Date : 20011114
Dossier : 01-T-53
Référence neutre : 2001 CFPI 1251
Ottawa (Ontario), le 14 novembre 2001
EN PRÉSENCE DE MONSIEUR LE JUGE BLANCHARD
ENTRE :
STEVEN K. WHITMAN
demandeur
- et -
LE PROCUREUR GÉNÉRAL DU CANADA
défendeur
Dossier : 00-T-54
ET ENTRE :
MARGO J. WHITMAN
demanderesse
- et -
LE PROCUREUR GÉNÉRAL DU CANADA
défendeur
MOTIFS DE L'ORDONNANCE ET ORDONNANCE
1. Il s'agit d'une requête en prorogation du délai de dépôt d'un avis de demande de contrôle judiciaire de la décision rendue le 23 juillet 2001 par l'Agence des douanes et du revenu du Canada (l'ADRC).
Les faits
2. Le 5 mars 2001, le demandeur a demandé une exemption d'intérêts à l'ADRC relativement à un état de compte d'impôts personnels visant les années d'imposition 1991, 1992 et 1993 en vertu des dispositions d'équité.
3. Un directeur adjoint du Recouvrement des recettes du Bureau des services fiscaux de Halifax s'est penché sur la demande et, par lettre du 28 mai 2001, il a informé le demandeur qu'il l'avait rejetée. Dans la même lettre, le directeur adjoint a également avisé le demandeur de son droit de solliciter la révision de cette décision par un organisme indépendant.
4. Vers le 28 juin 2001, le demandeur a sollicité la révision de cette décision. Cette révision a eu lieu et, par lettre du 23 juillet 2001, le directeur du Bureau des services fiscaux de Halifax a informé le demandeur que la décision était bien fondée. Il l'a également avisé de son droit de présenter une demande de contrôle judiciaire auprès de la Cour fédérale dans un délai de trente (30) jours de la date de la lettre s'il estimait que le pouvoir discrétionnaire relatif à la demande d'exemption avait été mal exercé.
5. Le demandeur a admis avoir reçu la lettre et ne pas avoir respecté le délai de trente (30) jours pour déposer un avis de demande de contrôle judiciaire.
6. Le demandeur présente cette requête en prorogation du délai de dépôt d'un avis de demande de contrôle judiciaire.
7. Depuis la présentation de la demande d'exemption d'intérêts initiale, le demandeur se représente lui-même.
La question en litige
8. La Cour devrait-elle accorder une prorogation du délai de dépôt d'un avis de demande de contrôle judiciaire?
Analyse
9. La règle 8 des Règles de la Cour fédérale (1998), DORS/98-106, prévoit que la Cour peut, sur requête, proroger ou abréger tout délai prévu par les Règles. Dans l'arrêt Canada c. Hennelly (1999), en ligne : QL, A.C.F. no 846, au paragraphe 3, le juge d'appel McDonald a énoncé les critères que doit respecter la partie sollicitant une prorogation de délai, à savoir :
1. Une intention constante de poursuivre sa demande;
2. que la demande est bien fondée;
3. que le défendeur ne subit pas de préjudice en raison du délai; et
4. qu'il existe une explication raisonnable justifiant le délai.
10. En outre, on peut tenir compte des facteurs supplémentaires que la Cour d'appel fédérale a exposés dans l'arrêt Grewal, [1985] 2 C.F. 263 (C.A.F.). Pour reprendre les termes du juge en chef Thurlow (aux pages 272, 277 et 278) :
Il me semble [...] [qu'on] doit tout d'abord se demander si, dans les circonstances mises en preuve, la prorogation du délai est nécessaire pour que justice soit faite entre les parties.
[...]
[...] en dernière analyse, la question de savoir si l'explication donnée justifie la prorogation nécessaire doit dépendre des faits de l'espèce et, à mon avis, nous commettrions une erreur si nous tentions d'énoncer des règles qui auraient l'effet de restreindre un pouvoir discrétionnaire que le Parlement n'a pas jugé bon de restreindre.
Dans ses motifs distincts, le juge Marceau a souligné ce qui suit (à la page 282) :
Il me semble que, pour apprécier la situation comme il se doit et tirer une conclusion valide, il est essentiel de balancer les différents facteurs impliqués. Par exemple, une explication parfaitement convaincante justifiant le retard peut entraîner une réponse positive même si les arguments appuyant la contestation du jugement paraissent faibles et, de la même façon, une très bonne cause peut contrebalancer une justification du retard moins convaincante.
11. En l'espèce, j'estime que la demanderesse a exprimé une intention constante de poursuivre sa demande et aucun des éléments de preuve dont je suis saisi ne m'indique le contraire. La demanderesse a témoigné croire que sa demande avait été refusée en raison de l'impression selon laquelle sa situation financière s'était améliorée. La demanderesse a également affirmé qu'elle était pénalisée car elle a [Traduction] « travaillé fort et s'est employée avec intégrité à faire "ce qui est juste" et à remettre leur vie en ordre; tandis qu'on semble être plus tolérant envers ceux qui ont abandonné ou décidé de rester indéfiniment dans leur situation » .
12. La preuve indique que la demanderesse a tenté à plusieurs reprises d'obtenir des renseignements de la part des fonctionnaires de l'ADRC. Lors de l'audition de la présente affaire, elle a avisé la Cour qu'elle s'était rendu à ses bureaux le 1er octobre 2001 et qu'elle avait parlé à ses fonctionnaires une semaine plus tôt.
13. En l'espèce, je ne peux pas conclure qu'il y a une preuve solide à l'appui de la contestation de la décision. Je suis toutefois convaincu, à la lumière des faits de la présente affaire, qu'il faut proroger le délai pour que justice soit rendue entre les parties compte tenu du retard relativement court, soit 11 jours.
14. Pour les motifs qui précèdent, j'exerce mon pouvoir discrétionnaire d'accueillir la requête.
ORDONNANCE
LA COUR ORDONNE :
1. Les demandeurs ont dix (10) jours de la date de la présente ordonnance pour déposer et signifier leur demande de contrôle judiciaire des décisions rendues le 23 juillet 2001 par l'Agence des douanes et du revenu du Canada.
« Edmond P. Blanchard »
Juge
Traduction certifiée conforme
Pierre St-Laurent, LL.M., Trad. a.
COUR FÉDÉRALE DU CANADA
SECTION DE PREMIÈRE INSTANCE
AVOCATS INSCRITS AU DOSSIER
DOSSIER : 01-T-53 et 01-T-54
INTITULÉ : Steven K. Whitman c. Le procureur général du Canada
Margo J. Whitman c. Le procureur général du Canada
LIEU DE L'AUDIENCE : Halifax (Nouvelle-Écosse)
DATE DE L'AUDIENCE : Le 10 octobre 2001
MOTIFS DE L'ORDONNANCE PAR : MONSIEUR LE JUGE BLANCHARD
EN DATE DU : 14 novembre 2001
ONT COMPARU
M. Steven K. Whitman DEMANDEUR POUR SON PROPRE COMPTE (01-T-53)
Mme Margo J. Whitman DEMANDERESSE POUR SON PROPRE COMPTE (01-T-54)
Mme Dominique Gallant POUR LE DÉFENDEUR
AVOCATS INSCRITS AU DOSSIER
M. Steven K. Whitman DEMANDEURS POUR LEUR PROPRE
Mme Margo J. Whitman COMPTE
Upper Tantallon (Nouvelle-Écosse)
M. Morris Rosenberg POUR LE DÉFENDEUR
Sous-procureur général du Canada
Halifax (Nouvelle-Écosse)