Date : 20200220
Dossier : IMM-4277-19
Référence : 2020 CF 276
Montréal (Québec), le 20 février 2020
En présence de monsieur le juge Pentney
ENTRE :
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OBED IDENS PETIT HOMME
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partie demanderesse
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et
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LE MINISTRE DE LA CITOYENNETÉ ET DE L'IMMIGRATION
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partie défenderesse
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JUGEMENT ET MOTIFS
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Le demandeur, Obed Petit Homme, sollicite le contrôle judiciaire de la décision de la Section d’appel des réfugiés [SAR] datée du 18 juin 2019 concluant qu’il devait être exclu de la protection du Canada en application de l’article 98 de la Loi sur l’immigration et la protection des réfugiés, LC 2001, c 21 [LIPR] et de l’article 1E de la Convention des Nations Unies relative au statut des réfugiés, 28 juillet 1951, 189 RTNU 137 [Convention].
[2]
Le demandeur est citoyen d’Haïti. Il a fui Haïti en juillet 2008, après avoir dénoncé aux autorités policières l’enlèvement et l’agression sexuelle dont sa fille de sept ans aurait été victime. Il affirme qu’après la dénonciation, il a commencé à recevoir des menaces.
[3]
Le demandeur s’est rendu en République dominicaine, et après trois ans, il a déménagé au Brésil. Il a témoigné qu’il craignait des menaces de mort qu’il avait reçues au Brésil suite à une perte d’emploi. Il a quitté le Brésil pour les États-Unis et est finalement entré au Canada en juillet 2017 pour y demander l’asile.
[4]
La Section de la protection des réfugiés [SPR] a rejeté la demande d’asile du demandeur parce qu’il détenait un statut de résident permanent au Brésil et que ce statut était toujours valide en date de l’audience devant la SPR. La SPR a conclu, compte tenu de la preuve soumise, que le demandeur avait quitté le Brésil le 11 septembre 2016, et l’audience avait eu lieu le 6 septembre 2018, c’est-à-dire à l’intérieur de la période de deux ans dans laquelle le statut de résident permanent au Brésil demeure valide suite à un départ du pays.
[5]
La SPR était aussi d’avis que le demandeur n’avait pas établi un risque de persécution advenant son retour au Brésil. Le demandeur n’avait pas mentionné les menaces au Brésil dans son formulaire d’asile, et il n’avait pas porté plainte à la police. La SPR a conclu que cela diminuait sa crédibilité.
[6]
La SAR a noté de la contradiction dans la preuve concernant la date de départ du demandeur du Brésil. Compte tenu du document émanant des autorités américaines indiquant que le demandeur y était arrivé le 12 septembre 2016, la SAR a conclu qu’il avait quitté le Brésil quelques semaines avant cette date. La SAR a conclu que la SPR avait erré et qu’au moment de l’audience devant la SPR, le demandeur ne détenait pas le statut de résident permanent au Brésil.
[7]
Ensuite, la SAR a procédé avec l’analyse des critères énoncés dans l’arrêt Canada (Citoyenneté et Immigration) c Zeng, 2010 CAF 118 [Zeng]. La SAR a confirmé la conclusion de la SPR voulant que l’omission de la mention des menaces au Brésil dans son formulaire d’asile mine sa crédibilité. Au surplus, la SAR a tiré une conclusion défavorable quant à la crédibilité du demandeur en ce qui concerne sa crainte en Haïti compte tenu des lacunes et des incohérences dans la preuve, et du fait qu’il est retourné en Haïti de décembre 2015 à février 2016 sans avoir été menacé. Considérant tous ces éléments et en appliquant les facteurs énoncés dans l’arrêt Zeng, la SAR a conclu que le demandeur devrait être exclu de la protection du Canada aux termes de l’article 98 de la LIPR, et de l’exclusion prévue dans l’article 1E de la Convention.
[8]
Le demandeur sollicite le contrôle judiciaire de cette décision, alléguant que la SAR a manqué à l’équité procédurale, et que la décision est déraisonnable.
[9]
La norme de contrôle qui s’applique à la révision du fond de la décision est celle de la décision raisonnable. Pour être raisonnable, une décision doit être fondée sur un raisonnement intrinsèquement cohérent et être justifiée à la lumière des contraintes juridiques et factuelles applicables : Canada (Ministre de la Citoyenneté et de l’Immigration) c Vavilov, 2019 CSC 65, au para 101 [Vavilov]; Société canadienne des postes c Syndicat des travailleurs et travailleuses des postes, 2019 CSC 67 aux paras 29-33 [Société canadiennes des postes]. Il incombe à la partie qui conteste la décision de convaincre la cour que « la lacune ou la déficience […] est suffisamment capitale ou importante pour rendre [la décision] déraisonnable »
. ( Société canadiennes des postes, au para 33, citant Vavilov, au para 100).
[10]
Le demandeur soutient que la décision est déraisonnable parce que la SAR n’a pas démontré une appréciation des faits en l’instance, en particulier le fait que les ravisseurs de sa fille sont toujours en Haïti, et que les menaces contre lui font partie de la situation générale en Haïti. Il prétend que la SAR n’a pas donné assez de poids au certificat médical portant sur le traumatisme subi par sa fille, et a miné sa crédibilité sans explication adéquate. Selon le demandeur, la décision de la SAR est déraisonnable. Le demandeur n’a pas précisé ses allégations par rapport au manque d’équité procédurale dans son mémoire, et donc il n’y a pas lieu d’en traiter.
[11]
Je ne suis pas persuadé que la décision de la SAR est déraisonnable. En appliquant les facteurs énoncés dans Vavilov, je conviens que la décision démontre une logique cohérente, et que la SAR a appliqué le droit qui s’applique. La SAR a suivi de près les critères prescrits dans l’arrêt Zeng sur l’application de l’exclusion selon l’article 1E de la Convention, et l’analyse des critères est bien motivée et étayée par la preuve au dossier. Le demandeur n’est pas d’accord avec l’évaluation de la preuve, et en particulier l’évaluation de sa crédibilité, mais cette tâche est au cœur du rôle de la SPR et de celui de la SAR, et je soutiens que l’analyse est fondée sur la preuve et les considérations appropriées, selon la jurisprudence (voir Rahal c Canada (Citoyenneté et Immigration), 2012 CF 319).
Il n’y a pas lieu d’intervenir. La demande de contrôle judiciaire est rejetée. Il n’y a pas de question d’importance générale pour la certification.
JUGEMENT au dossier IMM-4277-19
LA COUR STATUE que :
La demande de contrôle judiciaire est rejetée.
Il n’y a aucune question d’importance générale à certifier.
« William F. Pentney »
Juge
COUR FÉDÉRALE
AVOCATS INSCRITS AU DOSSIER
DOSSIER :
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IMM-4277-19
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INTITULÉ :
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OBED IDENS PETIT HOMME c. MCI
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LIEU DE L’AUDIENCE :
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MONTRÉAL, QUÉBEC
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DATE DE L’AUDIENCE :
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LE 19 Février 2020
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JUGEMENT ET MOTIFS :
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PENTNEY J.
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DATE DES MOTIFS :
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LE 20 FÉVRIER 2020
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COMPARUTIONS :
Laurent Gryner
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POUR LA PARTIE DEMANDERESSE
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Renalda Ponari
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POUR LA PARTIE DÉFENDERESSE
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AVOCATS INSCRITS AU DOSSIER :
Laurent Gryner – Avocat Montréal, Québec
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POUR LA PARTIE DEMANDERESSE
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Procureur général du Canada
Montréal, Québec
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POUR LA PARTIE DÉFENDERESSE
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