Date : 20011108
Dossier : IMM-4709-01
Référence neutre : 2001 CFPI 1225
ENTRE :
KADIATOU TRAORE
partie demanderesse
et
LE MINISTRE DE LA CITOYENNETÉ
ET DE L'IMMIGRATION
partie défenderesse
[1] Il s'agit d'une requête demandant le sursis de l'exécution d'une mesure de renvoi devenant exécutoire le 15 novembre 2001 contre la demanderesse. La requête est greffée à une demande d'autorisation et de contrôle judiciaire attaquant la décision de l'agent d'immigration, Denise Couture, rendue le 20 juin 2001, refusant la demande de dispense présentée par la demanderesse aux termes du paragraphe 114(2) de la Loi sur l'immigration (la "loi").
[2] Pour réussir, la demanderesse devrait démontrer qu'il existait une question sérieuse à débattre, qu'elle risquait de subir un préjudice irréparable si elle était déportée au Mali et que la balance des inconvénients jouait en sa faveur.
[3] L'agent d'immigration a essentiellement fondé sa décision sur le rapport de monsieur Maurice Groulx, l'agent de révision des revendications refusées ("agent réviseur"), en adoptant la décision de l'agent réviseur quant à l'absence de risques de retour.
[4] Quant à la question sérieuse, la demanderesse prétend que l'analyse de l'agent réviseur sur les risques de retour de la demanderesse au Mali n'est pas complète et n'est pas basée sur des documents pertinents et encore bien moins sur la situation exacte et actuelle concernant la pratique de l'excision dans la famille et dans son village natal. La demanderesse soumet donc que l'agent d'immigration a erré en concluant à l'absence de risques de retour.
[5] Ce n'est pas à un juge saisi d'une demande de redressement interlocutoire de faire une analyse complète du dossier. Afin de déterminer si il y a une "question sérieuse à juger", le juge saisi de la requête doit faire un examen préliminaire du fond de l'affaire. Les exigences minimales ne sont pas élevées.
[6] Je suis satisfait, sur examen préliminaire au fond de l'affaire, que la demanderesse a soulevé une question sérieuse à juger dans l'instance et que cette demande n'est ni futile, ni vexatoire.
[7] Quant au second élément, soit celui de préjudice irréparable, je constate le passage suivant dans le rapport de l'agent réviseur :
Loin de moi l'idée de minimiser l'horreur et les souffrances que doivent endurer la majorité des femmes au Mali. De telles pratiques sont courantes, malgré les efforts des gouvernements pour en extirper les racines profondément enfouies dans les traditions ancestrales, comme dans les tribus des Bambaras dont fait partie la requérante et dans les tribus des Malinkés, la tribu de son cousin. Si Madame Traore était une jeune femme sur le point de se marier, comme elle le prétend, et qu'elle ne veuille pas de ce mariage et de ces mutilations, il est probable que sa demande serait regardée favorablement. Mais Madame est âgée de 24 ans déjà mariée et divorcée.
[8] L'agent réviseur reconnaît qu'il y aurait risque de retour, si la demanderesse était une jeune femme sur le point de se marier, comme elle le prétend.
[9] Alors, si l'agent réviseur a erré dans son appréciation de la preuve pour conclure que les allégations de la demanderesse, à l'effet qu'elle devrait épouser son cousin à son retour et pourrait subir l'excision, sont sans fondement, les risques de retour pourraient être réels. C'est une question qui mérite d'être étudiée en profondeur au contrôle judiciaire de la décision de l'agent d'immigration.
[10] Je suis satisfait que la demanderesse risque de subir un préjudice irréparable si elle était déportée au Mali.
[11] En conclusion, je n'ai aucune hésitation à conclure que la balance des inconvénients penche en faveur du Ministre dans les circonstances.
[12] Pour toutes ces raisons, la requête en sursis d'exécution de mesure de renvoi est accueillie.
[13] J'ordonne que cette ordonnance demeure en effet jusqu'à la détermination de la demande d'autorisation et de contrôle judiciaire.
"Edmond P. Blanchard"
juge
Montréal (Québec)
le 8 novembre 2001
COUR FÉDÉRALE DU CANADA
SECTION DE PREMIÈRE INSTANCE
Date : 20011108
Dossier : IMM-4709-01
Entre :
KADIATOU TRAORE
partie demanderesse
et
LE MINISTRE DE LA CITOYENNETÉ
ET DE L'IMMIGRATION
partie défenderesse
MOTIFS DE L'ORDONNANCE
ET ORDONNANCE
COUR FÉDÉRALE DU CANADA
SECTION DE PREMIÈRE INSTANCE
NOMS DES AVOCATS ET DES PROCUREURS INSCRITS AU DOSSIER
DOSSIER : IMM-4709-01
INTITULÉ : KADIATOU TRAORE
partie demanderesse
et
LE MINISTRE DE LA CITOYENNETÉ
ET DE L'IMMIGRATION
partie défenderesse
LIEU DE L'AUDIENCE : Montréal (Québec)
DATE DE L'AUDIENCE : le 5 novembre 2001
MOTIFS DE L'ORDONNANCE ET ORDONNANCE
DE L'HONORABLE JUGE BLANCHARD
EN DATE DU : 8 novembre 2001
COMPARUTIONS:
Me Serge Dumas POUR LA PARTIE DEMANDERESSE
Me Steve Bell POUR LA PARTIE DÉFENDERESSE
AVOCATS INSCRITS AU DOSSIER:
Me Serge Dumas
Sainte-Foy (Québec) POUR LA PARTIE DEMANDERESSE
Morris Rosenberg
Sous-procureur général du Canada
Montréal (Québec) POUR LA PARTIE DÉFENDERESSE