Date : 19980513
Dossier : IMM-2094-98
ENTRE
MOHAMMAD ALI NASTRANI ET
HOURILAGHA KHERADPARVARDEH,
demandeurs,
et
LE MINISTRE DE LA CITOYENNETÉ ET DE L'IMMIGRATION,
défendeur.
MOTIFS DE L'ORDONNANCE
LE JUGE LUTFY
[1] Les demandeurs ont établi, au moins pour les fins de la présente requête en sursis à l'exécution de leur expulsion vers l'Iran, l'existence d'une question sérieuse concernant le fait pour l'agente d'immigration d'entraver l'exercice de son pouvoir discrétionnaire dans son examen de leur demande fondée sur des considérations humanitaires.
[2] Les demandeurs s'appuient sur la déclaration orale de l'agente d'immigration selon laquelle elle n'a jamais accepté un cas où les intéressés ont touché des prestations d'aide sociale.
[3] Sont également préoccupantes et pertinentes ses notes écrites concernant son refus de se pencher sur la crainte des demandeurs de retourner en Iran :
[TRADUCTION] Le couple a également exprimé son inquiétude à l'idée de retourner en Iran, étant donné le climat politique qui y régnait, mais il a exercé son droit de revendiquer le statut de réfugié et de poursuivre une revendication du statut de réfugié au Canada, et cette revendication a été rejetée. Je n'aborderai pas les inquiétudes du couple relativement à sa crainte de retourner en Iran. |
[4] Le tribunal de la Section du statut de réfugié a reconnu la crédibilité des demandeurs, mais il a rejeté, pour d'autres motifs, leur revendication du statut de réfugié. Les demandeurs ont au moins quatre enfants qui sont arrivés au Canada en tant que réfugiés venant de l'Iran et qui sont maintenant des citoyens canadiens. Le demandeur Nastrani, en plus des difficultés connues par ses enfants, a purgé une peine de quatorze mois pour avoir aidé une de ses filles à fuir l'Iran après avoir obtenu la libération de celle-ci qui avait été condamnée à une peine d'emprisonnement de dix ans, et pour sa propre implication dans un groupe d'opposition politique. Il a été libéré au début de 1993. Deux autres fils des demandeurs ont été exécutés en 1982 pour leur participation au même groupe d'opposition politique. Les demandeurs n'ont plus de parents en Iran.
[5] En concluant que le demandeur n'avait pas raison de craindre d'être éventuellement persécuté, le tribunal de la SSR a noté qu'il avait de la sympathie pour la situation des demandeurs, et il a ajouté qu'il n'avait pas compétence pour examiner des considérations humanitaires. L'agente d'immigration a décidé de ne pas examiner les inquiétudes des demandeurs quant à leur retour parce que leur revendication du statut de réfugié a été rejetée. Il me semblerait que la reconnaissance par le tribunal de la crédibilité des souffrances des demandeurs en Iran et ses commentaires concernant les considérations humanitaires sont des questions qui auraient dû faire partie de l'appréciation faite par l'agente d'immigration. La décision écrite de celle-ci indique qu'elles ne l'ont pas été.
[6] L'argument des demandeurs selon lequel la déclaration orale et la décision écrite de l'agente d'immigration démontrent qu'elle a entravé l'exercice de son pouvoir discrétionnaire n'est pas un argument qui est futile ou vexatoire. Il est satisfait au critère de la question sérieuse.
[7] De même, compte tenu des faits exposés au paragraphe 4, je suis convaincu que les demandeurs subiraient un préjudice irréparable dans l'éventualité de leur retour en Iran. Le demandeur Nastrani est âgé de 76 ans, et son épouse, de 70 ans. Le risque de harcèlement et de détention possible, même pour une brève période, dans l'éventualité de leur retour en Iran est réel. Cela est particulièrement pertinent étant donné que son emprisonnement a eu lieu il y a seulement cinq ans. Il s'agit d'un préjudice auquel les demandeurs, à leur âge et avec l'histoire de la famille en Iran, n'ont pas à s'exposer. Pour les mêmes raisons, les circonstances particulières de ces demandeurs en faveur de qui la prépondérance des inconvénients penche l'emportent sur l'intérêt habituel qu'a le défendeur à exécuter la mesure de renvoi dès que les circonstances le permettent.
[8] La demande de suspension de la mesure de renvoi dont l'exécution est prévue pour aujourd'hui est accueillie.
Allan Lutfy
Juge
Toronto (Ontario)
Le 13 mai 1998
Traduction certifiée conforme
Tan, Trinh-viet
COUR FÉDÉRALE DU CANADA
Avocats et procureurs inscrits au dossier
No DU GREFFE : IMM-2094-98 |
INTITULÉ DE LA CAUSE : MOHAMMAD ALI NASTRANI ET |
HOURILAGHA KHERADPARVARDEH, |
et |
LE MINISTRE DE LA CITOYENNETÉ ET DE L'IMMIGRATION |
DATE DE L'AUDIENCE : Le 12 mai 1998 |
LIEU DE L'AUDIENCE : Toronto (Ontario) |
MOTIFS DE L'ORDONNANCE PAR : le juge Lutfy
EN DATE DU 13 mai 1998 |
ONT COMPARU :
Maureen Silcoff pour les demandeurs |
Toby J. Hoffman pour le défendeur |
PROCUREURS INSCRITS AU DOSSIER :
Lewis & Associates |
Avocats |
175, rue Harbord |
Toronto (Ontario) |
M5S 1H3 pour le demandeur |
George Thomson |
Sous-procureur général du Canada |
pour le défendeur |
COUR FÉDÉRALE DU CANADA
Date : 19980513 |
Dossier : IMM-2094-98 |
ENTRE |
MOHAMMAD ALI NASTRANI ET |
HOURILAGHA KHERADPARVARDEH, |
demandeurs, |
et |
LE MINISTRE DE LA CITOYENNETÉ ET DE L'IMMIGRATION, |
défendeur. |
MOTIFS DE L'ORDONNANCE |