Date : 20031110
Dossier: IMM-5350-01
Référence : 2003 CF 1325
ENTRE :
SHANTONU SAHA
demandeur
-et-
LE MINISTRE DE LA CITOYENNETÉ ET DE L'IMMIGRATION
défendeur
[1] Le demandeur a 22 ans et est originaire de New Delhi, en Inde. Sa tante maternelle est une citoyenne canadienne. Au printemps 2001, il a été admis à un collège canadien pour étudier l'anglais pour l'année universitaire 2001-2002. Sa tante a accepté d'assumer ses frais de subsistance pendant son séjour au Canada. Il a acquitté en entier les frais de scolarité de 10 055 $ du collège et a fait une demande de visa d'étudiant au Haut-commissariat du Canada à New Delhi.
[2] Le demandeur a fait trois demandes de visa d'étudiant en 2001, toutes infructueuses. Elles ont été rejetées le 13 juin, le 8 octobre et le 23 octobre. La dernière demande fait l'objet de la présente affaire.
La décision
[3] L'agente des visas qui a étudié la troisième demande du demandeur est Mme Soyoung Park.
[4] Dans une lettre type datée du 23 octobre 2001, Mme Park a rejeté la troisième demande pour la raison suivante :
[traduction] Vous n'avez pas démontré que vous cherchez à être admis pour une fin temporaire puisque [...] vous n'avez pas pu éclaircir de façon adéquate des incompatibilités soulevées dans votre demande et, par conséquent, vous n'avez pas pu convaincre l'agente des visas que les raisons que vous avez mentionnées pour visiter le Canada étaient authentiques.
[5] Toutefois, dans un affidavit signé le 5 février 2002, Mme Park a dit qu'elle avait conclu que la prétention du demandeur selon laquelle il voulait aller au Canada pour apprendre l'anglais n'était pas crédible parce que :
[traduction]
12. Après avoir étudié tous les éléments de preuve, je n'étais pas convaincue que le demandeur avait des motifs crédibles pour étudier au Canada. J'ai tenu compte de différents facteurs en rendant ma décision de refuser sa demande, y compris les aptitudes linguistiques du demandeur en anglais comme cela a été démontré par sa capacité de subir son entrevue préalable en anglais, son manque d'effort à améliorer ses aptitudes en anglais au moyen de cours largement disponibles en Inde, et les réponses qu'offrait le demandeur aux questions touchant ses raisons de vouloir étudier au Canada.
13. En bout de ligne, le demandeur n'a pas réussi à me convaincre qu'il aurait étudié l'anglais au Canada et qu'il quitterait le Canada après ses études.
Les questions
[6] Le demandeur soulève trois questions. Toutefois, pour les motifs qui suivront, il n'est nécessaire de tenir compte que de la première.
Première question : L'agente des visas a-t-elle commis une erreur lorsqu'elle n'a pas fourni de motifs suffisants pour expliquer son refus de la demande?
Analyse
[7] Le demandeur prétend que la demande a été rejetée pour le motif mentionné dans les notes du STIDI et non pour les motifs mentionnés dans la lettre de Mme Park datée du 23 octobre 2001. J'irais plus loin. À mon avis, il ressort clairement de l'affidavit de Mme Park que le visa a été rejeté parce qu'elle n'a pas accepté ses raisons de venir au Canada, c'est-à-dire le besoin de parfaire ses connaissances en anglais. Cependant, il n'y a rien dans la lettre du 23 octobre qui permettrait au demandeur de conclure que c'était là le motif. La lettre parle seulement des « incompatibilités soulevées » par la demande. L'incompatibilité n'est pas en cause ici; plutôt, l'agente des visas n'a pas accepté le fait que le demandeur devait venir au Canada pour parfaire ses connaissances en anglais. La lettre type qui a été envoyée au demandeur donne la possibilité à l'agente de cocher la case 10 intitulée « autre » et ensuite d'insérer une raison pour laquelle la demande est rejetée. Cela aurait été possible ici. Une phrase du genre « vous n'avez pas réussi à démontrer pourquoi vous devez venir au Canada pour améliorer vos aptitudes linguistiques en anglais » aurait suffit. En l'absence d'une telle explication, le demandeur ne peut savoir ce qu'il doit faire pour se conformer aux règles en matière de demande de visa.
Conclusion
[8] L'omission de formuler la vraie raison du refus d'accorder le visa constitue une violation de l'équité procédurale et est un motif de contrôle en vertu de l'alinéa 18.1(4)b) de la Loi sur la Cour fédérale, L.R.C. 1985 ch. F-7. Comme le juge Hugessen l'a dit dans Mehterian c. Canada (M.E.I.), [1992] A.C.F. no 545, en ce qui concerne la nécessité de fournir des motifs suffisants :
Pour satisfaire à cette obligation, il faut que les motifs soient suffisamment clairs, précis et intelligibles pour permettre à l'intéressé de connaître pourquoi sa revendication a échoué et de juger s'il y a lieu, le cas échéant, de demander la permission d'en appeler.
[9] Par conséquent, la présente demande est accueillie. La décision de l'agente des visas, datée du 23 octobre 2001, est rejetée et l'affaire est renvoyée à un autre agent des visas pour nouvel examen.
« K. von Finckenstein »
Juge
Ottawa (Ontario)
Le 10 novembre 2003
Traduction certifiée conforme
Caroline Raymond, LL.L
COUR FÉDÉRALE
AVOCATS INSCRITS AU DOSSIER
DOSSIER : IMM-5350-01
INTITULÉ : SHANTONU SAHA
c.
LE MINISTRE DE LA CITOYENNETÉ ET DE L'IMMIGRATION
LIEU DE L'AUDIENCE : TORONTO (ONTARIO)
DATE DE L'AUDIENCE : LE 6 NOVEMBRE 2003
MOTIFS DE L'ORDONNANCE : LE JUGE von FINCKENSTEIN
DATE DES MOTIFS : LE 10 NOVEMBRE 2003
COMPARUTIONS :
Preevanda K. Sapru POUR LE DEMANDEUR
Michael Butterfield POUR LE DÉFENDEUR
AVOCATS INSCRITS AU DOSSIER :
Preevanda K. Sapru POUR LE DEMANDEUR
Avocate
Toronto (Ontario)
Morris Rosenberg POUR LE DÉFENDEUR
Sous-procureur général du Canada