Date : 20050407
Dossier : T-1207-04
Référence : 2005 CF 460
ENTRE :
FERDINAND PETER LAMA
Partie demanderesse
et
LE MINISTRE DE LA CITOYENNETÉ ET DE L=IMMIGRATION
Partie défenderesse
MOTIFS DE L=ORDONNANCE
Le juge de MONTIGNY
[1] Le demandeur interjette appel de la décision rendue le 27 janvier 2004 par le juge de la citoyenneté Gilbert Decoste, qui a rejeté sa demande de citoyenneté au motif qu=il ne rencontrait pas les exigences de résidence prévues à l=alinéa 5(1)(c) de la Loi sur la citoyenneté, L.R.C. (1985), ch. C-29 (la Loi). Plus particulièrement, le juge de la citoyenneté a conclu que le demandeur n=avait pas démontré avoir établi sa résidence au Canada ni avant ni après s=y être absenté pendant de nombreuses périodes de temps.
[2] Il convient de noter qu=une demande de citoyenneté a également été faite par son épouse (dossier T-1208-04), sa fille (dossier T-1210-04) et son fils (dossier T-1211-04); leur demande a été rejetée par le même juge de la citoyenneté, et chacune de ces décisions a fait l=objet d=un appel devant cette Cour, dont l=audition a eu lieu les 7 et 8 février dernier. L=épouse du demandeur s=est toutefois désistée de son appel lors de l=audition.
Contexte
[3] Le demandeur est originaire de Jérusalem et a résidé en Jordanie pendant près de douze ans avant de venir au Canada. Il est arrivé au pays le 18 août 1998 avec un visa de touriste pour lui et son épouse, tandis que sa fille a obtenu un visa d=étudiant. Il a par la suite obtenu le statut de résident permanent le 22 novembre 1999. Il a déposé sa demande de citoyenneté le 18 août 2002.
[4] Le nombre de jours où le demandeur a effectivement résidé au Canada durant cette période de quatre ans (du 18 août 1998 au 19 août 2002) a été difficile à établir, compte tenu du fait que des divergences sont apparues entre les absences déclarées dans la demande de citoyenneté du demandeur, dans son questionnaire de résidence et dans l=affidavit déposé au soutien du présent appel. Ces différentes absences ont été motivées par ses activités professionnelles, la maladie puis le décès de sa mère qui habitait toujours au Moyen-Orient, la mort de son beau-père (également en Jordanie), le mariage de sa fille et des procédures légales liées à la vente d=une propriété en Jordanie.
Décision
[5] Après avoir noté les divergences entre la demande de citoyenneté canadienne du demandeur (où il déclare avoir été absent du Canada pendant 543 jours durant la période de référence prévue par la Loi) et le questionnaire sur sa résidence (où ses absences totalisent maintenant 692 jours), et avoir relevé que le demandeur ne possède pas de propriété au Canada, le juge de la citoyenneté a procédé à l=analyse du dossier en appliquant les critères développés par la juge Reed dans l=arrêt Re Koo, [1993] 1 F.C. 286 (T.D.) pour déterminer s=il avait centralisé son mode d=existence au Canada.
[6] Pour plus de commodité, nous reproduisons ci-après l=analyse du juge de la citoyenneté :
ANALYSE :
Pour décider si le demandeur avait démontré que le Canada est le pays où il a concentré son existence, j=ai tenu compte des questions posées par le juge Reed lorsqu=elle a rendu sa décision dans l=affaire RE KOO (1992) 19 Imm. L.R.(2d) 1,59 F.T.R. 27, (1993) 1 F.C. 286 (T.D.)
Voici comment j=ai traité chacune de ces questions :
1- L=intéressé se trouvait-il au Canada depuis longtemps avant sa première absence? Ses absences sont-elles récentes et ont-elles eu lieu juste avant la présentation de la demande de citoyenneté?
Le requérant déclare avoir quitté le Canada 21 jours après son arrivée au Canada pour une visite de 5 jours aux U.S.A. De retour au Canada, il est resté 50 jours et est reparti en Jordanie avec sa femme en attendant l=obtention de son Visa de résident permanent qu=il a obtenu le 16 novembre 1999 à Paris. Il est revenu au Canada le 22 novembre 1999. Le requérant a présenté sa demande de citoyenneté le 18 août 2002 soit 15 jours après un retour de séjour de 1 mois dans plusieurs pays du Moyen-Orient.
2- Où résident les membres de la famille immédiate du demandeur et les personnes à sa charge (les membres de la famille élargie)?
Dans sa demande, le requérant déclare vivre avec sa femme et ses deux enfants à Montréal dans un appartement loué. Sa famille élargie vit au Moyen-Orient.
3- Quand on examine le profil de sa présence effective au Canada, peut-on conclure que l=intéressé revient chez lui au Canada ou qu=il n=est qu=en visite?
Le requérant a déclaré s=être absenté du Canada 13 fois entre le 22 novembre 1999 et le 18 août 2002 totalisant 238 jours d=absences. Ses séjours au Canada ont été moins de deux mois à 9 reprises, moins de 3 mois à 2 reprises et une fois 5 mois.
4- Quelle est l=étendue des absences du demandeur, s=il ne lui manque que quelques jours de résidence pour satisfaire l=exigence de 1095 jours, il est plus facile de conclure à la résidence réputée que si ces absences sont importantes?
Pour la période de référence, il manque 362 jours au requérant pour satisfaire le minimum de 1095 jours prévus dans la Loi. L=écart est très important.
5- Ces absences sont-elles imputables à une situation manifestement temporaire, comme du travail de missionnaire à l=étranger, des études à l=étranger, un travail temporaire à l=étranger, le fait d=accompagner un conjoint qui a accepté un travail temporaire à l=étranger.
Dans le questionnaire sur le résidence, le requérant déclare à la question 9 que ses absences sont liées à son travail de consultants [sic] et au règlement d=un contentieux concernant une propriété en Jordanie. Toutefois parmi les raisons données par le requérant pour expliquer ses absences on dénombre seulement 29 jours pour ses activités professionnelles sur un total de 238 jours durant la période du 22 novembre 1999 au 18 août 2002.
6- Quelle est la qualité des liens du demandeur avec le Canada? Sont-ils plus importants que ceux qu=il a avec d=autres pays?
Les liens que le requérant a gardés avec le Canada sont moins importants que ceux qu=il a gardés avec les pays du Moyen-Orient. Entre le 18 août 2002 date du dépôt de sa demande et le 17 août 2003 le requérant a passé 192 jours à l=extérieur du Canada sur un total de 365 jours pour cette période soit 53% du temps. La moyenne de jours présents au Canada pendant la période de référence est de 50%. C=est donc dire que le requérant a passé plus de temps à l=extérieur du Canada durant les cinq années entre le 18 août 1998 et le 18 août 2003.
[7] Suite à cette analyse, le juge de la citoyenneté a conclu que le demandeur ne satisfaisait pas aux exigences de l=alinéa 5(1)(c) de la Loi. Il a par ailleurs cru bon de noter que le requérant n=avait pas déclaré toutes ses absences dans sa demande, et que les adresses déclarées par ses enfants ne concordaient pas toujours avec celles déclarées par le demandeur, alors que ce dernier avait prétendu qu=ils avaient tous vécu dans le même appartement pendant la période de référence prescrite par la Loi.
Prétentions du demandeur
[8] Le demandeur a prétendu que le juge de la citoyenneté avait erré en fait et en droit pour les motifs suivants :
! Il aurait dû se concentrer sur la période à partir de laquelle le demandeur a été légalement admis au Canada à titre de résident permanent, puisqu=il ne pouvait séjourner au Canada que comme touriste avant le 22 novembre 1999;
! Il n=a pas informé le demandeur des doutes qu=il entretenait eu égard à la véritable adresse où lui et sa famille ont résidé pendant la période de référence;
! Il n=a pas demandé où se trouvait la famille élargie du demandeur et a erré en concluant que celle-ci se trouvait en Jordanie;
! Il n=a pas demandé pourquoi les factures de téléphone émanaient d=Ottawa et ne lui a pas donné la possibilité de fournir une explication;
! Il n=a pas tenu compte des liens qu=il a développés au Canada;
! Il n=a pas considéré les motifs qui l=ont amené à voyager hors du pays et n=a pas pris en considération que son mode de vie, sa famille et son emploi sont à Montréal.
[9] Enfin, le demandeur a soutenu que le juge de la citoyenneté avait erré en lui imposant erronément un fardeau de preuve hors de tout doute raisonnable, plutôt que celui de la prépondérance des probabilités.
Prétentions du défendeur
[10] Le défendeur prétend d=abord que le juge de la citoyenneté pouvait opter pour l=une ou l=autre des trois interprétations traditionnellement retenues par cette Cour pour déterminer si le demandeur respecte les exigences de l=alinéa 5(1)(c) de la Loi, à condition de l=appliquer correctement. Selon l=approche souple retenue dans l=arrêt Re Koo, il est possible de résider au Canada au sens de la Loi sans y être physiquement présent; il n=en demeure pas moins, selon le défendeur, que la présence physique demeure le facteur le plus important. Or, peu importe la version des faits que l=on retient, le demandeur est très loin de satisfaire le nombre minimal de jours requis pour satisfaire à l=exigence de l=alinéa 5(1)(c).
[11] D=autre part, le défendeur soutient que le juge de la citoyenneté a tenu compte de l=ensemble de la preuve et a correctement conclu que le demandeur n=avait pas centralisé son mode de vie au Canada après avoir examiné les critères énoncés dans l=arrêt Re Koo. D=abord, le demandeur n=a pas résidé au Canada pour une longue période avant ses nombreuses absences. Il a par ailleurs fait de nombreux voyages au Moyen-Orient pour des raisons familiales, ce qui étaye la conclusion du juge de la citoyenneté sur sa famille élargie. Les retours au Canada du demandeur ont été de courte durée et le nombre de jours manquants était important. Ses absences n=étaient pas causées par une situation temporaire, mais résultaient plutôt de son emploi comme consultant et du règlement d=un litige en Jordanie. Enfin, la preuve révèle que les liens qu=a gardés le demandeur avec le Canada sont moins importants que ceux qu=il a conservés avec les pays du Moyen-Orient, et les éléments de preuve déposés (relevés bancaires, comptes de téléphone et d=électricité) sont des éléments de preuve peu probants pour prouver la résidence du demandeur aux fins de sa demande de citoyenneté.
[12] Le défendeur allègue en conclusion que la norme de contrôle applicable dans le cadre d=appels en matière de citoyenneté est celle de la décision raisonnable simpliciter, et conclut que le juge de la citoyenneté pouvait raisonnablement, compte tenu des éléments de preuve dont il disposait, rendre la décision qu=il a rendue.
Dispositions législatives applicables
5.(1) Le ministre attribue la citoyenneté à toute personne qui, à la fois :
[. . .]
c) a été légalement admise au Canada à titre de résident permanent, n=a pas depuis perdu ce titre en application de l=article 24 de la Loi sur l=immigration, et a, dans les quatre ans qui ont précédé la date de sa demande, résidé au Canada pendant au moins trois ans en tout, la durée de sa résidence étant calculée de la manière suivante :
(i) un demi-jour pour chaque jour de résidence au Canada avant son admission à titre de résident permanent;
(ii) un jour pour chaque jour de résidence au Canada après son admission à titre de résident permanent. |
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5. (1) The Minister shall grant citizenship to any person who
[. . .]
(c) has been lawfully admitted to Canada for permanent residence, has not ceased since such admission to be a permanent resident pursuant to section 24 of the Immigration Act, and has, within the four years immediately preceding the date of his application, accumulated at least three years of residence in Canada calculated in the following manner:
(iii) for every day during which the person was resident in Canada before his lawful admission to Canada for permanent residence the person shall be deemed to have accumulated one-half of a day of residence, and
(iv) for every day during which the person was resident in Canada after his lawful admission to Canada for permanent residence the person shall be deemed to have accumulated one day of residence;
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Analyse
[13] La seule question soulevée par le présent appel est celle de savoir si le juge de la citoyenneté a erré en concluant que le demandeur ne remplissait pas les conditions de résidence prévues par la Loi. De façon plus précise, il nous faut déterminer si le juge de la citoyenneté a correctement interprété l=exigence de * résidence +, compte tenu des faits qui ont été portés à son attention.
[14] Pour répondre à cette question, il nous faut d=abord déterminer la norme de contrôle applicable. Dans le passé, certains juges se sont inspirés de la décision rendue par le juge Lutfy (tel était alors son titre) dans l=arrêt Lam c. Canada (M.C.I.) ([1999] A.C.F. No. 410) pour conclure que la norme de contrôle appropriée pour un appel de la décision d=un juge de la citoyenneté était celle de la décision correcte.
[15] Plus récemment, un consensus semble s=être forgé autour de la norme de la décision raisonnable simpliciter (voir notamment les arrêts suivants : Chen v. Canada (Minister of Citizenship and Immigration) 2004 FC 1693, [2004] F.C.J. No. 2069; Rasaei v. Canada (Minister of Citizenship and Immigration) 2004 FC 1688, [2004] F.C.J. No. 2051; Gunnarson v. Canada (Minister of Citizenship and Immigration) 2004 FC 1592, [2004] F.C.J. No. 1913; Canada (Minister of Citizenship and Immigration) v. Chen 2004 FC 848, [2004] F.C.J. No. 1040; Canada (Minister of Citizenship and Immigration) v. Fu 2004 FC 60, [2004] F.C.J. No. 88; Canada (Minister of Citizenship and Immigration) v. Chang 2003 FC 1472, [2003] F.C.J. No. 1871; Canada (M.C.I.) c. Mueller, [2005] F.C. 227.
[16] Ma collègue la juge Tremblay-Lamer a justifié cette approche dans les termes suivants :
En l=espèce, lorsque la Cour doit vérifier que le juge de la citoyenneté a appliqué l=un des critères admis de résidence aux faits, cela soulève, à mon avis, une question mixte de droit et de fait (Canada (Directeur des enquêtes et recherches) c. Southam Inc., [1997] 1 R.C.S. 748). Compte tenu du fait qu=il faille accorder un certain degré de déférence à l=égard des connaissances et de l=expérience particulières du juge de la citoyenneté, je conclurais que la norme de contrôle applicable est celle de la décision raisonnable simpliciter. (Canada (M.C.I.) c. Fu, [2004] A.C.F. No. 88, au par. 7)
[17] Compte tenu de l=approche pragmatique et fonctionnelle développée par la Cour suprême du Canada, notamment dans les arrêts Dr. Q c. College of Physicians and Surgeons of British Columbia, [2003] 1 S.C.R. 226 et Law Society of New Brunswick c. Ryan, [2003] 1 S.C.R. 247, je suis d=avis que cette norme de contrôle est effectivement la plus appropriée dans les circonstances. Par conséquent, il convient de faire preuve de déférence dans la mesure où il est démontré que le juge a compris la jurisprudence et qu'il a apprécié les faits et les a appliqués au critère prévu par la Loi.
[18] Un examen attentif de la jurisprudence de cette Cour révèle que différentes interprétations ont été retenues quant à l=interprétation qui doit être donnée à l=exigence de résidence que l=on retrouve à l=alinéa 5(1)(c) de la Loi. Un juge de la citoyenneté peut adopter l=une ou l=autre de ces différentes interprétations pour déterminer si le demandeur satisfait aux exigences de la Loi; dans la mesure ou le juge n=a pas commis d=erreur déraisonnable en appliquant cette interprétation à la preuve qui lui a été soumise, cette Cour n=interviendra pas.
[19] Étant donné que le demandeur n=avait manifestement pas résidé au Canada pendant au moins trois ans au cours des quatre années ayant précédé sa demande, le juge de la citoyenneté a opté pour l=approche plus souple développée par le juge Thurlow dans l=arrêt In re Citizenship Act and in re Antonios E. Papadogiorgakis, [1978] 2 F.C. 208. Cette approche consiste essentiellement à déterminer si le demandeur a centralisé son mode d=existence au Canada. Pour répondre à cette question, Mme la juge Reed a énoncé dans l=arrêt Re Koo six facteurs qui peuvent être pris en considération :
1) la personne était-elle physiquement présente au Canada durant une période prolongée avant de s=absenter juste avant la date de sa demande de citoyenneté?
2) où résident la famille proche et les personnes à charge (ainsi que la famille étendue) du requérant?
3) la forme de présence physique de la personne au Canada dénote-t-elle que cette dernière revient dans son pays ou, alors, qu=elle n=est qu=en visite?
4) quelle est l=étendue des absences physiques (lorsqu=il ne manque à un requérant que quelques jours pour atteindre le nombre total de 1 095 jours, il est plus facile de conclure à une résidence réputée que lorsque les absences en question sont considérables)?
5) l=absence physique est-elle imputable à une situation manifestement temporaire (par exemple, avoir quitté le Canada pour travailler comme missionnaire, suivre des études, exécuter un emploi temporaire ou accompagner son conjoint, qui a accepté un emploi temporaire à l=étranger)?
6) quelle est la qualité des attaches du requérant avec le Canada: sont-elles plus importantes que celles qui existent avec un autre pays?
[20] Après avoir considéré attentivement les motifs du juge de la citoyenneté, rien ne me permet de croire qu=il a erré en fait ou en droit dans l=application de la démarche qu=il a retenue. Contrairement à ce que soutient le demandeur, il n=a pas imposé un fardeau de preuve trop onéreux au demandeur et ses conclusions s=appuyaient entièrement sur la preuve qui lui a été soumise.
[21] Le demandeur ne peut reprocher au juge Decoste d=avoir considéré la période du 18 août 1998 au 22 novembre 1999 aux fins de déterminer les jours de présence au Canada. Dans la mesure où le demandeur a choisi de présenter sa demande de citoyenneté le 18 août 2002, il n=avait d=autre choix que de tenir compte des quatre années précédentes pour établir s=il satisfaisait la période minimale de résidence. Si le demandeur ne pouvait légalement établir sa résidence au Canada avant le 22 novembre 1999, il n=avait qu=à différer la présentation de sa demande de citoyenneté.
[22] Peu importe le nombre de jours où le demandeur a effectivement résidé au Canada durant la période de référence (et à cet égard, les nombreuses divergences entre les différentes déclarations du demandeur ne pouvaient que miner sa crédibilité), le fait qu=il se soit absenté du pays pour de longues périodes et de façon régulière autorisait certainement le juge de la citoyenneté à conclure qu=il n=avait pas centralisé son mode de vie au Canada. L=écart entre la présence requise au Canada (trois ans) et sa présence effective était considérable.
[23] Au surplus, le juge a noté qu=entre le 22 novembre 1999 et le 18 août 2002, le demandeur s=était absenté du Canada à treize reprises, et ses séjours au Canada entre ces absences ont été de moins de deux mois à neuf reprises. Une telle situation pouvait certes l=amener à conclure qu=il revenait au Canada en visite.
[24] Plusieurs de ces absences étaient motivées par des vacances, des visites à la famille et des activités professionnelles. La jurisprudence de cette Cour indique clairement qu=il s=agit là d=un choix personnel qui ne saurait dispenser le demandeur des exigences prévues par la Loi. Comme le rappelait le juge Walsh dans l=arrêt Re Leung, [1991] A.C.F. No. 160 :
Un grand nombre de citoyens canadiens, qu=ils soient nés au Canada ou naturalisés, doivent passer une grande partie de leur temps à l=étranger en relation avec leur entreprise, et il s=agit là de leur choix. Une personne qui veut obtenir la citoyenneté, toutefois, ne dispose pas de la même liberté, à cause des dispositions du paragraphe 5(1) de la Loi.
Voir aussi : Alibhal c, Canada (M.C.I.), [2003] A.C.F. No. 248; Sharma c. Canada (M.C.I.), [2003] A.C.F. No. 1763; Shreshta c. Canada (M.C.I.), [2003] A.C.F. No. 778.
[25] Enfin, le juge de la citoyenneté a eu raison d=accorder peu de valeur probante aux éléments de preuve déposés par le demandeur au soutien de sa demande, notamment les rapports d=impôt, les baux, la carte d=assurance sociale, d=assurance maladie et autres, le permis de conduire, les relevés bancaires, les comptes de téléphone et d=électricité. Cette Cour a jugé à plusieurs reprises que de tels éléments de preuve ne suffisent pas pour établir que le demandeur a centralisé son mode de vie au Canada : voir Re Hui, [1994] A.C.F. No. 238.
[26] Tenant compte de tous ces facteurs et des problèmes de crédibilité du demandeur eu égard au nombre de jours où il a effectivement été présent au Canada, le juge de la citoyenneté pouvait certes conclure que le demandeur n=avait pas centralisé son mode de vie au Canada et ne remplissait pas en conséquence les exigences prévues par l=alinéa 5(1)(c) de la Loi.
[27] Je ne doute pas du fait que le demandeur désire vraiment obtenir la citoyenneté canadienne. Je suis cependant d=avis que sa demande était prématurée et que le juge de la citoyenneté n=a pas erré en la lui refusant, compte tenu de la preuve qui était devant lui. Il lui sera cependant loisible de présenter une nouvelle demande en temps opportun.
(s) *Yves de Montigny +
Juge
COUR FÉDÉRALE
AVOCATS INSCRITS AU DOSSIER
DOSSIER: T-1207-04
INTITULÉ: FERDINAND PETER LAMA c. LE MINISTRE DE LA CITOYENNETÉ ET DE L=IMMIGRATION
LIEU DE L=AUDIENCE: Montréal (Québec)
DATE DE L=AUDIENCE: 7 février 2005
MOTIFS DE L=ORDONNANCE: le juge de Montigny
DATE DE L=ORDONNANCE: 7 avril 2005
COMPARUTIONS:
MeAnnie Kenane POUR LA PARTIE DEMANDERESSE
MeAlexandre Tavadian POUR LA PARTIE DÉFENDERESSE
AVOCATS INSCRITS AU DOSSIER:
Étude Kenane
Montréal (Québec) POUR LA PARTIE DEMANDERESSE
Me John H. Sims, c.r.
Sous-procureur général du Canada
Ottawa (Ontario) POUR LA PARTIE DÉFENDERESSE