Date: 19990503
Dossier : IMM-199-99
ENTRE
AUGUSTO PALOMINO ESPIRITU,
demandeur,
et
LE MINISTRE DE LA CITOYENNETÉ
ET DE L"IMMIGRATION,
défendeur.
MOTIFS DE L"ORDONNANCE ET ORDONNANCE
LE PROTONOTAIRE JOHN A. HARGRAVE
[1] Le 13 janvier 1999, le demandeur a présenté une demande de contrôle judiciaire d"une décision rendue au mois de mai 1998, selon laquelle il constituait un danger pour le public au Canada. Le demandeur a tardé à agir, mais il existe peut-être un motif justifiant ce retard. Toutefois, telle n"est pas la question. Le demandeur sollicite maintenant une prorogation du délai dans lequel il peut déposer son dossier.
[2] Le défendeur, à juste titre dans ce cas-ci, ne s"oppose pas à la demande, mais il soulève avec raison la question de savoir si le retard est justifié et s"il existe une cause défendable. Le défendeur se demande en outre si le demandeur a démontré qu"il subira un préjudice si la prorogation est refusée. Le défendeur souligne qu"aucun affidavit en tant que tel n"a été déposé à l"appui de la demande.
[3] Une requête n"a pas à être toujours étayée par un affidavit; les Règles exigent simplement que les faits soient exposés au moyen d"un affidavit lorsqu"ils ne figurent pas dans le dossier du greffe. Dans ce cas-ci, le demandeur a fourni un bref exposé dans lequel il attestait que les motifs invoqués dans l"avis de requête étaient exacts. Je suis prêt à accepter ce document à l"appui de la requête, car le demandeur se cache au Pérou et de toute évidence il ne peut pas facilement obtenir de l"aide. Le dossier du greffe renferme également des lettres utiles, sans être intéressées.
[4] Je résumerai les faits en disant que le demandeur, un marin péruvien qui a été incarcéré à Vancouver, a fait à la police, après que le consul du Pérou lui eut rendu visite et l"eut conseillé en juillet 1996, une déclaration par suite de laquelle une grosse quantité de cocaïne a été trouvée à bord du navire sur lequel il servait. Par suite de ces événements, un certain nombre de ressortissants péruviens ont été impliqués dans l"affaire; ils ont été accusés et incarcérés et l"affaire est actuellement en instance devant les tribunaux. Malheureusement, malgré les garanties d"anonymité qui lui ont été fournies à Vancouver, le demandeur a été désigné comme étant à l"origine de toute l"affaire. Ces mêmes ressortissants péruviens en veulent d"une façon toute particulière au demandeur. Le demandeur affirme que, par conséquent, depuis qu"il a été expulsé au Pérou, il se cache et il craint pour sa vie.
[5] Premièrement, en ce qui concerne le retard, il ressort des documents qui ont été versés au dossier du greffe que le demandeur a été expulsé au Pérou le lendemain du jour où il a présenté la demande de contrôle judiciaire ici en cause. Les juges de la Cour fédérale ont, de temps en temps, souligné que le fait qu"une demande de contrôle judiciaire est en instance ne justifie pas en soi le sursis de la mesure d"expulsion, car le demandeur peut poursuivre une demande de contrôle judiciaire même s"il est en dehors du pays. À coup sûr, les délais posent un problème, lorsque le demandeur agit pour son propre compte et qu"il n"est pas au Canada. De plus, le demandeur a fait en sorte qu"un membre de sa famille se présente à l"ambassade du Canada au Pérou pour demander de l"aide au sujet de la procédure de la Cour fédérale. L"ambassade a fait savoir que le demandeur devrait retenir les services d"un avocat à Vancouver. Le demandeur a échangé un certain nombre de lettres avec la Cour afin d"obtenir des renseignements et des documents. Le fait que le demandeur avait l"intention de poursuivre l"affaire a été établi. Les motifs du retard sont valables dans ce cas-ci.
[6] Deuxièmement, en ce qui concerne la question de savoir s"il existe une cause défendable, il ne s"agit pas ici d"une affaire facile. Pourtant, dans la mesure où les documents que renferme le dossier sont présentés dans la forme appropriée et déposés à titre de dossier, un juge pourrait conclure que certains principes d"équité favorisent le demandeur. Eu égard aux circonstances, le demandeur satisfait au critère relatif à la cause défendable.
[7] Troisièmement, il y a la question du préjudice. Sur les conseils du consul du Pérou, le demandeur a donné des renseignements qui ont de fait amené la découverte de cocaïne cachée à bord du navire sur lequel il servait. Malheureusement, comme je l"ai dit, malgré les garanties qui avaient été données au demandeur, le nom de celui-ci a été rendu public et il a finalement été mentionné dans la presse péruvienne. Je puis prendre connaissance d"office des renseignements publiés dans la presse internationale selon lesquels les exportateurs de drogues ne voient pas d"un bon oeil ce que le demandeur a fait, même s"il l"a fait sur les conseils du consul. On peut s"attendre à ce que le demandeur ne puisse pas se cacher indéfiniment; pourtant, il subirait un préjudice fort grave s"il ne le faisait pas. Par conséquent, la requête est accueillie.
ORDONNANCE
Le demandeur pourra, dans les 60 jours qui suivent, signifier et déposer son dossier. Le demandeur doit également, dans ce délai de 60 jours, désigner à Vancouver une personne dont l"adresse sera considérée comme la sienne aux fins de la signification. |
" John A. Hargrave "
Protonotaire
Vancouver (Colombie-Britannique),
le 3 mai 1999.
Traduction certifiée conforme
L. Parenteau, LL.L.
COUR FÉDÉRALE DU CANADA
SECTION DE PREMIÈRE INSTANCE
AVOCATS INSCRITS AU DOSSIER
No DU GREFFE : IMM-199-99
INTITULÉ DE LA CAUSE : Augusto Palomino Espiritu |
c.
MCI
REQUÊTE JUGÉE SUR DOSSIER SANS COMPARUTION DES AVOCATS
MOTIFS DE L"ORDONNANCE ET ORDONNANCE DU PROTONOTAIRE JOHN A. HARGRAVE en date du 3 mai 1999
ARGUMENTATION ÉCRITE :
Augusto Palomino Espiritu pour son propre compte
Helen Park pour le compte du défendeur
AVOCATS INSCRITS AU DOSSIER :
Morris Rosenberg pour le défendeur
Sous-procureur général
du Canada