Date : 20040513
Dossier : IMM-4221-04
Référence : 2004 CF 698
Ottawa (Ontario), le 13 mai 2004
EN PRÉSENCE DE MADAME LA JUGE MACTAVISH
ENTRE :
AUSTYN EHIREME AKPATAKU
demandeur
et
LE MINISTRE DE LA CITOYENNETÉET DE L'IMMIGRATION
défendeur
MOTIFS DE L'ORDONNANCE ET ORDONNANCE
[1] M. Akpataku cherche à obtenir un sursis à l'exécution de la mesure de renvoi prise contre lui prévue pour demain. La demande pricipale d'autorisation et de contrôle judiciaire est reliée à un examen des risques avant renvoi (ERAR) qui a été signifié à M. Akpataku le 20 avril 2004. La demande d'autorisation a été déposée le 7 mai, c'est-à-dire, deux jours en retard.
[2] M. Akpataku cherche aussi à obtenir une prorogation du délai pour déposer sa demande d'autorisation. L'avocat de M. Akpataku a dit qu'il avait mal lu une note sur l'avis de convocation concernant la date de signification, et qu'il avait compris que les documents avaient été signifiés à M. Akpataku le 30 avril, alors qu'ils avaient en réalité été signifiés le 20 avril.
[3] L'obtention d'une prorogation de délai est une condition préalable à l'étude de la demande d'autorisation de M. Akpataku. Les principes régissant l'exercice du pouvoir discrétionnaire en ce qui concerne les demandes de prorogation de délai sont énoncés dans Canada (Procureur général) c. Hennelly, [1999] A.C.F. no 846 (C.A.F.), (1999), 244 N.R. 399. Pour qu'une prorogation de délai soit accordée, le demandeur doit démontrer :
1. une intention constante de poursuivre sa demande;
2. que la demande est bien fondée;
3. que le défendeur ne subit pas de préjudice en raison du délai; et
4. qu'il existe une explication raisonnable justifiant le délai.
[4] Même si je suis convaincue que le demandeur s'est conformé à la première, à la troisième et à la quatrième des conditions du critère de Hennelly, je ne suis pas persuadée du bien-fondé de la demande principale. Par conséquent, la demande de prorogation de délai est rejetée.
[5] M. Akpataku est un chrétien. Sa demande d'asile était fondée sur sa crainte alléguée de son oncle maternel, qui était bien en vue dans la communauté musulmane au Nigéria, et qui était en colère du fait que M. Akpataku n'avait pas adopté l'Islam. Cette prétention a été rejetée par la Section de la protection des réfugiés de la Commission de l'immigration et du statut de réfugié. Un examen des motifs de la Commission révèle que la Commission a rejeté la majeure partie du témoignage de M. Akpataku l'estimant non crédible. Par conséquent, la Commission a conclu que M. Akpataku n'avait pas réussi à fournir suffisamment d'éléments de preuve montrant qu'il avait une crainte fondée de persécution au Nigéria en raison de sa religion ou de son appartenance à un groupe social particulier.
[6] M. Akpataku n'a fourni à l'agent d'ERAR aucun élément de preuve additionnel concernant la question du risque, et la décision rendue relativement à l'ERAR a été défavorable. À mon avis, la prétention de M. Akpataku selon laquelle l'examen avait été fait de manière abusive ou arbitraire est sans fondement.
[7] M. Akpataku affirme de plus que s'il rentrait au Nigéria, il s'exposerait à un risque pour sa vie et pour sa sécurité, ce qui donnerait ouverture aux droits que lui reconnaît l'article 7 de la Charte. Dans Suresh c. Canada (Ministre de la Citoyenneté et de l'Immigration), [2002] 1 R.C.S. 3, 2002 CSC 1, la Cour suprême du Canada a dit que les protections en matière de procédure offertes par l'article 7 de la Charte s'appliquent au processus de renvoi seulement si la personne concernée établit une preuve prima facie qu'elle pourrait risquer la torture si elle était expulsée. À mon avis, M. Akpataku ne s'est pas acquitté de cette obligation.
[8] M. Akpataku a fourni une lettre récente de sa soeur dans laquelle elle prétend que leur oncle est toujours en colère contre M. Akpataku. L'agent d'ERAR n'avait pas cette lettre en main lorsque l'examen a été complété. De plus, vu que cette lettre a été produite à la toute dernière minute, et vu les liens familiaux serrés entre l'auteure de la lettre et son destinataire, je ne suis pas persuadée que la lettre soit suffisante pour créer une preuve prima facie que M. Akpataku pourrait être exposé à un risque s'il était expulsé.
[9] Enfin, M. Akpataku prétend qu'il n'a pas eu droit à une audience équitable de la part de l'agent d'ERAR, parce qu'on ne lui a pas remis une copie du projet de rapport avant qu'il soit finalisé, et qu'on ne lui a pas non plus donné la possibilité de formuler des commentaires sur les conclusions de l'agent d'ERAR. Une certaine jurisprudence soutient la proposition qu'une telle possibilité devrait être offerte aux demandeurs, à tout le moins dans le contexte des examens de risques faits en application de la Loi sur l'immigration (voir Soto c. Ministre de la Citoyenneté et de l'Immigration, [2001] A.C.F. no 1207). Toutefois, la jurisprudence prépondérante de la Cour veut qu'un demandeur d'ERAR n'ait aucun droit de formuler des commentaires concernant les motifs compris dans un projet lorsqu'il s'agit d'un examen des risques fait en application de la Loi sur l'immigration et la protection des réfugiés. (Voir, à titre d'exemple, Zolotareva c. Ministre de la Citoyenneté et de l'Immigration, [2003] A.C.F. no 1596.) Par conséquent, je suis convaincue que cet aspect de la demande de M. Akpataku est sans fondement.
[10] Pour ces motifs, la demande de prorogation de délai pour déposer la demande d'autorisation et de contrôle judiciaire de la décision de l'agent d'ERAR est rejetée.
[11] Avec le consentement des parties, l'intitulé est modifié par le retrait de « ministre de la Citoyenneté et de l'Immigration » et par l'ajout de « Solliciteur général » à titre de défendeur.
ORDONNANCE
LA COUR ORDONNE :
- La demande de prorogation de délai pour déposer la demande d'autorisation et de contrôle judiciaire de la décision de l'agent d'ERAR est rejetée; et
- L'intitulé est modifié par le retrait de « ministre de la Citoyenneté et de l'Immigration » et par l'ajout de « Solliciteur général » à titre de défendeur.
« Anne L. Mactavish »
Juge
Traduction certifiée conforme
Caroline Raymond, LL.L.
COUR FÉDÉRALE
AVOCATS INSCRITS AU DOSSIER
DOSSIER : IMM-4221-04
INTITULÉ: AUSTYN EHIREME AKPATAKU
c.
LE MINISTRE DE LA CITOYENNETÉ ET DE L'IMMIGRATION
LIEU DE L'AUDIENCE : OTTAWA (ONTARIO)
DATE DE L'AUDIENCE : LE 13 MAI 2004
MOTIFS DE L'ORDONNANCE
ET ORDONNANCE : LA JUGE MACTAVISH
DATE DES MOTIFS : LE 13 MAI 2004
COMPARUTIONS:
Adetayo G. Akinyemi POUR LE DEMANDEUR
Martin Anderson POUR LE DÉFENDEUR
AVOCATS INSCRITS AU DOSSIER:
Adetayo G. Akinyemi POUR LE DEMANDEUR
Toronto (Ontario)
Morris Rosenberg POUR LE DÉFENDEUR
Sous-procureur général du Canada