Date : 20020321
Dossier : T-2256-01
Référence neutre : 2002 CFPI 310
Montréal (Québec), le 21 mars 2002
En présence de : Me Richard Morneau, protonotaire
ENTRE :
ASTRAL MÉDIA INC.
demanderesse
et
LE COMMISSAIRE DE LA CONCURRENCE
et
LE CONSEIL DE LA RADIODIFFUSION ET
DES TÉLÉCOMMUNICATIONS CANADIENNES
et
LA PROCUREURE GÉNÉRALE DU CANADA
et
TÉLÉMÉDIA RADIO INC.
défendeurs
Requête de la part de l'Association canadienne des Radiodiffuseurs pour permission d'intervenir.
[Règle 109 des Règles de la Cour fédérale (1998)]
MOTIFS DE L'ORDONNANCE ET ORDONNANCE
[1] J'entends pour les motifs qui suivent rejeter avec dépens cette requête de l'Association canadienne des Radiodiffuseurs (l'A.C.R.) présentée en vertu des règles 109 et 369 des Règles de la Cour fédérale (1998) (les règles).
[2] Le contexte général de cette demande d'intervention semble être le suivant.
[3] Aux termes d'une convention d'achat d'actions intervenue entre Télémédia Radio Inc. (Télémédia) et Astral Média Inc. (Astral) en date du 16 mai 2001 (ci-après la transaction proposée), Astral se propose d'acquérir le contrôle de Radiomédia et de toutes les entreprises de radiodiffusion de Télémédia et de son affiliée Télémédia Radio Atlantic Inc., lesquelles sont situées respectivement dans la province de Québec et dans les Maritimes.
[4] Le Commissaire de la concurrence (le Commissaire) nommé en vertu de la Loi sur la concurrence, L.R.C., ch. C-34, a ouvert une enquête sur la transaction proposée en vertu de l'alinéa 10(1)b) de cette loi.
[5] Le Commissaire soutient, entre autres, que ladite transaction aurait vraisemblablement pour effet d'empêcher ou de diminuer sensiblement la concurrence sur les marchés de la vente de temps publicitaire à la radio de langue française situés dans les régions d'Ottawa-Hull, de Montréal, de Sherbrooke, de Trois-Rivières, de Québec et de Chicoutimi-Jonquière.
[6] Astral et Télémédia se sont adressées, par demandes séparées mais au même effet, à notre Cour afin de faire déclarer que la Loi sur la concurrence ne s'applique pas à la transaction proposée et que le Commissaire n'a donc pas compétence sur la transaction proposée.
[7] Selon la jurisprudence de cette Cour, la règle 109 impose à une personne désirant intervenir dans une instance le fardeau de démontrer que les trois critères suivants sont satisfaits :
a) le requérant de l'intervention doit posséder un intérêt en ce qui concerne l'issue du procès;
b) l'issue du procès portera gravement atteinte aux droits du requérant;
c) le requérant, en sa qualité d'intervenant, apportera un point de vue différent à l'instance.
Abbott c. Canada, [2000] 3 C.F. 482 (1ère inst.).
[8] La règle 109 se lit comme suit :
109. (1) La Cour peut, sur requête, autoriser toute personne à intervenir dans une instance. (2) L'avis d'une requête présentée pour obtenir l'autorisation d'intervenir: a) précise les nom et adresse de la personne qui désire intervenir et ceux de son avocat, le cas échéant; b) explique de quelle manière la personne désire participer à l'instance et en quoi sa participation aidera à la prise d'une décision sur toute question de fait et de droit se rapportant à l'instance. (3) La Cour assortit l'autorisation d'intervenir de directives concernant : a) la signification de documents; b) le rôle de l'intervenant, notamment en ce qui concerne les dépens, les droits d'appel et toute autre question relative à la procédure à suivre. |
109. (1) The Court may, on motion, grant leave to any person to intervene in a proceeding. (2) Notice of a motion under subsection (1) shall (a) set out the full name and address of the proposed intervener and of any solicitor acting for the proposed intervener; and (b) describe how the proposed intervener wishes to participate in the proceeding and how that participation will assist the determination of a factual or legal issue related to the proceeding. (3) In granting a motion under subsection (1), the Court shall give directions regarding (a) the service of documents; and (b) the role of the intervener, including costs, rights of appeal and any other matters relating to the procedure to be followed by the intervener. |
[9] Je ne suis pas convaincu premièrement que l'issue des demandes de contrôle judiciaire en litige portera gravement atteinte aux droits de l'A.C.R.
[10] L'A.C.R. en la présente instance soutient que la décision qui sera rendue par cette Cour pourra avoir pour effet de réduire substantiellement la prévisibilité des orientations et décisions du pouvoir public à l'égard des radiodiffuseurs canadiens et ainsi compromettre ou substantiellement insécuriser les investissements qui doivent être effectués par les radiodiffuseurs canadiens. Or, je suis d'avis comme le signalent le Commissaire et le Procureur général du Canada que cet intérêt est de nature purement « jurisprudentielle » selon l'expression utilisée par le juge Hugessen dans l'arrêt Tioxyde Canada Inc. c. Canada (1994), 174 N.R. 212 (CAF). Je ne suis pas convaincu que la présente instance aura un impact direct sur les intérêts pécuniaires ou sur les droits de propriété de l'A.C.R. Son seul intérêt découle du fait que d'autres transactions pourront éventuellement requérir l'approbation du Commissaire et du CRTC.
[11] D'autre part, il m'apparaît que l'A.C.R. ne s'est pas déchargée de son fardeau de démontrer que son intervention aidera à la prise d'une décision sur toute question de faits et de droit se rapportant à l'instance.
[12] Suivant mon appréciation, l'A.C.R. se limite à énoncer qu'elle possède une expertise en matière de réglementation de l'industrie de la radiodiffusion et qu'elle possède un point de vue nouveau et distinct de celui des parties au litige sans toutefois préciser en quoi cette expertise et ce point de vue complètent les arguments et les faits que font valoir les parties à l'instance.
[13] De fait, il découle du contre-interrogatoire sur affidavit de monsieur O'Farrel - affidavit soumis à l'appui de la requête - que contrairement à ce qu'il allègue dans cet affidavit, l'A.C.R. ne peut s'appuyer sur aucune expertise particulière existante en ce qui a trait aux questions que cette Cour est appelée à trancher en la présente instance.
[14] Enfin, il appert qu'ayant sollicité l'intervention de l'A.C.R. au dossier en Cour fédérale pour y soutenir sa position et étant informée dès le 21 janvier 2002 de la décision d'intervenir de l'A.C.R., Astral n'en a jamais informé ni la Cour, ni le Commissaire ou le Procureur général du Canada en temps opportun. Astral aurait tenu ces parties dans l'ignorance complète de cette demande d'intervention, déjà décidée par l'A.C.R., et aurait ainsi négocié avec les procureurs des autres parties un échéancier pour une audition accélérée qui ne tient pas compte de cette intervention. Il y a là un élément d'inéquité et de tardivité que l'on peut retenir contre l'A.C.R.
Richard Morneau
protonotaire
COUR FÉDÉRALE DU CANADA
SECTION DE PREMIÈRE INSTANCE
Date : 20020321
Dossier : T-2256-01
Entre :
ASTRAL MÉDIA INC.
demanderesse
et
LE COMMISSAIRE DE LA CONCURRENCE
et
LE CONSEIL DE LA RADIODIFFUSION ET DES TÉLÉCOMMUNICATIONS CANADIENNES
et
LA PROCUREURE GÉNÉRALE DU CANADA
et
TÉLÉMÉDIA RADIO INC.
défendeurs
MOTIFS DE L'ORDONNANCE
ET ORDONNANCE
COUR FÉDÉRALE DU CANADA
SECTION DE PREMIÈRE INSTANCE
AVOCATS INSCRITS AU DOSSIER
DOSSIER :
INTITULÉ :
T-2256-01
ASTRAL MÉDIA INC.
demanderesse
et
LE COMMISSAIRE DE LA CONCURRENCE
et
LE CONSEIL DE LA RADIODIFFUSION ET DES TÉLÉCOMMUNICATIONS CANADIENNES
et
LA PROCUREURE GÉNÉRALE DU CANADA
et
TÉLÉMÉDIA RADIO INC.
défendeurs
REQUÊTE ÉCRITE EXAMINÉE À MONTRÉAL SANS COMPARUTION DES PARTIES
MOTIFS DE L'ORDONNANCE DE ME RICHARD MORNEAU, PROTONOTAIRE
EN DATE DU :21 mars 2002
OBSERVATIONS ÉCRITES:
Me Daniel O'Brien Me Jean-Christian Drolet |
pour l'Association canadienne des radiodiffuseurs |
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Me Carole Johnson Me Athena Debbie Afraim |
pour les défendeurs, le Commissaire de la concurrence et la Procureure générale du Canada |
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Me Réal Forest |
pour les défendeurs, le Commissaire de la concurrence et la Procureure générale du Canada |
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PROCUREURS INSCRITS AU DOSSIER:
O'Brien, Avocats Québec (Québec) |
pour l'Association canadienne des radiodiffuseurs |
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Me Morris Rosenberg Sous-procureur général du Canada |
pour les défendeurs, le Commissaire de la concurrence et la Procureure générale du Canada |
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Fasken Martineau DuMoulin Montréal (Québec) |
pour les défendeurs, le Commissaire de la concurrence et la Procureure générale du Canada |
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Stikeman, Elliott Montréal (Québec) |
pour la demanderesse |
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Me John Keogh Hull (Québec) |
pour le Conseil de la radiodiffusion et des télécommunications canadiennes |
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McCarthy Tétrault Montréal (Québec) |
pour Télémédia Radio Inc.
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