Date: 20000110
Dossier: IMM-3657-98
ENTRE :
XUE HU JIAN
demandeur
et
LE MINISTRE DE LA CITOYENNETÉ ET DE L"IMMIGRATION
défendeur
MOTIFS DE L"ORDONNANCE
LE JUGE O"KEEFE
[1] Il s"agit d"une demande que XUE HU JIAN (le demandeur) a présentée en vue d"obtenir le contrôle judiciaire de la décision qui a été prise par Mary Coulter, vice-consule, agente d"immigration, Section de l"immigration au consulat général du Canada, à Hong Kong, le 19 juin 1998. Mme Coulter a conclu que le demandeur ne remplissait pas les conditions de résidence permanente, et ce, pour les motifs suivants :
[TRADUCTION] |
Comme on vous l"a expliqué à l"entrevue, je ne suis pas convaincue que les exigences énoncées dans la Classification canadienne descriptive des professions à l"égard de la profession de physiologiste envisagée soient satisfaites, en ce qui concerne la formation et l"entrée; ces exigences sont ci-après énoncées : |
- Un baccalauréat de quatre ans en sciences biologiques et |
- Au moins deux années d"études de deuxième cycle menant à une maîtrise ainsi que de l"expérience professionnelle dans la spécialité. |
Dans votre demande, il n"est fait mention d"aucune autre profession à l"égard de laquelle vous avez les qualités et l"expérience voulues, et qui permettrait de faire droit à votre demande. |
J"ai également apprécié la demande en me fondant sur la Classification nationale des professions (la CNP), mais malheureusement, vous n"avez pas obtenu le nombre total de points d"appréciation nécessaire pour que je puisse faire droit à votre demande. |
LES FAITS
[2] Le 30 avril 1997, le demandeur a demandé à résider en permanence au Canada. Il s"est présenté à une entrevue avec Mary Coulter le 1er mai 1998. Dans sa demande, le demandeur a déclaré qu"au Canada, il prévoyait exercer la profession de physiologiste (Recherche). Toutefois, il ressort des notes de l"entrevue figurant dans le dossier qui a été déposé conformément à la règle 317 (page 5 du dossier) et de la lettre de refus envoyée par Mme Coulter (page 8 du dossier) que le demandeur a de fait été apprécié à titre de physiologiste.
[3] Le 1er mai 1998, le demandeur a eu une entrevue avec Mme Coulter; le 19 juin 1998, Mme Coulter a envoyé la lettre par laquelle elle refusait la demande de résidence permanente.
[4] Le demandeur a demandé à résider en permanence au Canada à titre de membre de la catégorie des parents aidés; afin d"être admis à titre de parent aidé, le demandeur doit obtenir 65 points d"appréciation.
[5] Mme Coulter a conclu que le demandeur ne satisfaisait pas aux exigences, en ce qui concerne la formation et l"entrée, à l"égard de la profession de physiologiste envisagée conformément à la Classification canadienne descriptive des professions, soit un baccalauréat de quatre ans en sciences biologiques et au moins deux années d"études de deuxième cycle menant à une maîtrise ainsi que de l"expérience professionnelle dans la spécialité.
[6] Mme Coulter a également apprécié le demandeur à titre de physiologiste en se fondant sur la Classification nationale des professions (la CNP); le demandeur n"a pas obtenu les 65 points d"appréciation nécessaires dans cette catégorie.
[7] Mme Coulter a également apprécié le demandeur dans la catégorie " technicien de recherche ", profession à l"égard de laquelle elle a attribué 61 points d"appréciation.
[8] Le demandeur a étudié au Collège médical de la Mongolie-Intérieure, à Houhelot, en Chine, de 1978 à 1982; il a obtenu un baccalauréat en médecine. Le demandeur a travaillé comme physiologiste de 1983 jusqu"à la date de l"entrevue. Il exerçait encore cette profession le 15 juillet 1998.
LES QUESTIONS EN LITIGE
[9] Le demandeur a soulevé les questions ci-après énoncées :
1. L"agente des visas a-t-elle omis d"observer un principe de justice naturelle ou d"équité procédurale ou toute autre procédure qu"elle était légalement tenue de respecter? |
2. L"agente des visas a-t-elle rendu une décision fondée sur une conclusion de fait erronée, tirée de façon abusive ou arbitraire ou sans tenir compte des éléments dont elle disposait? |
3. L"agente des visas a-t-elle commis une erreur de droit en décidant de rejeter la demande de résidence permanente? |
Dans la demande de contrôle, des précisions sont apportées à cet égard :
1. Omission d"apprécier le demandeur dans la catégorie des " biologistes et autres scientifiques " (no 2121 de la CNP) |
2. Personnalité |
3. Facteur professionnel |
4. Expérience |
LE DROIT APPLICABLE
[10] Les dispositions législatives qui s"appliquent à l"appréciation du demandeur figurent dans la première colonne, Annexe I du Règlement sur l"immigration, DORS/78-172 (le Règlement). L"annexe I énonce une série de facteurs en vertu desquels les points sont attribués au demandeur compte tenu de l"appréciation effectuée par l"agent des visas en vertu de chaque facteur.
[11] De plus, le 1er mai 1997, un nouveau système de classification des professions appelé la Classification nationale des professions (la CNP) a été adopté à la place de la Classification canadienne descriptive des professions (la CCDP). Les paragraphes 2.03(1) et (2) du Règlement sont ainsi libellés :
2.03(1) For the purpose of an assessment by a visa officer under section 8, in respect of an application for a visa that was made under section 9 of the Act before May 1, 1997 and was still pending on that date, the application factors set out in Schedule I, as that Schedule read immediately before May 1, 1997, shall apply. |
2.03 (1) L"appréciation par l"agent des visas aux termes de l"article 8, dans le cadre d"une demande de visa pendante au 1er mai 1997 qui a été présentée avant cette date en vertu de l"article 9 de la Loi, se fait suivant les facteurs applicables prévus à l"annexe I dans sa version antérieure au 1er mai 1997. |
(2) If an application for a visa referred to in subsection (1) is refused, the visa officer shall reassess the applicant in accordance with the applicable factors set out in Schedule I, as that Schedule read on May 1, 1997. SOR/97-242, s. 2. |
(2) Lorsque la demande visée au paragraphe (1) est refusée, l"agent des visas apprécie à nouveau le demandeur suivant les facteurs applicables prévus à l"annexe I dans sa version du 1er mai 1997. DORS/97-242, art. 2. |
Par conséquent, une demande présentée avant le 1er mai 1997 qui est pendante le 1er mai 1997 est appréciée en vertu de la CCDP, telle qu"elle s"applique aux professions. Lorsque la demande de visa est refusée par suite de l"application de la CCDP à la profession envisagée, l"agent des visas apprécie à nouveau le demandeur en vertu de la CNP. Il existe un tableau de conversion des professions d"un système à l"autre.
ANALYSE ET DÉCISION
[12] Il ressort de l"examen des dispositions législatives citées au paragraphe 10 qu"il incombe à l"agent des visas, lorsqu"il apprécie une demande qui a été présentée avant le 1er mai 1997 (la présente demande a été présentée le 30 avril 1997), d"apprécier d"abord le demandeur conformément à l"annexe I du Règlement en utilisant le système de classification de la CCDP en vue d"apprécier la profession du demandeur. Si le demandeur n"obtient pas 65 points d"appréciation en tout, l"agent des visas l"apprécie à nouveau suivant les facteurs applicables prévus à l"annexe I, dans sa version du 1er mai 1997, c"est-à-dire en utilisant le système de classification de la CNP à l"égard de la profession.
[13] L"examen du dossier montre que Mme Coulter a conclu que le demandeur ne satisfaisait pas aux exigences, en ce qui concerne la formation et l"entrée, à l"égard de la profession de physiologiste décrite dans la CCDP puisqu"il n"était pas titulaire d"une maîtrise.
[14] Dans sa décision, l"agente des visas déclare également avoir apprécié le demandeur en se fondant sur le système de la CNP; elle a décidé que le nombre total de points d"appréciation était encore une fois insuffisant pour justifier l"octroi de la demande. Elle a également conclu qu"il fallait, selon le système de la CNP, être titulaire d"une maîtrise en vue d"exercer la profession de chercheur scientifique (page 5 du dossier).
[15] La lecture du dossier ou de la décision ne me permet pas de déterminer si le demandeur a été apprécié à l"égard de tous les facteurs nécessaires énoncés dans la première colonne de l"annexe I à l"égard de la profession de physiologiste selon le système de la CNP, étant donné que l"agente des visas déclare avoir apprécié le demandeur à titre de " technicien de recherche, sciences de la vie ".
[16] La CCDP et la CNP renferment un tableau de conversion d"un système à l"autre (pages 33 à 38 du dossier de la demande). La consultation du tableau permet de déterminer que la catégorie des physiologistes (no 2133-214 de la CCDP) équivaut à la catégorie des biologistes et autres scientifiques (no 2121 de la CNP). Il ressort en outre du libellé de la classification no 2121 intitulée " Biologistes et autres scientifiques " que les biologistes et autres scientifiques font tant des recherches de base que des recherches appliquées. Dans ce groupe, il est également fait mention des physiologistes. Le document montre également qu"un baccalauréat en biologie ou dans une discipline connexe est exigé des biologistes. Il me semble que le même raisonnement s"appliquerait à un physiologiste. Un physiologiste devrait uniquement être titulaire d"un baccalauréat en vue de faire des recherches de base. Le physiologiste qui veut faire des recherches à un niveau plus avancé devrait probablement être titulaire d"une maîtrise.
[17] En l"espèce, le demandeur était titulaire d"un baccalauréat en physiologie, et avait quatorze (14) années d"expérience professionnelle; il aurait donc du être apprécié selon la classification professionnelle no 2121 " Biologistes et autres scientifiques ". En ne tenant pas compte de cette profession, Mme Coulter a omis de tenir compte d"une considération pertinente; elle a donc exercé d"une mauvaise façon son pouvoir discrétionnaire. J"infirmerais donc la décision de Mme Coulter et je renverrais la demande pour nouvel examen par un agent des visas différent.
[18] Étant donné la conclusion que j"ai tirée, il n"est pas nécessaire de statuer sur la question de la personnalité, sur le facteur professionnel et sur le facteur " expérience ". Toutefois, à mon avis, il n"incombe pas à cette cour de reconsidérer la décision de l"agente des visas sur ce point et de substituer ensuite son avis à celui de l"agente des visas dans la mesure où cette dernière s"est acquittée des obligations qui lui incombaient en vertu de la loi.
[19] Le demandeur a soutenu que l"agente des visas n"avait pas apprécié sa conjointe. Or, le nom du demandeur figurait à titre de demandeur principal sur la demande et aucune demande n"a été faite à l"égard de la conjointe, de sorte que l"agente des visas n"était pas tenue d"apprécier la conjointe.
[20] Eu égard aux circonstances de l"espèce, aucune ordonnance ne sera rendue au sujet des dépens.
[21] La décision de l"agente des visas est donc infirmée et la demande est renvoyée pour nouvel examen par un agent des visas différent.
[22] Étant donné que je ne suis pas convaincu que la question proposée satisfasse aux critères prévus au paragraphe 83(1) de la Loi sur l"immigration, c"est-à-dire " une question grave de portée générale ", je n"ai pas certifié de question aux fins d"un appel.
" John A. O"Keefe "
___________________________
J.C.F.C.
Ottawa (Ontario),
le 10 janvier 2000.
Traduction certifiée conforme
L. Parenteau, LL.L.
COUR FÉDÉRALE DU CANADA
SECTION DE PREMIÈRE INSTANCE
AVOCATS INSCRITS AU DOSSIER
No DU GREFFE : IMM-3657-98
INTITULÉ DE LA CAUSE : XUE HU JIAN c. MCI |
LIEU DE L'AUDIENCE : TORONTO |
DATE DE L'AUDIENCE : LE 14 SEPTEMBRE 1999
MOTIFS DE L"ORDONNANCE du juge O"Keefe en date du 10 janvier 2000
ONT COMPARU :
Matthew Moyal POUR LE DEMANDEUR
Godwin Friday POUR LE DÉFENDEUR
AVOCATS INSCRITS AU DOSSIER :
Moyal et Moyal POUR LE DEMANDEUR
Toronto (Ontario)
Morris Rosenberg
Sous-procureur général du Canada POUR LE DÉFENDEUR