Date : 19990618
Dossier : T-762-99
ENTRE :
ERNST ZUNDEL,
demandeur,
et
LE PROCUREUR GÉNÉRAL DU CANADA,
LE MINISTRE DE LA CITOYENNETÉ ET DE L"IMMIGRATION et
LE SERVICE CANADIEN DU RENSEIGNEMENT DE SÉCURITÉ,
défendeurs.
MOTIFS DE L"ORDONNANCE
LE JUGE McKEOWN
[1] Le procureur général du Canada a présenté une requête en vue d"annuler la demande de contrôle judiciaire pour le motif que la décision visée était en fait le rapport ministériel en date du 2 août 1995, et non la lettre datée du 31 mars 1999, dans laquelle le président du Comité de surveillance des activités du renseignement de sécurité (ci-après le Comité) a avisé les avocats des parties que le Comité continuerait son enquête relativement au rapport ministériel.
[2] Le président du Comité, M. Grant, a soulevé certaines questions dans sa lettre adressée au ministre à propos du rapport ministériel. Il a ensuite écrit aux avocats des deux parties relativement à ses interrogations et a reçu des réponses. L"avocat de M. Zundel a affirmé que les questions soulevées par le président montraient que le Comité n"avait pas compétence pour tenir une enquête sur M. Zundel en vertu de la Loi sur l"immigration en se fondant sur le rapport ministériel du 2 août 1995. Toutefois, l"avocat du procureur général a indiqué que, aux termes du paragraphe 19(4) de la Loi sur la citoyenneté , le Comité est tenu d"enquêter sur les motifs sur lesquels se fonde le rapport décrit au paragraphe 19(2). Le Comité n"a aucun pouvoir discrétionnaire et doit procéder à la tenue d"une enquête. Au terme de l"enquête, il doit faire un rapport au gouverneur en conseil en vertu du paragraphe 19(6), et ce, de l"avis du procureur général, même si le Comité a des doutes sur le bien-fondé des motifs à la base du rapport ministériel.
[3] Le président du Comité a décidé de tenir l"enquête. Il a toutefois émis les commentaires qui suivent, à la page 3 de sa lettre datée du 31 mars 1999 :
[TRADUCTION] Il semble y avoir deux conséquences juridiques possibles relativement au libellé du rapport ministériel. La première est que l"initiative du ministre quant à la mise en oeuvre du rapport ministériel est ultra vires et que, par conséquent, le rapport en question ne peut faire l"objet d"une obligation d"origine législative de la part du Comité. La seconde est que le Comité peut et doit enquêter sur le rapport ministériel (bien qu"il doive restreindre son enquête aux seuls motifs prévus par la loi), et faire un rapport au gouverneur en conseil relativement à tous les aspects de l"enquête, notamment à toute question se rapportant au libellé du rapport. |
Il exprime par la suite son accord avec le procureur général que la seconde conclusion était la bonne, et que le Comité devait continuer son enquête relativement au rapport ministériel.
[4] Il ne s"agit pas ici d"un excès de compétence. Le rapport ministériel aurait pu faire l"objet d"une demande de contrôle judiciaire dans les trente jours de sa publication, le 2 août 1995. M. Zundel n"a pas cherché à obtenir de prorogation de délai pour déposer sa demande de contrôle judiciaire. La Cour est d"avis que la présente demande peut être tranchée par un examen des motifs de la demande de contrôle judiciaire déposée par M. Zundel le 29 avril 1999 : dans le paragraphe a) des motifs, il est fait mention d"un manquement de la part du ministre à son obligation qui découle de la loi; les paragraphes b), c) et d) ne sont en réalité que des versions plus élaborées des motifs pour lesquels le rapport ministériel est ultra vires ; le paragraphe e) est en fait une plainte relativement au fait que le président a décidé que la simple association ou la simple appartenance ne remplissait pas le critère énoncé au paragraphe 2(c) de la Loi sur le Service canadien du renseignement de sécurité. L"avis donné à l"avance par le président aux parties pour les informer des éléments qui ne seront pas examinés ne constitue pas une décision; cette démarche servait simplement à délimiter les questions en litige de manière que les parties sachent que des observations n"étaient pas requises sur ce point. L"on aurait cru que M. Zundel se serait réjoui des commentaires émis par le président sur ce point.
[5] La Cour se retrouve donc saisie d"une contestation relativement au rapport ministériel, et non d"une constestation relativement à la décision du Comité de surveillance des activités du renseignement de sécurité. Si M. Zundel avait voulu contester le rapport ministériel par voie de contrôle judiciaire, il aurait dû le faire dans les trente jours de la date de publication du rapport en question, le 2 août 1995, comme le prévoit le paragraphe 18.1(2) de la Loi sur la Cour fédérale . Il ne peut aujourd"hui contester le rapport ministériel par voie de contrôle judiciaire des commentaires préliminaires que le président a adressés aux avocats. Par conséquent, la demande de contrôle judiciaire en date du 29 avril 1999 est annulée.
William P. McKeown
JUGE
OTTAWA (Ontario)
18 juin 1999
Traduction certifiée conforme
Thanh-Tram Dang, B.C.L., LL.B.
COUR FÉDÉRALE DU CANADA
SECTION DE PREMIÈRE INSTANCE
AVOCATS ET AVOCATS INSCRITS AU DOSSIER
NO DU GREFFE : T-762-99
INTITULÉ DE LA CAUSE : ERNST ZUNDEL c. LE PROCUREUR GÉNÉRAL DU CANADA, LE MINISTRE DE LA CITOYENNETÉ ET DE L"IMMIGRATION et LE SERVICE CANADIEN DU RENSEIGNEMENT DE SÉCURITÉ
LIEU DE L"AUDIENCE : OTTAWA (ONTARIO)
DATE DE L"AUDIENCE : 15 JUIN 1999
MOTIFS DU JUGEMENT PRONONCÉS PAR LE JUGE MCKEOWN
EN DATE DU : 18 JUIN 1999
COMPARUTIONS :
Barbara Kulaszka POUR LE DEMANDEUR
Barbara McIsaac, c.r. POUR LE DÉFENDEUR
Claire A.H. le Riche
AVOCATS INSCRITS AU DOSSIER :
Barbara Kulaszka POUR LE DEMANDEUR
McCarthy Tétrault POUR LE DÉFENDEUR
Ottawa (Ontario)
Sous-procureur général du Canada
Ottawa (Ontario)