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Date : 19991116


T-2685-95

E n t r e :

     COCA-COLA LTD. et COCA-COLA BOTTLING LTD.,

     demanderesses,

     - et -


     MUSADIQ PARDHAN, faisant affaire sous la raison sociale de

     UNIVERSAL EXPORTERS, 1106972 ONTARIO LIMITED, faisant affaire

     sous la raison sociale de UNIVERSAL EXPORTERS, M. UNTEL et

     Mme UNETELLE ET D'AUTRES PERSONNES DONT LES

     DEMANDERESSES IGNORENT L'IDENTITÉ ET QUI OFFRENT

     EN VENTE, VENDENT, EXPORTENT OU FONT LE COMMERCE

     DE PRODUITS COCA-COLA TRANSBORDÉS,

     défendeurs.



     MOTIFS DE L'ORDONNANCE


LE JUGE LUTFY

INTRODUCTION

[1]          Les demanderesses demandent à la Cour de déclarer les défendeurs Musadiq Pardhan et Mustafa Pardhan coupables d'outrage au tribunal pour avoir refusé d'obéir à l'injonction prononcée par le juge MacKay le 8 janvier 1996. L'injonction en question visait à interdire aux deux défendeurs en question et à d'autres personnes d'exporter des produits Coca-Cola du Canada.

[2]          Le 19 décembre 1995, les demanderesses Coca-Cola Ltd. et Coca-Cola Bottling Ltd. ont déposé une déclaration dans laquelle elles désignaient les défendeurs Musadiq Pardhan, 1106729 Ontario Limited " et d'autres personnes dont les demanderesses ignorent l'identité et qui offrent en vente, vendent, exportent ou font le commerce de produits Coca-Cola transbordés ". Les demanderesses affirmaient que les défendeurs avaient usurpé leur marques de commerce déposées Coca-Cola, en violation de l'article 19 de la Loi sur les marques de commerce1, et qu'ils avaient considérablement diminué la valeur de l'achalandage afférent aux marques de commerce en question en vendant à l'étranger des produits Coca-Cola fabriqués exclusivement en vue d'être vendus et consommés au Canada.

[3]          Le défendeur Mustafa Pardhan a été constitué partie à la présente action aux termes de l'ordonnance prononcée par le juge MacKay le 8 janvier 1996. Mustafa Pardhan est le père de Musadiq Pardhan2.

[4]          En octobre 1997, les défendeurs ont tenté de faire radier certains paragraphes de la déclaration en vertu de l'article 419 des anciennes Règles de la Cour fédérale3. Le juge Wetston, tel était alors son titre, a conclu que l'exportation par un acheteur secondaire de produits sur lesquels étaient apposées les marques de commerce en question ne constituait pas un " emploi " au sens du paragraphe 4(3) de la Loi sur les marques de commerce4. Il a également statué que l'éventuelle diminution de la valeur de l'achalandage afférent aux marques de commerce des demanderesses avait eu lieu à l'extérieur du Canada et qu'elle ne donnait pas ouverture à une action devant la Cour fédérale. Le juge Wetston a accueilli la requête et a radié la déclaration en son entier. Il n'a toutefois pas rejeté l'action ou annulé l'injonction interlocutoire qui avait été prononcée le 8 janvier 1996. Le juge MacKay a rejeté l'action et levé l'injonction aux termes de l'ordonnance qu'il a rendue le 22 mai 19985.

[5]          Les demanderesses ont interjeté appel de la décision par laquelle le juge Wetston avait radié la déclaration. Leur appel a été rejeté6. Le même jour, la Cour d'appel a également confirmé la décision par laquelle le juge MacKay avait rejeté l'action des demanderesses et levé l'injonction interlocutoire7.

[6]          Les deux parties reconnaissent que le rejet de l'action et la levée de l'injonction n'ont aucune incidence sur la présente instance. Elles reconnaissent toutes les deux que l'annulation ultérieure d'une ordonnance ne peut être invoquée comme moyen de défense par celui qui est cité à comparaître pour répondre à une accusation d'outrage au tribunal8.

[7]          Le 27 juillet 1997, le juge en chef adjoint Jerome a rendu une ordonnance de justification dans le cadre de la présente instance pour outrage au tribunal. Voici un extrait de cette ordonnance :

     [TRADUCTION]
     LA COUR [...]
     2.      ORDONNE aux défendeurs MUSADIQ PARDHAN et MUSTAFA PARDHAN de comparaître devant la Cour [...] pour expliquer les raisons pour lesquelles ils ne devraient pas être reconnus coupables d'outrage au tribunal pour :
          a)      avoir désobéi à l'injonction interlocutoire rendue le 8 janvier 1996 par le juge MacKay (l'injonction), étant donné qu'ils ont contrevenu directement et de façon flagrante aux modalités de l'injonction par l'intermédiaire de la 1184268 Ontario Limited :
         i.      en ordonnant et en effectuant des exportations et des transbordements non autorisés de produits portant la marque COCA-COLA Canada ou en participant à de telles activités ;
         ii.      en distribuant, exportant, vendant ou offrant en vente à des tiers situés à l'extérieur du Canada des produits des demanderesses portant la marque COCA-COLA en les exportant du Canada ou en les vendant à des tiers situés au Canada pour qu'ils les exportent à des personnes situées à l'extérieur du Canada ;
         iii.      en transportant, expédiant, distribuant, commercialisant, promouvant ou vendant des produits des demanderesses portant la marque de commerce COCA-COLA dans des territoires pour lesquels les défendeurs ne sont titulaires d'aucune licence leur permettant d'y distribuer, commercialiser, promouvoir ou vendre ces produits ;
         iv.      en aidant d'autres personnes à se livrer à des activités de transbordement qui contreviennent aux modalités de l'injonction ;
         [...]
     4.      ENJOINT aux défendeurs Musadiq Pardhan, Mustafa Pardhan et 1184268 Ontario Limited, faisant affaire sous la raison sociale de 3-M International Freight Forwarders et Sid Enterprise, de comparaître devant la Cour fédérale du Canada [...] pour expliquer les raisons pour lesquelles ils ne devraient pas être reconnus coupables d'outrage au tribunal pour avoir agi de façon à entraver la bonne administration de la justice ou à porter atteinte à l'autorité ou à la dignité de la Cour en se livrant aux actes énoncés aux paragraphes 2 et 3, le tout subrepticement et clandestinement.

[8]          Les demanderesses demandent à la Cour de déclarer coupables d'outrage du tribunal les deux personnes physiques défenderesses nommément désignées, en l'occurrence, Musadiq Pardhan et Mustafa Pardhan. Les parties conviennent que la norme de preuve exigée pour établir l'existence d'un outrage au tribunal est celle de la preuve au-delà de tout doute raisonnable, c'est-à-dire la norme de preuve applicable en matière criminelle.

[9]          L'audience relative à l'outrage au tribunal a duré huit jours. Elle s'est déroulée au cours de la dernière semaine du mois d'avril 1998, de la première semaine du mois de juin et en août 1998, dans le cadre de la commission rogatoire tenue à Newark, au New Jersey. Les plaidoiries orales, qui devaient être entendues en décembre 1998, ont été reportées à la fin d'avril 1999.

LIBELLÉ DE L'INJONCTION INTERLOCUTOIRE

[10]          Le 8 janvier 1996, les demanderesses ont présenté leur requête en injonction interlocutoire. Dans les propos qu'il a tenus en audience publique immédiatement après que les avocats eurent présenté leurs observations, le juge MacKay a conclu que les agissements des défendeurs causaient un préjudice irréparable aux demanderesses. Voici ce qu'il a conclu :

     [TRADUCTION]
     Finalement, je crois que la preuve démontre que les défendeurs étaient au courant des actions intentées contre eux, non seulement aux États-Unis, mais aussi au Canada et qu'il n'ont pas entrepris les démarches nécessaires pour se faire représenter. Je ne remets pas en question la compétence de l'avocat des défendeurs ou quoi que ce soit d'autre en disant cela, mais attire simplement l'attention sur le fait que les défendeurs ne lui ont donné aucune indication sur la meilleure façon de les représenter ce matin.
     Ceci étant dit, il sera certes toujours loisible aux défendeurs, une fois qu'ils seront revenus et qu'ils auront examiné les documents et le dossier, de demander à la Cour de lever l'injonction que je m'apprête à prononcer ce matin.
     J'accorde donc l'injonction [...]9

[11]          Un bref échange a ensuite eu lieu au sujet de la rédaction d'un projet d'ordonnance. Le juge MacKay a par la suite signé l'ordonnance préparée par les avocats. Il convient de reproduire les extraits pertinents des attendus et du dispositif de l'ordonnance du 8 janvier 1996 :

     [TRADUCTION]
         LA COUR, STATUANT SUR LA REQUÊTE présentée ce jour par l'avocat de la demanderesse en vue d'obtenir une injonction provisoire et interlocutoire interdisant aux défendeurs, Mustafa Pardhan, à leurs actionnaires, administrateurs, dirigeants, mandataires, préposés, employés et toute personne agissant conformément à leurs instructions, ainsi qu'à toute personne avisée de l'ordonnance qui pourra être prononcée, de directement ou indirectement :
     (i)      usurper les marques de commerce de Coca-Cola Ltée qui sont énumérées dans la déclaration ;
     (ii)      diminuer la valeur de l'achalandage afférent aux marques de commerce de la demanderesse Coca-Cola Ltée ;
     (iii)      distribuer, exporter, promouvoir, vendre et offrir en vente les produits à boire des demanderesses à des tiers situés à l'extérieur du Canada en les exportant du Canada ou en les vendant à des tiers situés au Canada pour qu'ils les exportent à des personnes situées à l'extérieur du Canada ;
     (iv)      transporter, expédier, distribuer, commercialiser, promouvoir ou vendre les produits à boire des demanderesses à quelque fin que ce soit dans des territoires pour lesquels les défendeurs ne sont titulaires d'aucune licence leur permettant d'y distribuer, commercialiser, promouvoir ou vendre ces produits ;
     [...]
     1.      aux défendeurs, Mustafa Pardhan, à leurs actionnaires, administrateurs, dirigeants, mandataires, préposés, employés et toute personne agissant conformément à leurs instructions, ainsi qu'à toute personne avisée de l'ordonnance qui pourra être prononcée, de directement ou indirectement :
         (i)      usurper les marques de commerce de Coca-Cola Ltée qui sont énumérées dans la déclaration au moyen de l'exportation et du transbordement non autorisés de produits canadiens portant la marque COCA-COLA ;
         (ii)      distribuer, exporter, promouvoir, vendre et offrir en vente les produits à boire des demanderesses à des tiers situés à l'extérieur du Canada en les exportant du Canada ou en les vendant à des tiers situés au Canada pour qu'ils les exportent à des personnes situées à l'extérieur du Canada ;
         (iii)      transporter, expédier, distribuer, commercialiser, promouvoir ou vendre les produits à boire des demanderesses à quelque fin que ce soit dans des territoires pour lesquels les défendeurs ne sont titulaires d'aucune licence leur permettant d'y distribuer, commercialiser, promouvoir ou vendre ces produits ;
     6.      ORDONNE que l'adjudication des dépens soit reportée à une date ultérieure et soit effectuée aux termes d'une autre ordonnance de la Cour.

[12]          En raison de certaines erreurs typographiques, il y a lieu de se demander si l'injonction interlocutoire prononcée le 8 janvier 1996 est valable. L'omission la plus importante concerne le mot " interdit " qui précède les mots " aux défendeurs " au paragraphe 1 du dispositif. La mention du paragraphe 6 est erronée.

[13]          La question des incidences des erreurs typographiques sur la validité d'une injonction a été abordée dans au moins deux affaires sur lesquelles il convient de s'arrêter.

[14]          Dans l'arrêt Baxter Travenol Laboratories of Canada Ltd. c. Cutter (Canada), Ltd.10, la Cour suprême du Canada a conclu qu'une erreur de copiste portant sur le nom d'une des parties n'avait aucune incidence sur la validité ou l'effet de l'injonction lorsque cette erreur ne pouvait induire en erreur la partie visée par l'interdiction.

[15]          Dans l'affaire Apple Computer, Inc. c. Minitronics of Canada Ltd.11, le texte de l'injonction, qui interdisait à la défenderesse de violer les droits d'auteur que possédait la demanderesse sur un logiciel, renvoyait à un numéro d'enregistrement de droit d'auteur qui n'avait rien à voir avec celui de la demanderesse. Pour répondre à la question de savoir si cette erreur avait pour effet d'invalider l'injonction, le juge Strayer a conclu qu'il s'agissait d'un vice de forme qui n'avait pas induit la défenderesse en erreur. La partie visée par l'interdiction était donc inexcusable de ne pas avoir obtempéré à l'ordonnance.

[16]          Dans l'arrêt Taylor12, la Cour suprême du Canada a confirmé l'arrêt de la Cour d'appel et a fait siens les propos du juge Mahoney, qui s'était exprimé au nom d'une formation collégiale unanime de la Cour d'appel fédérale :

     La personne qui est liée par une ordonnance d'un tribunal doit se soumettre à cette ordonnance pendant que celle-ci reste en vigueur, quelque imparfaite qu'elle puisse la considérer ou quelque imparfaite qu'elle puisse réellement être. L'ordre public exige que ce soit l'application régulière de la loi qui fasse échec à une ordonnance, et non pas son inobservation13.

Il est de jurisprudence constante que la partie visée par une ordonnance de ne pas faire est irrecevable à contester indirectement l'ordonnance en question, même lorsque celle-ci est entachée d'irrégularités, en invoquant ces irrégularités comme moyen de défense dans le cadre d'une procédure pour outrage.

[17]          En l'espèce, une ordonnance comportant certaines erreurs typographiques mineures a été prononcée. Les avocats des deux parties étaient au courant du prononcé et des modalités de cette ordonnance. Il était loisible en tout temps aux parties de demander des éclaircissements. Or, aucune n'en a demandés.

[18]          À mon avis, l'injonction interlocutoire du juge MacKay est cohérente et son libellé ne pose aucun problème de sens. Le mot " interdisant " se trouve dans les attendus immédiatement avant le dispositif, ce qui est conforme avec la réparation sollicitée à l'alinéa 26b) de la déclaration, qui vise à obtenir [TRADUCTION] " une injonction interlocutoire interdisant aux défendeurs, à leurs mandataires, préposés et employés [...] de vendre, entreposer, exporter, transborder ou expédier tout produit portant les marques de commerce COCA-COLA jusqu'au procès ou jusqu'au prononcé d'une décision dans la présente action ". La déclaration reprend, à ses paragraphes 17 et 18, les allégations des demanderesses concernant les produits transbordés. L'avis de requête en injonction était en grande partie identique aux attendus de l'ordonnance du juge MacKay et renfermait le mot " interdisant ". Finalement, le juge MacKay a déclaré en séance publique en présence des avocats qu'il accordait l'injonction demandée.

[19]          Le sens effectif et véritable de l'ordonnance du juge MacKay ne fait aucun doute, malgré les erreurs typographiques. Pour reprendre les mots employés par le juge Mahoney dans l'arrêt Taylor14, les défendeurs Musadiq Pardhan et Mustafa Pardhan " n'ont pas pu douter de bonne foi que ce qui leur était interdit [...] ", c'était d'exporter des produits Coca-Cola du Canada. Je vais maintenant essayer de déterminer le moment où les défendeurs ont été mis au courant de l'injonction.

CONNAISSANCE DE L'INJONCTION PAR LES DÉFENDEURS

[20]          Il est de jurisprudence constante que les personnes à qui l'on reproche d'avoir désobéi à une ordonnance doivent être au courant de l'ordonnance qu'ils sont accusés d'avoir violée. Cette connaissance peut découler de la signification de l'ordonnance à l'intéressé ou à son avocat ou elle peut être inférée des circonstances de l'espèce.

[21]          Dans l'arrêt Bhatnager c. Canada (ministre de l'Emploi et de l'Immigration)15, le juge Sopinka, qui examinait la question de savoir dans quels cas la connaissance d'une injonction peut être imputée aux ministres de la Couronne, a déclaré ce qui suit :

     À mon avis, dans certaines circonstances, le fait que le procureur en ait été informé permet d'inférer que le client en a eu connaissance. En fait, cette inférence est normale dans le cas ordinaire d'une partie engagée dans des litiges isolés [...] Dans la plupart des cas (y compris les affaires pénales), la connaissance est démontrée de façon circonstancielle et, dans les affaires d'outrage au tribunal, on peut toujours inférer la connaissance lorsque les faits permettant d'appuyer cette inférence sont prouvés [...]

[22]          Dans le jugement Apple Computer16, le juge Strayer a inféré des agissements des défendeurs et de leur avocat que les parties visées par l'interdiction étaient au courant de l'injonction, même si elles n'en avaient pas reçu personnellement signification. Pour imputer cette connaissance au procureur du client, le juge a fait remarquer :

     Bien qu'il ait été statué que le simple fait pour un avocat de savoir qu'une ordonnance a été rendue contre son client ne suffit pas nécessairement à prouver que le client était au courant de l'ordonnance aux fins de l'outrage au tribunal, il est inconcevable dans les circonstances de l'espèce que l'avocat ait interjeté appel d'une ordonnance et ait consenti par la suite à une autre sans avoir jamais reçu d'instructions de ses clients. Recevoir de telles instructions impliquerait manifestement que les clients étaient au courant des ordonnances rendues ou qui devaient être rendues contre eux. Je ne suis pas disposé à croire que [l'avocat] aurait agi sans avoir reçu d'instructions de ses clients sur ces questions-là. Il n'a été présenté aucune preuve de l'existence d'une situation extraordinaire de ce genre17.

[23]          Le 8 janvier 1996, lors de l'audition de la requête en injonction interlocutoire, les défendeurs dont le nom apparaît en premier lieu dans la déclaration étaient représentés par un avocat qui s'était occupé de certaines affaires de l'entreprise de la défenderesse qui faisait affaire sous la raison sociale d'Universal Exporters. Il avait reçu [TRADUCTION] " le 2 janvier un appel téléphonique de M. Pardhan, qui se trouvait à Bombay et qui l'informait qu'il avait reçu signification de certains documents [...] "18. J'en déduis que l'avocat faisait allusion à Musadiq Pardhan, le seul membre de la famille qui avait été constitué défendeur à ce moment-là. Le 3 janvier 1996, l'avocat a reçu par télécopieur les instructions suivantes de Bombay : [TRADUCTION] " Veuillez faire le nécessaire pour vous occuper de tout ". Le même jour, l'avocat de l'entreprise a écrit à l'avocat des demanderesses pour demander un ajournement, en envoyant une copie de cette lettre au greffe de la Cour. À défaut d'autres directives, l'avocat a, le 8 janvier 1996, obtenu l'ajournement de l'affaire au 15 janvier 1996, date à laquelle M. Pardhan serait rentré au Canada19. L'avocat de l'entreprise a été remplacé par un avocat plaidant peu de temps après.

[24]          L'injonction a été prononcée en audience publique en présence de l'avocat qui représentait Musadiq Pardhan. Ainsi qu'il a déjà été précisé, ce n'est que le jour où l'injonction a été prononcée que Mustafa Pardhan a été expressément constitué défendeur à l'action. Le 9 janvier 1996, le greffe a fait parvenir par courrier recommandé l'ordonnance signée par le juge MacKay le 8 janvier 1996 à l'avocat inscrit au dossier qui occupait pour les défendeurs. Aucun des deux Pardhan n'était présent lorsque le juge MacKay a prononcé son ordonnance en audience publique. Je ne suis pas convaincu que la présence de l'avocat ou le fait qu'il a reçu l'ordonnance par la poste constituent une connaissance de l'injonction par Musadiq Pardhan ou Mustafa Pardhan dans les jours qui ont suivi le 8 janvier 1996.

[25]          La défense, que le nouvel avocat des défendeurs a déposée le 14 mars 1996, ne mentionne pas l'injonction.

[26]          Un des avocats des demanderesses a témoigné que Musadiq Pardhan l'avait informé en mars 1996 qu'il avait reçu une copie de l'ordonnance du juge MacKay, qu'il était au courant des modalités de l'injonction et qu'il comprenait que l'ordonnance de la Cour lui interdisait d'exporter des produits Coca-Cola20.

[27]          En février 1997, les avocats des parties ont comparu devant le juge MacKay, qui statuait sur une demande présentée par les demanderesses en vue d'obtenir les dépens afférents à l'injonction interlocutoire. Dans les motifs de l'ordonnance qu'il a prononcés au sujet de la question des dépens, le juge MacKay déclare :

     La seconde ordonnance du 8 janvier 1996 consistait en une injonction interlocutoire prononcée dans l'attente de l'instruction, enjoignant aux parties défenderesses nommées de ne pas se livrer à des activités qui violent les marques de commerce des demanderesses. Elle imposait notamment aux défendeurs des interdictions relatives aux boissons des demanderesses portant des marques de commerce en ce qui concerne leur expédition et leur distribution ainsi que d'autres activités connexes touchant des territoires pour lesquels les défendeurs ne sont titulaires d'aucune licence leur permettant d'y expédier ou d'y distribuer ces produits. Cette ordonnance a été rendue sous réserve des droits des défendeurs de présenter une requête pour en faire modifier les modalités. Il a en outre été [TRADUCTION] " sursis à l'adjudication des frais jusqu'à nouvelle ordonnance de la Cour "21. [Non souligné dans l'original.]

Le juge MacKay a refusé d'adjuger les dépens aux demanderesses et de condamner les défendeurs à les payer sur-le-champ à l'étape interlocutoire et il a ordonné que les dépens suivent l'issue de la cause.

[28]          Le 27 mars 1997, l'avocat des défendeurs a écrit à la Cour pour lui demander de convoquer une séance spéciale pour entendre une requête en radiation de certains extraits de la déclaration. Dans leur projet d'avis de requête, les défendeurs sollicitaient la réparation suivante :

     [TRADUCTION]
     3.      Une ordonnance levant, suspendant ou modifiant l'injonction prononcée contre les défendeurs le 8 janvier 1997 [sic] par le juge MacKay, selon ce que la Cour jugera à propos, compte tenu de la décision qu'elle rendra au sujet de la présente requête et de la thèse défendue par l'avocat des demanderesses.

Il n'est fait aucune mention dans le projet d'avis de requête d'une erreur typographique que comporterait le texte de l'injonction interlocutoire. Le 6 octobre 1997, un avis de requête formel reprenant presqu'intégralement la version provisoire du 27 mars 1997 a été déposé. C'est la requête que le juge Wetston a entendue et dont il est question au paragraphe 4.

[29]          Je reviendrai à mes conclusions sur le moment où Musadiq Pardhan et Mustafa Pardhan ont pu avoir pris connaissance de l'injonction après avoir examiné les éléments de preuve concernant leur présumée violation de l'ordonnance.

LA PRÉSUMÉE VIOLATION DE L'INJONCTION INTERLOCUTOIRE

a)      Activités commerciales des Pardhan en 1995

[30]          Il n'est pas sérieusement contesté, sinon pas du tout, qu'avant que le juge MacKay ne prononce l'injonction interlocutoire le 8 janvier 1996, une entreprise contrôlée par les défendeurs Musadiq Pardhan et Mustafa Pardhan achetait des produits Coca-Cola en cannettes à des tiers détaillants du Canada en vue de les exporter vers les marchés asiatiques.

[31]          La question en litige dans la présente procédure pour outrage au tribunal est celle de savoir si Musadiq Pardhan et Mustafa Pardhan ont poursuivi cette activité après le prononcé de l'injonction en violation des modalités de cette injonction.

[32]          En 1995, Musadiq Pardhan et Mustafa Pardhan étaient les dirigeants d'Universal Exporters, une entreprise dont les activités consistaient notamment à transborder vers l'Asie des boissons en cannettes, dont des produits Coca-Cola22.

[33]          Universal Exporters exerçait ses activités depuis le domicile de la famille Pardhan, qui était alors situé au 64, Central Park Drive à Markham, en Ontario23.

[34]          Une lettre adressée par Mustafa Pardhan à un client d'Universal Exporters au Japon révèle comment les produits Coca-Cola étaient vendus et expédiés aux marchés asiatiques :

     [TRADUCTION]
     Un des produits que nous avons le plaisir de vous offrir est le Coca Cola Classique d'origine canadien 24/335ml au prix de base de 6,10 $ US C & F. Nous mettons également dans le conteneur de la mousse de garnissage pour protéger le produit et nous insérons du contreplaqué et des coulisseaux pour soutenir l'arrière du conteneur. Le prix précité est celui du conteneur de 20 pieds24.

[35]          Aqua/Terra Warehousing Inc., une compagnie appartenant en partie à Oscar Cheddi, a reçu et chargé pour Universal Exporters des boissons en cannettes dans des conteneurs maritimes destinés à être transbordés en Asie. M. Cheddi s'occupait de l'entreposage et de l'expédition chez Aqua/Terra Warehousing Inc. Cette compagnie louait des bureaux et des entrepôts ainsi qu'un chariot élévateur à fourche pour ses opérations25.

[36]          Lansing Buildall a fourni les produits d'emballage dont M. Cheddi se servait pour charger les produits Coca-Cola dans des conteneurs maritimes pour Universal Exporters. Il n'a pas commandé ou payé les produits d'emballage et a témoigné qu'il ignorait qui s'en était occupé26. J'accepte le témoignage du représentant de Lansing Buildall qui a affirmé qu'il avait vendu des produits d'emballage à Universal Exporters et fait affaire avec Musadiq Pardhan dès 1994 et 199527.

[37]          M. Cheddi exécutait ce travail conformément aux instructions de Musadiq Pardhan et, à l'occasion, de Mustafa Pardhan, et il était payé par Universal Exporters28.

[38]          En 1995, Universal Exporters a également exporté des produits Coca-Cola et d'autres boissons en cannettes par l'intermédiaire d'Agritech Products International Inc., une compagnie possédée et exploitée par M. Henry Abramowitz, à Jersey City, au New Jersey29.

[39]          Universal Exporters a cessé ses activités à la fin de 199530. Aqua/Terra Warehousing Inc. a également cessé ses activités vers la fin de 199531.

b)      Création de Sid Enterprise en 1996

[40]          Le 10 juin 1996, 1184268 Ontario Limited a été constituée en personne morale. Les dénominations commerciales sous lesquelles 1184268 Ontario Limited exerçait ses activités étaient 3-M International Freight Forwarders et Sid Enterprise32.

[41]          Les locaux commerciaux de 1184268 Ontario Limited étaient situés au 180, avenue Steeles Ouest, bureau 201, à Thornhill (Ontario) (les locaux de l'avenue Steeles)33. L'adresse de son siège social était la suivante : 4261-A14 Highway #7 East, bureau 400, Unionville (Ontario) L3R 9W6. À cette adresse se trouvait une concession Mail Boxes Etc.34.

[42]          L'administrateur, premier dirigeant et fondé de pouvoir de 1184268 Ontario Limited était Akberali Fazal Kermali35. C'est le père de Fatima Fazal Kermali Pardhan36, qui est l"épouse de Mustafa Pardhan et la mère de Musadiq Pardhan37.

[43]          En juillet 1996, la résidence de la famille Pardhan située au 64, Central Park Drive à Markham (Ontario) a été vendue à des personnes avec lesquelles elle n'avait aucun lien38. Vers la même époque, Fatima Fazal a acquis un domicile au 111 de l'avenue Knightswood à Maple (Ontario)39. Mustafa Pardhan a autorisé la constitution au nom de son épouse d'une hypothèque sur leur nouveau domicile et Akberali Fazal Kermali a apparemment signé comme caution40.

c)      Locaux commerciaux de Sid Enterprise et d'Oscar Cheddi

[44]          En mars 1996, Oscar Cheddi a relancé Cheddi"s Freight Consulting, une petite entreprise non constituée qui offrait des services de transport et d'entreposage. M. Cheddi a ouvert un entrepôt au 89, Thornmount Drive à Scarborough (Ontario). Il se servait de son adresse résidentielle pour la facturation.

[45]          M. Cheddi a reconnu à contrecoeur que Sid Enterprise payait un loyer pour l'entrepôt de Thornmount, une entente qui n'a pris fin qu'en juin ou en juillet 199741.

[46]          Entre avril et juin 1996, Sid Enterprise a payé un loyer pour l'entrepôt de M. Cheddi au moyen de chèques tirés sur son compte à la Banque Canadienne Impériale de Commerce de Markham (Ontario) (compte no 8111618)42. Un de ces chèques porte la signature de S.H. Khoja, l"épouse de Musadiq Pardhan43. Le chèque et les talons de chèque ont été saisis dans les locaux de Sid Enterprise situés sur l'avenue Steeles. Suivant son témoignage, Oscar Cheddi connaissait à peine Shahina Khoja et ne recevait pas d'instructions d'elle44. Malgré les tergiversations et les réponses parfois évasives de M. Cheddi, je conclus que Sid Enterprise a régulièrement, sinon toujours, payé un loyer pour l'entrepôt qu'elle occupait entre avril 1996 et juillet 1997.

d)      Le chariot élévateur à fourche loué par Sid Enterprise et M. Cheddi

[47]          Oscar Cheddi a également loué un chariot élévateur à fourche pour charger des cannettes dans des conteneurs maritimes à son entrepôt de Thornmount Drive à Scarborough. Il a loué cet équipement de Mighty Lift Equipment Limited45. Les frais de location mensuels étaient de 500 $, taxes en sus. Mighty Lift Equipment Limited a été informée d'envoyer ses factures à l'adresse postale de Sid Enterprise chez Mail Boxes Etc. à Unionville, en Ontario.

[48]          Dans les notes manuscrites qu'il a inscrites sur la facture de Mighty Lift Equipment en date du 8 mars 1996, M. Cheddi a précisé que six chèques étaient remis pour payer la location du chariot élévateur à fourche. Un de ces chèques, daté du 8 juillet 1996, était tiré sur le compte d'Universal Exporters et portait la signature de M. Pardhan. Je conclus que ce chèque a été signé par Musadiq Pardhan46.

[49]          Le dernier versement afférent à la location du chariot élévateur a été reçu le 11 juillet 199747. Ce versement a été fait au moyen d'un chèque fait à l'ordre de [TRADUCTION] " 1184268 Ontario Limited, s/n Sid Enterprises ". Ce chèque, qui portait la date du 8 juillet 1997 était signé par F. Fazal48.

[50]          Voici ce que le président de Mighty Lift Equipment Limited a déclaré dans sa déposition49 :

     [TRADUCTION]
     Le nom de l'entreprise de qui nous louions le chariot élévateur a été modifié à quelques reprises. Il nous était en fait difficile de connaître avec précision le nom de l'entreprise locatrice. C'est pour cette raison que nous conservions toutes les factures. Voici une liste de divers noms utilisés pour la facturation :

         A/Z ENTERPRISE (S)

         A/Z ENTERPRISES (Universal Exporters) Div. of 1106972 Ontario Ltd.

         A/Z ENTERPRISES - 1184268 Ontario Ltd. - s/n Sid Enterprises

         1184268 Ontario Ltd. - s/n Sid Enterprises

         SID ENTERPRISES (1184268 Ontario Ltd.)


[51]              Je conclus que la location du chariot élévateur à fourche loué de Mighty Lift Equipment Limited et utilisé par M. Cheddi a été payée par Universal Exporters et Sid Enterprise, avec la connaissance et la participation de Musadiq Pardhan, qui a signé au moins un chèque à cet effet pendant la période de validité de l'injonction.

e)      Achat, par Sid Enterprise et M. Cheddi, de matériaux de Lansing Buildall

[52]          Oscar Cheddi a continué à utiliser les matériaux d'emballage obtenus de Lansing Buildall pour préparer les cannettes en vue de leur transbordement par conteneurs pour le compte de Sid Enterprise. M. Cheddi a témoigné qu'en 1995, les matériaux provenaient de chez Lansing Buildall, mais qu'il n'avait pas participé aux commandes. En revanche, en 1996 et en 1997, M. Cheddi commandait lui-même les matériaux par téléphone.

[53]          M. Charlie Latino était le représentant de Lansing Buildall qui s'occupait de Musadiq Pardhan et d'Oscar Cheddi. Il s'est d'abord occupé de Musadiq Pardhan, qu'il connaissait déjà en 1994 sous le nom de " Mushi "50. Il a témoigné que peu de temps après le début de ses relations d'affaires avec Musadiq Pardhan, il recevait des commandes d'achat de M. Pardhan par téléphone. M. Latino a ajouté que, vers le milieu de l'année 1996, Musadiq Pardhan lui avait présenté un certain " Oscar ". À compter de ce moment-là, c'est Oscar qui avait commandé les matériaux d'emballage51.

[54]          M. Cheddi reconnaît qu'il a participé aux commandes de fournitures qui ont été passées le plus souvent par téléphone auprès de Lansing Buildall pour le compte de Sid Enterprise en 1996 et 1997. Il se rappelle avoir visité un magasin de Lansing Buildall en compagnie de Musadiq Pardhan. Il se rappelle également avoir rencontré M. Latino. Il ne se souvient cependant pas d'avoir été présenté à M. Latino par M. Pardhan52.

[55]          J'accepte le témoignage de M. Latino suivant lequel Musadiq Pardhan lui a présenté Oscar Cheddi en 1996.

[56]          En novembre 1996, le nom de client qui figurait sur l'étiquette de prix courant de Lansing Buildall a été changé : le nom d'Universal Exporters a été remplacé par celui de " Sid Enterprises - Mushi & Mustafa Pardhan ". Le numéro de client de Lansing Buildall était le même dans le cas de Universal Exporters et de Sid Enterprise. À compter de novembre 1996, les factures de Lansing Buildall étaient adressées à Sid Enterprise chez Mail Boxes Etc. à Unionville.

[57]          À toute l'époque en cause, les matériaux d'emballage achetés par Universal Exporters et par Sid Enterprise étaient du même type.

[58]          À toute l'époque en cause, tant dans ses rapports avec Universal Exporters qu'avec ceux qu'il a plus tard eus avec Sid Enterprise, M. Latino était autorisé à porter les achats téléphoniques au compte Visa de Musadiq Pardhan, peu importe que les commandes proviennent de Musadiq Pardhan ou d'Oscar Cheddi53.

[59]          En particulier, au cours de la période de novembre 1996 à juillet 1997 au cours de laquelle un grand nombre des commandes ont été passées par Oscar Cheddi, les versements effectués à Lansing Buildall étaient faits par l'intermédiaire du compte Visa de M. Pardhan. Par exemple, deux achats effectués le 25 mars 1997 aux montants de 409,85 $ et de 167,03 $ respectivement et un autre achat effectué le 2 avril 1997 au montant de 433,11 $ figurent au compte Visa de Musadiq Pardhan dans le relevé du 7 avril 199754. Le numéro de compte Visa correspond à celui que Musadiq Pardhan a donné à M. Latino et dont Lansing Buildall s'est servi pour exécuter les commandes passées par Universal Exporters et par Sid Enterprise55. De même, un achat au montant de 772,33 $ effectué le 8 mars 1997 figurait au compte de la carte Visa de M. Pardhan, compte qui s'élevait à 1 852,65 $ à la date du relevé du 8 avril 1996. Sid Enterprise a payé cet achat56. Tous ces éléments démontrent la participation active de Musadiq Pardhan aux activités de Sid Enterprise.

f)      Exportation de produits Coca-Cola par Sid Enterprise en 1996 et 1997

[60]          La preuve présentée par les demanderesses au sujet du transbordement de produits Coca-Cola en violation de l'injonction prononcée par le juge MacKay le 8 janvier 1996 est principalement documentaire57 et repose par ailleurs sur les affirmations faites par Oscar Cheddi dans son témoignage58. La preuve documentaire comporte deux volets.

[61]          L'essentiel des documents a été obtenu de M. Cheddi par suite d'une ordonnance rendue par la Cour (les documents Cheddi)59. Ces documents font état de 132 chargements destinés à l'exportation pour lesquels M. Cheddi a offert ses services d'entreposage et d'emballage à 1184268 Ontario Limited (Sid Enterprise). Dans le cas de chaque envoi, les documents Cheddi comportaient la facture remise par Cheddi à Sid Enterprise pour l'entreposage et le chargement de produits Coca-Cola dans des conteneurs maritimes. Chaque facture mentionnait le numéro du conteneur maritime et la destination, habituellement l'Asie. Dans certains cas, ces renseignements sur l'expédition étaient confirmés dans des documents joints à la facture. Certains connaissements précisaient que les marchandises transportées entre le lieu d'achat et l'entrepôt de M. Cheddi étaient des produits Coca-Cola.

[62]          Les dossiers du Club Price constituent la seconde principale source de preuve documentaire dont les demanderesses se sont servie pour établir quels chargements destinés à l'exportation comprenaient des produits Coca-Cola60. Un représentant du Club Price a fait une recherche dans ses dossiers informatisés et a pu établir un corrélation entre ses ventes de produits Coca-Cola et 21 envois que M. Cheddi avait facturés à Sid Enterprise61. Le représentant du Club Price a en outre pu établir un lien entre ses ventes de produits Coca-Cola et des numéros de comptes Visa au nom de Shahina Khoja, l"épouse du défendeur Musadiq Pardhan.

[63]          Les ventes de produits Coca-Cola effectuées par le Club Price qui ont été réglées au moyen de la carte Visa délivrée au nom de Shahina Khoja se rapportent à 21 des factures envoyées par M. Cheddi à Sid Enterprise. Ces 21 factures concernent des travaux effectués par M. Cheddi pour 1184268 Ontario Limited ou pour Sid Enterprise et se rapportent aux envois destinés à l'exportation faits entre novembre 1996 et juin 1997.

[64]          Dans ses observations orales, l'avocat des défendeurs a reconnu que les produits Coca-Cola signalés par le représentant du Club Price ont été exportés du Canada par Sid Enterprise et, pour citer l'avocat, étaient [TRADUCTION] " le produit visé par la présente injonction "62.

[65]          Sur le fondement de cette preuve documentaire, je conclus qu'au moins 21 chargements de produits Coca-Cola ont été exportés du Canada par 1184268 Ontario Limited, faisant affaire sous la raison sociale de Sid Enterprise63.

[66]          Je conclus également que trois autres chargements mentionnés dans les documents Cheddi64 comprenaient des produits Coca-Cola. Cette conclusion repose sur les renseignements contenus dans la lettre du 12 mai 1997 écrite par Sid Enterprise (division de 1184268 Ontario Limited) à son client, M. John Chen, de Bay Harbour Trading Corp65. Les factures établies par M. Cheddi pour ces trois chargements ont été envoyées en avril 1997.

[67]          Dans cette lettre, on informe M. Chen que trois conteneurs maritimes désignés par leur numéro, contiendront des boissons en cannettes, notamment des produits Coca-Cola.

[68]          Les documents Cheddi mentionnent d'autres chargements pour lesquels les connaissements font notamment état de produits Coca-Cola. Il ressort de certains connaissements que les produits ne proviennent par du Club Price. Dans le cas de ces cargaisons, il n'y a pas d'autre preuve que le témoignage de M. Cheddi dont il est question au paragraphe suivant, pour corroborer que la marchandise expédiée est un produit Coca-Cola. Dans d'autres cas, lorsque l'expéditeur désigné est le Club Price, le représentant de ce dernier n'a pas été en mesure de confirmer par d'autres documents que la marchandise était vendue par le Club Price à Sid Enterprise et qu'elle était un produit Coca-Cola.

[69]          M. Cheddi a toutefois témoigné que lorsque les connaissements portaient que le produit en question était du Coca-Cola, ce renseignement était, selon lui, exact66. En contre-interrogatoire, M. Cheddi a quelque peu nuancé sa réponse en déclarant que les connaissements étaient exacts [TRADUCTION] " 99 pour 100 du temps "67. Lors de son réinterrogatoire, M. Cheddi a ajouté que lorsque les connaissements parlaient de " cargaisons mixtes " et de " Coke ", il en déduisait qu'au moins une partie de la cargaison comprenait des produits Coca-Cola.

[70]          À l'ouverture du présent procès, la Cour a cru comprendre que les demanderesses tenteraient d'établir que plus de 130 chargements de produits Coca-Cola avaient été exportés en violation des modalités de l'injonction. La thèse des demanderesses reposait sur les renseignements communiqués par M. Cheddi suivant lesquels les documents qu'il avait fournis [TRADUCTION] " se rapportaient aux envois destinés à l'exportation de produits Coca-Cola effectués par 1184268 Ontario Ltd. auxquels il avait participé "68.

[71]          Au procès, M. Cheddi a témoigné que ce n'étaient pas tous les chargements mentionnés dans ses documents qui se rapportaient à des produits Coca-Cola. À son avis, sur les 130 factures qu'il a envoyées à Sid Enterprise, entre 25 et 35 se rapportaient à des produits Coca-Cola alors que les autres concernaient diverses boissons en cannettes69. Plus particulièrement, M. Cheddi a identifié 25 chargements bien précis qui comprenaient des produits Coca-Cola parmi les opérations mentionnées dans les documents Cheddi70.

[72]          Si l'on en croit le témoignage de M. Cheddi, il y a quinze autres chargements de produits Coca-Cola qui auraient été exportés au mépris de l'injonction, en plus des 24 chargements dont il a déjà été question aux paragraphes 65 et 6671. Ces quinze chargements ont également quitté Toronto pour l'Asie entre novembre 1996 et juin ou le tout début de juillet de 1997.

[73]          En résumé, en acceptant l'évaluation que M. Cheddi a faite de ses propres documents sur cette question, je conclus hors de tout doute raisonnable que 39 chargements comprenant des produits Coca-Cola ont été exportés du Canada par 1184268 Ontario Limited, qui faisait affaire sous la raison sociale de Sid Enterprise, en violation des modalités de l'injonction.

g)      Participation de Musadiq Pardhan à Sid Enterprise

[74]          Les demanderesses soutiennent énergiquement que, compte tenu des similitudes qui existent entre les activités d'Universal Exporters et celles de Sid Enterprise, c'est essentiellement la même entreprise qui existait avant et après le prononcé de l'injonction et que cette entreprise a été exploitée après l'injonction sous une raison et une entité sociales différentes, mais toujours sous le contrôle des défendeurs Pardhan.

[75]          Bien que les observations des demanderesses soient pertinentes, je préfère m'en tenir à la participation personnelle de Musadiq Pardhan et de Mustafa Pardhan aux activités de Sid Enterprise et plus particulièrement à l'exportation de produits Coca-Cola. Après avoir examiné les similitudes qui existent entre les activités d'Universal Exporters et celles de Sid Enterprise, je vais d'abord examiner les éléments de preuve concernant Musadiq Pardhan.

(i)      Similitudes entre les deux entreprises

[76]          Musadiq Pardhan et Mustafa Pardhan étaient les principaux exploitants d'Universal Exporters. Après qu'Universal Exporters se soit " écroulée " à la fin de 1995, Mustafa Pardhan et Musadiq Pardhan se sont " joints " à Sid Enterprise72, une dénomination commerciale qui, selon la preuve documentaire, a commencé à être utilisée dès le 23 janvier 1996 et dans les premiers jours de mars 199673.

[77]          Oscar Cheddi était chargé de l'entreposage et de l'emballage des cannettes destinées à l'exportation. Il utilisait essentiellement les mêmes méthodes et matériaux pour les deux opérations. Il se procurait les matériaux d'emballage de la même source, Lansing Buildall, dont le numéro de client était le même pour Universal Exporters et pour Sid Enterprise. Le nom du client était simplement modifié : on remplaçait le nom d'Universal Exporters par celui de " Sid Enterprise - Mushi & Mustafa Pardhan ". En 1996, M. Musadiq Pardhan a présenté M. Cheddi au même représentant de Lansing Buildall qui avait fait affaire avec Universal Exporters et Sid Enterprise.

[78]          Universal Exporters et Sid Enterprise se procuraient leur cannettes auprès d'au moins deux fournisseurs communs, le Club Price et Knob Hill Farms74.

[79]          Le même bureau de travail et fichier portatif utilisés par Universal Exporters au domicile des Pardhan à l'époque ont été trouvés dans l'établissement de l'avenue Steeles de Sid Enterprise75. L'avocat des demanderesses a également signalé les similitudes qui existaient entre le papier à en-tête utilisé par Universal Exporters et celui dont se servait Sid Enterprise. Je partage son avis76.

(ii)      Musadiq Pardhan et les activités générales de Sid Enterprise

[80]          Outre ces similitudes, il y a d'autres éléments qui permettent d'établir un lien entre Musadiq Pardhan et les activités de Sid Enterprise.

[81]          Le contrat de location que M. Cheddi a signé en mars 1996 au sujet de son entrepôt du 89 Thornmount Drive a été trouvé parmi les documents saisis dans les locaux de Sid Enterprise au 180 de l'avenue Steeles77. Le loyer était versé par Sid Enterprise au nom de M. Cheddi. Au moins un des chèques de loyer a été signé par Shahina Khoja, l"épouse de Musadiq Pardhan (supra , paragraphe 46).

[82]          Le 23 janvier 1996, Shahina H. Khoja a signé avec Mail Boxes Etc. une convention de messagerie postale au nom de Sid Enterprise78.

[83]          En mars 1996, trois autres événements sont survenus. Premièrement, le 8 mars 1996 ou vers cette date, Shahina Khoja a signé un formulaire de demande d'adhésion du Club Price sous la raison sociale de Sid Enterprise79. Au cours du même mois, elle a également signé des documents bancaires pour le compte de Sid Enterprise relativement au compte de cette dernière à la Banque Canadienne Impériale de Commerce80. Finalement, le 8 mars 1996 ou vers cette date, M. Cheddi a loué un chariot élévateur à fourche au moyen de chèques d'Universal Exporters, dont au moins un portait la signature de Musadiq Pardhan81.

[84]          Le 16 avril 1996, le contrat de location des locaux de l'avenue Steeles de Sid Enterprise a été signé par Sajjad Fazal, le frère de la mère de Musadiq Pardhan ou son oncle82.

[85]          Entre mai et septembre 1996, Universal Exporters a été facturée par Mighty Lift Equipment Limited pour la location du chariot élévateur à fourche utilisé par Oscar Cheddi. Entre octobre 1996 et juin 1997, les factures mensuelles relatives à la même location d'équipement ont simplement été envoyées à Sid Enterprise pour paiement83. Je constate également que Musadiq Pardhan a signé le chèque du 8 juillet 1996, qui faisait partie d'une série de chèques postdatés pour le loyer du chariot élévateur à fourche (supra, paragraphes 48 et 51).

[86]          Il y a d'autres éléments de preuve tout aussi convaincants au sujet de la participation de Musadiq Pardhan aux activités générales de Sid Enterprise. Il a été vu dans les locaux de l'avenue Steeles de Sid Enterprise par des détectives, dont j'accepte le témoignage en ce qui concerne la filature dont il est question dans les présents motifs. Un chèque de 1 852,65 $ tiré sur le compte de Sid Enterprise a servi à acquitter le solde du compte Visa de M. Pardhan dû le 25 avril 199684. Il y a des lettres écrites sur du papier à en-tête de Sid Enterprise qui portent la signature de " Mushi " ou de " Musadiq "85 et un message électronique portant le nom " Mushi ", " Musadiq " ou " MP "86. Une carte d'affaires de Sid Enterprise porte le nom de [TRADUCTION] " M. Gulamhusein Ventes à l'exportation ", un nom utilisé par Musadiq Pardhan.

[87]          Le 31 juillet 1997, un ami de la famille Pardhan a facilité l'accès aux locaux de Sid Enterprise sur l'avenue Steeles en utilisant les clés du bureau de Musadiq Pardhan87.

[88]          Finalement, une série de chèques hebdomadaires au montant de 350 $ chacun ont été tirés sur le compte de Sid Entreprise entre le 18 avril 1997 et le 1er août 1997 à l'ordre de " M. Pardhan "88. Mustafa Pardhan était absent du Canada entre juin et août 199789, ce qui permet de penser que ces chèques étaient destinés à Musadiq Pardhan. Il n'est cependant pas nécessaire que je tire de conclusion précise à ce sujet.

[89]          Il y a également des éléments de preuve qui permettent d'établir un lien entre Musadiq Pardhan et l'exportation par Sid Enterprise de produits Coca-Cola alors que l'injonction était en vigueur. Pour apprécier ces éléments de preuve, il faut d'abord déterminer s'il existait effectivement une personne nommée Sid ou Syd Kassim.

(iii)      Sid Kassim : un nom a fictif ?

[90]          Le nom Sid ou Syd Kassim apparaît dans la preuve documentaire. Le nom Sid Kassim figure quant à lui sur des factures commerciales envoyées à la même adresse de Mail Boxes Etc. utilisée par Sid Enterprise90. Une agence maritime a transmis une télécopie à Sid Kassim le 14 mai 1997 et le document a été retrouvé dans la mallette de Musadiq Pardhan91. Des factures de téléphone ont été transmises à 1184268 Ontario Limited, à l'attention de Syd Kassim à l'adresse de Mail Boxes Etc. utilisée par Musadiq Pardhan et Mustafa Pardhan92. De même, des messages électroniques concernant les conteneurs maritimes à livrer à l'entrepôt de M. Cheddi ont été envoyés sous le nom de Sid Kassim93.

[91]          Les formules de déclaration d'exportation, qui ont été à l'occasion signées par Musadiq Pardhan avant 199694, auraient été signées par Sid Kassim le 2 décembre 199695, mais la signature est sensiblement différente de celle qui correspond au même nom sur les documents d'expédition en date du 18 juin 199796.

[92]          Les détectives des demanderesses n'ont pas trouvé de Sid ou de Syd Kassim au ministère des Transports ou en consultant la Loi sur les sûretés mobilières, le plumitif, le rôle d'évaluation ou les dossiers et registres fonciers ou ceux de Bell Canada97.

[93]          Oscar Cheddi a témoigné qu'il avait traité avec Sid Kassim. Il a affirmé qu'il avait reçu des chèques de Sid Kassim en paiement de la location du chariot élévateur d'Universal Exporters98. Parmi ces chèques se trouve évidemment celui qu'a signé Musadiq Pardhan99.

[94]          Il a affirmé que le premier contact qu'il avait eu avec Sid Enterprise en mars 1996 avait eu lieu avec son unique représentant, Sid Kassim. M. Kassim a pris l'initiative en lui téléphonant. M. Cheddi n'a pas pu préciser comment M. Kassim avait obtenu son nom. Ils se sont notamment rencontrés à l'entrepôt de M. Cheddi et à deux reprises dans une beignerie100.

[95]          M. Cheddi affirme qu'il avait reçu de Sid Kassim l'autorisation d'effectuer des achats chez Lansing Buildall101. Confronté aux factures de Lansing Buildall adressées à Mushi Pardhan et à Mustafa Pardhan, M. Cheddi est devenu plus vague et hésitant dans ses réponses. Il a insisté pour dire qu'il était payé pour les services qu'il exécutait pour le compte de Sid Enterprise par Sid Kassim. Il n'a pas pu témoigner au sujet du rôle joué par les Pardhan au sein de Sid Enterprise102. Je ne crois pas que M. Cheddi ait donné des réponses franches. Il avait fait affaire avec les deux Pardhan lorsque ceux-ci exerçaient leurs activités sous la raison sociale de Universal Exporters; il était chargé de l'emballage et de l'expédition de leur marchandise. Il est invraisemblable qu'il n'ait pas traité avec au moins un des Pardhan alors qu'il tenait le même rôle auprès de Sid Enterprise.

[96]          M. Cheddi a témoigné qu'il avait également rencontré Sid Kassim aux locaux de l'avenue Steeles de Sid Enterprise. Musadiq Pardhan et Mustafa Pardhan étaient parfois aussi présents103. Ses rapports avec Sid Kassim ont cessé à la fin de juillet 1997 et il n'a pu communiquer aucun renseignement au sujet de l'endroit où l'on pouvait retrouver Sid Kassim par la suite104.

[97]          Un second témoin aurait eu des rapports avec Sid Kassim. Henry Abramowitz est le président et propriétaire d'Agritech Products International Inc., au New Jersey. Il connaît Mustafa Pardhan depuis plus de vingt ans et ses relations d'affaires avec les deux Pardhan remontent à 1995105.

[98]          Dans la période de douze mois commençant en août 1996, la compagnie de M. Abramowitz a acheté à Sid Enterprise pour plus de 1,3 millions de dollars US de produits alimentaires dont certains ont été transbordés en Asie106. Après quelques hésitations, M. Abramowitz a reconnu que ces opérations portaient notamment sur des produits Coca-Cola107.

[99]          M. Abramowitz affirme qu'au cours de cette période, il a reçu une communication téléphonique d'une personne qui s'est présentée comme étant Sid Kassim. Il a d'abord témoigné qu'il n'avait eu aucun contact avec Musadiq Pardhan ou Mustafa Pardhan après 1995, mais il a par la suite reconnu qu'il en avait eus108. Il n'est guère plausible que M. Abramowitz ait fait des affaires pour plus de 1,3 millions de dollars US avec Sid Enterprise sur une période de douze mois sans jamais communiquer avec l'un ou l'autre des défendeurs Pardhan.

[100]          À mon avis, M. Abramowitz est un témoin secondaire qui ne voulait pas faire intervenir Musadiq Pardhan ou Mustafa Pardhan dans les affaires de Sid Enterprise, surtout en ce qui concerne le transbordement de produits Coca-Cola. J'interprète son témoignage comme une preuve de plus que Sid Kassim est une personne fictive.

[101]          Il est curieux de constater qu'en réponse à une des questions que le tribunal lui a posée lors de ses observations orales, l'avocat des défendeurs a reconnu que Sid Kassim était un nom fictif utilisé par quelqu'un d'autre109. L'avocat a fait remarquer que la personne dont le nom se rapprochait le plus de Sid Kassim était, suivant la preuve, Kassim Lakhani, qui avait les clés de l'établissement de l'avenue Steeles110. La preuve ne révèle aucune autre participation de M. Lakhani aux affaires de Sid Enterprise.

[102]          En résumé, je n'accepte pas le témoignage de MM. Cheddi et Abramowitz dans lequel ceux-ci affirment qu'il existait une personne dont le nom véritable était Sid ou Syd Kassim. Il se peut que M. Cheddi ait présumé de bonne foi ou à tort qu'une personne déterminée s'appelait Sid Kassim. Vu le comportement de M. Cheddi à l'audience, je doute fort que ce soit effectivement le cas. Les réponses qu'il a données étaient trop souvent hésitantes et évasives, du moins jusqu'à ce qu'il soit confronté à la preuve documentaire. M. Abramowitz a pris soin de préciser qu'il avait reçu un appel d'une personne qui s'est présentée sous le nom de Sid Kassim. À mon sens, sur la question de Sid Kassim et ailleurs dans leur témoignage, les deux témoins ont formulé leurs réponses de manière à empêcher la Cour de conclure que Musadiq Pardhan et Mustafa Pardhan avaient participé activement à l'exportation de produits Coca-Cola faite par Sid Enterprise.

[103]          Vu l'ensemble de la preuve qui m'a été présentée, je conclus hors de tout doute raisonnable qu'aucune personne dont le nom véritable ou fictif était Sid Kassim a participé aux activités de Sid Enterprise. Le nom Sid ou Syd Kassim a été employé par une ou plusieurs personnes participant aux activités de Sid Enterprise.

(iv)      Musadiq Pardhan, son utilisation du nom Sid Kassim et l'exportation de produits Coca-Cola

[104]          Il existe des éléments de preuve plus précis qui permettent d'établir un lien entre Musadiq Pardhan et l'utilisation du nom Sid Kassim.

[105]          Parmi les documents trouvés près de l'ordinateur au domicile de la famille Pardhan ou dans l'ordinateur en question, les demanderesses ont produit une photographie de Musadiq Pardhan et de John Chen, de Bay Harbour Trading Corporation, se tenant debout devant quelques patins de glissement contenant des produits Coca-Cola111. On trouve la mention suivante au dos de la photographie : [TRADUCTION] " Cher Sid, avec mes meilleurs souvenirs. Amitiés à vous et à votre famille. John. Fév. 1997 ".

[106]          Contre-interrogé au sujet de la photographie, le témoin des demanderesses, qui avait participé à la saisie, a déclaré que " Sid " est un nom d'emprunt et que, sauf erreur, il n'existe personne dont le nom véritable est " Sid "112.

[107]          Je conclus hors de tout doute raisonnable qu'aux fins de l'opération effectuée au moment où la photographie a été prise, Musadiq Pardhan s'est présenté à John Chen sous le nom de " Sid ", ou du moins sous un des noms qu'il utilisait. C'est la seule explication acceptable de l'inscription figurant au dos la photographie " cher Sid ".

[108]          Le 12 mai 1997, une lettre de Sid Enterprise portant le nom de " Sid " a été télécopiée à John Chen de Bay Harbour Trading Corporation pour confirmer les détails de l'envoi de trois conteneurs maritimes, dont chacun comprenait des produits Coca-Cola113. Cette lettre a également été retrouvée dans la mallette de Musadiq Pardhan114.

[109]          Le 11 juillet 1997, Musadiq " Mushi " Pardhan a télécopié à son père une lettre dont voici un extrait :

     [TRADUCTION] Les choses évoluent ici. Chargement de 2x20' chaque semaine. Ai parlé à M. Chen de HKG. Il va recommencer à acheter d'ici la fin du mois, car il vient de recevoir sept conteneurs avant-hier. Même si c'est la haute-saison à HKG, les affaires sont au ralenti. Il pleut sans arrêt depuis deux mois et tous les importateurs en souffrent. Je travaille aussi avec lui relativement à l'envoi de RC Cola, 1x20' conteneur d'échantillonnages. ll va mettre la moitié de l'argent et moi, l'autre moitié. Je travaille aussi avec lui au sujet de la vente de jus par le biais d'un intermédiaire115.

Musadiq Pardhan ne parle pas expressément de produits Coca-Cola. Sa lettre n'en est pas moins révélatrice. M. Chen, qui agissait pour le compte de Bay Harbour Trading, a acheté au moins six chargements de cannettes à Sid Enterprise en avril et en mai 1997116. Chacun de ces chargements comprenait des produits Coca-Cola. Il n'est pas plausible que, lorsqu'il a écrit cette lettre à son père, Musadiq ne savait pas que M. Chen, en compagnie de qui il était photographié, recevait des produits Coca-Cola dans les conteneurs mentionnés dans cette lettre et dans la lettre écrite par " Sid" le 12 mai 1997.

[110]          La lettre du 12 mai 1997 adressée à M. Chen a été envoyée sous le nom de " Sid ". Compte tenu de l'inscription [TRADUCTION] " cher Sid " figurant au dos de la photographie sur laquelle Musadiq Pardhan apparaît en compagnie de M. Chen, ce dernier aurait compris que cette lettre lui était adressée par une personne qu'il connaissait sous le nom de " Sid ", mais dont la véritable identité était Musadiq Pardhan. Vu cet élément de preuve, je conclus que le nom fictif " Sid " a été utilisé une seconde fois lors des échanges tenus avec M. Chen. Ce même élément de preuve, ajouté aux renseignements figurant sur sa télécopie du 11 juillet 1997, permet également de conclure que Musadiq Pardhan est l'auteur de la lettre du 12 mai 1997 et qu'il a participé à la vente de produits Coca-Cola à Bay Harbour Trading Corporation. Je reviendrai sur cette conclusion après avoir examiné le rôle qu'auraient joué d'autres personnes au sein de Sid Enterprise.

[111]          Le 30 mai 1997, Musadiq Pardhan a été vu en compagnie de son père dans le parc de stationnement d'un magasin Club Price au même moment où les détectives des demanderesses ont également remarqué la présence d'une soixantaine de patins de glissement contenant des produits Coca-Cola dans la zone de chargement du magasin. Le 3 juin 1997, les détectives ont observé le déplacement d'un nombre important de patins de glissement semblables, sinon identiques, de produits Coca-Cola dans deux remorques qui ont été transportées entre le même magasin du Club Price et l'entrepôt d'Oscar Cheddi en vue de leur exportation subséquente vers Hong-Kong117.

[112]          Oscar Cheddi a témoigné qu'il achetait au Club Price des boissons en cannettes pour le compte de Sid Enterprise. Il recevait ses directives sur les marques précises à acheter dans les enveloppes qui lui étaient adressées. Dans son témoignage, il a affirmé qu'il faisait affaire avec " Sid "118.

[113]          M. Cheddi a répondu qu'à l'occasion, Musadiq Pardhan lui remettait lui-même l'enveloppe dans laquelle se trouvaient les instructions. Il a fait un lien entre cette réponse et certaines opérations concernant les produits Coca-Cola :

     [TRADUCTION]
     Q.      Vous est-il arrivé de vous trouver dans les bureaux de Sid Enterprises seul en présence de Mushi Pardhan ?
     R.      Ça m'est arrivé, oui.
     Q.      Musadiq Pardhan vous a-t-il déjà remis lui-même l'enveloppe d'instructions ?
     R.      Oui. Parfois l'enveloppe était sur le bureau et il me disait : " Tiens. Voici une enveloppe pour toi ".
     Q.      D'accord. Vous faites des gestes avec un document pour montrer qu'il...
     R.      Oui.
     Q.      -- vous a remis --
     A.      C'est ça.
     Q.      -- l'enveloppe ?
     R.      Parfois. Parfois, elle était sur le bureau et il me disait que Sid avait laissée cette enveloppe pour moi.
     Q.      Et ces enveloppes que l'on vous remettait ou qu'on vous demandait de passer prendre, qu'est-ce qu'elles contenaient ?
     R.      Des instructions sur les endroits où l'on pouvait acheter le produit avec les instructions d'expédition.
     Q.      Donc, pour en revenir aux opérations d'achat de produits Coca-Cola, l'enveloppe renfermerait-elle des instructions indiquant de se rendre au Club Price ?
     R.      Dans certains cas, oui.
     Q.      Êtes-vous allé ailleurs acheter des produits Coca-Cola ?
     A.      Oui, chez Knob Hill Farms119.

M. Cheddi n'a présenté aucun élément de preuve révélateur au sujet de ses rapports avec d'autres personnes travaillant pour Sid Enterprise que Musadiq Pardhan et la personne qu'il a identifiée comme étant Sid Kassim. Suivant l'appréciation que je fais de la preuve, Sid Kassim est une personne fictive. Il n'existe personne qui porte le nom de Sid ou de Syd Kassim qui a eu quoi que ce soit à voir avec Sid Enterprise. Si Musadiq Pardhan a effectivement dit à Oscar Cheddi : [TRADUCTION] " Sid a laissé cette enveloppe pour vous " " une assertion que je n'accepte pas ", à qui Musadiq Pardhan pouvait-il bien faire allusion ?

[114]          Cette question nous amène à nous pencher sur le rôle, s'il en est, qu'ont joué d'autres membres de la famille Pardhan dans l'exportation de produits Coca-Cola pour Sid Enterprise. Le rôle joué par le défendeur Mustafa Pardhan sera par la suite examiné séparément.

h)      Rôle des membres de la famille Pardhan et d'autres personnes

[115]          Ainsi qu'il a déjà été souligné, Akberali Fazal Kermali figurait comme administrateur, premier dirigeant et fondé de pouvoir de 1184268 Ontario Limited, qui faisait affaire sous la raison sociale de Sid Enterprise. Les défendeurs font remarquer que le nom de cette personne figure sur certaines formules de déclaration d'exportation.

[116]          Fatima Fazal Kermali Pardhan, la fille d'Akberali Fazal Kermali, a signé chaque chèque tiré sur le compte no 100-064-5 de la Banque Royale du Canada que détenait 1184268 Ontario Limited sous la raison sociale de Sid Enterprise. Ce compte était actif entre juin 1996 et septembre 1997. Fatima Fazal est l"épouse de Mustafa Pardhan. Certains des chèques qu'elle a signés étaient faits à son ordre à elle120.

[117]          Shahina Khoja est l"épouse de Musadiq Pardhan. Suivant les registres du Club Price, elle a été désignée comme étant la personne de chez Sid Enterprise qui s'était occupée de sa carte d'adhésion121. Les cannettes que Sid Enterprise a achetées au Club Price ont été payées au moyen d'une carte Visa au nom de Shahina Khoja. Elle a également signé au moins quelques-uns des chèques, qui avaient été tirés sur un compte de la Banque Canadienne Impériale de Commerce, pour payer les dépenses de Sid Enterprise122.

[118]          Sidika Pardhan est la soeur de Musadiq Pardhan. Elle était la bénéficiaire de certains paiements faits par Sid Enterprise sous forme d'un chèque d'un montant d'au moins 22 000 $123. Il y a peu ou point d'éléments de preuve concernant le travail qu'elle effectuait pour Sid Enterprise.

[119]          Sajjad Fazal est le frère de Fatima Fazal. Son passeport a été trouvé dans les locaux de l'avenue Steeles124. Le nom Sajjad F. Kermali, qui correspond peut-être à la même personne, figure sur d'autres documents de Sid Enterprise. Il semble qu'il a communiqué en juillet 1996 avec l'un de ses clients au sujet de la vente de produits Coca-Cola125. En novembre 1996, un autre client a écrit à Sajjad Fazal Kermali, chez Sid Enterprise, au sujet d'avaries causées à des produits Coca-Cola au cours de leur transport126. Sajjad Fazal a signé le bail des locaux de l'avenue Steeles127.

[120]              Oscar Cheddi ne se souvient pas d'une femme qui aurait travaillé pour Sid Enterprise. Il n'a pas reçu d'instructions de Shahina Khoja ou de Fatima Fazal. Il connaissait à peine le nom d'Akberali Fazal Kermali, qu'il ne se souvient même pas avoir rencontré. Il a témoigné que ses rapports avec Sajjad Fazal, qu'il ne connaissait que par son prénom, [TRADUCTION] " étaient fort limités "128.

[121]          De même, Henry Abramowitz n'a eu aucun rapport avec Fatima Fazal Pardhan et Shahina Pardhan129. Il ne connaissait pas non plus le nom d'Akberali Fazal Kermali130. Il connaissait cependant Sajjad Fazal, le frère de Fatima Fazal et le beau-frère de Mustafa Pardhan131. Suivant son témoignage, M. Abramowitz a communiqué avec Sajjad Fazal chez Sid Enterprise132.

[122]          Je n'attribue aucun rôle significatif à Sajjad Kermali en ce qui concerne les affaires de Sid Enterprise. Même si les deux témoins ont tenté de protéger les Pardhan, j'accorde plus de valeur au témoignage de M. Cheddi et aux très rares mentions du nom de Sajjad Fazal dans la preuve documentaire qu'à l'affirmation de M. Abramowitz suivant laquelle il a communiqué à l'occasion avec cette personne. Je conclus que le rôle que Sajjad Fazal a pu jouer en ce qui concerne la vente de produits Coca-Cola au nom de Sid Enterprise était tout au plus accessoire. Vu l'ensemble de la preuve qui m'a été présentée, je conclus qu'il n'a pas participé aux 39 chargements, supra, paragraphe 73, si tant est qu'il a participé à l'un d'entre eux.

[123]          Les défendeurs ont produit la carte d'affaires de Sid Enterprise de Ally Hermani133. Il n'y a toutefois aucun autre élément de preuve au sujet de cette personne. L'avocat des défendeurs a mentionné un document adressé à " Alistair " et a émis l'hypothèse qu'il pouvait s'agir d'" Oscar "134. À mon avis, le nom de ces " employés fictifs ", pour reprendre les mots de l'avocat, visait simplement à faire une diversion dans le contexte des éléments de preuve portant sur les véritables activités de Sid Enterprise.

[124]          De même, il n'y a aucun élément de preuve solide permettant de conclure qu'Akberali Fazal Kermali, Fatima Pardhan, Shahina Khoja ou Sidika Pardhan ont joué quelque rôle que ce soit en ce qui concerne la vente de produits Coca-Cola pour Sid Enterprise. Leur signature qui apparaît sur les formules de déclaration d'exportation, les documents bancaires et les registres du Club Price constitue des éléments de preuve tendant à démontrer que leur nom a effectivement été utilisé, mais elle n'établit pas qu'ils ont activement participé aux activités de commercialisation de Sid Enterprise.

[125]          Je suis d'accord avec les demanderesses pour dire que le nom des membres de la famille Pardhan a été utilisé notamment pour dissimuler la participation des personnes qui s'occupaient véritablement des activités d'exportation de Sid Enterprise.

(i)      Résumé des conclusions de fait concernant Musadiq Pardhan

[126]          En mars 1996, Musadiq Pardhan a reconnu devant l'un des procureurs des demanderesses qu'il était au courant des modalités de l'injonction et qu'il comprenait que cette ordonnance du tribunal avait pour effet de lui interdire d'exporter des produits Coca-Cola.

[127]          Cet aveu de Musadiq Pardhan concernant son interprétation de l'injonction appuie et confirme la conclusion que j'ai par ailleurs déjà tirée et suivant laquelle le sens effectif et véritable de l'injonction prononcée par le juge MacKay ne fait aucun doute, malgré les erreurs typographiques.

[128]          En outre, le fait que le nom de Sid Enterprise ait été employé dès le 23 janvier 1996 et qu'il ait été utilisé à diverses reprises au début de mars 1996 constitue un élément de preuve qui, lorsqu'on l'apprécie à la lumière de l'aveu fait à l'avocat, me convainc hors de tout doute raisonnable que Musadiq Pardhan a été mis au courant de l'ordonnance et en a compris la teneur au plus tard en mars 1996.

[129]          À titre subsidiaire, et uniquement pour le cas où la présente décision serait portée en appel, je conclus que Musadiq Pardhan a été mis au courant de l'injonction en février 1997 lorsque son avocat s'est présenté devant le juge MacKay au sujet de la question des dépens. On peut inférer que la date la plus tardive à laquelle il a été mis au courant de l'injonction remonte à mars 1997, lorsque son avocat a déposé un projet d'avis de requête par lequel il demandait notamment à la Cour [TRADUCTION] " de lever, de suspendre ou de modifier l'injonction interlocutoire prononcée contre les défendeurs le 8 janvier 1997 [sic] par le juge MacKay135 ".

[130]          La constitution en personne morale de 1184268 Ontario Limited, faisant affaire sous la raison sociale de Sid Enterprise, et la signature et le dépôt en banque d'autres documents par les conjointes de Musadiq Pardhan et de Mustafa Pardhan visaient, abstraction faite des autres objectifs qui pouvaient être visés, à camoufler la véritable identité de la personne ou des personnes qui ont participé activement à l'exportation de produits Coca-Cola après le 8 janvier 1996.

[131]          Sid Enterprise a payé pour la location des locaux commerciaux et du chariot élévateur d'Oscar Cheddi au moyen de chèques qui étaient signés à l'occasion par l"épouse de Musadiq Pardhan, par la mère de ce dernier ou, à au moins une occasion, par Musadiq Pardhan lui-même. Oscar Cheddi a, conformément aux directives de Sid Enterprise, chargé les conteneurs maritimes en vue de l'exportation de 39 chargements de produits Coca-Cola entre novembre 1996 et le début de juillet 1997. Je conclus également que Sid Kassim n'était pas le nom d'une véritable personne et qu'au vu du dossier qui m'a été soumis, personne d'autre, et notamment aucun des membres de la famille Pardhan qui n'ont pas été constitués défendeurs dans la présente instance, n'a participé activement à la vente de produits Coca-Cola, si tant est qu'ils y ont même participé.

[132]          En conséquence, je conclus hors de tout doute raisonnable que la lettre de " Sid " en date du 12 mai 1997 a été écrite par Musadiq Pardhan et que ce dernier a participé à la vente de produits Coca-Cola à Bay Harbour Trading Corporation en avril et en mai 1997 pour le compte de 1184268 Ontario Limited, faisant affaire sous la raison sociale de Sid Enterprise.

[133]          Musadiq Pardhan a joué un rôle actif en collaboration avec John Chen, de Bay Harbour Trading Corporation. Il était au courant des chargements de produits Coca-Cola envoyés à ce client et y a participé. Le nom de son épouse a été utilisé pour faciliter l'achat de cannettes au Club Price. M. Cheddi a témoigné qu'il avait reçu des enveloppes d'instructions de Musadiq Pardhan. Le 31 juillet 1997, lorsque le domicile de la famille Pardhan et les locaux de l'avenue Steeles de Sid Enterprise ont été perquisitionnés, aucune des copies que Sid Enterprise possédait des documents Cheddi n'a été trouvée. Peu de temps avant la perquisition, Musadiq Pardhan avait découvert qu'il était surveillé136. Lorsque je les interprète à la lumière de l'ensemble de la preuve, ces faits importants m'amènent à conclure hors de tout doute raisonnable que Musadiq Pardhan a participé directement à l'exportation de produits Coca-Cola en violation de l'injonction du 8 janvier 1996.

j)      Rôle joué par Mustafa Pardhan au sein de Sid Enterprise

[134]          Il y a de nombreux éléments de preuve qui tendent à démontrer que Mustafa Pardhan était un des dirigeants d'Universal Exporters137.

[135]          Je conclus que Mustafa Pardhan a également participé aux activités de Sid Enterprise, du moins en ce qui concerne certains autres produits que ceux des demanderesses138. Dans le cadre de ses activités, Sid Enterprise vendait un grand nombre de produits alimentaires et de produits connexes en plus des boissons des demanderesses139.

[136]          Il y a d'autres indices qui permettent de conclure à une participation générale de Mustafa Pardhan aux activités de Sid Enterprise. Son beau-père était l'administrateur et l'un des dirigeants de 1184268 Ontario Limited. Son épouse signait les chèques de Sid Enterprise. Les activités de son fils Musadiq et de sa bru Shahina Khoja ont déjà été examinées. Son nom figure sur les factures de Lansing Buildall et il a été vu au moins une fois en compagnie de son fils Musadiq en train d'acheter des matériaux d'emballage140.

[137]          Je vais maintenant examiner les éléments de preuve précis invoqués par les demanderesses pour faire la preuve de la participation de Mustafa Pardhan à l'exportation de produits Coca-Cola en violation de l'injonction du 8 janvier 1996.

[138]          Mustafa Pardhan a été vu par les détectives des demanderesses à deux reprises dans les locaux de l'avenue Steeles de Sid Enterprise. Le 30 mai 1997, il a été observé en train de quitter les lieux en compagnie de son fils Musadiq. Les deux Pardhan ont ensuite été suivis jusqu'au Club Price, où les détectives ont, quatre jours plus tard, retracé des produits Coca-Cola transportés à l'entrepôt d'Oscar Cheddi en vue de leur exportation subséquente141. Le 5 juin 1997, Mustafa Pardhan a été observé dans les locaux de l'avenue Steeles où il est demeuré moins de trente minutes142.

[139]          Oscar Cheddi a vu à l'occasion Mustafa Pardhan dans les locaux de Sid Enterprise. Il a reconnu avoir reçu des instructions de Musadiq Pardhan et de Mustafa Pardhan au sujet du chargement de tasses en mousse, d'eau en bouteille et de produits du café143.

[140]          Mustafa Pardhan était toutefois absent du Canada pendant au moins une partie de décembre 1996 et il se trouvait de nouveau à l'étranger à la fin du printemps et à l'été 1997. Les deux fois, indépendamment des autres buts de ses voyages, il a effectué des opérations relativement à d'autres produits que les boissons des demanderesses. Il aurait également eu des problèmes avec son coeur au cours de cette période144.

[141]          Le 8 juillet 1997, Musadiq Pardhan a informé Mustafa Pardhan au sujet de la vente par Sid Enterprise de " jus " et de " gommes à mâcher "145. Le 11 juillet 1997, Musadiq Pardhan a informé son père du coût pour Sid Enterprise d'une série de rasoirs146. Les deux lettres ont été envoyées à Mustafa Pardhan alors qu'il se trouvait à l'étranger.

[142]          Le 11 juillet 1997, Musadiq Pardhan a également informé son père par télécopieur de l'envoi de sept conteneurs à John Chen de Bay Harbour Trading Corp.147. Cette télécopie de deux pages porte sur diverses questions d'affaires et diverses questions personnelles. La partie la plus pertinente de la lettre mentionne à la fois l'envoi de conteneurs maritimes et la vente éventuelle de jus et de boissons en cannettes à M. Chen. Il n'y a pas de mention expresse de produits Coca-Cola.

[143]          En rapprochant la lettre du 12 mai 1997 que Musadiq Pardhan a écrite à M. Chen et la lettre qu'il a adressée le 11 juillet 1997 à son père, j'en suis venu à la conclusion que Musadiq Pardhan a participé à la vente de produits Coca-Cola à Bay Harbour Trading Corp.

[144]          Les demanderesses soutiennent que la lettre du 11 juillet 1997 démontre que Mustafa Pardhan était également au courant que leurs produits étaient exportés en violation de l'injonction. À mon avis, je ne puis retenir cette hypothèse. Les envois faits à M. Chen comprenaient aussi d'autres cannettes que celles qui étaient fabriquées par les demanderesses. Cette lettre ne mentionne pas expressément de produits Coca-Cola. Ma conclusion que Musadiq Pardhan savait que les produits des demanderesses étaient expédiés à Hong-Kong ne saurait être imputée à son père, particulièrement dans une instance dans laquelle la charge de preuve régissant les matières criminelles s'applique.

[145]          Il ressort de l'ensemble de la preuve qui m'a été soumise que Mustafa Pardhan a continué son association d'affaires avec son fils Musadiq Pardhan après que le nom de l'entreprise a été changé pour celui de Sid Enterprise, du moins en ce qui concerne certains produits autres que ceux des demanderesses. Il a toutefois joué un rôle moins actif que celui de Musadiq Pardhan, mais plus actif que celui des autres membres de la famille, dont la participation était purement symbolique. Les éléments de preuve relatifs à la participation de Mustafa Pardhan à la vente de produits Coca-Cola à l'étranger et à sa connaissance de cette vente sont toutefois beaucoup moins solides.

[146]          Il n'y a pas de photographie de Mustafa Pardhan en compagnie de John Chen, ou de correspondance entre eux au sujet des chargements de produits Coca-Cola. La lettre de " Sid " en date du 12 mai 1997 a été écrite par Musadiq Pardhan et a été trouvée dans sa mallette, et non dans celle de son père. Oscar Cheddi n'a pas impliqué Mustafa Pardhan comme étant l'une des personnes de qui il recevait des enveloppes contenant des instructions. Rien ne permet de penser que Mustafa Pardhan a utilisé le nom de Sid Kassim. Il n'y a rien non plus qui permet de croire que Sid Enterprise a réglé des comptes de carte de crédit sous le nom de Mustafa Pardhan. Les chèques hebdomadaires de 350 $ que Sid Enterprise libellait à l'ordre de " M. Pardhan " visaient notamment une période au cours de laquelle Mustafa Pardhan n'était pas au Canada. Fait intéressant à signaler, Mustafa Pardhan ne se trouvait pas au Canada lorsque les locaux de l'avenue Steeles Avenue et le domicile de la famille Pardhan ont été perquisitionnés le 31 juillet 1999, date à laquelle on n'a pas réussi à retrouver les copies que Sid Enterprise possédait des documents Cheddi. Mustafa Pardhan ne pouvait donc pas s'être défait de ces documents et rien ne permet de penser qu'il a donné des instructions pour qu'on s'en départisse.

k)      Résumé des conclusions de fait concernant Mustafa Pardhan

[147]          Mustafa Pardhan a été constitué défendeur le jour même où l'injonction a été prononcée. Rien ne permet de conclure qu'il a reçu signification de l'avis de requête en injonction. Rien ne permet non plus de penser qu'il a reçu signification de l'ordonnance interlocutoire. Il était bien sûr absent du Canada le 8 janvier 1996148.

[148]          Il existe des éléments de preuve convaincants au sujet de la participation de Musadiq Pardhan aux activités générales de Sid Enterprise au début de 1996 (supra, paragraphe 80 à 86). Il y a également l'aveu qu'il a fait en mars 1996 au sujet de sa connaissance de l'injonction. Il n'existe pas de preuve aussi directe en ce qui concerne Mustafa Pardhan. L'avocat des demanderesses a reconnu que les éléments de preuve relatifs à la connaissance que Mustafa Pardhan avait de l'injonction étaient [TRADUCTION] " plus indirects "149. Il m'est impossible de conclure hors de tout doute raisonnablement, sur le simple fondement de la participation active de son fils et de la participation symbolique des autres membres de sa famille, que Mustafa Pardhan était au courant de l'injonction en 1996.

[149]          Il m'est cependant loisible d'inférer qu'il était au courant de l'injonction en février et en mars 1997, sur la foi des observations que son avocat a formulées devant la Cour à ce moment-là150. Cette inférence nous oblige elle aussi à présumer que les deux Pardhan ont donné des directives à leur avocat au sujet de l'injonction prononcée le 8 janvier 1996.

[150]          L'avocat des demanderesses a reconnu que les éléments de preuve relatifs au refus de Mustafa Pardhan de respecter l'injonction sont moins convaincants que ceux concernant Musadiq Pardhan. Bien que cette question de fait n'ait été soulevée par aucune des deux parties, les éléments de preuve directs permettent de conclure que l"épouse de Musadiq Pardhan a joué un rôle plus actif que celui de Mustafa Pardhan en ce qui concerne la vente de produits Coca-Cola.

[151]          L'avocat des demanderesses soutient toutefois énergiquement qu'il n'existe pas au sein de 1184268 Ontario Limited de division distincte qui permettrait d'établir une distinction entre ses ventes de boissons Coca-Cola et ses ventes d'autres produits. Il en infère que la participation aux activités de Sid Enterprise équivaut à une participation à la vente des produits des demanderesses. Je ne suis pas de son avis. En matière pénale, la norme de preuve applicable exige que la preuve démontre à l'évidence la participation de Sid Enterprise aux activités reprochées. À cet égard, les éléments de preuve concernant Mustafa Pardhan sont [TRADUCTION] " des éléments de preuve subjectifs "151.

[152]          J'estime que l'absence de division au sein de Sid Enterprise ne permet pas à la Cour d'imputer les agissements de Musadiq Pardhan à Mustafa Pardhan.

[153]          Le reproche le plus sévère que l'on puisse adresser à Mustafa Pardhan est, pour reprendre le libellé du paragraphe 2 de l'ordonnance de justification et de l'alinéa 466b) des Règles, d'avoir aidé " d'autres personnes à se livrer à des activités de transbordement qui contreviennent aux modalités de l'injonction ", en violation des modalités de l'injonction. Or, je ne suis pas convaincu que la preuve démontre hors de tout doute raisonnable que Mustafa Pardhan a aidé d'autres personnes à se livrer aux activités reprochées. Les demanderesses n'ont pas démontré que Mustafa Pardhan devrait être reconnu coupable de l'outrage au tribunal prévu au sous-alinéa 2a) (iv) de l'ordonnance de justification.

[154]          Toutefois, si j'ai bien compris les observations des demanderesses, les " éléments de preuve subjectifs " permettent au tribunal de conclure à l'outrage en vertu du paragraphe 4 de l'ordonnance de justification, qui dispose152 :

     4.      ENJOINT aux défendeurs Musadiq Pardhan, Mustafa Pardhan et 1184268 Ontario Limited, faisant affaire sous la raison sociale de 3-M International Freight Forwarders et Sid Enterprise à comparaître devant la Cour fédérale du Canada [...] pour expliquer les raisons pour lesquelles ils ne devaient pas être reconnus coupables d'outrage au tribunal pour avoir agi de manière à nuire à la bonne administration de la justice ou à porter atteinte à l'autorité ou à la dignité de la Cour en se livrant aux actes énoncés aux paragraphes 2 et 3, le tout subrepticement et clandestinement. [Non souligné dans l'original.]

[155]          Dans l'arrêt Valmet Oy c. Beloit Canada Ltd.153, le juge Pratte a comparé le libellé que l'on trouve maintenant aux alinéas 466b) et c) des Règles :

     La seule personne qui puisse désobéir à une ordonnance d'un tribunal est la partie que vise cette ordonnance. Toutefois, un tiers qui s'est sciemment fait le complice d'une partie pour désobéir à une injonction peut être déclaré coupable d'outrage, non pas parce qu'il a violé l'injonction, mais plutôt parce qu'il a agi de manière à entraver le cours de la justice154.

Ces propos permettent de penser que l'alinéa 466c) est susceptible de s'appliquer plus souvent à des tiers qui ne sont pas nommément désignés dans l'injonction. Toutefois, pour pouvoir évaluer la thèse défendue par les demanderesses en l'espèce, je suis disposé à présumer que Mustafa Pardhan pourrait à bon droit être accusé d'outrage au tribunal en vertu des alinéas 466b) et 466c) des Règles.

[156]          Le texte du paragraphe 4 de l'ordonnance de justification se veut une reprise du libellé de l'alinéa 466c) des Règles. Toutefois, les mots " en se livrant aux actes énoncés aux " paragraphes antérieurs de l'ordonnance de justification m'amènent nécessairement à la même conclusion. Si la preuve est insuffisante pour répondre aux exigences du paragraphe 2 de l'ordonnance de justification, les demanderesses ne peuvent être en meilleure position en invoquant le paragraphe 4155.

[157]          Dans l'arrêt Valmet156, la Cour d'appel a fait une analogie entre les rapports qui existent entre, d'une part, une société-mère et sa filiale et, d'autre part un père et son fils :

     Un père peut avoir beaucoup d'influence sur ses enfants ; néanmoins, un père qui fait l'objet d'une injonction ne viole pas cette injonction pour l'unique raison que son fils ou sa fille a fait quelque chose qu'il a reçu l'ordre de ne pas faire, à moins que, bien entendu, on puisse rapporter la preuve que le père a effectivement influé sur le comportement de son enfant157.

     [...]

     Je ne pense pas non plus que le juge de première instance ait eu raison de considérer qu'une partie qui a reçu l'ordre de ne pas faire un acte est tenue à autre chose que de ne pas faire ce qu'il lui est interdit de faire elle-même ou par l'entremise de ses mandataires, préposés ou d'autres personnes qu'elle incite à faire l'acte à sa place ou pour ses fins ; à mon avis, la partie qui a reçu l'ordre de ne pas faire n'est nullement tenue de faire davantage ; plus précisément, elle n'est pas tenue de faire usage de tous les pouvoirs et de l'influence dont elle dispose pour empêcher d'autres personnes d'accomplir l'acte prohibé pour leurs propres fins et dans leur propre intérêt158. [Non souligné dans l'original.]

Bien que les faits de l'affaire Valmet soient différents de ceux de la présente espèce, la preuve ne permet pas de conclure que Mustafa Pardhan a influencé la conduite de Musadiq Pardhan. Mustafa Pardhan n'était pas tenu d'empêcher son fils de désobéir à l'injonction.

[158]          Au vu du dossier qui m'a été soumis, outre les éléments de preuve concernant le rôle que Mustafa Pardhan a joué en ce qui concerne certains produits autres que le Coca-Cola, il y a lieu de signaler l'existence d'éléments de preuve portant sur la présence de Mustafa Pardhan dans le parc de stationnement du Club Price le 30 mai 1997, sa présumée réception de la lettre rédigée par Musadiq Pardhan le 11 juillet 1997 et la participation symbolique des autres membres de sa famille. Après examen de la preuve, j'ai un doute raisonnable quant à sa participation à la vente de produits Coca-Cola en violation des modalités de l'injonction et des dispositions de l'ordonnance de justification. Même si j'accepte qu'un des buts de la constitution en personne morale de 1184268 Ontario Limited était de dissimuler la poursuite de l'exportation de produits Coca-Cola, je conclus que la preuve ne démontre pas hors de tout doute raisonnable que Mustafa Pardhan s'est livré à l'exportation de produits Coca-Cola en violation de l'injonction du 8 janvier 1996 et des modalités de l'ordonnance de justification du 29 juillet 1997.

DISPOSITIF

[159]          Je conclus donc, sur le fondement de la preuve administrée à l'audience tenue en conformité avec l'ordonnance de justification du 27 juillet 1997, que Musadiq Pardhan est coupable d'avoir désobéi à l'ordonnance interlocutoire prononcée par le juge MacKay le 8 janvier 1996, conformément aux allégations contenues au paragraphe 2 de l'ordonnance de justification.

[160]          Vu la preuve administrée lors de cette même audience, je conclus que Mustafa Pardhan n'est pas coupable de l'outrage au tribunal dont il était accusé aux paragraphes 2 et 4 de l'ordonnance de justification en date du 27 juillet 1997.

[161]          Le greffe communiquera avec les avocats pour fixer la date, le lieu et l'heure de l'audience au cours de laquelle les avocats formuleront leurs observations au sujet des peines et des dépens.





     " Allan Lutfy "

     J.C.F.C.

Ottawa (Ontario)

Le 16 novembre 1999.


Traduction certifiée conforme


Martine Guay, LL.L.

     COUR FÉDÉRALE DU CANADA

     SECTION DE PREMIÈRE INSTANCE

     AVOCATS ET PROCUREURS INSCRITS AU DOSSIER



No DU GREFFE :              T-2685-95

INTITULÉ DE LA CAUSE :      COCA-COLA LTD. et autre c. MUSADIQ PURDHAN et autres

LIEU DE L'AUDIENCE :          Toronto (Ontario)

DATE DE L'AUDIENCE :      les 28, 29 et 30 avril 1999


MOTIFS DE L'ORDONNANCE prononcés par le juge Lutfy le 16 novembre 1999



ONT COMPARU :

Mes Christopher J. Pibus, James Buchan          pour les demanderesses

et Mark Galvin

Me David Seed                      pour les défendeurs

PROCUREURS INSCRITS AU DOSSIER :

Gowling, Strathy & Henderson              pour les demanderesses

Toronto (Ontario)

Muir, Seed & Short                      pour les défendeurs

Burlington (Ontario)

__________________

1      L.R.C. (1985), ch. T-13.

2      Transcription, aux pages 219 et 316.

3      C.R.C. 1978, ch. 663.

4      Coca-Cola Ltd. c. Pardhan, (1997), 77 C.P.R (3d) 501 (C.F. 1re inst.), conf. à (1999), 85C.P.R. (3d) 489 (C.A.F.), demande d'autorisation de pourvoi à la Cour suprême du Canada déposée le 9 juillet 1999, dossier no 27392.

5      Coca-Cola Ltd. c. Pardhan, (1998), 81 C.P.R. (3d) 244 (C.F. 1re inst.), conf. à (1999), 85 C.P.R. (3d) 501 (C.A.F.).

6      Supra note 4 (C.A.F.).

7      Supra note 5 (C.A.F.).

8      Dans l'arrêt Canada (Commission des droits de la personne) c. Taylor, [1990] 3 R.C.S. 892, aux pages 974 et 975, le juge McLachlin a fait remarquer : " Pour les fins des procédures pour outrage au tribunal, l'ordonnance doit être considérée comme valide jusqu'à son annulation par les voies de justice. Par conséquent, l'invalidité éventuelle de l'ordonnance ne constitue pas un moyen de défense opposable à la déclaration de culpabilité d'outrage au tribunal. " Voir également l'arrêt Canada (Commission des droits de la personne) c. Canadian Liberty Net, [1998] 1 R.C.S. 626, à la page 670.

9      Pièce P-1, onglet 4, à la page 2.

10      [1983] 2 R.C.S. 388.

11      [1988] 2 C.F. 265 (1re inst.).

12      Supra, note 8, à la page 942, le juge en chef Dickson.

13      [1987] 3 C.F. 593 (C.A.), à la page 601. Le juge Mahoney avait lui-même retenu le raisonnement suivi par le juge O"Leary dans le jugement Canada Metal Co. c. Canadian Broadcasting Corp. et al. (No. 2), (1974), 4 O.R. (2d) 585 (H.C.), à la page 613, conf. à (1975), 11 O.R. (2d) 167 (C.A.).

14      Ibid., à la page 601.

15      [1990] 2 R.C.S. 217, à la page 226.

16      Supra, note 11, aux pages 273 à 275.

17      Ibid., à la page 275.

18      Pièce P-1, onglet 3, à la page 39.

19      Pièce P-1, onglet 3, aux pages 39 et 41.

20      Transcription, aux pages 233 et 234. Ce témoignage n'a pas été réfuté. Je tiens toutefois compte des propos tenus par le juge Sopinka dans l'arrêt R. c. Evans, [1993] 3 R.C.S. 653, en particulier aux paragraphes 24, 32 et 34, et je reviendrai sur ce témoignage dans le contexte des autres événements qui se sont produits au début de 1996 (voir également John Sopinka, Sidney N. Lederman & Alan W. Bryant, The Law of Evidence in Canada (Toronto et Vancouver, Butterworths, 1999) aux pages 286 à 290.

21      Coca-Cola Ltd. c. Pardhan, (1997), 75 C.P.R. (3d) 318 (C.F. 1re inst.), à la page 321.

22      Transcription, aux pages 1155 à 1159, particulièrement aux pages 1158 et 1159 et 1172 et 1173. Voir également la pièce D-1 (documents 00524, 00525, 00527, 00530 et 00549). Les documents font également état de transbordements de [TRADUCTION] " boissons gazeuses en cannettes " à Hong-Kong (pièce D-1 (documents 00544-48 et 00550-51)). Voir également les pièces D-2 et D-3.

23      Pièce P-2 (par exemple, les documents 00519 et 00528), pièces P-3, P-16 et P-38 (onglet 1, document 00588 et onglet 2, documents 005843 et 005845). Voir également la transcription, page 219, lignes 7 à 19).

24      Pièce P-16.

25      Pièces P-27, P-28, P-29 et P-30 (particulièrement le document 01553) et transcription, pages 1158 et 1159, 1164, 1180 et 1185.

26      Transcription, aux pages 1184 et 1185.

27      Transcription, aux pages 1090 et 1091. Voir aussi la pièces P-26, onglet 1.

28      Transcription, aux pages 1172 et 1173.

29      Transcription du témoignage de M. Abramowitz recueilli dans le cadre d'une commission rogatoire (la déposition d'Abramowitz), aux pages 12 à 14 et 20 et 21. Voir également la pièce P-38, onglet 2.

30      Déposition d'Abramowitz, aux pages 13 et 51.

31      Transcription, à la page 1187.

32      Pièce P-5.

33      Voir les annexes D-9 et P-14, document 100133 et pièce P-40, onglets K et L. Voir aussi le témoignage des deux enquêteurs.

34      Pièce P-5 et transcription, à la page 253.

35      Ibid.

36      Pièce P-9 (dernière page) et pièce P-15. À la pièce P-5, le nom de M. Kermali est également orthographié " Kermall ". À la pièce P-15, le père de Fatima Pardhan écrit " Kermali ". Je constate qu'il s'agit de la même personne dont le nom est orthographié Akberali Fazal Kermali.

37      Voir les précisions données par l'avocat à ce sujet, transcription, aux pages 1550 et 1551.

38      Pièce P-3.

39      Pièce P-4 et transcription, aux pages 247 et 248.

40      Transcription, à la page 248, ligne 16 à la page 249, ligne 3. La pièce P-4 ne semble pas confirmer que M. Kermali a signé comme caution.

41      Transcription, aux pages 1201 à 1204.

42      Pièce P-19, document 200026 (talon de chèque no 112), document 200028 (talon de chèque no 122), document 200032 (talon de chèque no 148) et documents 200056 et 200057 (sur lesquels figure le numéro de compte bancaire 8111618 sur une enveloppe de la CIBC trouvée dans les locaux de l'avenue Steeles).

43      Pièce P-19, document 200057 et transcription, aux pages 339, 347, 379, 388, 492 et 683.

44      Transcription, aux pages 1207, 1383 et 1386.

45      Pièce P-19, documents 200064-65.

46      Pièce P-25. Voir également la pièce P-20. On trouve également la signature de M. Pardhan à la pièce P-11 (dernière page), à la pièce P-14, document 100070, à la pièce P-16, à la pièce D-1, documents 00528-29 et 00544-48, et à la pièce D-2, documents 00216 et 00224-28.

47      Pièce P-25, à la page 5, paragraphe 9.

48      Pièce P-40, paragraphes 10 et 14, et onglet E, troisième page.

49      Pièce P-25, à la page 4, paragraphe 8.

50      L'avocat des défendeurs a reconnu que le défendeur Musadiq Pardhan était connu sous divers noms : " M. Gulamhusein ", " Mushi Gulamhusein ", " Musadiq Pardhan ". M. Pardhan utilisait ces noms de façon interchangeable (transcription, aux pages 441 à 444).

51      Transcription, aux pages 1112 et 1135.

52      Transcription, aux pages 1247 à 1251.

53      Transcription, aux pages 1104, 1113 et 1114.

54      Pièce P-26, onglets 5 et 7. Voir également la pièce P-14 (documents 100145 à 100166).

55      Pièce P-14, documents 100145 à 100166 et pièce P-26, onglets 3, 4 et 5.

56      Pièce P-14, document 100150 et pièce P-19, documents 200027 et 200056-57. Cette dépense de 772,33 $ de Lansing Buildall est également inscrite sur le document 200004 qui a été extrait de l'ordinateur à l'établissement de l'avenue Steeles (transcription, à la page 483).

57          Voir notamment les pièces P-22, P-31 et P-32.

58      Transcription, aux pages 1329 et 1330.

59      Pièce P-22. Certains documents extraits de la pièce P-22 sont reproduits à la pièce P-31.     

60      Pièce P-32.

61      Les dix-sept mentions du Club Price contenues à la pièce P-32 renvoient en fait aux 21 envois mentionnés dans les documents Cheddi (pièce P-22).

62      Transcription du plaidoyer fait le 29 avril 1999, aux pages 134 et 135.

63      Les 21 chargements en question comprennent : a) les douze envois mentionnés aux onglets 1, 2, 3, 13, 14, 17, 18, 19, 22, 23, 24 et 29 de la pièce P-22 ; b) les neuf envois portant respectivement les numéros de document 300374 à 300378, 300327 à 300332, 300134 à 300139, 300000 à 300004, 300005 à 300009, 300580 à 300585, 300574 à 300579, 300540 à 300545 et 300463 à 300469 à la pièce P-22.

64      Pièce P-22, onglets 6, 7 et 8.

65      Pièce P-14, document 100002. Cette lettre a été trouvée dans la mallette de Musadiq Pardhan, infra , paragraphe 108.

66      Transcription, aux pages 1270 et 1271.

67      Transcription, à la page 1342.

68      Pièce P-21, un affidavit signé par M. Cheddi le jour où il a remis les documents Cheddi à l'avocat des demanderesses.

69      Transcription, aux pages 1268 à 1272.

70      Transcription, à la page 1272. M. Cheddi semble avoir limité les envois qui comprenaient des produits Coca-Cola à ceux qui sont documentés aux onglets 1, 2, 3 et 15 à 36 de la pièce P-22.

71      Il ressort des renseignements fournis par le Club Price, supra paragraphe 65 et note 63, que les douze chargements dont il est question aux onglets 1, 2, 3, 13, 14, 17, 18, 19, 22, 23, 24 et 29 de la pièce P-22 comprenaient des produits Coca-Cola. M. Cheddi a témoigné que 25 des chargements dont il est question aux onglets 1, 2, 3 et 15 à 36 de la pièce P-22 comprenaient des produits Coca-Cola. Il y a un chevauchement de dix envois parmi ceux qui, aux dires du Club Price et de M. Cheddi, comprenaient des produits Coca-Cola. J'en conclus que M. Cheddi a présenté des éléments de preuve au sujet de quinze autres chargements contenant des produits Coca-Cola dont le représentant du Club Price n'avait pas parlé auparavant.

72      Déposition d'Abramowitz, aux pages 13, 14 et 51, ll. 7 à 19.

73      Pièce P-19, documents 200052 à 200055. Voir aussi infra , section suivante des présents motifs.

74      Au sujet de l'achat par Universal Exporters de cannettes de boissons de Knob Hill Farms, voir la pièce D-4, document 005940, transcription, aux pages 665 et 666 et la pièce D-5, document 005842, transcription, à la page 670. En août 1995, Universal Exporters a acheté à trois reprises des produits Coca-Cola au Club Price : pièce P-30 (six premières pages). On trouve des preuves documentaires d'au moins un achat de produits Coca-Cola par Sid Enterprise à Knob Hill Farms à la pièce P-22, onglet 26, document 300312. M. Cheddi a confirmé que Sid Entreprise s'était procuré des produits Coca-Cola auprès de Knob Hill Farms et du Club Price en 1996 et en 1997, transcription, aux pages 1505 à 1510.

75      Transcription, aux pages 470 et 471.

76      Voir notamment la pièce P-14, document 100187, et la pièce D-1, document 000524,qui sont des factures informatisées de Sid Enterprise et d'Universal Exporters dont la présentation et les caractères semblent identiques.

77      Pièce P-19, documents 200066 et 200068.

78      Pièce P-19, documents 200052 à 200055.

79      Pièce P-36.

80      Pièce P-14, documents 100085, 100087, 100102 et 100104.

81      Pièce P-20 et pièce P-25 sous l'onglet E.

82      Pièce D-9 et déposition d'Abramowitz, à la page 113.

83      Pièce P-25, affidavit de M. Michael Bimm, aux paragraphes 6 et 7.

84      Pièce P-14, document 100150 et pièce P-19, documents 200027 et 200056 et 200057, au sujet du compte bancaire Sid Enterprise no 8111618 à la Banque Canadienne Impériale de Commerce.

85      Par exemple, voir la pièce P-14, documents 100188, 100189, 100191 et 100195 et la pièce P-19, document 200009.

86      Par exemple, voir la pièce P-14, documents 100120 à 100123.

87      Pièce P-18.

88      Pièce P-40, paragraphe 11 et onglet B.

89      Déposition d'Abramowitz, à la page 121. L'avocat des défendeurs ont semblé reconnaître cette appréciation de la preuve (transcription des plaidoyers entendus le 29 avril 1999, aux pages 178 et 179).

90      Pièce P-9, les neuvième, dizième et onzième pages. Ces documents ont été trouvés le 9 mai 1997 dans les ordures, à l'extérieur du domicile des Pardhan, au 111, rue Knightswood.

91      Pièce P-14, document 100006 et transcription, à la page 363. Les numéros de conteneurs mentionnés dans cette télécopie se rapportent aux chargements mentionnés aux onglets 10 et 11 de la pièce P-22.

92      Pièce P-14, document 100063 et pièce P-12. Voir également la transcription, aux pages 246, 247 et 317. Ces documents ont aussi été trouvés au domicile des Pardhan, au 111, rue Knightswood.

93      Pièce P-19, document 200006 et transcription, à la page 496.

94      Voir, par exemple, pièce D-2.

95      Pièce D-6, aux sizième et dix-septième pages.

96      Pièce D-6, aux cinquième et sixième pages.

97      Transcription, aux pages 1020 et 1021.

98      Transcription, aux pages 1215 à 1218.

99      Supra, paragraphe 48.

100      Transcription, aux pages 1233 à 1236.

101      Transcription, à la page 1251.

102      Transcription, aux pages 1255 et 1256. À d'autres moment, M. Cheddi s'est montré hésitant et souvent évasif dans ses réponses. Voir, par exemple, la transcription, aux pages 1199 à 1204 (supra , paragraphe 45), page 1217, ll. 14 à 20, page 1251 et page 1255.

103      Transcription, à la page 1304.

104      Transcription, à la page 1335.

105      Déposition d'Abramowitz, à la page 14.

106      Déposition d'Abramowitz, aux pages 25 et 26 et pièce P-38, onglet 4 et pages 55 et 56 et pièce P-38, onglet 5 et pièce P-39.

107      Déposition d'Abramowitz, aux pages 28 à 32, particulièrement à la page 32, l. 4.

108      Déposition d'Abramowitz, aux pages 22 et 49 et 50 en ce qui concerne Sid Kassim et aux pages 21 et 48, en ce qui concerne les Pardhan.

109      Transcription du plaidoyer du 29 avril 1999, aux pages 177 et 178.

110      Pièce P-18 et supra , au paragraphe 87.

111      Une reproduction couleur de cette photographie se trouve à la pièce P-14, document100131a) au sujet de l'identité des intéressés (voir la transcription, aux pages 410 et 411). Des éléments de preuve concernent l'identité de ces personnes ont été répétés lorsque l'avocat des défendeurs s'est opposé (voir la transcription, aux pages 450 à 455). Avec l'accord des parties, l'objection a été laissée en suspens. Par la suite, lors de son contre-interrogatoire, le témoin des demanderesses a réitéré l'identité des personnes figurant sur la photo en affirmant qu'il s'agissait de Musadiq Pardhan et de John Chen (voir la transcription, aux pages 750-51). Dans ces conditions, j'accepte que les personnes figurant sur la photo sont celles qui ont été identifiées par le témoin, de sorte que l'objection soulevée par l'avocat des défendeurs devient sans objet compte tenu de son contre-interrogatoire subséquent.

112      Transcription, aux pages 750 et 751.

113      Pièce P-14, document 100002. (" Sid " a également écrit à M. Chen le 15 juillet 1997, pièce P-14, document 100192.)

114      Transcription, aux pages 350 et 351.

115      Pièce P-14, documents 100183-84.

116      Pièce P-22, onglets 6, 7, 8, 13 et 14 et documents 300540-545. Voir supra , notes 63 et 65.

117      Témoignage de deux enquêteurs et pièces D-19 et D-20. Voir également la pièce P-22, onglets 1 et 2.

118      Transcription, aux pages 1238 à 1241.

119      Transcription, aux pages 1304 et 1305.

120      Pièce P-40, paragraphes 7 et 11.

121      Pièce P-32, paragraphe 6 et onglet D.

122      Pièce P-19, documents 200025-28, 200032, 200056-57.

123      Pièce P-40, paragraphe 26.

124      Pièce D-13.

125      Pièces D-10, D-11 et D-12.

126      Pièce P-19, document 200141.

127      Exhibit D-9.

128      Transcription, aux pages 1207, 1242, 1243, 1383, 1386, 1387, 1391 et 1392.

129      Déposition d'Abramowitz, à la page 80.

130      Déposition d'Abramowitz, à la page 128.

131      Déposition d'Abramowitz, aux pages 111 à 113.

132      Déposition d'Abramowitz, aux pages 50 et 80.

133      Pièce D-14.

134      Pièce P-22, document 300594 et transcription du 29 avril 1999, aux pages 54 à 56.

135      Ici, je fais miens les propos tenus dans les décisions Bhatnager et Apple Computer, supra paragraphes 21 et 22. Le dossier de la Cour révèle que le projet d'avis de requête a été déposé le 27 mars 1997. Dans le jugement Apple Computer, supra, note 11, à la page 288, le juge Strayer a déclaré : " Je suis convaincu que le mot "dossier" relativement à une requête en justification comprend les éléments du dossier qui se rapportent aux questions dont la Cour est saisie ". Cela est particulièrement vrai dans le cas de renseignements non litigieux de nature publique.

136      Pièce P-13, en particulier les paragraphes 27, 28 et 55 et pièce P-19, document 200152. Transcription, à la page 343, ll. 22 à 25, pages 536 et 537 et pages 1011 à 1015.

137      Supra, note 22. Voir aussi les pièces P-16 et P-28.

138      Déposition d'Abramowitz, aux pages 48, 49, 51 et 130. Par exemple, voir la pièce P-14, document 100195 et la pièce exhibit P-19, document 200009. Voir aussi la transcription, aux pages 1367, 1368 et 1406.

139      Pièces D-15, D-23 et D-24.

140      Transcription, à la page 1098.

141      Pièce D-20, page 8 et témoignage des détectives des demanderesses.

142      Transcription, à la page 987.

143      Transcription, aux pages 1304 et 1367 et 1368.

144      Pièce P-14, documents 100183 et 100195, pièce P-19, document 200009 et déposition d'Abramowitz, aux pages 80 et 121.

145      Pièce P-14, document 100121.

146      Pièce P-14, document 100195.

147      Pièce P-14, documents 100183 et 100184.

148      Pièce P-1, onglet 3, page 42, ll. 21 à 24. Le dossier de la requête soumis à l'appui de la requête en injonction interlocutoire a été soumis au tribunal lors de l'audience du 8 janvier 1996 (pièce P-1, onglet 3, à la page 8, ll. 17 et 18).

149      Transcription des observations présentées verbalement le 28 avril 1999, à la page 23.

150      Supra, note 134.

151      Transcription des observations présentées oralement le 28 avril 1999, aux pages 116 à 129.

152      Ibid., particulièrement aux pages 128 et 129.

153      (1988), 20 C.P.R. (3d) 1 (C.A.F.).

154      Ibid. , à la page 11. Voir également la décision Marengo v. Daily Sketch and Sunday Graphic Ltd., (1948), 65 R.P.C. 242, à la page 253, ll. 3 à 15.

155      R. c. Côté, [1987] 1 R.C.S. 8, R. c. Saunders, [1990] 1 R.C.S. 1020 et Titan Linkabit Corp. c. S.E.E. See Electronic Engineering Inc. (1993), 62 F.T.R. 241.

156      Supra, note 153.

157      Ibid., à la page 16, le juge Pratte.

158      Ibid., à la page 18, le juge Marceau.

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