Date : 19980514
Dossier : IMM-2892-97
Entre :
MING DONG JIANG,
requérant,
- et -
LE MINISTRE DE LA CITOYENNETÉ ET DE L'IMMIGRATION,
intimé.
MOTIFS DE L'ORDONNANCE
(Texte révisé des motifs prononcés à l'audience
le 21 avril 1998)
Le juge MCKEOWN
[1] Le requérant, qui est citoyen de Chine, agit en contrôle judiciaire contre la décision en date du 30 octobre 1996 par laquelle le ministre de la Citoyenneté et de l'Immigration (le ministre) a conclu qu'il ne pouvait prétendre à la qualité d'immigrant visé par une mesure de renvoi à exécution différée (IVMRED).
[2] Il échet d'examiner s'il ressort des faits de la cause que le requérant a entravé ou retardé l'exécution d'une ordonnance de renvoi en date du 24 juillet 1992. Il est clair que s'il ne l'a pas fait, la décision du ministre lui déniant la qualité d'IVMRED aura été fondée sur une conclusion de fait erronée, tirée de façon abusive ou capricieuse.
[3] Le 6 décembre 1995, l'agent chargé des renvois, M. Jordan, écrit au requérant pour lui demander de confirmer qu'il avait pris les dispositions nécessaires pour quitter le Canada au 8 janvier 1996 au plus tard. Le requérant lui a fait cette réponse par lettre en date du 2 janvier 1996 :
[TRADUCTION]
Je regrette mais je n'ai rien pu faire encore au sujet de l'ordonnance de renvoi qui m'a été notifiée le 24 juillet 1992. |
Par la suite, aucune autre demande d'information n'a été faite par le ministre, et aucune autre information n'a été donnée par le requérant.
[4] Subséquemment, une décision datée du 30 octobre 1996 et communiquée au requérant et à son avocat en juin et juillet 1997 respectivement a fait savoir ce qui suit :
[TRADUCTION]
Ce manque de coopération a retardé votre renvoi, ce qui fait courir votre période d'admissibilité au statut d'IVMRED du 8 juillet 1996. |
[5] Cependant, cette lettre portant décision du 30 octobre 1996 fait également état d'une lettre que l'avocat du requérant avait envoyée au ministre le 25 octobre 1996 pour l'informer des raisons pour lesquelles son client n'avait pu prendre les dispositions nécessaires pour quitter le pays. Essentiellement, l'ambassade de Chine l'avait informé que l'instruction de sa demande prendrait trois mois et qu'il devait avoir en sa possession un livret de marin, lequel était entre les mains d'Immigration Canada. Dans la lettre de décision cependant, le délégué du ministre a décidé de minimiser cette information, disant qu'elle aurait dû être communiquée en janvier 1996 et non après juillet de la même année.
[6] Il est important de considérer les termes du Règlement sur l'immigration. L'alinéa 2(1)f) de ce texte (DORS/94-681) porte ce qui suit :
" immigrant visé par une mesure de renvoi à exécution différée " Immigrant qui, à la fois : |
"
f) n'a pas entravé ni retardé l'exécution d'une mesure d'exclusion ou d'une mesure d'expulsion dont il fait l'objet, notamment en omettant de se présenter à l'entrevue préalable au renvoi ou de se présenter pour être renvoyé selon les dispositions prises par l'agent d'immigration; |
[7] La volonté du législateur transparaît au travers de l'étude d'impact de la réglementation, qui figure dans le texte de modification du règlement sur les IVMRED comme suit :
Les personnes qui se sont dérobées au renvoi en omettant de se présenter devant les autorités de l'Immigration lorsque celles-ci leur en donnaient l'ordre ou celles qui sont entrées dans la clandestinité, ont changé d'identité, évité tout contact avec l'Immigration, déménagé fréquemment sans en avertir les autorités, ou se sont engagées dans d'autres formes de subterfuge, ces personnes ne répondent pas aux critères et ne rentrent pas dans la catégorie. |
[8] Ainsi que l'a fait observer le juge Cullen dans Mitov c. Canada (Ministre de la Citoyenneté et de l'Immigration) (1996), 107 F.T.R. 228, en page 230 : " Indubitablement, cette disposition est judicieuse. "
[9] Bien que l'étude d'impact de la réglementation n'ait pas force obligatoire, j'en adopte le raisonnement sous-jacent qui pose que le facteur déterminant est la participation active au fait d'entraver ou de retarder le renvoi. En l'espèce, le requérant est resté en contact avec les autorités de l'immigration, il les a informées de tout changement d'adresse, et il ne s'est livré à aucun subterfuge. En conséquence, il m'est impossible de conclure des faits de la cause, somme toute inhabituels, qu'il a entravé ou retardé l'exécution de la mesure de renvoi.
[10] La Cour fait droit au recours en contrôle judiciaire, annule la décision en date du 30 octobre 1996, et renvoie l'affaire au ministre pour nouvelle instruction dans le sens des présents motifs.
Signé : William P. McKeown
________________________________
Juge
Ottawa (Ontario),
le 14 mai 1998
Traduction certifiée conforme,
Laurier Parenteau, LL.L.
COUR FÉDÉRALE DU CANADA
SECTION DE PREMIÈRE INSTANCE
AVOCATS ET PROCUREURS INSCRITS AU DOSSIER
NUMÉRO DU GREFFE : IMM-2892-97 |
INTITULÉ DE LA CAUSE : Ming Dong Jiang c. M.C.I.
LIEU DE L'AUDIENCE : Vancouver (Colombie-Britannique)
DATE DE L'AUDIENCE : 21 avril 1998
MOTIFS DE L'ORDONNANCE PRONONCÉS PAR LE JUGE MCKEOWN
LE : 14 mai 1998
TEXTE RÉVISÉ DES MOTIFS PRONONCÉS À L'AUDIENCE LE 21 AVRIL 1998
ONT COMPARU :
M. Timothy James Healy pour le requérant
Mme Wendy Petersmeyer pour l'intimé
PROCUREURS INSCRITS AU DOSSIER :
M. Timothy James Healy pour le requérant
Vancouver (Colombie-Britannique)
M. George Thomson pour l'intimé
Sous-procureur général du Canada