Date : 20031001
Dossier : IMM-2622-02
Référence : 2003 CF 1134
ENTRE :
HE CHUN LEI
Demandeur
et
MINISTRE DE LA CITOYENNETÉ
ET DE L'IMMIGRATION
Défendeur
MOTIFS DE L'ORDONNANCE
LE JUGE TREMBLAY-LAMER:
[1] Il s'agit d'une demande de contrôle judiciaire à l'encontre d'une décision de l'agent des visas rendue le 7 mai 2002 refusant la demande de résidence permanente de He Chun Lei (le « demandeur » ).
[2] Le 26 mai 2000, le demandeur reçu son certificat de sélection du Québec lui indiquant qu'il avait été sélectionné à titre d'immigrant investisseur.
[3] Le 22 janvier 2002, le demandeur fut convoqué en entrevue car la documentation qu'il avait soumise n'était pas suffisante pour établir avec certitude que les fonds déclarés avaient été obtenus de façon licite.
[4] Le 18 mars 2002, le demandeur s'est présenté à son entrevue avec l'agent à l'ambassade du Canada à Beijing.
[5] Durant l'entrevue, le demandeur précisa qu'il avait démarré seul une première compagnie en 1990 dans laquelle il a dû investir 50 000 RMB. L'agent des visas lui a aussi demandé comment il avait pu investir 255 000,00 $US pour partir son entreprise en 1993. L'agent a trouvé que ces montants étaient très élevés compte tenu du salaire du demandeur durant les années précédentes: en 1990, il gagnait au plus 100 RMB par mois avec la possibilité d'un bonus de 300 à 500 RMB en moyenne.
[6] Le demandeur déclara qu'il avait accumulé ces sommes en utilisant ses économies, des prêts de ses amis et l'argent qu'il se faisait avec sa photographie. À la fin de l'entrevue l'agent lui demanda de fournir toute preuve additionnelle pour supporter ses déclarations dans les 30 jours suivant l'entrevue et l'avisa que sa demande pourrait être refusée s'il ne déposait pas d'information additionnelle.
[7] Le 7 mai 2002, l'agent rendait une décision négative relativement à la demande de résidence permanente du demandeur au motif que ce dernier ne l'avait pas convaincu que les sommes qu'il avait accumulées dérivaient de sources légitimes de sorte qu'il n'avait pu démontrer qu'il n'appartenait à aucune des catégories non admissibles décrites au paragraphe 19(1) de la Loi sur l'immigration, L.R.C. 1985, c. I-2 (la « Loi » ).
[8] La Cour d'appel fédérale dans l'affaire To c. Canada (M.E.I.), [1996] A.C.F. no 696 a confirmé que la norme de contrôle applicable à l'égard des décisions des agents des visas était celle élaborée dans l'affaire Maple Lodge Farms Limited c. Gouvernement du Canada et al., [1982] 2 R.C.S. 2 aux pp. 7-8. Le juge McIntyre énonce ce qui suit:
[...] Lorsque le pouvoir discrétionnaire accordé par la loi a été exercé de bonne foi et, si nécessaire, conformément aux principes de justice naturelle, si on ne s'est pas fondé sur des considérations inappropriées ou étrangères à l'objet de la loi, les cours ne devraient pas modifier la décision. [...]
[9] Le demandeur soumet essentiellement que l'agent a erré en concluant que le demandeur a été incapable de justifier de façon documentée la provenance de ses fonds.
[10] Le paragraphe 9(3) de la Loi indique clairement que l'agent a le droit d'exiger toute documentation nécessaire pour s'assurer que l'admission du demandeur au Canada ne contrevienne pas la Loi et ses règlements. L'agent n'était pas préoccupé par l'origine des avoirs accumulés au cours des dernières années mais plutôt par la manière dont il avait accumulé assez d'argent pour partir ses premières entreprises, lesquelles sont à la source de ses avoirs actuels. Celui-ci devait s'assurer que les sommes acquises ne provenaient pas d'activités illégales visées par l'article 19 de la Loi, tel la fraude ou le blanchissement d'argent.
[11] Lorsque questionné à l'entrevue le demandeur a répondu avoir utilisé ses économies, le prêt d'un ami et des recettes de photos qu'il avait prises pour les autres. Cependant, il n'a fourni aucune preuve documentaire à l'appui.
[12] Étant insatisfait des explications offertes, il était raisonnable pour l'agent d'exiger dans un délai raisonnable une preuve supplémentaire. On ne peut lui reprocher aucun déni de justice naturelle puisque le demandeur savait que l'agent avait des préoccupations relatives à l'accumulation de ses fonds avant 1993 et qu'un refus de fournir la documentation nécessaire impliquerait possiblement un refus de sa demande.
[13] Le demandeur n'ayant pas fourni cette documentation, il était raisonnable pour l'agent des visas de conclure que le demandeur n'avait démontré de façon satisfaisante la légalité de la provenance des fonds concernant le début de ces premières entreprises.
[14] Pour tous ces motifs, la demande de contrôle judiciaire est rejetée.
[15] La procureure du demandeur a demandé que la question suivante soit certifiée:
Est-ce-que l'agent des visas a l'obligation de connaître le contexte légal et culturel dans lequel il doit rendre une décision? Dans la négative, est-ce-que les présomptions soulevées par l'agent contre le demandeur sont comparables à l'exercice abusif de sa compétence?
[16] La procureure ne m'a pas convaincue que la question proposée est déterminante pour l'issue du litige. Il n'y aura donc aucune question à certifier.
« Danièle Tremblay-Lamer »
J.C.F.
COUR FÉDÉRALE DU CANADA
SECTION DE PREMIÈRE INSTANCE
AVOCATS INSCRITS AU DOSSIER
DOSSIER: IMM-2622-02
INTITULÉ: HE CHUN LEI
et
MINISTRE DE LA CITOYENNETÉ ET DE
L'IMMIGRATION
LIEU DE L'AUDIENCE: Montréal (Québec)
DATE DE L'AUDIENCE: Le 25 septembre 2003
MOTIFS DE L'ORDONNANCE
ET ORDONNANCE DE: L'honorable juge Danièle Tremblay-Lamer
DATE DES MOTIFS: Le 1 octobre 2003
COMPARUTIONS:
Me Sylvie Tardif pour le demandeur
Me Edith Savard pour le défendeur
AVOCATS INSCRITS AU DOSSIER:
Sylvie Tardif
1310, avenue Greene
Bureau 750
Westmount (Québec)
H3Z 2B2 pour le demandeur
M. Morris Rosenberg
Sous-procureur général du Canada
Ministère de la Justice
Bureau régional de Québec
Complexe Guy Favreau
200, boulevard René Lévesque ouest
Tour est, 5ième étage
Montréal (Québec)
H2Z 1X4 pour le défendeur