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Date : 20060426

Dossier : IMM-4664-05

Référence : 2006 CF 526

Ottawa (Ontario), le 26 avril 2006

EN PRÉSENCE DE MONSIEUR LE JUGE PHELAN

ENTRE :

KAJENTHIRAN NAGARAJAN

demandeur

et

LE MINISTRE DE LA CITOYENNETÉ

ET DE L'IMMIGRATION

défendeur

MOTIFS DU JUGEMENT ET JUGEMENT

[1]                Le demandeur est un Tamoul de 25 ans du Nord du Sri Lanka. Il demande l'asile en raison des opinions politiques qu'on lui attribue, de sa nationalité et de son appartenance a un groupe social particulier. Il allègue qu'il craint les Tigres de libération de l'Eelam tamoul (TLET), l'armée du Sri Lanka, la police du Sri Lanka et le Parti démocratique populaire de l'Eelam (EPDP) - un parti qui s'oppose aux TLET.

[2]                Le demandeur soutient, entre autres allégations, que les TLET lui ont donné des brochures et lui ont demandé de les distribuer. Il ajoute qu'il a aussi été forcé à participer à la célébration du Heroes Day (jour des héros) des TLET. Enfin, même s'il niait être un partisan des TLET, il allègue que l'armée et l'EPDP étaient au courant de ces activités.

[3]                Le commissaire de la Commission de l'immigration et du statut de réfugié (CISR) a tiré deux conclusions importantes : a) le récit des faits du demandeur n'était pas crédible et b) il n'existait aucune preuve documentaire appuyant l'allégation selon laquelle l'armée ciblait les TLET, ses membres, ses partisans ou les travailleurs politiques parce qu'ils participaient à des activités politiques ou parce qu'ils distribuaient des dépliants ou des brochures pour les TLET.

[4]                Comme la décision doit être annulée pour d'autres raisons, je ne ferai pas de commentaires au sujet de la conclusion sur la crédibilité, sauf en ce qui a trait à la portée et à l'application des commentaires faits par le juge Campbell dans l'affaire El Moussa c. Canada (Ministre de la Citoyenneté et de l'Immigration), [2005] A.C.F. no 259 (QL); 2005 CF 217. Selon certains, l'affaire permettrait d'affirmer que l'absence de preuve documentaire confirmant que la persécution alléguée a bien eu lieu ne peut pas servir de fondement unique à partir duquel conclure que la persécution alléguée ne s'est pas produite.

[5]                À mon avis, la décision du juge Campbell n'établit pas une telle règle de droit universelle, et si c'était le cas, j'exprimerais mon désaccord en toute déférence. La nature, les particularités et la fiabilité de la preuve documentaire, et la nature de la preuve d'un demandeur sont trop importantes pour que l'on puisse formuler une déclaration aussi générale. Le mieux qu'on puisse dire, c'est que l'absence d'une preuve documentaire corroborante peut remettre en question la crédibilité d'un demandeur, sans toutefois que ce soit automatique.

[6]                Cependant, l'erreur déterminante de la décision de la CISR est le fait qu'elle a conclu qu'il n'existait aucune preuve documentaire appuyant l'allégation selon laquelle l'armée ciblait les TLET, ses membres, ses partisans ou les travailleurs politiques parce qu'ils participaient à des activités politiques ou parce qu'ils distribuaient des dépliants ou des brochures pour les TLET. Bien que la dernière partie de l'énoncé soit vraie - il n'y avait pas de preuve précise au sujet des dépliants ou des brochures - la première partie de l'énoncé est inexacte.

[7]                Peut-être que la CISR a mal formulé sa conclusion, ou peut-être se concentrait-elle sur la question des dépliants ou des brochures, mais il est impossible de tirer cette conclusion. Le résultat du commentaire de la CISR est trop important pour que le doute persiste. La déclaration contestée est contredite par un nombre important de rapports et de déclarations attestant le contraire. Pour cette raison, la conclusion, qui est essentielle à la décision de la CISR, est manifestement déraisonnable.

[8]                Par conséquent, la demande de contrôle judiciaire sera accueillie, la décision de la CISR sera annulée et l'affaire sera renvoyée devant un tribunal différemment constitué pour un nouvel examen.

[9]                La Cour apprécie la sincérité, la franchise et la qualité des observations des deux avocats.

[10]            Aucune question à certifier n'a été soulevée.

JUGEMENT

            LA COUR ORDONNE : la demande de contrôle judiciaire est accueillie, la décision de la CISR est annulée et l'affaire est renvoyée devant un tribunal différemment constitué pour un nouvel examen.

« Michael L. Phelan »

Juge

Traduction certifiée conforme

Evelyne Swenne, traductrice


COUR FÉDÉRALE

AVOCATS INSCRITS AU DOSSIER

DOSSIER :                                         IMM-4664-05

INTITULÉ :                                       KAJENTHIRAN NAGARAJAN

                                                            c.

                                                            LE MINISTRE DE LA CITOYENNETÉ ET DE L'IMMIGRATION

LIEU DE L'AUDIENCE :                  Toronto (Ontario)

DATE DE L'AUDIENCE :                Le 21 avril 2006

MOTIFS DU JUGEMENT :             Le juge Phelan

DATE DES MOTIFS :                       Le 26 avril 2006

COMPARUTIONS :

Karina Thompson

POUR LE DEMANDEUR

Matina Karvellas

POUR LE DÉFENDEUR

AVOCATS INSCRITS AU DOSSIER :

ROBERT I. BLANSHAY LAW OFFICE

Avocats

Toronto (Ontario)

POUR LE DEMANDEUR

JOHN H. SIMS, c.r.

Sous-procureur général du Canada

Toronto (Ontario)

POUR LE DÉFENDEUR

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