Date : 20040910
Dossier : IMM-6185-03
Référence : 2004 CF 1233
ENTRE :
MONICA ARRIVASPLATA HUAYTA
MELANIE MILAGRO PALACIOS ARRIVASPLATA
Demanderesses
- et -
LE MINISTRE DE LA CITOYENNETÉ
ET DE L'IMMIGRATION
Défendeur
MOTIFS DE L'ORDONNANCE
LE JUGE PINARD
[1] Il s'agit d'une demande de contrôle judiciaire d'une décision de la Section de la protection des réfugiés de la Commission de l'immigration et du statut de réfugié(la CISR) rendue le 15 juillet 2003, statuant que la demanderesse et sa fille ne sont ni des « réfugiées » au sens de la Convention, ni des « personnes à protéger » selon les définitions données aux articles 96 et 97 respectivement de la Loi sur l'immigration et la protection des réfugiés, L.C. 2001, ch. 27.
[2] Monica Arrivasplata Huayta (la demanderesse) agit aussi comme la représentante désignée de sa fille Melanie Milagro Palacios Arrivasplata. Toutes deux sont citoyennes du Pérou. La demanderesse allègue avoir une crainte bien fondée de persécution aux mains de l'armée péruvienne en raison d'opinions politiques imputées et, en ce qui concerne sa fille, en raison de son appartenance au groupe social de la famille. La demanderesse allègue aussi être une personne à protéger, tout comme sa fille.
[3] La CISR a conclu que la demanderesse et sa fille ne sont ni des « réfugiées » au sens de la Convention, ni des « personnes à protéger » parce que la demanderesse n'était pas crédible en raison d'incohérences, d'invraisemblances, d'ajouts et de contradictions.
[4] Il est bien établi qu'en matière de crédibilité, il n'appartient pas à cette Cour de se substituer à la CISR lorsque, comme dans le présent cas, la partie demanderesse ne parvient pas à démontrer que la décision de ce tribunal spécialisé est fondée sur une conclusion de fait erronée, tirée de façon abusive ou arbitraire ou sans tenir compte des éléments à sa disposition (alinéa 18.1(4)d) de la Loi sur la Cour fédérale, L.R.C. 1985, ch. F-7). En effet, après révision de la preuve et des notes sténographiques de l'audience devant le tribunal, je suis satisfait que les inférences tirées par ce dernier pouvaient raisonnablement l'être (voir Aguebor c. Canada (M.E.I.), 160 N.R. 315 (C.A.F.)). De plus, dans l'arrêt Sheikh c. Canada (M.E.I.), [1990] 3 C.F. 238, la Cour d'appel fédérale a statué que la perception du tribunal qu'un demandeur n'est pas un témoin crédible peut mener à la conclusion qu'il n'existe aucun élément crédible sur lequel la demande pourrait se fonder.
[5] Par ailleurs, la demanderesse soumet que la CISR a enfreint les principes de justice naturelle en adoptant une attitude agressive envers elle, ce qui l'aurait empêchée de bien présenter ses arguments. Toutefois, une lecture attentive des notes sténographiques de l'audience révèle que le procureur de la demanderesse a pu adéquatement faire ses représentations sur le bien-fondé de la revendication et qu'aussi la demanderesse a eu l'opportunité de répondre aux questions posées par la CISR. Dans l'arrêt Committee for Justice and Liberty et al. c. L'Office national de l'énergie et al., [1978] 1 R.C.S. 369, la Cour suprême du Canada a développé le critère applicable en matière de crainte raisonnable de partialité à la page 394 :
. . . la crainte de partialité doit être raisonnable et le fait d'une personne sensée et raisonnable qui se poserait elle-même la question et prendrait les renseignements nécessaires à ce sujet. [. . .] ce critère consiste à se demander « à quelle conclusion en arriverait une personne bien renseignée qui étudierait la question en profondeur, de façon réaliste et pratique. Croirait-elle que, selon toute vraisemblance, [le décideur], consciemment ou non, ne rendra pas une décision juste? »
[6] De plus, dans l'arrêt Arthur c. Canada (Procureur général), [2001] A.C.F. no 1091 (QL), la Cour d'appel fédérale s'est prononcée ainsi :
[8] . . . Une allégation de partialité, surtout la partialité actuelle et non simplement appréhendée, portée à l'encontre d'un tribunal, est une allégation sérieuse. Elle met en doute l'intégrité du tribunal et des membres qui ont participé à la décision attaquée. Elle ne peut être faite à la légère. Elle ne peut reposer sur de simples soupçons, de pures conjectures, des insinuations ou encore de simples impressions d'un demandeur ou de son procureur. Elle doit être étayée par des preuves concrètes qui font ressortir un comportement dérogatoire à la norme.
[7] La demanderesse a aussi le devoir de faire connaître sa crainte de partialitéaussitôt que cela lui est possible. En l'espèce, elle n'a présenté aucune preuve qui fait ressortir un comportement dérogatoire à la norme de la part du Commissaire et elle n'a pas fait connaître sa crainte de partialité lors de l'audience. Je suis d'avis, dans les circonstances, que l'allégation de partialité est sans fondement.
[8] Pour toutes ces raisons, la demande de contrôle judiciaire est rejetée.
JUGE
OTTAWA (ONTARIO)
Le 10 septembre 2004
COUR FÉDÉRALE
AVOCATS INSCRITS AU DOSSIER
DOSSIER : IMM-6185-03
INTITULÉ : MONICA ARRIVASPLATA HUAYTA, MELANIE MILAGRO PALACIOS ARRIVASPLATA c. LE MINISTRE DE LA CITOYENNETÉET DE L'IMMIGRATION
LIEU DE L'AUDIENCE : Montréal (Québec)
DATE DE L'AUDIENCE : Le 10 août 2004
MOTIFS DE L'ORDONNANCE : Le juge Pinard
DATE DES MOTIFS : Le 10 septembre 2004
COMPARUTIONS :
Me Brigitte Poirier POUR LES DEMANDERESSES
Me Mario Blanchard POUR LE DÉFENDEUR
AVOCATS INSCRITS AU DOSSIER :
Brigitte Poirier POUR LES DEMANDERESSES
Montréal (Québec)
Morris Rosenberg POUR LE DÉFENDEUR
Sous-procureur général du Canada
Montréal (Québec)