable de la conclusion de la SAR.
[41]
Le principal argument de Mme Pazmandi sur cette question consiste à dire que la SAR a déraisonnablement diminué l’importance des contacts qu’elle a eus avec son père après l’agression sexuelle. Mme Pazmandi fait valoir que son père la [traduction] « traquait »
et que la SAR n’a pas considéré le préjudice psychologique subi par la victime d’une agression sexuelle qui est simplement approchée par son agresseur ou qui le voit seulement. Même si la Cour reconnaît que cet aspect de la demande d’asile présentée par une personne ayant fui des violences sexuelles peut revêtir de l’importance, Mme Pazmandi n’a ni déposé la preuve d’un tel préjudice ni soumis des arguments afférents.
[42]
Devant la SPR, Mme Pazmandi a déposé plus de 30 pages d’observations écrites, toutes axées sur l’allégation portant qu’elle serait persécutée en tant que femme d’ethnicité rom. Elle n’a présenté aucune preuve personnelle ou professionnelle concernant le préjudice psychologique associé au simple fait de voir son père, et les observations de son conseil n’évoquaient pas la crainte d’un tel préjudice. Les observations de Mme Pazmandi présentées à la SAR ne soulevaient pas non plus la question, soit à titre de motif d’appel soit comme fondement de sa demande d’asile, puisqu’elle arguait simplement que son père [traduction] « se mettrait à sa recherche, réussirait à la retrouver, la harcèlerait et lui ferait du mal »
. N’ayant pas fondé sa demande d’asile sur ce motif, Mme Pazmandi ne peut à présent faire valoir devant notre Cour que la SAR n’a pas adéquatement considéré le risque de préjudice psychologique à titre distinct : Vavilov, aux para 127‑128.
[43]
La SAR a néanmoins examiné la question, notant que Mme Pazmandi n’avait pas fourni de rapport psychologique à jour pour expliquer son état psychologique actuel au regard de son père. Mme Pazmandi soutient que cette conclusion est à elle seule déraisonnable, et que le préjudice psychologique peut être inféré de l’existence d’une agression sexuelle. Je conviens avec le ministre qu’en l’absence d’une preuve professionnelle ou personnelle remplissant les conditions des articles 96 ou 97 et montrant que les contacts avec son père causeraient un préjudice psychologique à Mme Pazmandi, il ne suffit pas d’invoquer simplement des inférences générales quant aux répercussions psychologiques d’une agression sexuelle pour fonder une demande d’asile.
[44]
Par conséquent, j’estime que la conclusion de la SAR portant que Mme Pazmandi n’a pas établi que son père tenterait de la trouver pour lui nuire si elle devait retourner en Hongrie était raisonnable.
[45]
Comme la demande d’asile de Mme Pazmandi au titre des articles 96 et 97 de la LIPR reposait sur l’ethnicité rom qu’elle invoquait et sur le risque de préjudice de la part de son père, aucun de ces éléments n’ayant été établi par elle, je conclus que le rejet par la SAR de son appel et de sa demande d’asile était raisonnable.
C.
La SAR n’était pas tenue de faire une analyse au titre de l’article 108.
[46]
Mme Pazmandi soutient que la SAR était tenue de faire une évaluation des « raisons impérieuses »
au titre du paragraphe 108(4) de la LIPR. L’article 108 de la LIPR, qui figure sous le titre « Perte de l’asile », concerne la perte de la qualité de réfugié : Canada (Ministre de l’Emploi et de l’Immigration) c Obstoj, [1992] 2 CF 739 (CA) au para 13. L’alinéa 108(1)e) prévoit une règle générale suivant laquelle la demande d’asile est rejetée si les raisons pour lesquelles l’intéressé a demandé l’asile n’existent plus, tandis que le paragraphe 108(4) prévoit une exception à cette règle lorsque des raisons impérieuses amènent le réfugié à ne pas se réclamer de la protection de son pays malgré ce changement de circonstances :
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Mme Pazmandi soutient que la décision de la SAR à l’égard de son père revenait effectivement à conclure que les motifs pour lesquels elle a demandé l’asile (la persécution violente qu’il lui a fait subir) n’existaient plus. Elle fait donc valoir que la SAR aurait dû se demander si l’exception prévue au paragraphe 108(4) trouvait à s’appliquer, à savoir s’il existait des « raisons impérieuses »
tenant à la persécution que lui avait déjà fait subir son père, pour lesquelles elle refusait de se réclamer de la protection de la Hongrie. Elle cite des décisions de notre Cour analysant l’obligation de faire une évaluation des raisons impérieuses, notamment Mir c Canada (Citoyenneté et Immigration), 2005 CF 205 aux para 13‑15; Moya c Canada (Citoyenneté et Immigration), 2016 CF 315 aux para 118‑119; Suleiman c Canada (Ministre de la Citoyenneté et de l’Immigration), 2004 CF 1125 aux para 16‑22.
[48]
À mon avis, les circonstances dans lesquelles une évaluation des raisons impérieuses doit être menée sont absentes en l’espèce. Dans l’arrêt Yamba, la Cour d’appel fédérale a conclu qu’il faut se demander s’il existe des raisons impérieuses « lorsqu[e] [la Section du statut de réfugié] conclut qu’un demandeur de statut a déjà été persécuté, mais qu’il y a eu un changement de situation dans le pays en question »
: Yamba c Canada (Ministre de la Citoyenneté et de l’Immigration), 2000 CanLII 15191 (CAF) au para 6; Alfaka Alharazim c Canada (Citoyenneté et Immigration), 2010 CF 1044 au para 36.
[49]
En l’espèce, aucune de ces deux conditions relatives à l’application du paragraphe 108(4) n’a été remplie. La persécution passée n’a pas été établie, pas plus qu’un changement de situation en Hongrie faisant obstacle dès lors à une demande d’asile. Je ne peux pas souscrire à l’observation de Mme Pazmandi selon laquelle la conclusion de la SAR portant qu’elle a été victime d’une agression sexuelle rendait en soi nécessaire une évaluation des « raisons impérieuses »
. Comme le notait le juge Noël de notre Cour au paragraphe 21 de sa décision dans Contreras Martinez c Canada (Ministre de la Citoyenneté et de l’Immigration), 2006 CF 343 :
Le libellé du par. 108(4) indique clairement qu’il n’a pas pour but d’imposer à la SPR une large obligation d’examiner l’existence de « raisons impérieuses » dans chaque demande d’asile. Lorsqu’un demandeur d’asile n’est ni un réfugié ni une personne à protéger parce que les conditions exposées dans la définition générale figurant aux articles 96 et 97 de la LIPR ne sont pas remplies, la SPR n’est aucunement tenue de procéder à un examen des « raisons impérieuses ». Cela n’est nécessaire que lorsque la demande est rejetée aux termes de l’al. 108(1)e).
[50]
Par ailleurs, notre Cour a confirmé que pour que le paragraphe 108(4) trouve à s’appliquer, « le demandeur doit déjà avoir eu la qualité de réfugié au sens de la Convention ou de personne à protéger »
: Castillo Mendoza c Canada (Citoyenneté et Immigration), 2010 CF 648 aux para 27‑28; Krishan c Canada (Citoyenneté et Immigration), 2018 CF 1203, aux para 76‑77. Il est à noter que, dans le cas de Mme Pazmandi, pour être admissible à l’asile, le demandeur doit se trouver à l’extérieur de son pays de nationalité (article 96) ou au Canada (article 97). La SAR a conclu que Mme Pazmandi n’avait pas établi que son père avait tenté de lui nuire « après 2014 »
. Cette conclusion est incompatible avec toute conclusion portant que Mme Pazmandi a été, à un moment ou à un autre après son départ de Hongrie en février 2017, une réfugiée au sens de la Convention ou une personne à protéger. Même si l’on ne tient pas compte du fait que ni la SPR ni la SAR n’ont tiré une telle conclusion, rien ne justifie de penser que Mme Pazmandi a rempli à un moment donné les conditions pour se voir reconnaître la qualité de réfugié, qu’elle aurait toutefois ensuite perdue en raison d’un changement de conditions.
[51]
Par conséquent, je conclus que la SAR n’était pas tenue de faire une évaluation des « raisons impérieuses »
au titre du paragraphe 108(4); il était raisonnable qu’elle ne le fasse pas.
IV.
Conclusion
[52]
Comme les questions qui précèdent sont déterminantes au regard de la demande d’asile de Mme Pazmandi, la demande de contrôle judiciaire est rejetée.
[53]
Aucune partie n’a proposé de question à certifier. Je conviens que la présente affaire n’en soulève aucune.
JUGEMENT dans le dossier IMM‑3311‑19
LA COUR STATUE que :
La demande de contrôle judiciaire est rejetée.
« Nicholas McHaffie »
Juge
Traduction certifiée conforme
Claude Leclerc
COUR FÉDÉRALE
AVOCATS INSCRITS AU DOSSIER
DOSSIER :
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IMM‑3311‑19
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INTITULÉ :
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ANIKO PAZMANDI c LE MINISTRE DE LA CITOYENNETÉ ET DE L’IMMIGRATION
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LIEU DE L’AUDIENCE :
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Toronto (Ontario)
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DATE DE L’AUDIENCE :
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LE 18 février 2020
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JUGEMENT ET MOTIFS :
|
le juge MCHAFFIE
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DATE DES MOTIFS :
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LE 27 novembre 2020
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COMPARUTIONS :
Cemone Morlese
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pour la demanderesse
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Hillary Adams
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pour le défendeur
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AVOCATS INSCRITS AU DOSSIER :
Grice and Associates
Avocats
Toronto (Ontario)
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pour la demanderesse
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Procureur général du Canada
Toronto (Ontario)
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pour le défendeur
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