Date : 20000609
Dossier : IMM-3811-99
ENTRE :
PAUL SINGH CHAHAL
demandeur
et
LE MINISTRE DE LA CITOYENNETÉ
ET DE L'IMMIGRATION
défendeur
MOTIFS DE L'ORDONNANCE
LE JUGE MCKEOWN
[1] Le demandeur (aussi identifié comme « l'appelant » ou « le mari » ) sollicite le contrôle judiciaire d'une décision d'un membre de la Section d'appel de l'immigration (SAI) de la Commission de l'immigration et du statut de réfugié rendue le 13 juillet 1999. Dans cette décision, ce dernier rejetait l'appel du demandeur d'un refus de l'agent des visas d'accepter sa demande de parrainer la demande de droit d'établissement présentée au nom d'Amandeep Kaur Chahal (l'enfant).
[2] Les questions à trancher sont les suivantes : la SAI a-t-elle commis une erreur 1) en appliquant l'article 8 de la Hindu Adoptions and Maintenance Act, 1956 (HAMA), 2) en concluant que les gestes de donner et de prendre lors de la deuxième cérémonie d'adoption étaient un simulacre, contrairement au témoignage sous serment du mari et de la femme, 3) en ne faisant aucune référence dans ses motifs aux diverses lettres, photographies et factures liées à l'adoption de la jeune fille, aux appels téléphoniques et à la preuve similaire, et 4) en ne faisant aucun cas des explications de l'appelant au sujet du retard à présenter la demande de parrainage et à faire la demande d'adoption de la jeune fille plus tôt, questions qui sont clairement liées à l'existence d'un lien de filiation authentique.
[3] Selon moi, la SAI n'a commis aucune erreur susceptible de contrôle en décidant que l'enfant n'avait pas été adopté au sens donné à ce mot à l'époque en cause et qu'en conséquence, il n'était pas possible de parrainer sa demande d'établissement au Canada à titre de membre de la catégorie de la famille. Dans Le ministre de la Citoyenneté et de l'Immigration c. Sohal (IMM-1943-96), le 6 janvier 1997, le juge Pinard déclare à la page 1 que :
« La jurisprudence révèle que la CISR doit examiner non seulement si le requérant parrainé en vue de la résidence permanente au Canada a été adopté en conformité avec les exigences juridiques du pays dans lequel l'adoption a eu lieu, mais aussi si, conformément aux exigences du paragraphe 2(1) du Règlement sur l'immigration de 1978, les circonstances de fait indiquent que l'adoption a créé un véritable lien de filiation. »
[4] En l'instance, c'est à bon droit que la SAI a conclu qu'en plus d'examiner la question de savoir si l'enfant avait été adopté au sens de la HAMA, elle devait décider si un lien de filiation véritable avait été créé entre le demandeur et sa femme, d'une part, et l'enfant, d'autre part. La SAI a examiné les dispositions de l'article 8 et du paragraphe 11(6) de la HAMA et conclu qu'il n'y avait pas eu d'adoption. Selon moi, l'article 8 n'est pas restreint à la seule adoption par une femme pour elle-même. Le paragraphe 11(6) exige le consentement du mari et de l'épouse pour qu'un tiers puisse prendre l'enfant. Le juge Wetston a correctement énoncé le droit dans Canada (M.C.I.) c. Sharma (1995), 101 F.T.R. 54, à la page 56 :
« Le contenu du droit étranger est une question de fait et son application, une question de droit. »
Je suis d'avis que l'application du droit étranger aux conclusions de fait de la SAI ne justifie pas l'intervention de notre Cour.
[5] La SAI pouvait tout à fait conclure au vu de la preuve que la « deuxième adoption » était un simulacre. De toute façon, rien dans la preuve ne démontre que la mère naturelle avait l'intention de donner son enfant lors de la deuxième adoption, puisqu'elle croyait l'avoir déjà donné lors de la première adoption. En vertu de la HAMA, une des exigences pour qu'il y ait une adoption valable est que la mère naturelle ait l'intention de donner l'enfant à la cérémonie d'adoption.
[6] Quant à la troisième question soulevée par le demandeur, point n'était besoin que la SAI reprenne toute la preuve dans ses motifs. La SAI n'a pas contesté que l'appelant et son épouse avaient un lien émotif fort avec l'enfant.
[7] Nonobstant ce lien, la SAI a conclu que [traduction] « l'explication de l'appelant au sujet de quand et pourquoi ils ont adopté l'enfant est difficile à accepter » . La SAI pouvait raisonnablement arriver à cette conclusion.
[8] La SAI n'a pas accepté l'explication du demandeur quant au retard dans l'adoption et la demande de parrainage. Encore une fois, les conclusions de la SAI quant à savoir si l'adoption avait donné lieu à un lien de filiation véritable sont raisonnables. Au vu de la preuve, il y avait des motifs valables permettant à la SAI de conclure qu'on ne lui avait pas présenté une explication raisonnable des événements entourant l'adoption.
[9] Les conclusions de la SAI n'étaient pas fondées sur une conclusion tirée de façon abusive ou arbitraire, ou sans tenir compte des éléments dont elle disposait.
[10] Aucune des questions présentées par les parties répond aux critères d'une question grave de portée générale; il n'y aura donc pas de question certifiée. La demande de contrôle judiciaire est rejetée.
William P. McKeown
Juge
Le 9 juin 2000
Vancouver (Colombie-Britannique)
Traduction certifiée conforme
Martine Brunet, LL.B.
COUR FÉDÉRALE DU CANADA
SECTION DE PREMIÈRE INSTANCE
AVOCATS INSCRITS AU DOSSIER
No DU GREFFE : IMM-3811-99
INTITULÉ DE LA CAUSE : PAUL SINGH CHAHAL
c.
MINISTRE DE LA CITOYENNETÉ
ET DE L'IMMIGRATION
LIEU DE L'AUDITION : VANCOUVER (C.-B.)
DATE DE L'AUDITION : le 8 juin 2000
MOTIFS DE L'ORDONNANCE DU JUGE MCKEOWN
EN DATE DU : 8 juin 2000
ONT COMPARU
M. Ramzan Jussa POUR LE DEMANDEUR
Mme Rama Sood POUR LE DÉFENDEUR
AVOCATS INSCRITS AU DOSSIER
Ramzan Jussa
Avocat et procureur
Vancouver (C.-B.) POUR LE DEMANDEUR
Morris Rosenberg
Sous-procureur général
du Canada POUR LE DÉFENDEUR