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Date : 20200930


Dossier : T-1210-19

Référence : 2020 CF 944

[TRADUCTION FRANÇAISE]

Ottawa (Ontario), le 30 septembre 2020

En présence de madame la juge Elliott

ENTRE :

ROBERT MULDER

demandeur

et

LE PROCUREUR GÉNÉRAL DU CANADA

défendeur

JUGEMENT ET MOTIFS

  1. Aperçu

[1]  La Cour est saisie d’une demande de contrôle judiciaire présentée par M. Mulder à l’égard de la décision du 28 juin 2019 par laquelle la Commission canadienne des droits de la personne (la CCDP) a rejeté la plainte déposée par M. Mulder contre l’Agence du revenu du Canada (l’ARC) en application du sous-alinéa 44(3)b)(i) de la Loi canadienne sur les droits de la personne, LRC 1985, c H-6 (la LCDP). La Commission a décidé de suivre la recommandation de son enquêtrice et de ne pas renvoyer la plainte de M. Mulder au Tribunal pour examen [la décision contestée].

[2]  M. Mulder s’était plaint que son employeur, l’ARC, lui avait réservé un traitement défavorable fondé sur une déficience et avait omis de prendre les mesures d’adaptation nécessaires, sans aller jusqu’à la contrainte excessive, en refusant de lui permettre d’essayer le télétravail à domicile pendant un certain temps, ce qui est contraire à la LCDP.

[3]  Dans la présente demande, M. Mulder sollicite une ordonnance annulant la décision contestée et renvoyant l’affaire à la CCDP pour qu’elle charge une personne différente d’effectuer une nouvelle enquête.

[4]  Pour les motifs exposés ci-après, la demande est rejetée.

II.  Le contexte

[5]  M. Mulder a commencé à travailler pour l’ARC en avril 2007 en qualité d’agent d’allègement pour les contribuables. Dans le cadre de ses fonctions, il devait communiquer avec les contribuables ou leurs représentants, répondre aux demandes d’information, préparer des rapports détaillés, des lettres et d’autres documents.

A.  Les faits survenus en 2012 

[6]  En février 2012, M. Mulder a été impliqué dans un accident de la route qui lui a occasionné une commotion cérébrale ainsi que des blessures au cou et au dos. Il a été en arrêt de travail jusqu’au 4 avril 2012, date à laquelle il est retourné travailler à raison de quatre heures par jour, avec des pauses, conformément à un billet de son chiropraticien.

[7]  M. Mulder s’est rendu compte à ce moment-là qu’il ressentait des douleurs et de l’inconfort au travail. L’ARC lui a demandé de se soumettre à un examen médical destiné à évaluer sa capacité de travailler, appelé « Évaluation de l’aptitude physique au travail » (EAPT), effectué par un fournisseur de soins de santé indépendant, Workplace Health & Cost Solutions (WHCS). Avant de recevoir les résultats de cette EAPT, M. Mulder est parti en congé de maladie sans solde. Ce congé s’est étalé de juillet 2012 au 19 mai 2015.

B.  Les faits survenus en 2014 

[8]   Durant son congé de maladie, M. Mulder a été évalué par son propre médecin, le DJanjua, qui a procédé à une EAPT le 26 juin 2014 (l’EAPT de juin 2014). Le Dr Janjua a estimé que M. Mulder était apte au travail, sous réserve de certaines limites et restrictions décrites dans son rapport, et a recommandé qu’il travaille de la maison pendant une période d’essai.

[9]  Le Dr Janjua n’a relevé aucune limite dans le contexte des éléments liés au milieu de travail physique à évaluer, mais il était d’avis que M. Mulder [traduction] « éprouverait fort probablement des difficultés à suivre un horaire et à respecter les règles de présence et de ponctualité nécessaires au bureau à ce moment-ci en raison des problèmes précisés ». Le médecin a également souligné que plusieurs tâches comportant des exigences sociales et émotionnelles pourraient se révéler difficiles et que ces difficultés semblaient être exacerbées en situation de stress, [traduction] « ce qui nuit aussi à une bonne communication et à la capacité de [M. Mulder] de faire preuve de la diligence et de l’exactitude requises pour remplir les fonctions importantes inhérentes à son poste ». Le Dr Janjua a mentionné que, pour cette même raison, toutes les tâches cognitives et mentales pertinentes seraient difficiles à accomplir pour M. Mulder.

[10]  Le 26 novembre 2014, en réponse à l’EAPT de juin 2014, l’ARC a remis une lettre à M. Mulder destinée au Dr Janjua. L’ARC demandait au médecin des éclaircissements au sujet de son rapport et des commentaires sur le plan d’adaptation au travail décrit dans la lettre.

C.  Les faits survenus en 2015 

[11]  Le 6 janvier 2015, l’ARC a envoyé une lettre à M. Mulder où elle lui offrait trois options pour mettre un terme à son congé sans solde, qui s’était prolongé au-delà de la période de congé permise dans la Politique sur les blessures et les maladies de l’ARC. Ainsi, M. Mulder pouvait demander une retraite pour raison de santé, démissionner ou retourner au travail.

[12]  M. Mulder a convenu avec l’ARC lors d’une réunion qui s’est tenue le 28 ou le 29 janvier 2015 qu’il tenterait un retour graduel au travail à compter du 1er mars 2015. À cette fin, le 3 février 2015, l’ARC a demandé par écrit à l’ergothérapeute de M. Mulder, Dawn James, de procéder à une EAPT. L’ARC souhaitait connaître son avis sur les limites et restrictions de M. Mulder et sur la meilleure façon de s’y adapter en milieu de travail.

[13]  En mars 2015, Dawn James a avisé l’ARC qu’elle n’était pas en mesure de lui fournir l’information exigée dans l’EAPT.

[14]  Le 23 mars 2015, l’ARC a informé M. Mulder par lettre qu’elle n’avait reçu aucune réponse de Dawn James et que le congé sans solde de M. Mulder s’était prolongé au-delà de la période permise dans ses politiques. Comme M. Mulder n’avait fourni aucun renseignement médical confirmant son aptitude à retourner au travail dans un avenir prévisible, elle lui a demandé de lui faire savoir par écrit, au plus tard le 7 avril 2015, s’il souhaitait partir à la retraite pour raison de santé, démissionner ou prendre sa retraite.

[15]  Malgré cette date limite, le 21 avril 2015, l’ARC a donné à M. Mulder la possibilité de se faire évaluer à nouveau par WHCS. Des formulaires d’exonération et de consentement ont été fournis à M. Mulder et devaient être retournés dûment signés au plus tard le 1er mai 2015.

[16]  Le 7 mai 2015, n’ayant pas reçu le formulaire de consentement à l’EAPT de M. Mulder, l’ARC a déclaré qu’elle s’appuierait sur les plus récents renseignements médicaux qu’elle possédait au dossier, c’est-à-dire l’EAPT de juin 2014. M. Mulder a été informé qu’il devait se présenter au travail le 19 mai 2015.

[17]  Le 19 mai 2015, M. Mulder est retourné au travail après son congé de maladie. Le lendemain, l’ARC a procédé à une évaluation ergonomique du poste de travail de M. Mulder.

[18]  Le 22 mai 2015, l’ARC a transmis le formulaire de consentement et l’EAPT à WHCS. Le rapport qui y fait suite, daté du 18 décembre 2015, a été reçu le 22 décembre 2015. Le volet principal de l’EAPT a été effectué par le Dr Chernish, le 8 juin 2015. Un autre volet a été réalisé par le Dr Lazereck, le 19 octobre 2015. Le rapport indiquait que M. Mulder n’avait pas de limites en ce qui a trait aux aspects physiques de son travail, mais qu’il avait des limites et des restrictions en ce qui a trait aux exigences sociales, émotionnelles, cognitives et mentales. Le Dr Chernish était d’avis que M. Mulder pourrait reprendre l’intégralité de ses fonctions régulières au plus tard le 30 mars 2016.

[19]  Le 12 juin 2015, M. Mulder a obtenu sa propre évaluation des capacités fonctionnelles (ECF). Cette ECF a été effectuée par l’ergothérapeute Shauna Bourbonniere, du Wellness Institute (l’ECF de Wellness). Toute une batterie de tests physiques et fonctionnels a été réalisée sur deux jours. Ces tests ont montré que M. Mulder ressentait de la douleur chronique dans tout le corps, ce qui limitait gravement son fonctionnement. Il ne pouvait se déplacer que sur des distances extrêmement courtes, même avec une marchette, et avait de la difficulté à se servir de ses membres supérieurs. L’ergothérapeute a mentionné que M. Mulder ne pourrait se présenter au bureau pour faire ses tâches quotidiennes en raison des multiples difficultés qu’elle avait relevées. D’après elle, avec un poste de travail bien aménagé à la maison et un ordinateur doté d’un programme de reconnaissance vocale comme Dragon, M. Mulder pourrait mener à bien certaines de ses tâches. Il était recommandé qu’il puisse travailler seulement une ou deux heures par jour au début afin de développer sa tolérance petit à petit.

[20]  Le 1er juillet 2015, M. Mulder a transmis à l’ARC une copie de l’ECF, un billet de son chiropraticien, M. Arauz, daté du 25 mai 2015, et un résumé d’une page, non daté, du rapport rédigé par son psychothérapeute, M. Hanson.

[21]  Dans une lettre datée du 15 juillet 2015, le Dr Janjua a déclaré qu’il avait examiné l’ECF de Wellness et qu’à son avis cette évaluation était exhaustive, objective et exacte. Il a souscrit à l’évaluation et aux recommandations qui y figuraient en précisant que ces dernières amélioreraient énormément les capacités fonctionnelles de M. Mulder.

[22]  Dans son billet, M. Arauz a appuyé le recours au télétravail et a mentionné que [traduction] « même si M. Mulder présente les limites précitées, il a exprimé le souhait de travailler, et son médecin de famille a recommandé qu’il le fasse à partir de la maison, à l’essai, pour voir s’il est capable de suivre le programme de retour au travail ».

[23]  Dans son résumé d’une page, M. Hanson a précisé que le pronostic quant au retour au travail de M. Mulder était favorable. Il a souligné que M. Mulder présentait de graves limites physiques, psychosociales et cognitives fonctionnelles qui l’empêchaient de retourner à son poste régulier. Le résumé indiquait que les mesures d’adaptation qui pourraient être bénéfiques dans le cas de M. Mulder comprenaient celles qui suivent, qui ne sont ni exhaustives ni définitives :

  • travailler à temps partiel pendant une période prolongée;

  • déterminer les fonctions ou les responsabilités que M. Mulder est à ce moment capable d’exercer;

  • offrir un horaire de travail souple pour tenir compte des symptômes variables de M. Mulder;

  • laisser M. Mulder déterminer sa charge de travail et ses priorités en toute autonomie;

  • permettre à M. Mulder de se présenter à ses rendez-vous médicaux et à ses séances de psychothérapie.

[24]  Le 24 novembre 2015, M. Mulder a transmis à l’ARC une lettre de M. Hanson recommandant d’autres mesures d’adaptation. M. Hanson préconisait le travail à temps partiel, soit trois heures par jour pendant une période prolongée et une semaine de travail de trois jours, avec congé les mercredis et vendredis. Il a recommandé également que M. Mulder reçoive l’aide d’un superviseur qui veillerait à ce que le milieu de travail soit adapté à ses besoins psychologiques et médicaux. M. Hanson a souligné que le bureau de M. Mulder devait être déplacé dans un endroit où il pourrait travailler seul, loin du regard constant et inquisiteur des gestionnaires. En dernier lieu, M. Hanson a déclaré que le milieu de travail de M. Mulder se révélait à ce moment-là extrêmement stressant, de sorte qu’il était nécessaire que M. Mulder puisse récupérer en milieu de semaine pour ne pas se sentir dépassé.

[25]  M. Hanson a conclu que le pronostic quant au retour éventuel au travail à temps plein de M. Mulder était positif, à la condition que des mesures soient en place au travail pour tenir compte de ses limites fonctionnelles. Il a souligné que M. Mulder continuait de présenter de graves limites physiques, psychosociales et cognitives fonctionnelles, qui l’empêchaient de retourner à son poste régulier.

[26]  Après avoir reçu les renseignements médicaux à jour de M. Hanson, l’ARC a instauré, en décembre 2015, d’autres mesures visant l’adaptation du milieu de travail de M. Mulder. Elle a ainsi placé son bureau dans un endroit plus isolé qui se trouvait à 70 pieds plus près du corridor menant aux toilettes. M. Mulder a installé des parasols au-dessus de son bureau pour réduire l’éclat des lumières. Le 21 décembre 2015, l’horaire de M. Mulder a été modifié pour que celui-ci puisse travailler trois heures par jour les mardis, jeudis et vendredis, de manière à être libre d’aller à ses rendez-vous médicaux les lundis.

[27]  Comme il a été souligné précédemment, l’ARC a reçu le 18 décembre 2015 l’EAPT de WHCS, qui estimait que M. Mulder serait en mesure de reprendre ses fonctions régulières au plus tard le 30 mars 2016.

D.  Les faits survenus en 2016 

[28]  En janvier 2016, M. Mulder a transmis à l’ARC une copie de la réponse du Dr Janjua, datée du 12 décembre 2014. Le médecin y affirmait que M. Mulder serait apte à retourner au travail s’il avait la possibilité de travailler de la maison.

[29]  Lorsque l’ARC a reçu cette réponse, en janvier 2016, M. Mulder était déjà retourné au travail selon un horaire réduit.

[30]  Pour ce qui est de la date à laquelle M. Mulder serait en mesure d’assumer toutes ses fonctions régulières, le Dr Janjua a déclaré qu’elle restait indéterminée.

[31]  Le 3 mars 2016, M. Mulder a quitté le travail. Le 4 mars 2016, il a pris un deuxième congé de maladie. Le 9 mars 2016, il a remis à son employeur un autre billet de M. Hanson, qui indiquait que ses progrès en psychothérapie avaient été [traduction] « constamment freinés par le stress important qu’il [vivait] au travail ».

[32]  Les 14 et 23 mars 2016, Shauna Bourbonniere, ergothérapeute pour Enabling Access, a procédé à une évaluation des capacités cognitives fonctionnelles (ECCF) de M. Mulder. L’évaluation est décrite dans le rapport du 6 mai 2016 comme une évaluation personnalisée, adaptée à un emploi précis. L’ARC a reçu les résultats du rapport en juin 2016, peu après le dépôt de la plainte de M. Mulder à la CCDP.

[33]  L’ECCF a révélé que M. Mulder manifestait un éventail de comportements douloureux. Il marchait et se déplaçait aussi très lentement, incliné vers l’avant. Il soupirait, gémissait et grognait fréquemment.

[34]  Enabling Access a examiné les antécédents de M. Mulder, effectué un examen physique de ses capacités et limites, puis évalué ses facultés cognitives fonctionnelles en lien avec ses capacités et ses tolérances. Le rapport renfermait une grille d’analyse énonçant les sept exigences physiques et les dix exigences cognitives rattachées au poste d’examinateur ou d’agent d’allègement pour les contribuables. Les capacités de M. Mulder correspondant à chaque exigence étaient énumérées, et il était indiqué si des mesures d’adaptation étaient nécessaires ou non. En tout, treize exigences nécessitaient des mesures d’adaptation et, dans dix cas, des mesures spécifiques ont été recommandées.

[35]  L’ECCF se terminait par une section intitulée [traduction] « Retour au travail », où la première phrase était la suivante : [traduction] « M. Mulder ne serait pas capable de se rendre au bureau pour accomplir ses tâches quotidiennes. » Le rapport énonçait plusieurs des éléments qui ont mené à cette conclusion :

[traduction]

  • - La tolérance limitée de M. Mulder à la position debout ou à la marche fait qu’il est très difficile pour lui de se déplacer du stationnement jusqu’à son bureau, et de son bureau à la cafétéria ou aux toilettes.

  • - Après environ 30 minutes en position assise, M. Mulder doit s’étendre pour soulager sa douleur, ce qui ne serait pas possible en milieu de travail.

  • - La vue et l’ouïe de M. Mulder sont devenues très sensibles, de sorte que M. Mulder ne tolère plus les éclairages brillants ni les milieux bruyants, car ils peuvent lui causer des maux de tête importants.

  • - La motricité fine de M. Mulder est très mauvaise et fait en sorte qu’il lui est difficile de taper sur un clavier. Cette lacune pourrait être comblée à l’aide du logiciel de dictée vocale Dragon, ce qui fonctionnerait mieux dans un environnement tranquille, c’est-à-dire à la maison plutôt qu’au bureau.

[36]  Plusieurs mesures d’adaptation ont été proposées, en fonction de ce qui précède, et la conclusion était la suivante :

[traduction]

Grâce à un poste de travail bien aménagé chez lui, muni d’un programme de reconnaissance vocale sur son ordinateur, M. Mulder pourrait être capable d’accomplir certaines tâches. Il devra commencer par seulement une ou deux heures chaque jour et développer sa tolérance petit à petit. Le travail joue un rôle extrêmement important dans notre vie à tous, et M. Mulder veut prendre tous les moyens pour devenir productif, ce qui contribuera à donner un sens à sa vie et lui procurera un peu le sentiment de mener une existence normale.

[37]  Le 14 mars 2016, avant de recevoir l’ECCF, l’ARC a envoyé une lettre à M. Mulder l’avisant qu’il devait soit démissionner, soit prendre sa retraite pour raison de santé.

[38]  Le 18 mai 2016, M. Mulder a déposé sa plainte à la CCDP.

[39]  M. Mulder a pris sa retraite pour raison médicale le 26 novembre 2016. L’ARC a collaboré avec M. Mulder et son syndicat afin de lui permettre de choisir une date de départ à la retraite postérieure à la ratification de la nouvelle convention collective, de manière à ce qu’il soit admissible à une prime à la signature.

III.  La plainte déposée à la CCDP

[40]  La CCDP a reçu la plainte de M. Mulder le 19 mai 2016.

[41]  Dans sa plainte, M. Mulder invoque plusieurs motifs de distinction. La présente demande porte sur un seul de ces motifs, soit la déficience.

[42]  La plainte de M. Mulder a été renvoyée pour enquête le 14 juillet 2017.

IV.  Le rapport d’enquête

[43]  L’enquête s’est conclue le 11 février 2019, avec la publication du rapport d’enquête (le rapport). Dans le cadre de son travail, en plus de lire les divers rapports médicaux et documents, l’enquêtrice a communiqué avec les parties et avec des tiers dans le but de confirmer ou de clarifier au besoin l’information reçue. Elle a interviewé M. Mulder, son chef d’équipe et sa représentante syndicale. Elle a également tenté d’interroger deux anciens membres du personnel de l’ARC, en vain.

[44]  L’enquêtrice a commencé son rapport en précisant qu’il ne s’agissait pas d’une décision de la CCDP et que les membres de la CCDP ne déterminent pas s’il y a eu discrimination ou non. Ils analysent la situation pour savoir si une plainte doit être renvoyée pour examen par le Tribunal canadien des droits de la personne, qui est une entité différente de la CCDP.

[45]  Bien que le rapport se soit attardé aux diverses raisons invoquées par M. Mulder pour affirmer qu’il a subi un traitement défavorable, la demande en l’espèce ne porte que sur l’allégation selon laquelle l’ARC a omis de prendre des mesures d’adaptation à l’égard de la déficience de M. Mulder, sans aller jusqu’à la contrainte excessive, en refusant à ce dernier la possibilité de faire du télétravail. Par conséquent, les parties du rapport qui concernent d’autres questions ne seront pas examinées.

A.  La démarche de l’enquêtrice

[46]  L’enquêtrice a pris connaissance des arguments des parties. Elle a passé en revue et commenté tous les rapports médicaux reçus des parties. Le dossier certifié supplémentaire du tribunal contient les rapports médicaux en question, ainsi que les notes d’entrevue, la correspondance, les courriels, les notes de service et les documents administratifs, y compris la Politique sur les blessures et les maladies de l’ARC. Ces documents ont tous été créés ou consultés par l’enquêtrice.

[47]  L’enquêtrice a décrit le contexte général entourant la plainte. Au paragraphe 18 de son rapport, elle a dressé en deux pages un résumé chronologique très détaillé des événements à partir des documents qu’elle avait reçus. Une bonne partie de cette chronologie se retrouve dans la section des présents motifs portant sur le contexte de l’affaire.

B.  Les allégations de traitement défavorable

[48]  M. Mulder a déclaré à l’enquêtrice qu’il avait été contraint par l’ARC de se soumettre à des évaluations médicales et que son gestionnaire avait menti quand il avait dit ne pas avoir reçu la lettre du 12 décembre 2014, par laquelle le Dr Janjua avait répondu à la demande de suivi de l’ARC. M. Mulder n’a pas transmis à l’enquêtrice la preuve qu’elle demandait, soit le courriel accusant réception de la réponse du Dr Janjua. L’ARC a affirmé n’avoir reçu la réponse du Dr Janjua que le 30 janvier 2016 et a ajouté qu’elle avait demandé à M. Mulder de se soumettre à une autre EAPT parce qu’elle avait besoin de plus amples renseignements pour déterminer la meilleure façon de répondre à ses besoins.

[49]  L’enquêtrice a conclu, à la lumière des éléments de preuve, que l’ARC n’avait pas réservé un traitement défavorable à M. Mulder en exigeant qu’il subisse une autre évaluation médicale afin de savoir sur quoi fonder les mesures d’adaptation. Cette conclusion n’est pas contestée dans la présente demande.

C.  L’omission alléguée de prendre des mesures d’adaptation

[50]  L’enquêtrice a constaté que M. Mulder et l’ARC étaient d’accord sur la nécessité de prendre des mesures d’adaptation en raison de la déficience de M. Mulder et sur le fait que M. Mulder avait avisé l’ARC de ses besoins à ce titre. Selon l’enquêtrice, le différend entre les parties est lié au choix à faire entre, d’une part, la modification de l’horaire ou du poste de travail et, d’autre part, la possibilité de faire du télétravail.

(1)  Les mesures d’adaptation en milieu de travail

[51]  L’enquêtrice a conclu que rien n’indiquait que M. Mulder avait omis de coopérer à la recherche de mesures d’adaptation, car il s’était présenté à toutes les évaluations et avait fourni tous les formulaires de consentement et tous les renseignements médicaux demandés par l’ARC. Toutefois, il n’a pas répondu avec assiduité et promptitude aux demandes des gestionnaires et de tiers.

[52]  L’enquêtrice a décrit brièvement les points saillants de la lettre de novembre 2015 de M. Hanson, dans laquelle celui-ci s’inquiétait du risque que posait le stress en milieu de travail pour la santé physique et émotionnelle de M. Mulder. Elle a pris en considération les commentaires de M. Mulder et ceux de l’ARC, puis a souligné que l’ARC avait fourni l’évaluation ergonomique du poste de travail de M. Mulder, effectuée le 20 mai 2015, qui avait montré que l’éclairage était optimal. L’ARC a également précisé que M. Mulder utilisait à ses deux postes de travail des parasols pour atténuer l’éblouissement.

[53]  L’enquêtrice a précisé que, par suite des recommandations de M. Hanson, l’horaire de M. Mulder a été modifié pour qu’il travaille trois heures par jour les mardis, jeudis et vendredis, ce qui le rendait disponible les lundis pour ses rendez-vous médicaux.

[54]  L’enquêtrice était d’avis que les éléments de preuve recueillis ne permettaient pas de croire que l’ARC avait refusé de prendre des mesures d’adaptation à l’égard de M. Mulder à son lieu de travail. Ils montraient plutôt que l’ARC avait tenté de répondre aux besoins de M. Mulder, compte tenu de ses besoins opérationnels, de l’information tirée de l’évaluation ergonomique et des renseignements obtenus de M. Hanson.

[55]  L’enquêtrice a conclu que, pour ce qui est des mesures d’adaptation en milieu de travail, l’ARC ne semblait pas avoir réservé à M. Mulder un traitement défavorable fondé sur une déficience.

(2)  Le télétravail à domicile comme mesure d’adaptation

[56]  L’enquêtrice s’est ensuite attardée à la principale question en litige dans la présente demande, à savoir si l’ARC avait omis de prendre les mesures d’adaptation nécessaires pour tenir compte des besoins de M. Mulder, sans aller jusqu’à la contrainte excessive, lorsqu’elle a refusé de lui permettre d’essayer le télétravail pendant un certain temps afin qu’il puisse travailler de chez lui, ce qui est contraire à la LCDP.

[57]  Après avoir mené un examen approfondi de la preuve, l’enquêtrice a déterminé que rien ne laissait croire que l’ARC avait réservé à M. Mulder un traitement défavorable fondé sur une déficience en refusant de lui permettre d’essayer le télétravail.

[58]  Cette question est analysée en détail dans la section qui suit, qui porte sur la question de savoir si la décision contestée est raisonnable et sur la question de savoir si l’enquêtrice a retenu seulement les éléments de preuve qui lui convenaient ou si elle a mal interprété la preuve.

V.  La décision contestée

[59]  La CCDP a adopté la recommandation de l’enquêtrice. Elle a informé M. Mulder qu’après avoir examiné l’information et les observations reçues, elle avait décidé, en application du sous-alinéa 44(3)b)(i) de la LCDP, de rejeter la plainte parce que [traduction] « selon les éléments de preuve recueillis durant l’enquête, il ne semble pas que [l’ARC] ait réservé à [M. Mulder] un traitement défavorable fondé sur un motif illicite énoncé dans la [LCDP] ». Par conséquent, la CCDP a conclu que, compte tenu des circonstances de la plainte, l’examen de celle-ci n’était pas justifié. Le dossier a alors été clos.

[60]  Dans les décisions prises à l’issue d’un examen préalable en vertu de l’article 44, quand la CCDP adopte les recommandations de l’enquêteur et qu’elle ne présente aucun motif ou qu’elle fournit des motifs très succincts, le rapport d’enquête est réputé faire partie des motifs de la CCDP, parce que l’enquêteur établit son rapport à l’intention de la CCDP « et, par conséquent, il mène l’enquête en tant que prolongement de la Commission » : Sketchley c Canada (Procureur général), 2005 CAF 404 au para 37.

VI.  Les questions en litige et la norme de contrôle applicable

[61]  M. Mulder soulève deux questions relatives à la décision contestée :

  1. La décision prise en application du sous-alinéa 44(3)b)(i) de la LCDP de ne pas renvoyer la plainte de M. Mulder au Tribunal pour examen était-elle raisonnable?

  2. La CCDP a-t-elle violé le droit de M. Mulder à l’équité procédurale?

[62]  M. Mulder allègue que la décision contestée est déraisonnable parce que l’enquêtrice s’est écartée de son rôle consistant à effectuer un examen préalable de la plainte et qu’elle a plutôt rendu une décision sur le fond. Plus particulièrement, il soutient que l’enquêtrice 1) a soupesé à tort les éléments de preuve médicale, 2) a mal interprété certains éléments de preuve et 3) n’a pas tenu compte de sa preuve.

[63]  M. Mulder fait valoir également que, même si l’enquêtrice était habilitée à soupeser les éléments de preuve, elle l’a fait d’une manière déraisonnable en retenant seulement ceux qui lui convenaient et en ne tenant pas compte de sa preuve.

[64]  Au sujet de l’équité procédurale, M. Mulder estime que l’enquête n’a pas été menée avec rigueur et neutralité. Il répète que l’enquêtrice a écarté, sans explication, la majeure partie de la preuve médicale et accepté, sans la remettre en question, la preuve de l’ARC.

[65]  En outre, selon M. Mulder, l’enquêtrice a fait preuve de partialité quand elle a ajouté ses propres commentaires sur sa capacité de faire du télétravail en mentionnant la lenteur de M. Mulder à lui répondre durant son enquête.

A.  Le contrôle selon la norme de la décision raisonnable

[66]  Le contrôle judiciaire d’une décision administrative repose sur la présomption selon laquelle la norme de contrôle applicable à tous les aspects de la décision est celle de la décision raisonnable : Canada (Ministre de la Citoyenneté et de l’Immigration) c Vavilov, 2019 CSC 65 [Vavilov] au para 25.

[67]  Le contrôle selon la norme de la décision raisonnable se fonde sur le principe de la retenue judiciaire et témoigne d’un respect envers le rôle distinct des décideurs administratifs : Vavilov au para 13.

[68]  Une décision est considérée comme raisonnable quand elle est justifiée au regard des contraintes juridiques et factuelles auxquelles le décideur est assujetti et qu’elle est fondée sur une analyse intrinsèquement cohérente et rationnelle. Lorsque c’est le cas, « [l]a norme de la décision raisonnable exige de la cour de justice qu’elle fasse preuve de déférence envers une telle décision » : Vavilov au para 85.

[69]  Il est acquis que le décideur administratif peut apprécier et évaluer la preuve qui lui est soumise et qu’à moins de circonstances exceptionnelles, les cours de révision ne modifient pas ses conclusions de fait. Les cours de révision doivent également s’abstenir « d’apprécier à nouveau la preuve examinée par le décideur » : Vavilov au para 125.

[70]  Pour ce qui est la décision de savoir si l’examen d’une plainte par le Tribunal est justifié, il a été conclu que le contrôle selon la norme de la décision raisonnable est largement tributaire des faits et de considérations d’ordre public, que le décideur doit bénéficier d’une importante marge de manœuvre et qu’il faut faire montre d’un niveau élevé de retenue judiciaire : Ritchie c Canada (Procureur général), 2017 CAF 114 au para 38.

B.  L’équité procédurale dans le contexte de l’application de la LCDP

[71]  L’obligation d’équité procédurale de la CCDP envers un plaignant est établie depuis longtemps. L’enquête sur laquelle se fonde la Commission doit être neutre et rigoureuse. Lorsqu’une preuve manifestement importante n’a pas été examinée, le contrôle judiciaire est justifié : Slattery c Canada (Commission des droits de la personne), [1994] 2 CF 574 aux para 50 et 57.

[72]  Si l’enquête n’est pas suffisamment rigoureuse, la décision ne peut être maintenue parce qu’elle est le résultat d’un processus inéquitable sur le plan procédural : Herbert c Canada (Procureur général), 2008 CF 969 au para 18.

[73]  Récemment, dans l’arrêt Chemin de fer Canadien Pacifique Limitée c Canada (Procureur général), 2018 CAF 69 [CPR], le juge Rennie a passé en revue et confirmé les principes de base applicables au contrôle de décisions mettant en jeu l’équité procédurale. Il a déterminé que l’équité procédurale ne se prêtait pas à une analyse relative à la norme de contrôle applicable. Ici, la question est plutôt de savoir si M. Mulder connaissait « la preuve à réfuter et s’il a eu la possibilité complète et équitable d’y répondre » : CPR aux para 55 et 56.

[74]  La norme de la décision correcte servant à déterminer si une enquête était suffisamment rigoureuse peut nécessiter un certain degré de retenue en raison du caractère factuel des décisions de la CCDP : Bergeron c Canada (Procureur général), 2015 CAF 160 [Bergeron] au para 69.

[75]  Compte tenu des principes énoncés ci-dessus et de la jurisprudence connexe, mon analyse des deux questions en litige est exposée ci-après.

VII.  La décision contestée est raisonnable

A.  L’enquêtrice ne s’est pas prononcée sur le fond de la plainte

[76]  M. Mulder fait valoir que la décision contestée est déraisonnable parce que l’enquêtrice s’est écartée de son rôle consistant à effectuer un examen préalable de la plainte en vertu de l’article 44, et qu’elle a tranché la plainte sur le fond. À l’appui de cet argument, il cite l’arrêt Cooper c Canada (Commission des droits de la personne), [1996] 3 RCS 854 au para 53 [Cooper], où la Cour suprême a affirmé que « [l]’aspect principal de ce rôle [celui de la Commission] est alors de vérifier s’il existe une preuve suffisante » et que « [l]e but n’est pas […] [de soupeser] la preuve de la même manière que dans des procédures judiciaires; la Commission doit plutôt déterminer si la preuve fournit une justification raisonnable pour passer à l’étape suivante ».

[77]  Les deux parties ont invoqué l’arrêt Cooper. M. Mulder estime que l’enquêtrice a utilisé des termes qui montrent qu’elle a soupesé les éléments de preuve, comme [traduction] « la preuve amène à conclure que », « la preuve montre que », « il semble que » et « la preuve ne porte pas à penser que ».

[78]  De son côté, l’ARC soutient que ces termes signifient que l’enquêtrice a évalué le caractère suffisant des éléments de preuve. Elle n’a pas tiré de conclusion sur le fond ni sur la crédibilité.

[79]  Dans la décision Gupta c Canada, 2011 CF 56, le juge Zinn s’est penché sur les expressions [traduction] « n’étaye pas », [traduction] « ne permet pas de discerner » et [traduction] « ne pouvait établir un lien » dans le contexte d’une allégation similaire au sujet d’une enquêtrice. Il a conclu que les expressions en question portaient toutes sur la valeur probante de la preuve, non sur le poids qu’il convenait de lui accorder, et a précisé que, même s’il ne relève pas du pouvoir des membres de la CCDP d’apprécier la preuve, il relève de leur pouvoir d’évaluer la valeur probante de la preuve. Comme l’a expliqué le juge Zinn, le rôle même de l’enquêteur consiste à rédiger un rapport à l’intention de la Commission qui sert à déterminer s’il y a suffisamment d’éléments de preuve pour justifier le renvoi de la plainte au Tribunal : aux para 24-26.

[80]  L’évaluation du caractère suffisant de la preuve nécessite d’en considérer la valeur probante. Comme l’a affirmé le juge Barnes dans la décision Tutty c Canada (Procureur général), 2011 CF 57, à cette étape, « la décision de la Commission de rejeter ou de renvoyer une plainte requiert qu’elle apprécie la preuve afin de déterminer si elle est suffisante pour justifier une audience sur le fond » : au para 14.

[81]  L’ARC souligne que l’enquêtrice a considéré l’ensemble de la preuve médicale et n’a tiré aucune conclusion relative à la crédibilité; elle n’a pas soupesé certains éléments de preuve par rapport à d’autres. Selon l’ARC, le paragraphe 98, où est résumée la teneur du rapport, confirme que l’enquêtrice ne s’est pas prononcée sur le fond :

[traduction]

Le plaignant allègue que la défenderesse lui a réservé un traitement défavorable fondé sur sa déficience […] en ce qui concerne les […] mesures d’adaptation en milieu de travail et le refus de permettre le télétravail quand le plaignant a tenté de retourner au bureau et qu’il a effectivement repris le travail sur place en 2015. Cependant, la preuve recueillie au moment de l’enquête ne corrobore pas ces allégations du plaignant.

[82]  Compte tenu de tout ce qui précède, le fait que l’enquêtrice emploie les expressions contestées n’est à mon avis pas suffisant pour conclure qu’elle se prononçait sur le bien-fondé de la plainte de M. Mulder. Il s’agissait plutôt, comme dans la décision Gupta, d’une évaluation du caractère suffisant des éléments de preuve, que l’enquêtrice pouvait et devait effectuer pour formuler une recommandation à la CCDP.

B.  L’enquêtrice n’a pas mal interprété la preuve médicale de M. Mulder ou retenu seulement les éléments de preuve qui lui convenaient

[83]  Selon M. Mulder, l’enquêtrice a conclu à tort qu’il souhaitait faire du télétravail comme mesure d’adaptation, mais qu’aucune raison médicale ne l’y obligeait. Il cite le paragraphe 95 du rapport, où l’enquêtrice a déclaré que le rapport de juin 2014 du Dr Janjua mentionnait le « souhait » de M. Mulder de faire du télétravail et que le rapport de 2015 de WHCS ne parlait pas de télétravail. M. Mulder affirme que l’enquêtrice s’est déraisonnablement appuyée sur les éléments de preuve qui lui convenaient et a ainsi démontré un mépris total pour la prépondérance des documents qui lui avaient été présentés.

[84]  Le paragraphe 95 est ainsi libellé :

[traduction]

La preuve montre que le plaignant voulait travailler de la maison, au moins pendant une période de trois mois. Dans le rapport faisant suite à l’EAPT de 2014, le médecin du plaignant, le Dr Janjua, a précisé que le plaignant devrait travailler de la maison; les rendez-vous et évaluations que le plaignant a entrepris de sa propre initiative indiquaient qu’il devrait travailler de la maison. Le Dr Janjua, cependant, a indiqué que cette mesure d’adaptation était celle que souhaitait le plaignant, et l’EAPT de 2015 de WHCS ordonnée par la défenderesse n’a pas mentionné que cette forme d’adaptation était nécessaire.

[85]  Au paragraphe 94, l’enquêtrice énonce sa conclusion :

[traduction]

La preuve recueillie au cours de l’enquête porte à croire que les mesures d’adaptation requises n’ont pas été refusées, mais plutôt que la défenderesse n’a pas fourni au plaignant la mesure d’adaptation qu’il souhaitait.

[86]  D’après mon interprétation du paragraphe 95, dans le contexte général de la preuve dont il est question dans la décision contestée et compte tenu du libellé du paragraphe 94, je suis d’avis que l’enquêtrice énonçait les faits décrits dans les deux rapports médicaux auxquels elle a renvoyé.

[87]  L’enquêtrice n’a pas retenu seulement les éléments de preuve qui lui convenaient et elle n’a pas non plus mal interprété la preuve. Le rapport cite à maintes reprises des extraits de l’ensemble de la preuve médicale. Certains rapports mentionnent que le télétravail constitue effectivement une option en matière d’accommodement, tandis que d’autres n’en font pas mention. Au paragraphe 95, l’enquêtrice a invoqué un rapport de chaque type : le Dr Janjua recommandait le télétravail, mais l’EAPT de 2015 de WHCS ne proposait pas le télétravail puisque M. Mulder n’avait pas de limites en ce qui a trait aux aspects physiques de son travail, mais qu’il avait des limites et des restrictions en ce qui a trait aux exigences sociales, émotionnelles, cognitives et mentales.

[88]  L’ARC fait valoir que la conclusion de l’enquêtrice ne reposait pas sur la question de savoir si le télétravail constituait un souhait ou une recommandation médicale. Au paragraphe 96, l’enquêtrice a en effet conclu que le télétravail ne représentait pas une mesure d’adaptation viable dans le cas de M. Mulder :

[traduction]

La défenderesse est tenue d’offrir des mesures d’adaptation raisonnables à un employé, et elle a souligné que les tâches confiées à un employé doivent être valables et utiles tout en ayant une valeur pour l’Agence et l’employé. Étant donné la description d’emploi du plaignant ainsi que les limites ou restrictions médicales signalées par divers médecins et évaluateurs, dont les problèmes observés sur le plan de la mémoire et des fonctions cognitives qui nécessiteraient une supervision constante, sans oublier que le plaignant n’était pas disposé à répondre avec diligence, voire du tout, aux demandes formulées par téléphone ou par voie électronique, ou qu’il était incapable de le faire, il semble qu’il était justifié pour la défenderesse de croire que la demande de télétravail du plaignant n’était pas appropriée ni propice à un travail valable et utile. La défenderesse était prête, cependant, à continuer d’essayer de répondre aux besoins du plaignant en milieu de travail.

[89]  Bien que les autres rapports médicaux ne soient pas mentionnés expressément par l’enquêtrice dans les paragraphes sur lesquels M. Mulder s’est appuyé, l’enquêtrice a examiné et évalué de façon assez détaillée les éléments de preuve médicale tout au long de son rapport. Du paragraphe 65 au paragraphe 93, elle passe en revue les rapports médicaux pour ce qui est du télétravail. Elle a cerné les diverses mesures d’adaptation recommandées dans les rapports en question, y compris celles qui portaient sur le télétravail.

[90]  L’ARC relève plusieurs paragraphes du rapport où l’enquêtrice mentionne que le télétravail a été recommandé par le Dr Janjua, le chiropraticien et l’ECF de Wellness.

[91]  L’enquêtrice a cité également les raisons fournies par l’ARC pour décider que M. Mulder n’était pas un bon candidat pour le télétravail, compte tenu des limites et restrictions dont les rapports font état.

[92]  Plus particulièrement, le deuxième rapport du Dr Janjua a énuméré plusieurs problèmes physiques éprouvés par M. Mulder et recommandé ce qui suit en réponse à la demande initiale de l’ARC de préciser un calendrier de retour au travail pour M. Mulder :

[TRADUCTION]

Un maximum de trois heures par jour pour un total d’au plus 15 heures par semaine. Ces chiffres devront être rajustés d’après l’évolution de l’état de santé de M. Mulder ou advenant des complications. M. Mulder a besoin de pauses fréquentes et ne peut travailler plus de 20 minutes d’affilée. Les pauses peuvent être de durée variable puisqu’il pourra arriver que M. Mulder ait besoin de s’allonger ou de se rendre aux toilettes pendant de longues périodes pour des raisons médicales.

[93]  M. Hanson, le psychothérapeute de M. Mulder, est également conseiller en réadaptation certifié et a rédigé plusieurs rapports. Le premier est un résumé d’une page transmis par M. Mulder le 1er juillet 2015. M. Hanson y a indiqué que le pronostic de M. Mulder pour un retour au travail éventuel était favorable, mais que M. Mulder continuait de présenter des limites graves qui l’empêchaient de retourner à son poste régulier. M. Hanson a formulé cinq recommandations, mais aucune ne touchait le télétravail.

[94]  Le rapport suivant de M. Hanson, rédigé quelques mois plus tard, envisageait aussi le retour de M. Mulder en milieu de travail. Parmi toutes les mesures d’adaptation proposées par M. Hanson, aucune ne mentionnait le télétravail.

[95]  Dans son rapport final, M. Hanson a précisé qu’un retour graduel au travail à l’ARC n’était pas recommandé à ce moment-là, mais il n’a pas suggéré de recourir au télétravail.

[96]  M. Mulder affirme également que l’enquêtrice n’a pas traité de ses limites psychologiques et cognitives. Le rapport d’enquête renferme pourtant des extraits des rapports médicaux qui font état des répercussions de ses problèmes cognitifs. Par exemple, l’enquêtrice a noté que le Dr Chernish, lorsqu’il a conclu que M. Mulder n’avait pas de limites liées aux aspects physiques et non physiques du lieu de travail, a affirmé que [traduction] « [c]et employé pourrait présenter des symptômes variables susceptibles de limiter temporairement ses capacités cognitives et son jugement de même que sa capacité de faire face à des situations conflictuelles ».

[97]  Il est bien établi que l’enquêtrice est présumée avoir examiné l’ensemble de la preuve qui lui a été présentée et qu’elle n’était pas tenue de mentionner chaque élément : Newfoundland and Labrador Nurses’ Union c Terre-Neuve-et-Labrador (Conseil du Trésor), 2011 CSC 62 au para 16. Quant à la Commission, elle a examiné le rapport et les réponses des parties à ce rapport.

[98]  M. Mulder ne m’a pas convaincue que l’enquêtrice a commis une erreur dans son choix de mots ou son traitement de la preuve médicale.

VIII.  Il n’y a pas eu d’atteinte à l’équité procédurale

A.  L’enquête a été rigoureuse et neutre

[99]  M. Mulder prétend que la décision contestée est inéquitable sur le plan procédural parce que l’enquête n’était pas suffisamment rigoureuse. À cette fin, il affirme que l’enquêtrice [traduction] « n’a pas tenu compte de la majeure partie de la preuve médicale qui corroborait [sa] plainte, sans expliquer pourquoi ». Il invoque la décision Dupuis c Canada (Procureur général), 2010 CF 511 [Dupuis], où le juge Martineau a annulé le rejet d’une plainte par la CCDP au motif que celle-ci « [avait] fait preuve d’un aveuglement volontaire » à l’égard du bien-fondé des arguments du plaignant quand elle a accepté la thèse de l’employeur sans expliquer pourquoi elle rejetait le témoignage du plaignant : au para 42.

[100]  Dans l’affaire Dupuis, l’enquêteur a conclu, sans s’attarder aux éléments de preuve contraires, que le plaignant ne souffrait pas de dépression au moment où il a démissionné. Cette affaire s’articulait autour du fait que l’enquêteur avait esquivé la question des mesures d’adaptation et n’avait pas vraiment discuté de la déficience actuelle ou passée du plaignant. Dans le cas de M. Mulder, l’enquêtrice n’a pas commis ce genre d’erreur. M. Mulder répète que l’enquêtrice a considéré que le télétravail était la mesure d’adaptation qu’il souhaitait, plutôt que celle dont il avait besoin, et qu’elle a écarté la majeure partie de la preuve médicale. J’ai parlé de la notion de « souhait » dans la section précédente. Dans l’analyse portant sur l’équité procédurale qui suit, je me penche sur la question de savoir si l’enquêtrice a omis de tenir compte des éléments de preuve médicale.

[101]  L’ARC est d’avis que l’enquête était suffisamment rigoureuse. Elle s’appuie sur la décision McIlvenna c Banque de Nouvelle-Écosse, 2017 CF 699 [McIlvenna], qui énonce le principe selon lequel les cours de révision ne devraient intervenir pour des motifs liés à l’équité procédurale que si l’enquêteur néglige ou omet d’examiner une « preuve manifestement importante ». Les éléments de preuve que l’enquêtrice a omis d’examiner dans l’affaire McIlvenna étaient deux courriels qui corroboraient l’allégation du plaignant selon laquelle la banque avait décidé d’exiger le remboursement du prêt hypothécaire parce que les occupants cultivaient de la marijuana thérapeutique.

[102]  Selon l’ARC, dans le cas de M. Mulder, il n’y a pas de « preuve manifestement importante » qui aurait été écartée par l’enquêtrice. Celle-ci a examiné les rapports médicaux qui recommandaient le télétravail, et elle en a fait mention. Elle a clairement exposé l’ensemble des éléments de preuve pertinents dans son rapport et a discuté de chacun des rapports médicaux. Elle n’a pas omis d’en tenir compte.

[103]  Je suis d’accord. M. Mulder n’a pas donné d’exemples où des éléments de preuve auraient été écartés par l’enquêtrice. Celle-ci a mentionné tous les rapports médicaux et toutes les évaluations qui ont été fournis, y compris les évaluations réalisées à l’instigation de M. Mulder.

B.  Les observations personnelles de l’enquêtrice au sujet du demandeur

[104]  M. Mulder fait valoir que l’enquêtrice a fait preuve de partialité et qu’elle s’est fondée sur des stéréotypes visant les personnes atteintes d’un handicap. Il s’appuie à cette fin sur le paragraphe 85 de la décision contestée, où l’enquêtrice a signalé que M. Mulder n’avait pas répondu à ses appels ou à ses courriels [traduction] « à quatre reprises au moins ». M. Mulder estime qu’il était injuste que l’enquêtrice tire des conclusions sur sa capacité de faire du télétravail en s’appuyant sur seulement quatre événements, surtout que certaines de ses réponses tardives étaient imputables à sa maladie. D’après lui, la frustration de l’enquêtrice à son égard l’a poussée à rejeter la preuve médicale attestant que le télétravail serait bénéfique pour lui.

[105]  M. Mulder soutient également que l’enquêtrice a cédé au stéréotype voulant que les personnes handicapées soient moins aptes que les autres. En témoigne à son avis le fait qu’elle a accepté l’argument de l’ARC selon lequel il aurait besoin d’une supervision constante, ce qui est incompatible avec le télétravail.

[106]  Selon M. Mulder, l’argument portant sur la nécessité d’une supervision constante a été contredit dans le rapport de son psychothérapeute, M. Hanson, qui a affirmé que M. Mulder profiterait d’une plus grande autonomie et d’une supervision moins étroite. Cependant, il s’agit là d’une extrapolation des propos de M. Hanson. En effet, dans le résumé d’une page fourni par M. Mulder, on peut lire qu’il serait bénéfique de laisser M. Mulder [traduction] « déterminer sa charge de travail et ses priorités en toute autonomie ». Le rapport n’indique pas que M. Mulder peut ou doit travailler sans supervision. En fait, le rapport suivant de M. Hanson a recommandé en guise de mesure d’adaptation que M. Mulder reçoive [traduction] « l’aide d’un superviseur qui veillerait à ce que le milieu de travail soit adapté aux besoins psychologiques et médicaux de M. Mulder ».

[107]  L’ARC se fonde sur la décision Abi-Mansour c Agence du revenu du Canada, 2015 CF 883 [Abi‑Mansour], pour soutenir que la norme de la « crainte raisonnable de partialité » ne s’applique pas à la CCDP parce qu’elle n’est pas un organisme décisionnel. Il s’agit plutôt, selon l’ARC, et je suis d’accord, d’appliquer le critère énoncé dans la décision Société Radio‑Canada c Canada (Commission canadienne des droits de la personne), [1993] ACF no 1334 (CF 1re inst.), à la p 225, pour déterminer si une enquête était neutre, c’est-à-dire qu’il faut savoir « si l’on s’est tellement écarté de la norme de l’ouverture d’esprit qu’on pourrait avec raison affirmer qu’il y a eu préjugement de la question portée devant l’organisme d’enquête ». D’après l’ARC, il n’y a rien dans le dossier qui permet de croire que les conclusions de l’enquêtrice étaient prédéterminées, et il n’existe aucune preuve non plus que l’enquêtrice était frustrée envers le demandeur.

[108]  À mon avis, les éléments de preuve invoqués par M. Mulder ne permettent pas de conclure que l’enquêtrice a abordé le dossier l’esprit fermé. Elle a soulevé l’omission de répondre de M. Mulder après avoir discuté des éléments de preuve semblables fournis par l’ARC et par la représentante syndicale de M. Mulder, Diana Litke.

[109]  Dans une lettre du 24 janvier 2019 envoyée à l’enquêtrice, l’ARC a expliqué pourquoi elle avait conclu que M. Mulder avait besoin de supervision. Étant donné que ce dernier avait été absent du travail pendant près de trois ans, il avait besoin d’une formation sur les nouveaux systèmes et les nouvelles procédures, ce qui était plus facile à faire en personne, au bureau.

[110]  Même si l’opinion de l’enquêtrice quant à la capacité de M. Mulder de faire du télétravail était pertinente dans le contexte de l’argument avancé par l’ARC selon lequel le télétravail n’était pas une option viable sur le plan opérationnel, elle n’a pas joué un rôle déterminant. D’autres éléments de preuve, y compris divers rapports médicaux, ont abordé les problèmes cognitifs de M. Mulder, qui ont été attestés par la représentante syndicale de M. Mulder.

[111]  La déclaration de l’enquêtrice ne s’appuyait pas sur des préjugés, mais bien sur son examen de la preuve qui lui avait été présentée. Il n’y a pas eu atteinte à l’équité procédurale.

[112]  Je n’ai pas été convaincue que les droits de M. Mulder à l’équité procédurale ont été violés. En plus des raisons exposées plus haut, je constate que l’enquêtrice a interviewé M. Mulder et l’a par la suite consulté pour obtenir son point de vue quand il y avait contradiction entre des éléments de preuve ou pour obtenir des précisions de sa part. M. Mulder a reçu une ébauche du rapport d’enquête et a pu formuler des commentaires à ce sujet par l’intermédiaire de son syndicat. M. Mulder savait ce qu’il devait démontrer. Il a eu la possibilité de présenter des éléments de preuve et des arguments, et il l’a fait.

IX.  Résumé et conclusion

[113]  Il existait des motifs suffisants pour que l’enquêtrice conclue que l’ARC avait tenté de répondre aux besoins de M. Mulder sans aller jusqu’à la contrainte excessive. L’ARC a ordonné que plusieurs évaluations soient menées afin de savoir comment accommoder M. Mulder au travail. Elle a également examiné les éléments de preuve médicale fournis par M. Mulder. Quand M. Mulder lui a transmis une lettre de son psychothérapeute recommandant qu’il travaille moins de jours par semaine, l’ARC a modifié son horaire de travail en conséquence.

[114]  Compte tenu de la preuve qui a été présentée à l’enquêtrice, il était raisonnable que celle-ci conclue que l’ARC avait un motif valable pour refuser le télétravail.

[115]  L’ARC a expliqué pourquoi le télétravail n’était pas une option viable. Quand M. Mulder est retourné au travail la première fois, il a eu besoin de suivre une formation sur les nouveaux systèmes. L’ARC avait déterminé, comme employeur, qu’il valait mieux le faire en personne. Quand M. Mulder a présenté une nouvelle demande de télétravail, l’ARC a raisonnablement conclu que l’horaire de travail qu’il proposait, soit trois heures réparties sur toute la journée avec des pauses, ne permettait pas à M. Mulder d’effectuer un travail valable et utile, ni pour elle ni pour M. Mulder.

[116]  L’ARC n’était pas tenue de fournir au demandeur les mesures d’adaptation qu’il préférait si celles-ci n’étaient pas réalisables sur le plan opérationnel. Elle avait pour seule obligation de répondre aux besoins de M. Mulder sans aller jusqu’à la contrainte excessive. Quand il est apparu clairement que le demandeur ne pouvait plus remplir les obligations fondamentales de son emploi, l’ARC n’était plus obligée de l’accommoder.

[117]  La CCDP a eu raison de rejeter la plainte de M. Mulder en application du sous-alinéa 44(3)b)(i) de la LCDP. L’enquêtrice a exposé en détail les éléments de preuve qui lui ont été présentés. Elle a demandé des explications aux parties lorsque les rapports médicaux se contredisaient. Bien qu’elle n’ait pas soupesé les éléments de preuve, elle les a évalués à la lumière des faits et du droit, puis a fait une recommandation compatible avec ces éléments de preuve.

[118]  La décision contestée est fondée sur une analyse intrinsèquement cohérente et rationnelle qui est justifiée au regard des faits et du droit. La norme de la décision raisonnable exige de la cour de révision qu’elle fasse preuve de retenue à l’égard de la décision contestée : Vavilov au para 85.

[119]  M. Mulder demande essentiellement à la Cour d’apprécier à nouveau la preuve, ce qui n’est pas le rôle de la cour de révision. L’enquêtrice a conclu que les éléments de preuve montraient que l’ARC avait tenté de répondre aux besoins opérationnels de M. Mulder en milieu de travail. La preuve présentée à l’enquêtrice comportait de nombreuses listes détaillées de mesures d’adaptation proposées et une liste tout aussi longue de limites et de restrictions physiques ou cognitives fonctionnelles. Quand l’ARC a reçu les nouveaux rapports médicaux, elle a appliqué les mesures d’adaptation qu’elle pouvait. Elle a fait installer un logiciel de reconnaissance vocale. Une évaluation ergonomique professionnelle a été réalisée. Le poste de travail de M. Mulder a été modifié, et son bureau a été déménagé dans un endroit plus tranquille, plus proche des toilettes. Sa charge de travail a été allégée, et les attentes sur le plan de sa productivité ont été réduites. Il avait accès à une personne-ressource qui l’encadrait. Sa semaine de travail a été réduite à trois heures par jour, trois jours par semaine.

[120]  La Cour n’est pas en mesure de remettre en question la conclusion de l’enquêtrice, étant donné la preuve d’expert. Mon rôle consiste à contrôler la décision contestée. La Cour suprême a énoncé très clairement que la cour saisie du contrôle judiciaire doit s’abstenir de juger la question de nouveau. Elle doit plutôt décider du caractère raisonnable de la décision, ce qui inclut à la fois le raisonnement suivi et le résultat obtenu : Vavilov au para 83.

[121]  La CCDP a raisonnablement conclu, compte tenu de la preuve, que les limites et restrictions médicales de M. Mulder, conjuguées à ses problèmes de mémoire diagnostiqués, aux répercussions de ses problèmes cognitifs fonctionnels et aux horaires de travail proposés (courtes périodes de travail suivies de pauses), justifiaient la conclusion de l’ARC selon laquelle le télétravail ne serait pas approprié ni propice à un travail valable et utile pour l’ARC ou pour M. Mulder lui-même.

[122]  Une décision rendue par la CCDP ne sera pas infirmée « uniquement parce [que la Cour] aurait pu en arriver à une conclusion différente eu égard à la preuve. La Cour n’a pas à analyser à la loupe le rapport de l’enquêteur ou à reprendre son travail » : Abi-Mansour au para 21.

[123]  La demande est rejetée. Même si l’ARC a demandé l’adjudication des dépens, j’exerce mon pouvoir discrétionnaire et j’estime qu’il n’y a pas lieu d’adjuger les dépens en l’espèce.


JUGEMENT DANS LE DOSSIER T-1210-19

LA COUR ORDONNE que la requête est rejetée, sans dépens.

« E. Susan Elliott »

Juge

Traduction certifiée conforme

Julie Blain McIntosh


COUR FÉDÉRALE

AVOCATS INSCRITS AU DOSSIER


DOSSIER :

T-1210-19

 

INTITULÉ :

ROBERT MULDER c LE PROCUREUR GÉNÉRAL DU CANADA

 

LIEU DE L’AUDIENCE :

Ottawa (Ontario)

 

DATE DE L’AUDIENCE :

LE 11 MARS 2020

 

JUGEMENT ET MOTIFS :

LA JUGE ELLIOTT

 

DATE DES MOTIFS :

LE 30 SEPTEMBRE 2020

 

COMPARUTIONS :

Morgan Rowe

 

POUR LE DEMANDEUR

 

Marshall Jeske

 

POUR LE DÉFENDEUR

 

AVOCATS INSCRITS AU DOSSIER :

Raven, Cameron, Ballantyne & Yazbeck LLP/s.r.l.

Avocats

Ottawa (Ontario)

 

POUR LE DEMANDEUR

 

Procureur général du Canada

Ottawa (Ontario)

 

POUR LE DÉFENDEUR

 

 

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