Dossier : IMM‑1871‑19
Référence : 2020 CF 821
[TRADUCTION FRANÇAISE]
Ottawa (Ontario), le 11 août 2020
En présence de monsieur le juge McHaffie
ENTRE :
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TSEGA DESTA MEBRAHTOM
JAHI KIM KWANG BU
SAMUEL D’AMBROSCA
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demandeurs
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et
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LE MINISTRE DE LA CITOYENNETÉ
ET DE L’IMMIGRATION
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défendeur
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JUGEMENT ET MOTIFS
I.
Aperçu
[1]
Tsega Mebrahtom et ses deux enfants affirment que le rejet de leur demande de résidence permanente fondée sur des considérations d’ordre humanitaire était déraisonnable. Selon eux, l’agent chargé de l’examen des considérations d’ordre humanitaire (l’agent) a adopté une approche inappropriée dans son analyse relative à l’intérêt supérieur des enfants, n’a pas fait preuve de compassion, malgré le fait que cela soit essentiel dans le cadre d’une telle demande, et a apprécié de manière déraisonnable les difficultés qu’ils subiraient s’ils devaient retourner en Italie.
[2]
Je conclus que la décision était raisonnable. L’agent a pris en considération l’intérêt supérieur des deux enfants et la façon dont cet intérêt serait touché par le renvoi, et il a accordé un poids favorable à ce facteur dans son appréciation. Bien que l’agent ait mentionné qu’il avait accordé un [traduction] « certain poids »
à ce facteur, je conclus que l’utilisation de cette expression ne contrevient pas à l’obligation juridique de traiter l’intérêt supérieur des enfants comme un facteur important dans l’analyse relative aux considérations d’ordre humanitaire. Les termes utilisés signifiaient plutôt que, bien que le renvoi ait un effet négatif sur l’intérêt supérieur des enfants, cet effet ne serait pas particulièrement important. Par conséquent, ce facteur était favorable à la demande, mais seulement dans une certaine mesure. Il s’agissait d’une conclusion raisonnable dans les circonstances.
[3]
Je ne peux pas non plus convenir que la décision montre que l’agent était [traduction] « dépourvu de compassion »
. Il a plutôt examiné les observations de la famille Mebrahtom ainsi que sa situation avec attention et respect, en notant les éléments favorables et défavorables, en tenant compte de la situation personnelle de la famille et en louant son engagement auprès de la collectivité ainsi que les résultats scolaires des enfants, tout en reconnaissant les difficultés que la famille subirait si elle était renvoyée. L’agent a conclu que, selon la prépondérance des probabilités, les considérations d’ordre humanitaire ne justifiaient pas une dispense de l’application de la Loi sur l’immigration et la protection des réfugiés, LC 2001, c 27 (la LIPR), mais cela ne veut pas dire qu’il n’a pas fait preuve de la compassion requise dans sa décision. L’analyse relative aux facteurs liés aux difficultés n’était pas non plus déraisonnable, car l’agent a examiné à nouveau et pris en considération les observations ainsi que la preuve pour parvenir à des conclusions justifiées.
[4]
Par conséquent, la demande de contrôle judiciaire sera rejetée.
II.
Les questions en litige et la norme de contrôle
[5]
Les demandeurs, ci‑après les Mebrahtom, pour faciliter la lecture, bien que les enfants ne portent pas ce nom, soulèvent trois questions dans le cadre de la présente demande :
L’agent a‑t‑il commis une erreur dans son appréciation de l’intérêt supérieur des deux enfants?
La décision relative aux considérations d’ordre humanitaire était‑elle déraisonnable du fait qu’elle était [traduction]
« dépourvue de compassion »
?L’analyse relative aux difficultés effectuée par l’agent était‑elle déraisonnable?
[6]
Les parties conviennent que chacune des questions en litige doit être examinée par la Cour selon la norme de la décision raisonnable : Kisana c Canada (Ministre de la Citoyenneté et de l’Immigration), 2009 CAF 189 au para 18; Baker c Canada (Ministre de la Citoyenneté et de l’Immigration), [1999] 2 RCS 817 au para 62. Le cadre d’analyse quant au contrôle d’une décision administrative énoncé dans l’arrêt Dunsmuir c Nouveau-Brunswick, 2008 CSC 9, était encore déterminant lorsque la présente affaire a été plaidée, peu avant la publication de l’arrêt de la Cour suprême du Canada dans l’arrêt Canada (Ministre de la Citoyenneté et de l’Immigration) c Vavilov, 2019 CSC 65. Toutefois, les différences entre les cadres d’analyse des arrêts Dunsmuir et Vavilov n’ont pas d’incidence sur la norme de contrôle ou sur l’analyse en l’espèce. Chacun établit que la norme de contrôle est la décision raisonnable, demande à la Cour de faire preuve de retenue à l’égard de la décision discrétionnaire de l’agent et exige que la Cour examine la question de savoir si la décision répond aux exigences en matière de justification, de transparence et d’intelligibilité : Dunsmuir, au para 47; Vavilov, au para 81, 99.
III.
Analyse
A.
L’analyse relative à l’intérêt supérieur des enfants effectuée par l’agent était raisonnable
[7]
La LIPR exige que « l’intérêt supérieur de l’enfant directement touché »
soit pris en considération dans le cadre de l’appréciation des considérations d’ordre humanitaire : LIPR, art 25(1); Kanthasamy c Canada (Citoyenneté et Immigration), 2015 CSC 61 au para 10. Le principe de l’intérêt supérieur de l’enfant dépend fortement du contexte et doit être appliqué de manière à tenir compte de l’enfant en question et de sa situation : Kanthasamy, au para 35.
[8]
Dans l’arrêt Kanthasamy, la Cour suprême du Canada a confirmé que l’intérêt supérieur de l’enfant doit être un « élément important »
qui joue dans l’appréciation des autres aspects de la situation de l’enfant : Kanthasamy, aux para 40‑41; Baker, au para 75. La juge Abella a adopté la déclaration du juge Décary de la Cour d’appel fédérale dans l’arrêt Hawthorne, selon laquelle « [l]es enfants méritent rarement, sinon jamais, d’être exposés à des difficultés »
, ce qui rend la notion de « difficultés injustifiées »
inapplicable aux enfants : Kanthasamy, au para 41; Hawthorne c Canada (Ministre de la Citoyenneté et de l’Immigration), 2002 CAF 475 au para 9. Cependant, bien que le facteur de l’« intérêt supérieur de l’enfant »
soit important, il n’est pas nécessairement déterminant dans le cadre d’une demande particulière fondée sur des considérations d’ordre humanitaire : Hawthorne, aux para 2, 8. Le libellé du paragraphe 75 de l’arrêt Baker demeure un résumé de ces propositions qui fait autorité :
[…] pour que l’exercice du pouvoir discrétionnaire respecte la norme du caractère raisonnable, le décideur devrait considérer l’intérêt supérieur des enfants comme un facteur important, lui accorder un poids considérable, et être réceptif, attentif et sensible à cet intérêt. Cela ne veut pas dire que l’intérêt supérieur des enfants l’emportera toujours sur d’autres considérations, ni qu’il n’y aura pas d’autres raisons de rejeter une demande d’ordre humanitaire même en tenant compte de l’intérêt des enfants. Toutefois, quand l’intérêt des enfants est minimisé, d’une manière incompatible avec la tradition humanitaire du Canada et les directives du ministre, la décision est déraisonnable.
[9]
L’agent a apprécié l’intérêt des deux enfants de Mme Mebrahtom, qui sont, comme leur mère, des citoyens de l’Italie et qui vivaient au Canada avec elle et son fiancé, lequel apporte un soutien financier à la famille. Au moment de la décision, ils fréquentaient chacun une école au Canada depuis environ cinq ans, dont environ deux ans pendant lesquels leur renvoi avait été reporté pour permettre à la fille aînée de terminer ses études secondaires (le fils cadet fréquentait l’école primaire). L’agent a pris acte de la réussite des enfants à l’école, tant sur le plan social que scolaire, et a conclu qu’il était admirable qu’ils aient pu obtenir de tels succès dans un nouveau pays pendant le traitement de la demande d’asile. Il a également noté que les enfants pouvaient fréquenter l’école en Italie et accéder au système d’éducation dans ce pays.
[10]
L’agent a conclu qu’il était [traduction] « dans l’intérêt supérieur des enfants de rester avec leur mère, que ce soit au Canada ou en Italie »
. Il a ensuite comparé la situation des enfants, selon qu’ils retournaient en Italie ou demeuraient au Canada. Il a reconnu que le retour en Italie et la reprise des études (postsecondaires dans le cas de la fille aînée) entraîneraient des difficultés et que cela demanderait une certaine adaptation. Toutefois, il a souligné que, compte tenu du fait qu’ils avaient déjà vécu en Italie, ils avaient probablement, à tout le moins, un petit réseau social et une connaissance des coutumes et de la langue qui atténueraient certaines des difficultés. S’ils restaient au Canada, les enfants continueraient probablement leur cheminement couronné de succès, tout en demeurant au sein de l’unité familiale, avec le fiancé de Mme Mebrahtom, et physiquement proches de leurs amis et des membres de la communauté. L’agent a conclu son analyse en déclarant : [traduction] « Dans l’ensemble, j’accorde un certain poids à l’intérêt supérieur des enfants s’ils demeurent au Canada. »
Dans la conclusion finale de l’analyse relative aux considérations d’ordre humanitaire, il a résumé l’appréciation de l’intérêt supérieur des enfants ainsi :
[traduction]
J’admets qu’il y a certains facteurs à prendre en considération quant à l’intérêt supérieur des enfants. J’y ai accordé un certain poids dans la présente décision. Je souligne qu’il est dans l’intérêt supérieur des enfants de demeurer avec leur mère, que ce soit au Canada ou en Italie. Après avoir soigneusement apprécié l’information concernant l’intérêt supérieur des enfants, je conclus que le retour en Italie n’aurait pas de conséquences négatives importantes sur l’intérêt supérieur des deux enfants concernés.
[Non souligné dans l’original.]
[11]
Les Mebrahtom soulèvent plusieurs questions concernant l’analyse relative à l’intérêt supérieur des enfants effectuée par l’agent. Tout d’abord, ils font valoir que ce dernier n’a pas tiré de conclusion sur ce qui était réellement dans l’intérêt supérieur des enfants, se contentant de déclarer simplement que leur intérêt supérieur était de demeurer avec leur mère. Citant les décisions de la Cour dans les affaires Joseph et Blas, les Mebrahtom font valoir qu’un agent doit apprécier ce qui est dans l’intérêt supérieur des enfants, et que le simple fait de déclarer que leur intérêt supérieur est de demeurer avec leur mère est dénué de sens : Joseph c Canada (Citoyenneté et Immigration), 2013 CF 993 aux para 23‑24; Blas c Canada (Citoyenneté et Immigration), 2014 CF 629 au para 60; citant tous deux Chandidas c Canada (Citoyenneté et Immigration), 2013 CF 258 au para 69.
[12]
Comme le ministre l’a admis, si l’analyse de l’agent s’était arrêtée à la déclaration selon laquelle il était dans l’intérêt supérieur des enfants de demeurer avec leur mère, cela aurait été déraisonnable. Il est juste de supposer qu’il est dans l’intérêt supérieur des enfants de demeurer avec leurs parents et, de fait, de rester au Canada : Hawthorne, aux para 5‑6; Chandidas, au para 69. Cela dit, je suis d’accord avec le ministre pour dire que ce n’est pas une erreur de confirmer expressément qu’il est dans l’intérêt supérieur des enfants, dans ce cas, de demeurer avec leur mère, à condition que ce ne soit pas l’étendue de l’analyse.
[13]
Cependant, l’analyse de l’agent quant à l’intérêt supérieur des enfants ne s’est pas arrêtée à cette déclaration. Elle est allée plus loin, et il a été reconnu qu’il était dans l’intérêt supérieur des enfants de rester au Canada afin qu’ils poursuivent leur cheminement couronné de succès et qu’ils demeurent proches de leurs amis et des membres de leur communauté. Je ne souscris pas à l’affirmation des Mebrahtom selon laquelle l’agent a conclu que l’intérêt supérieur des enfants pouvait être satisfait aussi bien au Canada qu’en Italie. Au contraire, l’agent a reconnu qu’il y aurait, jusqu’à un certain point, des difficultés à leur retour en Italie et qu’ils devraient s’adapter. Il a accordé du poids [traduction] « à l’intérêt supérieur des enfants s’ils demeurent au Canada »
. À mon avis, cela va au‑delà d’une simple hypothèse implicite selon laquelle il serait dans leur intérêt supérieur de demeurer au Canada. Quoi qu’il en soit, même si la conclusion avait été implicite, la Cour d’appel a confirmé que la reconnaissance du fait que le facteur de l’intérêt supérieur de l’enfant penchera en faveur du non‑renvoi, en l’absence de circonstances exceptionnelles, peut être une « prémisse […] implicite »
: Hawthorne, au para 5; Garraway c Canada (Immigration, Réfugiés et Citoyenneté), 2017 CF 286 aux para 46‑48.
[14]
Les Mebrahtom font également valoir que l’agent a considéré de manière déraisonnable le facteur de l’intérêt supérieur des enfants, car il l’a apprécié selon l’angle des « difficultés »
, et ils soulignent que l’analyse relative à l’intérêt supérieur de l’enfant ne consiste pas simplement à respecter un critère relatif aux difficultés ou à appliquer une norme particulière touchant l’appréciation des difficultés, mais plutôt à apprécier l’intérêt supérieur de manière plus générale. Je suis d’accord avec les Mebrahtom pour dire que l’analyse relative à l’intérêt supérieur de l’enfant n’est pas une appréciation visant à déterminer si un enfant subirait des difficultés inhabituelles ou injustifiées, ou satisfait à tout critère des difficultés particulier : Kanthasamy, aux para 59‑60; Hawthorne, au para 9; Williams c Canada (Citoyenneté et Immigration), 2012 CF 166 aux para 64‑67. Toutefois, la prise en considération des difficultés liées au renvoi reste potentiellement pertinente en ce qui concerne l’analyse relative à l’intérêt supérieur de l’enfant si les difficultés sont évoquées comme un facteur. En effet, l’arrêt Hawthorne, sur lequel se fonde la Cour suprême du Canada dans l’arrêt Kanthasamy, décrit l’analyse dans les termes suivants, au paragraphe 4 :
On détermine l’« intérêt supérieur de l’enfant » en considérant le bénéfice que retirerait l’enfant si son parent n’était pas renvoyé du Canada ainsi que les difficultés que vivrait l’enfant, soit advenant le renvoi de l’un de ses parents du Canada, soit advenant qu’elle quitte le Canada volontairement si elle souhaite accompagner son parent à l’étranger. Ces bénéfices et difficultés constituent les deux côtés d’une même médaille, celle‑ci étant l’intérêt supérieur de l’enfant.
[15]
Les Mebrahtom ont fait référence à l’arrêt Hawthorne dans leurs observations sur les considérations d’ordre humanitaire et ont fait valoir que les enfants subiraient des difficultés à leur retour. En particulier, ils renvoient à la partie de leurs observations qui portait sur les difficultés et ont souligné que toutes les difficultés que subirait Mme Mebrahtom en Italie toucheraient également ses enfants. Dans ce contexte, il est difficile de voir comment la façon d’aborder les difficultés de la part de l’agent peut être considérée comme déraisonnable.
[16]
L’agent a apprécié la situation dans laquelle les enfants seraient en Italie, l’a comparée à celle de la famille si elle restait au Canada et a pris en considération les conséquences sur les enfants. C’est ce que l’agent devait analyser : les « deux côtés d’une même médaille »
qui représente l’intérêt supérieur de l’enfant : Hawthorne, au para 4. Contrairement à ce qui a été fait dans la décision en cause dans l’affaire Joseph, dans la présente affaire, l’agent a bel et bien procédé à cette analyse et a effectivement formulé une conclusion sur l’intérêt supérieur des enfants en se fondant sur l’appréciation de la situation de la famille si elle restait au Canada ou si elle retournait en Italie : Joseph, au para 20. À cet égard, je ne considère pas la conclusion de l’agent selon laquelle il n’y aurait pas de [traduction] « conséquences négatives importantes »
comme imposant une certaine norme de difficulté. Le fait de tirer une conclusion quant à l’ampleur des conséquences du renvoi sur les enfants n’équivaut pas à exiger un degré particulier de difficultés. Même en l’absence de conséquences négatives importantes, l’agent a reconnu l’intérêt supérieur des enfants et lui a accordé un poids favorable à l’accueil de la demande fondée sur des considérations d’ordre humanitaire. Il s’agit d’une appréciation raisonnable.
[17]
Les Mebrahtom font également valoir qu’il était contradictoire pour l’agent de conclure que les enfants subiraient des difficultés à leur retour en Italie, tout en concluant que leur intérêt supérieur pourrait être également satisfait en Italie en rejetant la demande fondée sur des considérations d’ordre humanitaire. Ils soulignent qu’aucune difficulté que pourraient subir les enfants n’est justifiée et se demandent quels facteurs [traduction] « défavorables »
seraient suffisants pour l’emporter sur l’intérêt supérieur des enfants. Un certain poids favorable a été accordé à l’établissement de la famille au Canada, et un poids similaire a été accordé aux difficultés qu’elle subirait dans l’ensemble en Italie. Par conséquent, ils font valoir qu’il est déraisonnable de conclure que ces facteurs l’emportent d’une manière ou d’une autre sur l’intérêt supérieur des enfants.
[18]
Je ne peux pas convenir que cela montre une incohérence dans la décision. Comme le reconnaissent les Mebrahtom, la conclusion selon laquelle l’intérêt supérieur d’un enfant est de demeurer au Canada n’est pas déterminante pour statuer sur une demande fondée sur des considérations d’ordre humanitaire : Hawthorne, aux para 2, 8; Baker, au para 75. S’il en était autrement, chaque fois qu’un renvoi porterait atteinte à l’intérêt supérieur de l’enfant – ce qui, comme l’a reconnu la Cour d’appel dans l’arrêt Hawthorne, serait le cas sauf dans des « circonstances exceptionnelles »
–, la demande fondée sur des considérations d’ordre humanitaire devrait alors être accueillie. Cela ne correspond ni au libellé du paragraphe 25(1) de la LIPR ni à l’interprétation jurisprudentielle de ce paragraphe : Kisana, au para 24.
[19]
Dans le cas présent, l’agent a conclu que l’intérêt supérieur des enfants était de demeurer au Canada avec leur mère, mais que ce n’était pas un facteur très important en faveur de la demande, étant donné la situation dans laquelle ils se trouveraient si la famille était renvoyée en Italie. L’enquête relative aux demandes fondées sur des considérations d’ordre humanitaire ne consiste pas simplement à savoir si d’autres facteurs « l’emportent »
ensuite sur ce facteur. Il s’agit d’apprécier si toutes les circonstances, y compris, en particulier, l’intérêt supérieur des enfants, sont « de nature à inciter [une personne] raisonnable d’une société civilisée à soulager les malheurs d’une autre personne »
, afin de justifier une dispense des dispositions de la LIPR : Kanthasamy, au para 21, citant Chirwa c Canada (Ministre de la Citoyenneté et de l’Immigration) (1970), 4 AIA 338, [1970] DSAI no 1 (QL/Lexis). Il s’agit d’apprécier non seulement si les facteurs sont « favorables »
ou « défavorables »
, mais aussi dans quelle mesure ils vont dans ce sens. Il n’est pas nécessairement incohérent qu’un agent conclue que le facteur de l’intérêt supérieur de l’enfant joue dans une certaine mesure en faveur d’une dispense, comme le font d’autres facteurs, et pourtant conclue que, en se fondant sur l’appréciation globale, la dispense pour des considérations d’ordre humanitaire n’est pas justifiée. S’il en était autrement, même la plus petite différence entre les conditions dans le pays favoriserait une demande fondée sur des considérations d’ordre humanitaire et exigerait que des facteurs défavorables (par opposition aux facteurs favorables insuffisants) « l’emportent »
sur ce facteur. Cela serait contraire au critère énoncé dans la décision Chirwa et à l’affirmation formulée dans l’arrêt Kanthasamy, selon laquelle le paragraphe 25(1) ne doit pas être « interprété d’une façon si large qu’il détruise la nature essentiellement exclusive »
de la LIPR : Kanthasamy, au para 14.
[20]
À cet égard, je pense que le recours des Mebrahtom aux décisions du juge Martineau de la Cour dans les affaires Conka c Canada (Citoyenneté et Immigration), 2014 CF 985, et Bushra c Canada (Citoyenneté et Immigration), 2016 CF 1364, est erroné. Dans ces décisions, le juge Martineau a réitéré ce qui est énoncé dans l’arrêt Hawthorne, à savoir que les enfants méritent rarement, sinon jamais, d’être exposés à des difficultés, et a déclaré que « l’objet même de la demande [fondée sur des considérations d’ordre humanitaire] est de veiller à ce que l’on réponde à l’intérêt supérieur des enfants et à ce que ces derniers ne subissent pas de difficultés »
: Conka, au para 23; Bushra, au para 18. Il a conclu dans chaque affaire qu’il était déraisonnable de simplement apprécier si les besoins de l’enfant seraient satisfaits dans son pays d’origine, sans apprécier ce qui serait dans son intérêt supérieur : Conka, aux para 5, 15‑23; Bushra, aux para 17‑19. Je n’interprète pas les déclarations du juge Martineau comme s’il laissait entendre qu’une décision rendue à l’égard des considérations d’ordre humanitaire devait invariablement garantir que les enfants ne subiraient aucune difficulté, ou que des facteurs défavorables importants devaient l’emporter sur toute conséquence négative sur leur intérêt supérieur pour justifier une décision défavorable relativement à une demande fondée sur des considérations d’ordre humanitaire.
[21]
Les Mebrahtom font en outre valoir que le fait que l’agent n’a accordé qu’un [traduction] « certain poids »
au facteur de l’intérêt supérieur des enfants était déraisonnable et contraire à l’exigence selon laquelle ce facteur doit être une « considération […] importante »
et avoir un « poids considérable »
: Kanthasamy, aux para 40‑41; Baker, au para 75. Je ne suis pas de cet avis. L’exigence selon laquelle l’analyse relative à l’intérêt supérieur de l’enfant doit avoir un poids considérable, ou être une considération importante dans l’appréciation ne veut pas dire que toutes les appréciations de l’intérêt supérieur de l’enfant jouent nécessairement fortement en faveur de l’accueil d’une demande. En d’autres mots, l’appréciation de l’intérêt supérieur de l’enfant doit se voir accorder un « poids considérable »
au sens de son importance relative dans l’appréciation globale. Mais, par nécessité, ce facteur peut jouer en faveur d’une conclusion favorable quant aux considérations d’ordre humanitaire à un degré plus ou moins important, en fonction de l’intérêt supérieur de l’enfant dans un cas donné. La mesure dans laquelle le renvoi aurait des conséquences négatives sur l’enfant ou les enfants dans leur situation particulière est essentielle à l’analyse : Kanthasamy, aux para 34‑35; Agraira c Canada (Sécurité publique et Protection civile), 2013 CSC 36 au para 41. Le fait de reconnaître que le renvoi causerait certaines difficultés, mais qu’il n’aurait pas de conséquences négatives importantes sur les enfants, est une conclusion raisonnable, et le fait d’exprimer qu’un « certain poids »
a été accordé à ce facteur dans l’analyse globale ne veut pas dire que l’intérêt des enfants a été minimisé de manière inappropriée ou n’a pas été reconnu comme étant un facteur important.
[22]
Par conséquent, je conclus que l’agent n’a pas apprécié de manière déraisonnable l’intérêt supérieur des enfants dans le cadre de l’analyse globale relative aux considérations d’ordre humanitaire.
B.
La décision de l’agent n’était pas dépourvue de compassion
[23]
Une demande fondée sur des considérations d’ordre humanitaire exige de l’agent qu’il tienne compte non seulement de la question des « difficultés »
, mais aussi des facteurs d’ordre humanitaire de façon plus générale : Marshall c Canada (Citoyenneté et Immigration), 2017 CF 72 au para 33. Le juge Campbell a formulé ce qui suit au paragraphe 34 de la décision Damte c Canada (Citoyenneté et Immigration), 2011 CF 1212 :
La compassion passe par l’empathie. Pour être empathique, le décideur doit se mettre dans la peau du demandeur d’asile et se poser la question suivante : comment me sentirais‑je si j’étais à sa place? Le décideur doit formuler sa réponse en écoutant son cœur aussi bien que son esprit analytique.
[24]
Les Mebrahtom font valoir que, dans leur cas, la décision de l’agent ne montrait pas cette empathie, mais était plutôt [traduction] « dépourvue de compassion »
. Ils ne ciblent pas une partie particulière des motifs montrant un manque de compassion, mais affirment plutôt que les motifs dans leur ensemble ne montrent aucune compassion ou empathie. Je ne suis pas convaincu, après examen de la décision, qu’elle montre que l’agent a manqué de compassion. Il a examiné la situation personnelle de la famille, a souligné leurs relations et a mis en relief le succès des enfants à l’école, trouvant [traduction] « admirable »
qu’ils aient si bien réussi dans un nouveau pays. Il a reconnu les difficultés que subiraient les enfants s’ils devaient recommencer à aller à l’école en Italie. Il a soupesé les différents facteurs et est finalement parvenu à une conclusion selon laquelle, considérés dans leur ensemble, ils ne justifiaient pas une dispense pour des considérations d’ordre humanitaire. La décision n’était pas dans l’effusion ni n’était excessivement personnelle, mais je ne peux pas conclure qu’elle démontrait un manque déraisonnable de compassion.
[25]
De même, je ne peux pas accepter la proposition selon laquelle l’accent mis par l’agent sur les difficultés mettait en évidence le manque de compassion dans son approche. Les difficultés que subiraient les Mebrahtom avec le renvoi sont un facteur pertinent à prendre en considération dans une analyse relative aux considérations d’ordre humanitaire, compte tenu du fait qu’il y aura inévitablement des difficultés associées à l’obligation de quitter le Canada : Kanthasamy, aux para 23, 34; Agraira, au para 41. Les Mebrahtom ont fortement insisté sur les difficultés qu’ils subiraient s’ils devaient retourner en Italie; ils ont d’ailleurs intitulé la deuxième partie de leurs observations [traduction] « Difficultés »
. Il ne peut être reproché à l’agent d’avoir tenu compte de ces observations et d’avoir apprécié les difficultés comme étant un facteur, et il ne peut être blâmé d’avoir [traduction] « mis l’accent sur les difficultés »
dans son analyse.
[26]
En définitive, une grande partie des observations des Mebrahtom à ce sujet consistaient à réitérer les facteurs qui, selon eux, étaient favorables à leur demande. Cependant, le rôle de la Cour en matière de contrôle judiciaire n’est pas de soupeser à nouveau ces facteurs et de substituer son avis sur la question de savoir si une dispense discrétionnaire pour des considérations d’ordre humanitaire doit être accordée. Je ne peux pas conclure que la décision de l’agent a démontré un manque de compassion, du fait qu’il n’a pas reconnu qu’une dispense pour des considérations d’ordre humanitaire était justifiée en l’espèce.
C.
L’analyse relative aux difficultés effectuée par l’agent n’était pas déraisonnable
[27]
Dans leur dernier moyen de contestation, les Mebrahtom soulèvent trois questions concernant l’appréciation par l’agent des facteurs de difficultés qu’ils avaient avancé. Premièrement, ils soulignent que l’agent s’est appuyé sur la décision de la Section d’appel des réfugiés (la SAR) en ce qui concerne la question de la protection de l’État. La famille a sollicité l’asile à son arrivée au Canada, après avoir fui des mauvais traitements, en Italie, aux mains de l’ex‑époux de Mme Mebrahtom. La SAR a conclu qu’en Italie, la protection de l’État était adéquate et que la famille pourrait y recourir. Elle a rejeté la demande d’asile. Dans le cadre de la demande ultérieure fondée sur des considérations d’ordre humanitaire présentée par les Mebrahtom, ceux‑ci ont mentionné ces incidents de mauvais traitements et ont fait valoir que la conclusion de la SAR concernant la protection adéquate de l’État a été [traduction] « déstructurée »
par de nouveaux documents versés au cartable national de documentation, lesquels faisaient état des difficultés auxquelles s’exposaient les personnes d’origine africaine pour accéder au système de justice en Italie. Citant des statistiques récentes sur la violence faite aux femmes, les Mebrahtom ont fait valoir que Mme Mebrahtom risquait d’être assassinée par son ex‑conjoint.
[28]
L’agent a examiné les conclusions de la SAR et a conclu qu’il n’y avait pas eu de [traduction] « changement important »
en Italie démontrant que la famille n’avait pas de recours dans ce pays. Tout en reconnaissant qu’il existe des problèmes concernant la violence faite aux femmes, l’agent a de nouveau constaté que ces problèmes n’étaient pas nouveaux et a conclu que la police était capable de venir en aide à ceux qui en avaient besoin en Italie et qu’elle était disposée à le faire.
[29]
Les Mebrahtom font valoir qu’il était déraisonnable pour l’agent de faire fi de leur expérience personnelle d’occurrences où la police n’avait pas protégé la famille. Je ne peux pas conclure que l’agent a fait fi de ces éléments de preuve. Dans son analyse, l’agent n’a pas mentionné spécifiquement l’allégation des Mebrahtom selon laquelle la police ne les avait pas aidés. Cependant, dans son résumé de la demande fondée sur des considérations d’ordre humanitaire, l’agent a noté que Mme Mebrahtom avait déclaré qu’elle avait été victime de violence conjugale et qu’elle n’avait pas été protégée par l’État. Ces mêmes allégations ont été faites dans la demande d’asile de la famille, et la SAR a néanmoins conclu que la famille bénéficierait d’une protection adéquate de l’État en Italie. L’agent a cité cette conclusion. En l’absence d’éléments de preuve démontrant un changement de situation en Italie, je conclus qu’il est raisonnable que l’agent ait accepté les conclusions de la SAR quant à la protection de l’État et qu’il ait considéré cela comme un facteur pertinent dans l’examen des difficultés auxquelles la famille pourrait s’exposer en Italie.
[30]
Deuxièmement, les Mebrahtom font valoir que l’agent n’a pas tenu compte de la dépendance financière par rapport au fiancé de Mme Mebrahtom et n’a pas pris en considération la façon dont ils subviendraient à leurs besoins, par leurs propres moyens, en Italie. La réponse la plus simple à cette observation est que la question n’a pas été soulevée comme un moyen relatif aux difficultés dans la demande fondée sur des considérations d’ordre humanitaire. Il y était bien mentionné que la famille comptait sur le soutien financier du fiancé, et, dans la partie sur l’intérêt supérieur des enfants, les difficultés potentielles à trouver un emploi ont été soulevées, ce que l’agent a pris en compte. Toutefois, les observations de la famille concernant les difficultés liées au renvoi en Italie portaient principalement sur les antécédents de violence conjugale subie par Mme Mebrahtom et sur sa santé mentale, ainsi que sur les préoccupations relatives à la protection de la police décrites plus haut. Il était raisonnable pour l’agent de souligner que le fiancé pouvait choisir de continuer à soutenir la famille, et il n’était pas tenu d’aborder un argument qui n’avait pas été soulevé dans la demande.
[31]
Enfin, les Mebrahtom font valoir que c’est à tort que l’agent a écarté la preuve relative à la santé mentale de Mme Mebrahtom, en se fondant sur l’accès, en Italie, à du counseling en matière de santé mentale. Ils font valoir qu’il est établi dans l’arrêt Kanthasamy que cette approche à l’égard d’une telle preuve relative à la santé mentale est déraisonnable. Je ne souscris pas à l’affirmation selon laquelle l’analyse de l’agent était déraisonnable ou violait l’approche décrite dans l’arrêt Kanthasamy.
[32]
Dans l’arrêt Kanthasamy, la Cour suprême du Canada a souligné que l’agente s’était « attach[ée] uniquement à la possibilité que [l’appelant] soit traité »
dans le pays de renvoi, et qu’elle avait « pass[é] sous silence les répercussions de son renvoi du Canada sur sa santé mentale »
: Kanthasamy, au para 48. La Cour a conclu qu’une détérioration possible de la santé mentale est une considération pertinente, indépendamment du fait que le traitement soit ou non accessible dans le pays de renvoi : Kanthasamy, au para 48. Je n’interprète pas l’arrêt Kanthasamy comme établissant un principe selon lequel l’accès à un traitement de santé mentale dans le pays de renvoi est invariablement sans pertinence ou que ce ne peut être pris en considération.
[33]
Dans la décision Esahak‑Shammas c Canada (Citoyenneté et Immigration), 2018 CF 461, la juge Strickland a résumé la nécessité de prendre en considération les rapports d’évaluation psychologique lorsqu’ils traitent de l’effet d’un renvoi du Canada sur la santé mentale d’un demandeur. Au paragraphe 26 de la décision, elle a souligné ce qui suit :
[…] Notre Cour a affirmé que lorsque des rapports d’évaluation psychologique sont disponibles et indiquent que la santé mentale de demandeurs se détériorerait s’ils devaient être renvoyés du Canada, l’agent doit analyser les difficultés auxquelles seraient soumis les demandeurs s’ils devaient être renvoyés dans leur pays d’origine. Dans de telles circonstances, un agent ne peut limiter son analyse à la seule question de savoir si des soins en santé mentale sont disponibles dans le pays de renvoi […]
[34]
À mon avis, et comme cela est décrit dans la décision Esahak‑Shammas, il n’est pas déraisonnable de prendre en considération l’accès à du counseling en matière de santé mentale dans le pays de renvoi, à condition que l’analyse ne s’attache pas uniquement ou exagérément à cet aspect. En effet, il ne pourrait en être autrement. Si le counseling en matière de santé mentale n’était pas offert ou était limité dans le pays de renvoi, il s’agirait d’un facteur pertinent à prendre en considération. Inversement, l’accès à un tel counseling constitue également un élément pertinent.
[35]
En l’espèce, l’agent a examiné le rapport d’évaluation psychologique déposé concernant la santé mentale de Mme Mebrahtom. Dans le rapport, il est souligné que Mme Mebrahtom satisfaisait aux critères de diagnostic du trouble dépressif majeur de gravité modérée et du trouble de stress post‑traumatique avec symptômes de dissociation. Il est indiqué que Mme Mebrahtom a besoin d’un traitement de santé mentale, que son état pouvait s’améliorer avec [traduction] « des soins appropriés et une garantie d’absence de menace de renvoi »
et que, si la permission de demeurer au Canada lui était refusée, son état se détériorerait et [traduction] « le risque de suicide augmenterait »
.
[36]
L’agent a pris note de ces éléments du rapport et a accordé [traduction] « un certain poids »
à ces préoccupations. En même temps, il a fait remarquer que le rapport avait été préparé en se fondant sur une seule consultation psychologique datant de 2014 (presque quatre ans avant le dépôt des observations sur les considérations d’ordre humanitaire, présentées en février 2018), et que rien ne montrait que les recommandations formulées relativement au counseling en matière de santé mentale avaient été suivies. L’agent a également souligné qu’il y avait peu d’éléments de preuve pour démontrer que Mme Mebrahtom ne pourrait pas bénéficier d’un tel counseling en Italie. Contrairement à la situation décrite dans l’arrêt Kanthasamy, l’agent n’a pas fait fi des conclusions du rapport quant aux conséquences du renvoi. Il ne s’est pas non plus « attach[é] uniquement »
à la possibilité que Mme Mebrahtom reçoive des services de counseling en Italie, ni n’a « limité »
son analyse à cette question. Compte tenu de la nature des éléments de preuve présentés, je conclus que l’agent a traité de manière raisonnable le rapport d’évaluation psychologique.
IV.
Conclusion
[37]
Les Mebrahtom ne m’ont pas convaincu du caractère déraisonnable des motifs de l’agent pour rejeter leur demande de dispense fondée sur des considérations d’ordre humanitaire. L’examen de la question de savoir si les divers facteurs pertinents et la situation de la famille, y compris l’intérêt supérieur des enfants, sont suffisants pour justifier une dispense pour des considérations d’ordre humanitaire est une décision discrétionnaire pour laquelle il faut faire preuve de retenue si l’analyse de l’agent n’est pas déraisonnable. Étant donné que l’analyse n’était pas déraisonnable, il n’y a pas lieu d’intervenir. La demande de contrôle judiciaire sera donc rejetée.
[38]
Aucune des parties n’a soulevé de question en vue de la certification, et je conviens que les circonstances de la présente affaire n’en soulèvent aucune.
[39]
Enfin, je souligne que l’intitulé en l’espèce désigne Mme Mebrahtom comme Mme « Membrahtom »
. Les éléments de preuve, y compris son passeport, montrent que son nom correctement orthographié est « Mebrahtom »
. Afin d’éviter toute confusion, j’ordonnerai que l’intitulé soit corrigé pour refléter correctement l’orthographe de son nom.
JUGEMENT dans le dossier IMM‑1871‑19
LA COUR ORDONNE :
La demande de contrôle judiciaire est rejetée.
L’intitulé est modifié pour que le nom de la demanderesse principale soit TSEGA DESTA MEBRAHTOM, afin de refléter correctement son nom tel qu’il figure dans le dossier.
« Nicholas McHaffie »
Juge
COUR FÉDÉRALE
AVOCATS INSCRITS AU DOSSIER
DOSSIER :
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IMM‑1871‑19
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INTITULÉ :
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TSEGA DESTA MEBRAHTOM ET AUTRES c LE MINISTRE DE LA CITOYENNETÉ ET DE L’IMMIGRATION
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LIEU DE L’AUDIENCE :
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Toronto (Ontario)
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DATE DE L’AUDIENCE :
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LE 9 DÉCEMBRE 2019
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JUGEMENT ET MOTIFS :
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LE JUGE MCHAFFIE
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DATE DES MOTIFS :
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LE 11 AOÛT 2020
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COMPARUTIONS :
Richard Wazana
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POUR LES DEMANDEURS
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Prathima Prashad
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POUR LE DÉFENDEUR
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AVOCATS INSCRITS AU DOSSIER :
WazanaLaw
Avocat
Toronto (Ontario)
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POUR LES DEMANDEURS
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Procureur général du Canada
Toronto (Ontario)
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POUR LE DÉFENDEUR
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