Date : 20060220
Toronto (Ontario), le 20 février 2006
EN PRÉSENCE DE MONSIEUR LE JUGE BARNES
ENTRE :
SONALI AFROZ
et MAHIYA NASRIN
demandeurs
et
LE MINISTRE DE LA CITOYENNETÉ ET DE L'IMMIGRATION
défendeur
MOTIFS DE L'ORDONNANCE ET ORDONNANCE
LE JUGE BARNES
[1] Les demandeurs font face à l'expulsion du Canada vers les Etats-Unis prévue pour le 21 février 2006. La demande de contrôle judiciaire sous-jacente vise l'annulation de la décision d'un agent de renvoi qui a refusé de différer le renvoi jusqu'à ce qu'une décision soit rendue sur la demande des demandeurs fondée sur des circonstances d'ordre humanitaire (CH). Cette demande est pendante depuis octobre 2004 et le défendeur a récemment demandé des renseignements additionnels à l'appui de cette demande d'établissement. Parallèlement, le défendeur cherche à expulser les demandeurs. Un enfant de deux ans, né au Canada, et sa soeur de sept ans, née au Bangladesh, sont pris dans le processus.
[2] Je suis tenu, bien entendu, d'appliquer le critère à trois volets énoncé dans l'arrêt Toth c. Canada (1988), 86 N.R. 302 (CAF).
[3] Je conclus que les documents dont je dispose soulèvent une question sérieuse. Le pouvoir discrétionnaire de l'agent de renvoi est assez limité, mais on exige que les intérêts immédiats des enfants touchés soient traités équitablement et avec sensibilité à cette étape du processus d'immigration. Je ne suis pas convaincu que les intérêts de ces deux jeunes enfants ont été pris en considération de façon appropriée. L'agent a fait référence à l'absence de toute préoccupation au sujet de l'éducation du plus jeune des enfants, mais il n'a absolument rien dit concernant le fait que l'aînée serait retirée de l'école à la suite de cette expulsion. En outre, les notes à l'appui de la décision énoncent que l'enfant de deux ans [traduction] « est un citoyen canadien et qu'il ne sera donc pas renvoyé du Canada » .
[4] Bien qu'en simplifiant sur le plan juridique, cela puisse être correct, dans les faits, la conséquence de cette décision est le renvoi d'un citoyen canadien du pays. On peut prétendre que cela ne représente pas le degré de sensibilité dont on doit faire montre à l'égard des intérêts de l'enfant.
[5] Quant à la question du préjudice irréparable, je pense qu'il convient de noter que cette expulsion déstabilisera l'unité familiale ainsi que son intégration profonde dans la collectivité (y compris l'emploi, le bénévolat et l'éducation). Cette famille s'est intégrée très efficacement et, encore une fois, les intérêts de deux jeunes enfants sont, à mon avis, suffisants pour prendre cela en considération, abstraction faite des catégories de difficultés plus générales qui, le plus souvent, n'étayent pas un sursis.
[6] Il est vrai que l'existence d'une demande CH pendante ne peut pas, en soi, être invoquée pour différer un renvoi, mais le fait que celle-ci est pendante depuis seize mois et qu'elle est examinée sérieusement vient étayer la demande de mesures provisoires des demandeurs, au moins en ce qui a trait à la prépondérance des inconvénients.
ORDONNANCE
LA COUR ORDONNE qu'il soit par les présentes sursis à l'exécution desmesures d'expulsion des demandeurs du Canada qui sont pendantes jusqu'à ce qu'une décision soit rendue sur leur demande d'autorisation de contrôle judiciaire sous-jacente et, si l'autorisation est accordée, jusqu'à ce que la demande soit définitivement tranchée au fond.
Traduction certifiée conforme
Christian Laroche, LL.B.
COUR FÉDÉRALE
AVOCATS INSCRITS AU DOSSIER
DOSSIER : IMM-935-06
INTITULÉ : MAMUN HOSSAIN JOARDER ET AL
c.
LE MINISTRE DE LA CITOYENNETÉ ET DE L'IMMIGRATION
LIEU DE L'AUDIENCE : TORONTO (ONTARIO)
LIEU DE L'AUDIENCE : LE 20 FÉVRIER 2006
MOTIFS DE L'ORDONNANCE
ET ORDONNANCE : LE JUGE BARNES
DATE DES MOTIFS : LE 20 FÉVRIER 2006
COMPARUTIONS :
John Guoba POUR LES DEMANDEURS
Tamrat Gebeyehu POUR LE DÉFENDEUR
AVOCATS INSCRITS AU DOSSIER :
John Guoba POUR LES DEMANDEURS
Avocat
Toronto (Ontario)
John H. Sims, c.r. POUR LE DÉFENDEUR
Sous-procureur général du Canada
Toronto (Ontario)