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Date : 20050502

Dossier : IMM-4269-04

Référence : 2005 CF 597

OTTAWA (ONTARIO), LE 2 MAI 2005

EN PRÉSENCE DE MONSIEUR LE JUGE MARTINEAU

ENTRE :

                                                LIOUDMILA RADOSTEVA

                                                                                                                    demanderesse

                                                                      et

                                      LE MINISTRE DE LA CITOYENNETÉ

                                                  ET DE L'IMMIGRATION

                                                                                                                             défendeur

                          MOTIFS DE L'ORDONNANCE ET ORDONNANCE


[1]                Il s'agit d'une demande de contrôle judiciaire de la décision datée du 14 avril 2004 par laquelle la Section de la protection des réfugiés de la Commission de l'immigration et du statut de réfugié (la Commission) a conclu que la demanderesse n'est pas un « réfugié au sens de la Convention » ni une « personne à protéger » au sens des articles 96 et 97 de la Loi sur l'immigration et la protection des réfugiés, L.C. 2001, ch. 27 (la LIPR), et a donc rejeté sa demande de protection.

[2]                La Commission n'a tout simplement pas cru le récit de la demanderesse. La décision toute entière repose sur la conclusion que la demanderesse n'était pas digne de foi et que son récit est une pure invention. En fait, la Commission n'a pas cru que la demanderesse a été persécutée parce qu'elle est juive, pas plus qu'elle n'a été convaincue que la demanderesse est vraiment d'origine juive. Par ailleurs, rien n'indiquait que la demanderesse, qui pratique la religion orthodoxe russe, serait perçue comme une juive en Russie. En outre, la Commission a conclu que la demanderesse n'avait pas établi comme il lui incombait qu'elle craint avec raison d'être persécutée.


[3]                Dans ses motifs écrits, la Commission a indiqué en termes clairs et non équivoques pourquoi elle ne croyait pas la demanderesse. Les conclusions défavorables que la Commission a tirées reposent sur un certain nombre d'incohérences entre le formulaire de renseignements personnels (FRP) de la demanderesse et son témoignage, qui se rapporte à des éléments essentiels de sa demande. Par ailleurs, les conclusions tirées par la Commission à propos des nombreuses omissions relevées dans le FRP de la demanderesse de même que le manque d'explications satisfaisantes ne sont pas manifestement déraisonnables.

[4]                Plus précisément, la Commission était en droit de tirer des conclusions défavorables du fait que la demanderesse n'a pas indiqué dans son FRP que son père était juif ou qu'elle n'a pas mentionné qu'elle avait eu des problèmes en Russie à cause de ses présumées origines juives. De plus, la demanderesse n'a nullement fait mention dans son FRP de la deuxième agression dont elle aurait été victime en Ukraine. La Commission était en droit de ne pas tenir compte de l'explication de la demanderesse au sujet de cette dernière omission.

[5]                En ce qui concerne les documents médicaux, je crois qu'il n'était pas déraisonnable pour la Commission de conclure qu'ils ont été obtenus frauduleusement. Par exemple, les prétendues blessures de la demanderesse ne coïncidaient pas avec les rapports médicaux produits. Qui plus est, ces derniers ne revêtaient pas la même forme et portaient des timbres officiels différents, même s'ils étaient censés avoir été produits à trois jours d'intervalle par la même clinique médicale.


[6]                À mon avis, la conclusion de la Commission selon laquelle le témoignage de la demanderesse n'était qu'une pure invention n'est pas manifestement déraisonnable. Ce manque général de crédibilité se répercute sur l'ensemble de sa demande. Il est bien établi en droit qu'une conclusion de manque général de crédibilité peut avoir une incidence sur la valeur probante de la preuve documentaire de la partie demanderesse. La Commission pouvait donc préférer certaines preuves documentaires objectives à celles que la demanderesse a fournies.

[7]                Quant à la conclusion de la Commission au sujet de l'allégation de la demanderesse qu'elle serait persécutée à cause de ses liens avec son ex-mari, qui se serait soustrait au service militaire en Tchétchénie en juillet 1999, je suis également d'avis que cette conclusion n'est pas manifestement déraisonnable. La demanderesse a omis de mentionner dans son FRP que son mari et elle ont divorcé en octobre 2001. La Commission était autorisée à tirer une conclusion défavorable de cette omission. De plus, elle a eu raison d'appuyer sa conclusion sur le fait que, à l'époque où l'ex-mari de la demanderesse a quitté la Russie, il n'aurait pu être persécuté pour insoumission puisque, d'après la preuve documentaire, on n'envoyait pas de réservistes en Tchétchénie.


[8]                En fait, selon la preuve documentaire objective, ce n'est qu'à partir de janvier 2000 que des réservistes ont été envoyés dans des zones de conflit armé. À cet égard, la Commission ne s'est pas fondée uniquement sur la décision d'un autre tribunal. Elle n'a pris en considération cette décision que pour situer dans un contexte plus détaillé les mêmes faits et les mêmes circonstances alléguées. De toute façon, la demanderesse n'a cité aucune preuve documentaire montrant que l'on cible les ex-conjoints d'insoumis. Par conséquent, la crainte alléguée de la demanderesse n'est pas fondée. Selon moi, il était loisible à la Commission de conclure qu'il serait hautement conjectural et invraisemblable que les autorités russes s'intéressent à la demanderesse, plusieurs années après son divorce et plusieurs années après que son ex-mari a quitté la Russie. De toute manière, il n'y avait aucune preuve crédible que la demanderesse avait réellement aidé son mari de quelque façon ou qu'elle avait été ou serait persécutée pour cette raison.

[9]                En outre, la conclusion de la Commission au sujet du fils de la demanderesse n'est pas manifestement déraisonnable, vu l'absence de crédibilité de cette dernière et la preuve documentaire objective. En fait, la demanderesse n'a pas pu prouver que son fils avait bel et bien été « appelé » ou conscrit. Par ailleurs, compte tenu du fait que 20 p. 100 seulement des conscrits admissibles sont effectivement enrôlés, la demanderesse n'a pas établi que sa crainte est crédible et, de ce fait, la conclusion de la Commission à cet égard n'est pas manifestement déraisonnable.


[10]            Il était également loisible à la Commission de conclure qu'il ressort bel et bien de la preuve documentaire que les mères qui s'organisent pour éviter que l'on enrôle de force leurs fils n'en subissent aucune répercussion. Je répète qu'en raison du manque général de crédibilité de la demanderesse, la Commission était en droit de n'accorder aucune valeur probante à sa preuve documentaire. À mon avis, l'allégation de la demanderesse selon laquelle elle serait torturée à son retour en Russie n'est tout simplement pas fondée.

[11]            La présente affaire ne soulève aucune question de portée générale, les avocats n'en ayant soumise aucune.

ORDONNANCE

LA COUR ORDONNE que la demande de contrôle judiciaire de la décision de la Commission en date du 14 avril 2004 soit rejetée.



                              Juge


Traduction certifiée conforme

Suzanne Bolduc, LL.B.


COUR FÉDÉRALE

AVOCATS INSCRITS AU DOSSIER

DOSSIER :                                               IMM-4269-04

INTITULÉ :                                              LIOUDMILA RADOSTEVA c. M.C.I.

LIEU DE L'AUDIENCE :                        TORONTO (ONTARIO)

DATE DE L'AUDIENCE :                      LE 28 AVRIL 2005

MOTIFS DE L'ORDONNANCE

ET ORDONNANCE :                              LE JUGE MARTINEAU

DATE DES MOTIFS :                             LE 2 MAI 2005

COMPARUTIONS :

Jeffrey L. Goldman                                      POUR LA DEMANDERESSE

Alison Engel                                               POUR LE DÉFENDEUR

AVOCATS INSCRITS AU DOSSIER :

Jeffrey L. Goldman                                      POUR LA DEMANDERESSE

Avocat

Toronto (Ontario)

John H. Sims, c.r.                                        POUR LE DÉFENDEUR

Sous-procureur général du Canada


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