Date : 20050106
Dossier : IMM-9385-03
Référence : 2005 CF 6
Ottawa (Ontario), le 6 janvier 2005
EN PRÉSENCE DE MONSIEUR LE JUGE O'REILLY
ENTRE :
SIVAKANTHAN PATHMANATHAN
demandeur
et
LE MINISTRE DE LA CITOYENNETÉ ET DE L'IMMIGRATION
défendeur
MOTIFS DU JUGEMENT ET JUGEMENT
[1] M. Sivakanthan Pathmanathan ne veut pas retourner au Sri Lanka, son pays natal, parce qu'il craint d'être persécuté par les Tigres de libération de l'Eelam tamoul (TLET). Après avoir effectué un examen des risques avant renvoi (ERAR), une agente d'immigration a conclu que M. Pathmanathan ne serait pas en danger s'il était renvoyé au Sri Lanka. M. Pathmanathan prétend que l'ERAR comporte une erreur grave car il ne tient pas compte des faits nouveaux survenus au Sri Lanka au cours des cinq semaines qui se sont écoulées entre la date à laquelle l'examen a été effectué par l'agente et la date à laquelle les résultats lui ont été communiqué. Il me demande d'ordonner qu'un nouvel examen soit effectué par un autre agent.
[2] M. Pathmanathan a reçu les résultats de l'ERAR le concernant le 18 novembre 2003. Cet examen était daté du 10 octobre précédent. Or, pendant les cinq semaines séparant ces deux dates, l'état d'urgence avait été instauré au Sri Lanka et, dans certaines régions, le cessez-le-feu fragile avait fait place à une escalade de la violence.
[3] L'agente d'ERAR savait que la situation se détériorait au Sri Lanka. Elle a fait état de violations sporadiques du cessez-le-feu et d'atteintes aux droits de la personne commises par les TLET, mais elle ne croyait pas que le processus de paix était sérieusement compromis. Elle ne croyait pas non plus que le demandeur lui-même courait un risque de préjudice plus grand à cause de ces événements.
[4] Il n'y a aucun doute que la situation s'est détériorée au Sri Lanka pendant les cinq semaines en cause. Mais la décision de l'agente doit-elle être infirmée pour autant?
[5] Il y aura souvent un délai entre la décision de l'agent d'ERAR et la date à laquelle le demandeur la recevra. Un délai est parfois nécessaire pour réduire le risque que le demandeur s'enfuie avant de pouvoir être renvoyé. Le délai est aussi parfois simplement une conséquence indésirable, mais inévitable, de la bureaucratie. Il y a certainement des situations où un délai cause un préjudice à un demandeur et des recours appropriés doivent être offerts dans ces cas.
[6] À mon avis cependant, le contrôle judiciaire de la décision de l'agente n'est pas le recours approprié en l'espèce. Il est vrai que les choses peuvent changer radicalement en cinq semaines. En fait, elles peuvent changer du jour au lendemain. Mais il ne serait pas réaliste d'attendre des agents d'ERAR qu'ils suivent en permanence l'évolution de la situation existant dans les pays d'origine de tous les demandeurs et qu'ils mettent continuellement à jour leurs analyses. Ils doivent évidemment veiller à ce que leurs examens soient raisonnablement à jour. De leur côté, les demandeurs d'ERAR doivent s'assurer que leurs demandes sont fondées sur les conditions existant dans leur pays au moment où elles sont présentées. Les demandeurs peuvent compléter les observations qu'ils transmettent à l'agent d'ERAR. Ils peuvent également demander un deuxième examen des risques en vertu de l'article 165 de la Loi sur l'immigration et la protection des réfugiés, L.C. 2001, ch. 27 (voir l'annexe). Une deuxième demande n'entraîne pas systématiquement un sursis, mais le renvoi du demandeur peut être reporté si les circonstances le justifient. En outre, la Cour ordonnera évidemment qu'il soit sursis à la mesure de renvoi s'il y a urgence. Il y aura certainement des cas où l'examen ne sera pas suffisamment à jour. Chaque cas doit être examiné en fonction des faits et des circonstances en cause. Je suis cependant convaincu que l'agente n'a pas commis d'erreur dans le cas de M. Pathmanathan et que le fait que l'examen des risques a été effectué cinq semaines avant qu'il reçoive la décision ne lui a causé aucun préjudice.
[7] Par conséquent, je dois rejeter la présente demande de contrôle judiciaire. Aucune question de portée générale n'a été proposée par les parties et aucune ne sera énoncée.
JUGEMENT
LA COUR STATUE :
1. que la demande de contrôle judiciaire est rejetée;
2. qu'aucune question de portée générale n'est énoncée.
_ James W. O'Reilly _
Juge
Traduction certifiée conforme
Jacques Deschênes, LL.B.
Annexe
Loi sur l'immigration et la protection des réfugiés, L.C. 2001, ch. 27
Pouvoir d'enquête 165. La Section de la protection des réfugiés et la Section de l'immigration et chacun de ses commissaires sont investis des pouvoirs d'un commissaire nommé aux termes de la partie I de la Loi sur les enquêtes et peuvent prendre les mesures que ceux-ci jugent utiles à la procédure. |
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Immigration and Refugee Protection Act, S.C. 2001, c. 27
Powers of a commissioner 165. The Refugee Protection Division and the Immigration Division and each member of those Divisions have the powers and authority of a commissioner appointed under Part I of the Inquiries Act and may do any other thing they consider necessary to provide a full and proper hearing. |
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COUR FÉDÉRALE
AVOCATS INSCRITS AU DOSSIER
DOSSIER : IMM-9385-03
INTITULÉ : SIVAKANTHAN PATHMANATHAN
c.
LE MINISTRE DE LA CITOYENNETÉ
ET DE L'IMMIGRATION
LIEU DE L'AUDIENCE : TORONTO (ONTARIO)
DATE DE L'AUDIENCE : LE 18 NOVEMBRE 2004
MOTIFS DU JUGEMENT
ET JUGEMENT : LE JUGE O'REILLY
DATE DES MOTIFS : LE 6 JANVIER 2005
COMPARUTIONS :
Lani Gozlan POUR LE DEMANDEUR
Kareena R. Wilding POUR LE DÉFENDEUR
AVOCATS INSCRITS AU DOSSIER :
Max Berger et associés POUR LE DEMANDEUR
Toronto (Ontario)
Morris Rosenberg POUR LE DÉFENDEUR
Sous-procureur général du Canada
Toronto (Ontario)