Date : 20011016
Dossier : IMM-4330-00
Référence neutre : 2001 CFPI 1120
ENTRE :
SARAVANAMUTHU THIRUCHELVAM
demandeur
- et -
LE MINISTRE DE LA CITOYENNETÉ ET DE L'IMMIGRATION
défendeur
INTRODUCTION
[1] Le demandeur dans la présente demande de contrôle judiciaire contestant une décision rendue le 10 juillet 2000 par la Section du statut de réfugié de la Commission de l'immigration et du statut de réfugié (le tribunal), selon laquelle la revendication du statut de réfugié présentée par le demandeur a été rejetée, est un Tamoul âgé de 54 ans né dans le district de Jaffna dans le nord du Sri Lanka. Sa plus récente revendication a été entendue en même temps que celles de ses deux enfants mineurs qui étaient représentés par le cousin du demandeur parce que le demandeur a été gravement blessé dans un accident d'automobile à Toronto en 1998.
[2] Le statut de réfugié a été accordé aux deux enfants du demandeur, âgés de seize et treize ans, mais lui a été refusé.
[3] La revendication du statut de réfugié au Canada est la troisième revendication que le demandeur présente.
[4] Le demandeur est arrivé au Canada en novembre 1989 et a présenté une première revendication du statut de réfugié qui a été rejetée en 1990. Après que Citoyenneté et Immigration eut commencé les procédures de renvoi, le demandeur s'est volontairement rendu aux États-Unis pour une période de quatre-vingt-dix jours, est revenu au Canada et a présenté une deuxième revendication du statut de réfugié le 24 juillet 1996, laquelle revendication a été rejetée par la Section du statut de réfugié le 19 juin 1997. L'autorisation de présenter une demande de contrôle judiciaire a été refusée par la Cour le 23 octobre 1997.
[5] Le demandeur a, une fois de plus, volontairement quitté le Canada, s'est rendu aux États-Unis pour une période de quatre-vingt-dix jours entre juin et septembre 1999, est revenu au Canada et a alors présenté une troisième revendication du statut de réfugié qui, une fois de fois, a été rejetée par la décision datée du 10 juillet 2000 qui fait l'objet de la présente demande de contrôle.
LA DÉCISION DU TRIBUNAL
[6] Le tribunal a mentionné la crédibilité, l'omission d'avoir revendiqué le statut de réfugié dans un autre pays, les agents de persécution et la possibilité d'un refuge intérieur (PRI) comme étant les questions en litige de la présente demande.
[7] Se fondant sur la décision de M. le juge Rothstein, alors juge à la Section de première instance, dans l'affaire Vasquez c. Canada (Le ministre de la Citoyenneté et de l'Immigration) (Dossier IMM-1979-97, 16 septembre 1998), qui comprend des motifs additionnels publiés dans (1998), 160 F.T.R. 142, quant à l'issue estoppel, le tribunal a établi qu'il devait décider s'il existait des faits nouveaux, qui n'étaient raisonnablement pas disponibles en 1997, qui seraient suffisants pour conclure favorablement quant à la revendication qui lui était soumise. Le tribunal a déclaré que l'avocat du demandeur avait soulevé les faits nouveaux ci-après énumérés :
(1) la situation au Sri Lanka, notamment dans le Nord et dans l'Est, s'est détériorée au point d'être jugée critique;
(2) toute sa famille, sa femme et ses enfants, a quitté le Sri Lanka et il serait seul au Sri Lanka s'il devait y retourner;
(3) sans un laissez-passer, les Tamouls du Nord ne sont pas les bienvenus à Colombo, ce qui touche à la question d'une PRI.
[8] Le tribunal a alors traité la question de savoir pourquoi le demandeur n'avait pas revendiqué le statut de réfugié lorsqu'il était aux États-Unis et a fait remarquer qu'il savait qu'il pouvait le faire parce qu'il avait reçu des autorités américaines des documents à cet effet. Le tribunal a mentionné que le demandeur avait un visa valide pour six mois mais qu'il avait décidé de revenir au Canada. Le tribunal a conclu comme suit à la page 3 :
[TRADUCTION]
Ce [retour au Canada] était sa seule intention même après que sa revendication eut été rejetée deux fois au Canada. Il considérait qu'il ne pourrait pas survivre seul aux États-Unis parce qu'il n'y avait aucun soutien; il craignait, dans l'éventualité où sa revendication aux États-Unis aurait été rejetée, d'être renvoyé au Sri Lanka et il n'aimait pas la situation aux États-Unis. Il craignait d'être agressé aux États-Unis, bien qu'il ne l'ait pas été et qu'il ait été attaqué au Canada après y être revenu. Dans l'ensemble, le tribunal conclut que les raisons énoncées pour expliquer pourquoi il n'avait pas revendiqué le statut de réfugié aux États-Unis ne sont pas raisonnables. (Non souligné dans l'original.)
[9] Le tribunal a tiré une conclusion défavorable quant à l'élément subjectif de la crainte du demandeur et a rédigé ce qui suit à la page 3 :
[TRADUCTION]
Je conclus que son omission d'avoir revendiqué aux États-Unis le statut de réfugié n'est pas compatible avec la crainte d'être persécuté. Il n'a pas tenté d'obtenir asile aux États-Unis après que deux revendications eurent été rejetées au Canada. Sa crainte d'être persécuté au Sri Lanka résultait de sa croyance que les autorités l'arrêteraient à son arrivé à l'aéroport parce qu'il n'avait pas de documents d'identité tels qu'une carte nationale d'identité (CNI) et un passeport. Lorsqu'on lui a fait remarquer qu'après onze ans au Canada, il aurait dû obtenir des documents du haut-commissariat sri lankais au Canada, il a répondu qu'il ne voulait pas obtenir ces documents et qu'il ne voulait pas retourner au Sri Lanka. (Non souligné dans l'original.)
[10] Le tribunal a alors conclu qu'il n'existait pas de fondement objectif pour la crainte qu'avait le demandeur d'être persécuté s'il devait retourner au Sri Lanka. Le tribunal a mentionné les facteurs de l'âge du demandeur et de la durée de son absence du Sri Lanka :
[TRADUCTION]
Le revendicateur est âgé de 54 ans et s'il devait retourner dans le Nord du Sri Lanka où il possède une propriété, il ne serait pas susceptible d'être recruté par les TLET. Il a aussi largement dépassé l'âge pour lequel les forces de sécurité soupçonnent les individus d'être des partisans des TLET. De manière très clairement définie, la preuve documentaire réfère au risque pour les jeunes tamouls d'être soupçonnés d'être des partisans des TLET. Bien que les forces de sécurité continuent de procéder à des arrestations et à des détentions massives, leurs cibles sont les jeunes gens. En outre, le revendicateur reçoit une prestation d'une compagnie d'assurance au Canada en rapport avec un accident d'automobile dans lequel il a été impliqué et il n'y a pas de raisons pour lesquelles ces prestations cesseraient s'il vivait au Sri Lanka.
Le Haut Commissariat des Nations Unies pour les réfugiées (HCNUR) est présent au Sri Lanka depuis 1987 et y a présentement six agents sur place dont un à Colombo. Dans un document de référence de mars 1999, la question des retours a été traitée. Le HCNUR est d'avis que ceux qui cherchent à obtenir le statut de réfugié et dont les revendications traitées selon une procédure complète et équitable ont été rejetées parce qu'elles ne satisfaisaient pas aux critères de reconnaissance du statut de réfugié peuvent retourner en toute sécurité au Sri Lanka. (Non souligné dans l'original.)
LES ARGUMENTS DU DEMANDEUR
[11] L'avocat du demandeur a invoqué trois moyens au soutien de la demande de contrôle judiciaire présentée par le demandeur.
[12] La premier moyen touche l'évaluation défavorable que le tribunal a faite à l'égard de la crainte subjective du demandeur de retourner au Sri Lanka, fondée sur son omission d'avoir revendiqué le statut de réfugié aux États-Unis où il a séjourné pendant une courte période de 90 jours. L'avocat du demandeur a allégué ce qui suit :
(a) Le demandeur a témoigné de façon claire quant aux raisons pour lesquelles il n'avait pas présenté de revendication du statut de réfugié aux États-Unis. Il n'avait pas de famille aux États-Unis, ni d'amis ou de soutien étant donné que tous les membres de sa famille qui pouvaient lui offrir un soutien vivaient au Canada. Il avait appris qu'il ferait l'objet d'une expulsion vers le Sri Lanka si sa revendication aux États-Unis était rejetée et il craignait la criminalité qui y règne. Son avocat a allégué que ces facteurs avaient contribué à sa croyance qu'il n'était pas approprié pour lui de revendiquer aux États-Unis le statut de réfugié;
(b) Son avocat a de plus affirmé que tout le système canadien de décisions touchant les réfugiés était manifestement familier au demandeur et qu'il voulait profiter de la possibilité de présenter une autre revendication au Canada. Cette possibilité de présenter une autre revendication constituait la seule raison de son séjour aux États-Unis;
(c) L'avocat a fait la distinction d'avec l'arrêt de la Cour d'appel fédérale dans l'affaire Ilie c. Canada (Ministre de l'Emploi et de l'Immigration) (1994), 88 F.T.R. 220. Le revendicateur du statut de réfugié avait voyagé dans des pays signataires pendant environ six mois avant de présenter sa revendication au Canada. L'avocat du demandeur a allégué que son client était parti aux États-Unis pour une courte période de 90 jours et qu'il n'avait pas d'autres choix que de quitter le Canada pour pouvoir se prévaloir du droit de présenter une autre revendication;
(d) Le fait que le demandeur avait été informé qu'il était problématique de présenter une revendication du statut de réfugié aux États-Unis et qu'il risquait d'être expulsé vers le Sri Lanka était raisonnable;
(e) En résumé, les explications du demandeur quant aux raisons pour lesquelles il n'avait pas tenté d'obtenir la protection des États-Unis n'étaient pas déraisonnables au point de justifier la conclusion défavorable tirée par le tribunal.
[13] Le deuxième moyen invoqué par l'avocat du demandeur est que le tribunal a commis une erreur en faisant arbitrairement des suppositions, sans connaissance particulière, expertise ou preuve documentaire objective établie au soutien de sa conclusion selon laquelle le demandeur recevrait au Sri Lanka les prestations d'assurance. L'avocat a affirmé que le tribunal n'avait absolument aucune preuve quant à ces prestations. Il a allégué que la supposition faite par le tribunal à cet égard a eu une incidence et a, en partie, été déterminante dans la décision étant donné qu'elle était directement liée à l'élément essentiel de la revendication, c'est-à-dire la situation à laquelle ferait face le demandeur s'il était forcé de retourner au Sri Lanka. L'avocat a allégué que le tribunal a omis d'évaluer correctement et de prendre en compte la preuve qui existait quant à la question de savoir si la situation actuelle qui attendait le demandeur au Sri Lanka serait trop difficile à supporter.
[14] Le troisième moyen de l'avocat du demandeur est la prétention que le tribunal a omis de prendre en compte la plus récente preuve documentaire quant aux conditions objectives auxquelles le demandeur pourrait devoir faire face s'il était forcé de retourner au Sri Lanka.
ANALYSE
[15] L'avocat du demandeur a admis que les principes énoncés dans la décision Vasquez s'appliquent à la troisième revendication du statut de réfugié.
[16] M. le juge Rothstein a fondé sa décision dans l'affaire Vasquez sur son interprétation de l'alinéa 46.01(1)c) et du paragraphe 46.01(5) de la Loi sur l'immigration, qui sont rédigés comme suit :
46.01 (1) La revendication de statut n'est pas recevable par la section du statut si l'intéressé se trouve dans l'une ou l'autre des situations suivantes : [...] c) depuis sa dernière venue au Canada, il a fait l'objet : (i) soit d'une décision de la section du statut lui refusant le statut de réfugié au sens de la Convention ou établissant le désistement de sa revendication, (ii) soit d'une décision d'irrecevabilité de sa revendication par un agent principal;
46.01(5) Séjour à l'étranger (5) La rentrée au Canada de l'intéressé après un séjour à l'étranger d'au plus quatre-vingt-dix jours n'est pas, pour l'application de l'alinéa (1)c), prise en compte pour la détermination de la date de la dernière venue de celui-ci au Canada. [Non souligné dans l'original.] |
46.01 (1) A person who claims to be a Convention refugee is not eligible to have the claim determined by the Refugee Division if the person . . . (c) has, since last coming into Canada, been determined (i) by the Refugee Division not to be a Convention refugee or to have abandoned the claim, or (ii) by a senior immigration officer not to be eligible to have the claim determined by the Refugee Division;
46.01(5) Last coming to Canada (5) A person who goes to another country and returns to Canada within ninety days shall not, for the purposes of paragraph (1)(c), be considered as coming into Canada on that return. [emphasis mine]
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[17] Le juge Rothstein a déclaré que l'alinéa 46.01(1)c) était la formulation légale du principe de common law de la chose jugée. Il a interprété le paragraphe 46.01(5) de la Loi comme étant une exception permettant de présenter des demandes ultérieures. Il a conclu que le but de la disposition était de permettre au tribunal de prendre en compte les changements de situation dans un pays.
[18] Le juge Rothstein a alors mentionné qu'il était d'accord avec l'arrêt rendu par la Cour suprême du Canada dans l'affaire Angle c. Ministre du Revenu National, [1975] 2 R.C.S. 248, quant aux conditions de l'issue estoppel de même qu'avec l'arrêt de la Cour suprême du Canada dans l'affaire La ville de Granview c. Doering (1975), 61 D.L.R. (3d) 455. Il a déclaré que l'issue estoppel empêche une partie de faire de nouvelles représentations fondées sur des faits qui existaient au moment où la première revendication du statut de réfugié a été entendue.
[19] La Cour d'appel fédérale dans l'arrêt Cihal c. Canada (Ministre de la Citoyenneté et de l'Immigration), [2000] A.C.F. no 577, a récemment examiné les circonstances dans lesquelles la Cour interviendrait à l'égard de la décision rendue par un tribunal quant au bien-fondé d'une revendication du statut de réfugié. M. le juge Evans a conclu « [l]a question de savoir si les faits admis ont satisfait à l'exigence législative est une question mixte de faits et de droit sur laquelle la Commission a compétence [...]. Sur ce genre de question, la Commission a droit à une certaine retenue judiciaire et la Cour ne devrait pas intervenir à moins qu'elle ne soit convaincue que la Commission avait clairement tort [...] » [paragraphe 18].
[20] Le dossier certifié contient la décision de la Section du statut de réfugié quant à la deuxième revendication du demandeur. La question était alors de savoir si le demandeur pouvait démontrer qu'il craignait avec raison d'être persécuté et si une PRI raisonnable existait.
[21] Le tribunal avait décidé que le demandeur n'avait aucune crainte objective d'être soupçonné d'être un partisan des TLET par les autorités sri lankaises, tout en reconnaissant qu'il y avait eu une invasion massive de la péninsule de Jaffna en 1995 par l'armée sri lankaise. Le tribunal avait fondé sa décision sur l'âge du demandeur et sur la durée de son absence du Sri Lanka. Le tribunal lors de la deuxième revendication du demandeur avait de plus considéré que Colombo pouvait représenter une PRI raisonnable en se fondant sur un rapport du HCNUR et il avait minimisé la crainte que le demandeur éprouvait d'être arrêté et détenu à l'aéroport au Sri Lanka en raison du fait qu'il ne possédait que des documents d'identité d'urgence. Le tribunal était d'avis que le demandeur pourrait obtenir un passeport valide afin de retourner au Sri Lanka et, une fois rendu, qu'il pourrait obtenir une carte nationale d'identité (CNI). Le tribunal avait déclaré que le demandeur pourrait s'installer en toute sécurité à Colombo et que le gouvernement mettrait à sa disposition des services sociaux et médicaux gratuits.
[22] Comme je l'ai dit, à cause des limites énoncées dans la décision Vasquez, précitée, l'avocat du demandeur n'avait pas d'autre choix que d'alléguer qu'il existait des circonstances et des faits nouveaux. Je remarque que le tribunal qui a examiné la deuxième revendication du statut de réfugié a tenu pour acquis, sans le décider, que le demandeur avait une crainte subjective de persécution.
[23] Selon moi, sur cette question, la conclusion du tribunal selon laquelle le demandeur n'avait pas une crainte subjective de persécution résultait de deux éléments : son omission d'avoir revendiqué le statut de réfugié aux États-Unis et sa crainte d'être arrêté et détenu à l'aéroport au Sri Lanka en raison du fait qu'il ne possédait pas de documents d'identité appropriés.
[24] Les avocats des deux parties s'entendent pour dire que le fait que le demandeur n'ait pas revendiqué le statut de réfugié quand une occasion s'est présentée est un facteur dont il faut tenir compte, bien qu'il ne soit pas déterminant. Le critère est de savoir si, compte tenu de toutes les circonstances, il était raisonnable pour le revendicateur du statut de réfugié au Canada de ne pas avoir présenté une revendication dans un pays signataire de la Convention. Voir à cet égard l'arrêt Ilie, précité, Huerta c. Canada (Ministre de la Citoyenneté et de l'Immigration) (1993), 157 N.R. 225 (C.A.F.) et Ibis c. Canada (Ministre de la Citoyenneté et de l'Immigration), [2001] A.C.F. no 86.
[25] La question est de savoir s'il était déraisonnable pour le tribunal de se fonder sur l'omission du demandeur d'avoir présenté une revendication aux États-Unis, pour conclure qu'il n'existait pas de crainte subjective, alors que l'intention du demandeur était de rester aux États-Unis pour la période minimale de 90 jours afin de revenir au Canada pour présenter une troisième revendication du statut de réfugié, après que les deux premières revendications qu'il y avait présentées eurent été refusées. Le refus du demandeur d'avoir fait les démarches nécessaires pour obtenir de l'ambassade ou du consulat sri lankais les documents appropriés qui étaient nécessaires à son retour au Sri Lanka, et qui lui auraient permis d'éliminer sa crainte d'être arrêté à l'aéroport parce qu'il n'avait pas les documents appropriés, doit s'ajouter à la question mentionnée ci-haut.
[26] Je ne peux pas conclure, dans les circonstances particulières de la présente affaire, que la décision du tribunal sur cette question était déraisonnable. Selon moi, le tribunal a évalué tous les facteurs allégués par le demandeur par rapport au fait que ses deux premières revendications avaient été rejetées et qu'un tribunal antérieur avait tranché qu'il pouvait obtenir les documents appropriés qui lui auraient permis d'éliminer sa crainte d'être arrêté et détenu au Sri Lanka.
[27] Bien que l'avocat du demandeur ait eu raison quant à son deuxième moyen, selon lequel le tribunal avait supposé que les prestations que le demandeur recevait d'une compagnie d'assurance continueraient à lui être versées au Sri Lanka, je suis d'avis que cette supposition n'était pas déterminante pour la conclusion d'ensemble, sur le plan objectif, et que la crainte de persécution dans l'éventualité où le demandeur retournerait au Sri Lanka n'avait aucun fondement. Je conclus ainsi pour les motifs suivants :
(1) la preuve démontre que l'avocat du demandeur négociait le paiement d'une somme globale plutôt que des versements périodiques;
(2) le demandeur possédait un bien immobilier au Sri Lanka et il n'avait donné aucune indication quant à ses avoirs;
(3) de toute façon, vu l'arrêt récent de la Cour d'appel fédérale dans l'affaire Ministre de la Citoyenneté et de l'Immigration c. Ranganathan, dossier A-348-99, 21 décembre 2000, des raisons d'ordre humanitaire, telles que l'absence de parents, ne pouvaient pas être prises en compte.
[28] Le troisième moyen du demandeur ne peut non plus être retenu. Bien que le demandeur ait raison lorsqu'il affirme que le tribunal n'a pas renvoyé de façon expresse au US DOS 1999 Human Rights Report sur le Sri Lanka de même qu'au rapport d'Amnistie internationale de 1999 pour ce pays, le dossier mentionne que ces deux rapports ont été expressément soumis en preuve par l'ACR.
[29] Sur ce point, l'avocat du défendeur renvoie à l'arrêt de la Cour suprême du Canada Woolaston c. Canada (Ministre de la Main d'oeuvre et de l'Immigration), [1973] R.C.S. 102, dans lequel M. le juge Laskin, plus tard juge en chef, a déclaré ce qui suit :
Je ne puis conclure que la Commission a méconnu ce témoignage et a ainsi commis une erreur de droit que cette Cour doit corriger. Le fait qu'il n'est pas mentionné dans les motifs de la Commission n'entache pas sa décision de nullité. Il figurait au dossier; sa crédibilité et sa force probante pouvaient être appréciées avec les autres témoignages en l'espèce et la Commission avait la faculté de ne pas en tenir compte ou de ne pas y ajouter foi.
[30] Je suis d'accord avec l'avocat du défendeur que ces deux rapports n'attestent pas un changement dans la situation du pays suffisant qui annulerait la conclusion du tribunal qui a entendu la deuxième revendication du demandeur, conclusion selon laquelle il n'avait pas raison de craindre d'être persécuté, en particulier s'il retournait vivre à Colombo.
[31] Je refuse de certifier la question soulevée par l'avocat du demandeur à savoir si un tribunal a l'obligation, dans ses motifs, de démontrer qu'il a pris connaissance de la plus récente preuve sur la situation dans le pays. Je suis d'accord avec l'avocat du défendeur que, en l'espèce, cette question a déjà trouvé réponse dans l'arrêt Woolaston de la Cour suprême du Canada.
DISPOSITIF
[32] Pour tous ces motifs, la demande de contrôle judiciaire est rejetée.
« François Lemieux »
Juge
OTTAWA (ONTARIO)
LE 16 OCTOBRE 2001
Traduction certifiée conforme
Danièle Laberge, LL.L.
Date : 20011016
Dossier : IMM-4330-00
OTTAWA (ONTARIO), LE 16 OCTOBRE 2001
En présence de MONSIEUR LE JUGE LEMIEUX
ENTRE :
SARAVANAMUTHU THIRUCHELVAM
demandeur
- et -
LE MINISTRE DE LA CITOYENNETÉ ET DE L'IMMIGRATION
défendeur
ORDONNANCE
Pour les motifs énoncés, la demande de contrôle judiciaire est rejetée.
« François Lemieux »
Juge
Traduction certifiée conforme
Danièle Laberge, LL.L.
COUR FÉDÉRALE DU CANADA
SECTION DE PREMIÈRE INSTANCE
AVOCATS INSCRITS AU DOSSIER
No DU GREFFE : IMM-4330-00
INTITULÉ : Saravanamuthu Thiruchelvam c. M.C.I.
LIEU DE L'AUDIENCE : Toronto (Ontario)
DATE DE L'AUDIENCE : Le 24 juillet 2001
MOTIFS DE L'ORDONNANCE : MONSIEUR LE JUGE LEMIEUX
DATE DES MOTIFS : Le 16 octobre 2001
COMPARUTIONS :
Robert Blanshay POUR LE DEMANDEUR
Claire LeRiche POUR LE DÉFENDEUR
AVOCATS INSCRITS AU DOSSIER :
Robert I. Blanshay POUR LE DEMANDEUR
Toronto (Ontario)
Morris Rosenberg POUR LE DÉFENDEUR
Sous-procureur général du Canada