Date : 19980113
Dossier : IMM-270-97
ENTRE
ROSA SANCHEZ,
requérante
et
LE MINISTRE DE LA CITOYENNETÉ ET DE L'IMMIGRATION,
intimé.
MOTIFS DU JUGEMENT
LE JUGE SUPPLÉANT HEALD
[1] Il s'agit d'une demande de contrôle judiciaire d'une décision en date du 23 décembre 1996 rendue par la section du statut de réfugié de la Commission de l'immigration et du statut de réfugié. Par cette décision, la Commission a conclu que la requérante n'était pas une réfugiée au sens de la Convention.
[2] LES FAITS
Le témoignage de la requérante peut être résumé comme suit. La requérante est citoyenne salvadorienne. Elle a travaillé comme trieuse dans une compagnie de café. Ses opinions politiques sont à l'origine de sa revendication de statut de réfugié. Elle et certaines de ses compagnes de travail ont organisé un syndicat pour améliorer leurs conditions de travail. La requérante était un membre fondateur ainsi que la trésorière du syndicat. Leur syndicat a organisé une grève de trois jours en février 1989. Au dernier jour de cette grève, le syndicat a reçu une lettre anonyme qui avertissait que les dirigeants syndicaux disparaîtraient. Par la suite, la requérante était suivie lorsqu'elle se rendait au travail ou en revenait et ce, quotidiennement. En janvier 1994, le directeur de la compagnie a menacé les dirigeants syndicaux. En février 1994, la présidente du syndicat local a été tuée. Le corps révélait des signes de viol et de torture. Le syndicat a organisé des grèves tournantes jusqu'à la fermeture permanente de l'usine le 28 mars 1994. Trois jours plus tard, quatre personnes en uniforme ont mis à sac la maison de la requérante.
[3] Au début d'avril 1994, la fille de la requérante a été brutalement assassinée. On a signalé que deux membres de l'armée avaient quitté la maison de la requérante après le meurtre. Une note a été laissée sur le sol, disant que l'escadron de la mort était responsable du meurtre. La police est venue peu de temps après et a confisqué la note.
[4] LA DÉCISION DE LA COMMISSION
La Commission a rejeté la demande pour deux motifs : a) un manque de [TRADUCTION] "crédibilité et de vraisemblance dans le témoignage de la requérante, y compris le comportement de la revendicatrice"1; b) un défaut de fondement dans la crainte de persécution de la requérante.
[5] LES POINTS LITIGIEUX
1. La Commission a-t-elle eu tort de tirer des conclusions défavorables relativement à la crédibilité ou à la véracité du témoignage de la requérante? |
2. La Commission a-t-elle eu tort en ne tenant pas compte d'une partie des éléments de preuve ou en tirant des conclusions erronées relativement à une partie des éléments de preuve? |
[6] 1. CRÉDIBILITÉ
Dans ses motifs, la Commission a expliqué en détail pourquoi elle n'a pas jugé crédible le témoignage de la requérante. Elle a également expliqué pourquoi elle a rejeté le certificat de décès se rapportant à la fille de la requérante parce que c'était frauduleux. La Commission, en tant que juge des faits, est tenue de déterminer la crédibilité des éléments de preuve produits devant elle2. En conséquence, une cour de révision n'a pas le droit de toucher à une telle décision. La Commission a trouvé des contradictions dans le certificat de décès, et elle a demandé à la requérante d'en donner l'explication. La requérante n'a pu expliquer de façon satisfaisante ces contradictions. Une telle conclusion est celle qu'il était raisonnablement loisible à la Commission de tirer, et ne devrait pas être annulée dans les procédures de contrôle judiciaire.
[7] 2. MÉCONNAISSANCE DES ÉLÉMENTS DE PREUVE
La requérante soutient que le principal élément de preuve a été méconnu. Il a été expressément fait état de l'évaluation psychiatrique de la requérante. Je ne saurais convenir que la Commission n'a pas tenu compte de cet élément de preuve. Ce dernier a particulièrement été mentionné dans les motifs de la Commission. Toutefois, la Commission n'a pas été d'accord sur le fait que l'affliction de la requérante portait atteinte à sa crédibilité, ni sur le fait que cela a justifié les prétendus motifs donnés pour le décès de la fille. J'estime qu'il était raisonnablement loisible à la Commission de tirer une telle conclusion compte tenu du dossier.
[8] Quant à la preuve documentaire, la Commission, après avoir examiné cette preuve, a conclu que la crainte de persécution de la requérante ne reposait pas sur un fondement objectif. La Commission a déduit que bien qu'il y eût eu de la violence au Salvador, le gouvernement avait pris des mesures pour parer aux activités des groupes criminels et pour protéger ses citoyens respectueux des lois. Elle a également noté que la constitution du Salvador interdisait la discrimination à l'égard des syndicats. Il existait d'autres éléments de preuve selon lesquels beaucoup d'employés avaient été dédommagés de ces actes de discrimination. À mon avis, la totalité du présent dossier étaye la conclusion de la Commission.
[9] CONCLUSION
Par ces motifs, la présente demande de contrôle judiciaire est rejetée.
[10] CERTIFICATION
Ni l'un ni l'autre des avocats n'a proposé que soit certifiée une question grave de portée générale en application de l'article 83 de la Loi sur l'immigration. Je conviens qu'il n'y a pas lieu à certification en l'espèce.
"Darrel V. Heald"
J.S.
Toronto (Ontario)
Le 13 janvier 1998
Traduction certifiée conforme
Tan Trinh-viet
COUR FÉDÉRALE DU CANADA
AVOCATS ET PROCUREURS INSCRITS AU DOSSIER
No DU GREFFE : IMM-270-97 |
INTITULÉ DE LA CAUSE : Rosa Sanchez |
et
Le ministre de la Citoyenneté et de l'Immigration |
DATE DE L'AUDIENCE : Le janvier 1998 |
LIEU DE L'AUDIENCE : Toronto (Ontario) |
MOTIFS DU JUGEMENT PAR : le juge suppléant Heald
EN DATE DU 13 janvier 1998 |
ONT COMPARU :
Yehuda Levinson pour la requérante |
Michael C. Morris pour l'intimé |
PROCUREURS INSCRITS AU DOSSIER :
Yehuda Levinson |
Levinson et Associés |
Avocats |
212, rue King ouest |
Pièce 410 |
Toronto (Ontario) |
M5H 1K5 pour la requérante |
George Thomson |
Sous-procureur général du Canada |
pour l'intimé |
COUR FÉDÉRALE DU CANADA |
Date : 19980113 |
Dossier : IMM-270-97 |
ENTRE |
ROSA SANCHEZ, |
requérante |
et |
LE MINISTRE DE LA CITOYENNETÉ ET DE L'IMMIGRATION, |
intimé. |
MOTIFS DU JUGEMENT |
1 Dossier de la requérante, page 11.
2 Comparer Brar c. M.E.I., A-987-84, 29 mai 1986, C.A.F., le juge en chef Thurlow.