Date: 19990609
Dossier: T-1303-98
ACTION RÉELLE EN MATIÈRE D'AMIRAUTÉ
OTTAWA (ONTARIO), le 9 juin 1999
DEVANT : LE PROTONOTAIRE ROZA ARONOVITCH
ENTRE
COLD OCEAN INC.,
demanderesse,
et
LES PROPRIÉTAIRES ET TOUTES LES AUTRES
PERSONNES AYANT UN DROIT SUR LE NAVIRE
« GORNOSTAEVKA » ET SA CARGAISON, LES
PROPRIÉTAIRES ET TOUTES LES AUTRES PERSONNES
AYANT UN DROIT SUR LE NAVIRE « VINOGRADNOE » Y COMPRIS,
EN CE QUI CONCERNE LES DEUX NAVIRES, JOINT-STOCK COMPANY G.M.K. CO. LTD.,
défendeurs,
ET ENTRE
ARCTIC UNITED SEAFOOD A.P.S.,
demanderesse reconventionnelle,
et
COLD OCEAN INC.,
défenderesse reconventionnelle.
MOTIFS DE L'ORDONNANCE ET ORDONNANCE
LE PROTONOTAIRE ARONOVITCH
[1] La demanderesse Cold Ocean Inc. (Cold Ocean) a présenté une requête en vue d'obtenir une ordonnance radiant la défense et demande reconventionnelle qu'Arctic United Seafood A.P.S. (Arctic United) a déposée le 5 mars 1999, pour le motif qu'elle n'est pas pertinente et qu'elle est redondante, scandaleuse, frivole et vexatoire au sens de l'article 221 des Règles. Subsidiairement, la demanderesse sollicite une ordonnance prorogeant le délai dans lequel elle peut déposer la défense et demande reconventionnelle.
[2] Le 25 juin 1998, la demanderesse a déposé une déclaration dans laquelle elle alléguait avoir un droit réel sur le navire « VINOGRADNOE » , sur le navire « GORNOSTAEVKA » et sur sa cargaison ainsi qu'un droit personnel opposable à Joint-Stock Company G.M.K. Co. Ltd. Arctic United ayant présenté une requête, en sa qualité d'affréteur coque nue des deux navires et de propriétaire-vendeur de la cargaison qui était à bord du dernier navire susmentionné, les mandats de saisie auxquels les navires et la cargaison étaient assujettis ont été annulés. Le 10 juillet 1998, par des ordonnances rendues par le juge McKay, la déclaration a été radiée sous réserve de toute réclamation que la demanderesse pourrait faire valoir contre Joint-Stock Company G.M.K. Co. Ltd.
[3] Environ huit mois plus tard, le 5 mars 1999, Arctic United a déposé une défense et demande reconventionnelle, réclamant des dommages-intérêts contre Cold Ocean par suite de la saisie des deux navires et de la cargaison qui était à bord de l'un des deux navires.
[4] La demanderesse Cold Ocean, qui est défenderesse reconventionnelle, soutient qu'au 10 juillet 1998, par suite des ordonnances rendues par le juge McKay, il n'y avait plus d'action à l'encontre de laquelle une défense et demande reconventionnelle pouvait être déposée. Quant la dernière partie de l'ordonnance du juge McKay, il est soutenu qu'elle a simplement pour effet d'empêcher Joint-Stock Company G.M.K. Co. Ltd. de plaider la chose jugée à l'égard de toute autre action que la demanderesse Cold Ocean pourrait intenter contre elle.
[5] La défenderesse Arctic United, qui est la demanderesse reconventionnelle, soutient qu'une demande reconventionnelle peut être déposée à la suite de la radiation d'une déclaration; à cet égard, elle se fonde sur l'article 190 des Règles de la Cour fédérale (1998), qui prévoit ce qui suit :
190. A conterclaim may be proceeded with notwithstanding that judgment is given in the action or that the action is stayed or discontinued. |
190. La demande reconventionnelle peut être poursuivie même si un jugement est rendu dans l'action principale ou si l'action principale est suspendue ou abandonnée. |
[6] À mon avis, l'article 190 des Règles vise des actions dans lesquelles une défense et demande reconventionnelle est délivrée avant qu'un jugement soit rendu ou que l'action soit suspendue. Il faut attribuer au mot « poursuivie » figurant à l'article 190 des Règles son sens ordinaire, à savoir qu'une demande reconventionnelle peut « continuer » même si un jugement est rendu dans l'action principale. De fait, aucun des arrêts cités par Arctic United ne dit le contraire ou ne contredit cette interprétation de la règle.
[7] En l'espèce, étant donné que l'action de la demanderesse a été radiée, il n'existait plus aucun fondement justifiant la délivrance d'une défense et demande reconventionnelle. En outre, les Règles de la Cour fédérale (1998) exigent qu'une défense et demande reconventionnelle soit déposée dans les 30 jours de la signification de la déclaration. Étant donné qu'elle n'a pas observé les Règles, Arctic United ne pouvait de toute façon pas déposer sa défense et demande reconventionnelle sans présenter une requête en prorogation de délai.
[8] Par conséquent, eu égard aux circonstances, le dépôt de la défense et demande reconventionnelle est irrégulier et inapproprié, et Arctic United devrait plutôt intenter une action fondée sur la saisie injustifiée.
ORDONNANCE
[9] La requête de la demanderesse est accueillie; la défense et demande reconventionnelle est radiée sous réserve de toute réclamation qu'Arctic United peut faire valoir au moyen d'une action fondée sur une saisie injustifiée.
[10] Les dépens de la requête sont adjugés à la demanderesse.
« Roza Aronovitch »
_______________________________
Protonotaire
Traduction certifiée conforme
L. Parenteau, LL.L.
COUR FÉDÉRALE DU CANADA
SECTION DE PREMIÈRE INSTANCE
AVOCATS INSCRITS AU DOSSIER
No DU GREFFE : T-1303-98
INTITULÉ DE LA CAUSE : COLD OCEAN INC. c. LES PROPRIÉTAIRES ET TOUTES LES AUTRES PERSONNES AYANT UN DROIT SUR LE NAVIRE « GORNOSTAEVKA » ET SA CARGAISON ET AUTRES
REQUÊTE JUGÉE SUR DOSSIER SANS COMPARUTION DES PARTIES
MOTIFS DE L'ORDONNANCE ET ORDONNANCE DU PROTONOTAIRE ARONOVITCH EN DATE DU 9 JUIN 1999
ARGUMENTATION ÉCRITE :
JOSEPH S. HUTCHINGS POUR LA DEMANDERESSE
JOHN R. SINNOTT POUR LA DÉFENDERESSE ARCTIC UNITED SEAFOOD A.P.S.
AVOCATS INSCRITS AU DOSSIER :
POOLE, ATHOUSE, CLARKE, POUR LA DEMANDERESSE
THOMPSON ET THOMAS
CORNER BROOK (TERRE-NEUVE)
LEWIS, SINNOTT, SHORTALL, POUR LA DÉFENDERESSE ARCTIC UNITED
HURLEY SEAFOOD A.P.S.
ST. JOHN'S (TERRE-NEUVE)