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Date : 20200819


Dossier : IMM-5365-19

Référence : 2020 CF 839

Ottawa (Ontario), le 19 août 2020

En présence de monsieur le juge Grammond

ENTRE :

JOANNE JOSEPH

MENOVE KERVINS

demanderesse

et

LE MINISTÈRE DE LA CITOYENNETÉ ET DE L’IMMIGRATION

défenderesse

JUGEMENT ET MOTIFS

(Rendu oralement par vidéoconférence le 19 août 2020)

[1]  Mme Joseph sollicite le contrôle judiciaire du rejet de sa demande d’asile. Je rejette sa demande parce que la Section d’appel des réfugiés [SAR] a raisonnablement conclu que Mme Joseph était visée par l’exclusion prévue à l’article 1E de la Convention des Nations Unies relative au statut des réfugiés [la Convention] et à l’article 98 de la Loi sur l’immigration et la protection des réfugiés, LC 2001, c 27 [la Loi].

[2]  Mme Joseph est citoyenne d’Haïti. Le 3 mars 2014, après avoir été agressée et menacée par un ex-conjoint, elle a quitté Haïti pour se rendre au Brésil.  Mme Joseph a acquis le statut de résidente permanente au Brésil, y a occupé un emploi jusqu’en mai 2016 et y avait un logement. Lors de son séjour, alors qu’elle était enceinte, elle a subi une agression durant laquelle on lui a volé son téléphone cellulaire et son sac à main.

[3]  Au mois de novembre 2016, Mme Joseph a quitté le Brésil pour se rendre aux États-Unis. Le 8 août 2017, elle est entrée au Canada et a demandé l’asile. La Section de la protection des réfugiés [SPR] a rejeté la demande d’asile de Mme Joseph. Mme Joseph a interjeté appel de cette décision devant la SAR. La SAR a rejeté l’appel de Mme Joseph et a conclu que celle-ci était visée par l’exclusion prévue à l’article 1E de la Convention et à l’article 98 de la Loi, puisqu’au jour de son audition devant la SPR, quoique citoyenne haïtienne, elle était aussi résidente permanente du Brésil et jouissait essentiellement des mêmes droits et obligations que les citoyens brésiliens. La SAR a conclu que Mme Joseph n’a pas établi une possibilité sérieuse de persécution ni qu’il soit probable que sa vie soit exposée à l’un des risques énumérés à l’article 97 de la Loi dans l’éventualité d’un retour au Brésil.

[4]  À mon avis, la décision de la SAR est raisonnable. Après avoir consulté la preuve documentaire, la SAR a conclu que les allégations de Mme Joseph quant à la difficulté d’obtenir un emploi et au crime dont elle a été victime sont insuffisantes pour donner lieu à une crainte bien fondée de persécution au Brésil.  Notre Cour a considéré à de multiples reprises qu’une conclusion semblable était raisonnable (Celestin c Canada (Citoyenneté et Immigration), 2020 CF 97, au paragraphe 62 [Celestin]; Morissaint c Canada (Citoyenneté et Immigration) 2020 CF 413, au paragraphe 19; Noel c Canada (Citoyenneté et Immigration), 2018 CF 1062, aux paragraphes 28 à 30; Simolia c Canada (Citoyenneté et Immigration) 2019 CF 1336, aux paragraphes 26 et 27; Jean-Pierre c Canada (Citoyenneté et Immigration) 2020 CF 136, aux paragraphes 31 à 34 [Jean-Pierre]).

[5]  Mme Joseph soutient également que la SAR devait évaluer le risque prospectif en Haïti, compte tenu de la perte alléguée du statut de résidente permanente de Mme Joseph au Brésil. Je ne puis souscrire à cet argument. L’exclusion prévue à l’article 1E de la Convention doit s’apprécier selon la situation qui prévaut au jour de l’audience devant la SPR : Canada (Citoyenneté et Immigration) c Zeng, 2010 CAF 118 au paragraphe 28, [2011] 4 RCF 3 ; Majebi c Canada (Citoyenneté et Immigration), 2016 CAF 274 au paragraphe 7. En date de son audience devant la SPR, Mme Joseph était résidente permanente du Brésil. L’exclusion prévue à l’article 1E demeure applicable malgré le fait que Mme Joseph ait laissé expirer sa qualité de résidente permanente après sa demande d’asile (Jean-Pierre, au paragraphe 24). La SAR ayant raisonnablement déterminé que Mme Joseph pouvait se prévaloir de la protection adéquate du Brésil, elle n’avait pas à analyser le risque auquel elle serait exposée advenant son retour en Haïti (Augustin c Canada (Citoyenneté et Immigration), 2019 CF 1232, au paragraphe 34).

[6]  Dans l’affaire Celestin, la Cour d’appel fédérale sera appelée à déterminer si la SAR doit prendre en considération le risque soulevé par un demandeur d’asile dans son pays de résidence avant d’appliquer l’exclusion prévue à l’article 1E de la Convention. Toutefois, je suis d’avis que cette question ne se soulève pas dans le cas de Mme Joseph, puisque la SAR, dans les faits, a procédé à une telle analyse, même si elle n’y était peut-être pas tenue.

[7]  Par conséquent, la demande de contrôle judiciaire est rejetée.

 


JUGEMENT dans le dossier IMM-5365-19

LA COUR STATUE que :

1.  La demande de contrôle judiciaire est rejetée.

2.  Aucune question n’est certifiée.

« Sébastien Grammond »

Juge


COUR FÉDÉRALE

AVOCATS INSCRITS AU DOSSIER


 

Dossier :

IMM-5365-19

INTITULÉ :

JOANNE JOSEPH MENOVE KERVINS c LE MINISTÈRE DE LA CITOYENNETÉ ET DE L’IMMIGRATION

LIEU DE L’AUDIENCE :

AFFAIRE ENTENDUE PAR VIDÉOCONFÉRENCE À OTTAWA (ONTARIO) ET À MONTRÉAL (QUÉBEC)

DATE DE L’AUDIENCE :

LE 19 AOÛT 2019

JUGEMENT ET motifs :

LE JUGE GRAMMOND

DATE DES MOTIFS :

LE 19 août 2020

COMPARUTIONS :

Virginia Cabello Coronado

Pour la demanderesse

 

Renalda Ponari

Pour la défenderesse

 

AVOCATS INSCRITS AU DOSSIER :

Virginia Cabello Coronado

Avocate

Montréal (Québec)

Pour la demanderesse

 

Procureur général du Canada

Montréal (Québec)

Pour la défenderesse

 

 

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