Date : 19991105
Dossier : IMM-1559-98
Ottawa (Ontario), le 5 novembre 1999
En présence de monsieur le juge Pinard
Entre :
YAROSLAV DOLINOVSKY
demandeur
- et -
LE MINISTRE DE LA CITOYENNETÉ
ET DE L"IMMIGRATION
défendeur
ORDONNANCE
La demande de contrôle judiciaire de la décision de la Section du statut de réfugié de la Commission de l"immigration et du statut de réfugié, datée du 14 juin 1996, dans laquelle elle a conclu que le demandeur n"était pas un réfugié au sens de la Convention, est rejetée.
YVON PINARD
_____________________
JUDGE
Traduction certifiée conforme
Philippe Méla
Date : 19991105
Dossier : IMM-1559-98
Entre :
YAROSLAV DOLINOVSKY
demandeur
- et -
LE MINISTRE DE LA CITOYENNETÉ
ET DE L"IMMIGRATION
défendeur
MOTIFS DE L"ORDONNANCE
LE JUGE PINARD
[1] Le demandeur cherche à obtenir le contrôle judiciaire d"une décision de la Section du statut de réfugié de la Commission de l"immigration et du statut de réfugié (la Commission), datée du 14 juin 1996, dans laquelle la Commission a conclu que le demandeur n"était pas un réfugié au sens de la Convention, au sens du paragraphe 2(1) de la Loi sur l"immigration (la Loi).
[2] La revendication du statut de réfugié du demandeur est basée sur une crainte fondée d"être persécuté à la fois en Ukraine mais aussi en Russie, parce qu"il est homosexuel.
[3] La Commission a conclu que le demandeur est un citoyen de l"Ukraine, ce qui n"est pas un problème, puisque ni le demandeur ni le défendeur n"ont soulevé la question de la nationalité du demandeur dans leur dossier respectif.
[4] La Commission a également conclu que la crainte d"être persécuté du demandeur n"était pas fondée. Même s"il fait partie d"un groupe social particulier (les homosexuels) et qu"il est sujet à la crainte subjective exigée, la Commission a conclu que la base objective exigée d"une crainte fondée d"être persécuté n"existait pas. La Commission a reconnu le témoignage du demandeur quant à ses expériences avant son arrivée au Canada comme étant crédible et digne de foi. Cependant, elle a conclu que les éléments de preuve n"attestaient pas d"une attitude publique hostile à l"homosexualité en Ukraine qui aurait pu [TRADUCTION] " générer une " possibilité raisonnable " que les homosexuels dans ce pays font face à des problèmes qui pourraient être considérés comme équivalents à de la persécution ". La Commission a souligné, en particulier, l"abrogation de la prohibition criminelle des actes homosexuels entre hommes consentants, le peu de preuve laissant penser que la police ukrainienne se livre à une conduite abusive envers les homosexuels, la constitution de l"organisme " Two Colours " visant à protéger les droits des homosexuels et l"ouverture d"une discothèque homosexuelle à Kiev. La Commission n"était pas prête à accepter la preuve provenant de la Russie comme étant une indication claire que la situation en Ukraine est la même que celle rapportée en Russie. De plus, la Commission a conclu que l"expérience du demandeur en Ukraine avant 1987 n"équivalait pas à de la persécution au sens de Canada (Procureur général) c. Ward , [1993] 2 R.C.S. 689, à la page 734. Comme la Commission a conclu que le demandeur était un citoyen de l"Ukraine et que sa crainte d"être persécuté dans ce pays n"était pas fondée, elle n"a pas rendu de décision relativement à sa revendication du statut de réfugié contre la Russie.
[5] Le demandeur prétend que la Commission a commis une erreur de droit en passant sous silence des éléments de preuve qui lui étaient présentés et en constatant les faits de manière erronée sans considérer les éléments de preuve qui lui étaient présentés. Le demandeur prétend également que la décision de la Commission est trop sommaire et brève.
[6] Les présentes observations ne sont pas très convaincantes. Il est bien établi qu"il incombe à la Commission d"évaluer correctement les éléments de preuve qui lui sont présentés et d"appuyer sa conclusion en renvoyant à ceux-ci. En l"espèce, je suis d"avis que la Commission a tenu compte de l"ensemble de la preuve qui lui avait été présentée.
[7] La Commission a conclu que le témoignage du demandeur était crédible et digne de foi, mais a donné plus d"importance à la preuve documentaire qui donnait à penser que la situation en Ukraine à l"égard des homosexuels s"améliorait. En vertu de Zhou c. M.E.I. (18 juillet 1994),
A- 492-94, la Commission est en droit de s"appuyer sur la preuve documentaire par préférence au témoignage du demandeur. De la même manière, la Cour d"appel a clarifié dans Yusuf c. Canada (Ministre de l"Emploi et de la Citoyenneté) (1995), 179 N.R. 11, que la question des changements de situation dans le pays est une question de fait. " Étant donné la directive selon laquelle le changement de situation au pays d'origine est une conclusion de fait, la Cour devrait hésiter à intervenir à moins que la conclusion soit vraiment erronée "1, ce qui n"a pas été établi en l"espèce.
[8] Le demandeur a soulevé trois questions supplémentaires mais, à mon avis, elles ne valent pas la peine d"être traitées dans le détail. Tout d"abord, le demandeur soutient que la Commission n"a pas explicitement conclu pourquoi il n"était pas un témoin crédible. À mon avis, cette affirmation est totalement incorrecte et trompeuse puisque la Commission a accepté le témoignage du demandeur comme étant crédible et digne de foi. Ensuite, le demandeur prétend que les membres de la Commission ont été indûment hostiles à son égard. Cette allégation n"est pas étayée par la transcription de l"audience du demandeur. Enfin, le demandeur prétend que la Commission a commis une erreur en droit en omettant d"appliquer le critère approprié, énoncé dans Adjei c. Canada (M.E.I.) , 1989 2 C.F. 680, de ce que constitue une crainte fondée d"être persécuté. Cette observation est incorrecte puisque la Commission a appliqué Adjei dans sa décision. La Commission a conclu que même si les attitudes envers les homosexuels restent hostiles en Ukraine, cette hostilité n"est pas [TRADUCTION] " telle qu"elle donne naissance à une " possibilité raisonnable " que les homosexuels dans ce pays font face à des problèmes qui pourraient être considérés comme équivalents à de la persécution ".
[9] Pour l"ensemble des motifs ci-dessus, la demande de contrôle judiciaire est rejetée.
YVON PINARD
_________________________
JUGE
OTTAWA (ONTARIO)
Le 5 novembre 1999
Traduction certifiée conforme
Philippe Méla
SECTION DE PREMIÈRE INSTANCE DE LA
COUR FÉDÉRALE DU CANADA
AVOCATS INSCRITS AU DOSSIER
NO DU GREFFE : IMM-1559-99 |
INTITULÉ DE LA CAUSE : YAROSLAV DOLINOVSKY c. M.C.I. |
LIEU DE L"AUDIENCE : Montréal (Québec) |
DATE DE L"AUDIENCE : le 6 octobre 1999 |
MOTIFS DE L"ORDONNANCE PAR : LE JUGE PINARD |
EN DATE DU : 5 novembre 1999 |
ONT COMPARU : |
Me Roman B. Karpishka POUR LE DEMANDEUR |
Me Josée Paquin POUR LE DÉFENDEUR |
AVOCATS INSCRITS AU DOSSIER : |
Me Roman B. Karpishka POUR LE DEMANDEUR |
Montréal (Québec)
M. Morris Rosenberg POUR LE DÉFENDEUR |
Sous-procureur général du Canada |
__________________
1 Elmi et autres c. Ministre de la Citoyenneté et de l"Immigration (10 juin 1996), A-744-92.