Date : 20010727
Référence neutre : 2001 CFPI 837
Vancouver (Colombie-Britannique), le vendredi 27 juillet 2001
EN PRÉSENCE DE MADAME LE JUGE HENEGHAN
ENTRE :
XIAOGANG LI
demandeur
et
LE MINISTRE DE LA CITOYENNETÉ
ET DE L'IMMIGRATION
défendeur
MOTIFS DE L'ORDONNANCE ET ORDONNANCE
Le juge Heneghan
INTRODUCTION
[1] M. Xiaogang Li (le demandeur) sollicite le contrôle judiciaire de la décision rendue le 3 novembre 2000 par Amy L. Ma, agente des visas (l'agente des visas). Dans sa décision, l'agente des visas a refusé la demande de résidence permanente au Canada qu'avait présentée le demandeur.
LES FAITS
[2] Le demandeur est un ressortissant chinois. Le 6 août 1996, ou vers cette date, il a présenté au Consulat général du Canada à Hong Kong sa demande de résidence permanente au Canada, sous la catégorie des investisseurs. Son dossier a été transmis au bureau de Los Angeles le 27 novembre 1996. Il s'est présenté à ce bureau le 19 février 1998 pour une entrevue avec l'agente des visas.
[3] Par la suite, l'agente des visas a invité à plusieurs reprises le demandeur à produire des renseignements et documents complémentaires se rapportant à son statut de membre de la catégorie des investisseurs. Le demandeur a donc présenté des documents à l'agente des visas, notamment une évaluation de rendement d'entreprise. Cependant, l'agente des visas n'a pas trouvé satisfaisantes les pièces produites et elle a rejeté la demande de visa au motif que le demandeur n'avait pas produit de documents complémentaires comme elle le lui avait demandé en application du paragraphe 9(3) de la Loi sur l'immigration, (1985), ch. I-2, et modifications (la Loi). La lettre de refus contenait le passage suivant :
[Traduction]
En application du paragraphe 9(3) de la Loi sur l'immigration de 1976, vous avez été prié de produire les pièces suivantes pour nous permettre de poursuivre le traitement de votre demande :
- Une preuve d'opérations financières, prenant la forme de paiements bancaires et de relevés bancaires, de vos propres comptes bancaires au fonds canadien actif d'investissement.
QUESTION
[4] Le seul point à décider est celui de savoir si l'agente des visas a commis une erreur de droit en obligeant le demandeur à produire des documents non requis par la loi, puis en invoquant l'absence des documents concernés pour refuser la demande de résidence permanente au Canada présentée par le demandeur en tant que membre de la catégorie des investisseurs.
Conclusions du demandeur
[5] Le demandeur soutient que l'agente des visas lui aurait, à tort, donné à entendre que les pièces présentées par lui à propos de sommes obtenues par des modes de financement pouvaient servir à montrer sa qualité de membre de la catégorie des investisseurs. Le Règlement sur l'immigration de 1978, DORS/78-172, définit ainsi le mot « investisseur » , en son article 2 (modifié par DORS/89-585, art. 1) :
[6] Le demandeur affirme que rien ne l'empêche de se servir de fonds empruntés pour répondre en partie aux exigences et qu'il a remis à l'agente des visas des pièces suffisantes qui montraient qu'il avait conclu un contrat de prêt en vue d'obtenir une partie des fonds nécessaires. Il soutient que l'agente des visas a commis une erreur de droit en l'obligeant à produire de nouvelles pièces en sus de celles qu'elle avait déjà, notamment l'accord d'investissement du client, et que les pièces en la possession de l'agente des visas auraient dû suffire à informer celle-ci que, pour atteindre l'investissement minimal requis, il avait recours à des fonds empruntés.
[7] Deuxièmement, le demandeur affirme que l'agente des visas n'a pas agi équitablement en ne cherchant pas à savoir ce que signifiait l'accord d'investissement du client après que cet accord lui eut été présenté, et il dit qu'elle l'a injustement laissé croire que cet accord suffisait à dissiper l'inquiétude qu'elle entretenait à propos de la source des fonds en question.
Conclusions du défendeur
[8] Le défendeur exprime l'avis que l'agente des visas a toujours entretenu des doutes à propos de la source des fonds du demandeur et qu'elle l'a expressément prié, à plusieurs reprises, de produire des pièces complémentaires indiquant la source des fonds en question. Le défendeur s'en remet aux notes du STIDI conservées par l'agente des visas et affirme que les notes en question témoignent clairement des doutes persistants de l'agente des visas concernant cet aspect.
[9] Par ailleurs, le défendeur affirme que la source des fonds du demandeur était un aspect essentiel que devait explorer l'agente des visas pour évaluer l'admissibilité du demandeur à obtenir la résidence permanente au Canada en tant que membre de la catégorie des investisseurs.
[10] Le défendeur avance que le demandeur n'a pas réussi à dissiper les doutes de l'agente des visas concernant la source de ses fonds, bien que l'agente des visas l'eût prié à plusieurs reprises de produire cette information, et elle avait donc de bonnes raisons de refuser sa demande de résidence permanente.
ANALYSE
[11] La décision qui fait l'objet de la demande de contrôle judiciaire est une décision discrétionnaire prise par l'agente des visas. En l'absence d'une preuve montrant que l'agente des visas a ignoré des faits pertinents ou tenu compte d'éléments hors de propos, les tribunaux déféreront à sa décision. Sur ce point, voir l'arrêt To c. Canada (Ministre de l'Emploi et de l'Immigration), [1996] A.C.F. no 696, dans lequel la Cour d'appel fédérale a adopté la norme de contrôle énoncée par la Cour suprême du Canada dans l'arrêt Maple Lodge Farms c. Gouvernement du Canada, [1982] 2 R.C.S. 2, comme il suit :
C'est aussi une règle bien établie que les cours ne doivent pas s'ingérer dans l'exercice qu'un organisme désigné par la loi fait d'un pouvoir discrétionnaire simplement parce que la cour aurait exercé ce pouvoir différemment si la responsabilité lui en avait incombé. Lorsque le pouvoir discrétionnaire accordé par la loi a été exercé de bonne foi et, si nécessaire, conformément aux principes de justice naturelle, si on ne s'est pas fondé sur des considérations inappropriées ou étrangères à l'objet de la loi, les cours ne devraient pas modifier la décision.
[12] Il s'agit de savoir s'il était raisonnable pour l'agente des visas d'obliger un demandeur à apporter la preuve que l'argent investi par lui était le produit de son propre travail. En d'autres termes, la demande de preuve formulée par l'agente des visas à propos de la source des fonds était-elle une demande raisonnable?
[13] À mon avis, il faut répondre à cette question par l'affirmative. L'agente des visas avait pour tâche d'évaluer l'admissibilité du demandeur au statut de membre de la catégorie des investisseurs. Selon le Règlement sur l'immigration de 1978, l'un des critères de cette catégorie oblige les demandeurs du statut de résident permanent à prouver qu'ils possèdent un certain niveau de ressources. C'est toujours à celui qui demande une telle admission qu'il appartient de montrer qu'il remplit les conditions pour être admis au Canada; voir l'article 8 de la Loi. Il était raisonnable pour l'agente des visas de demander une confirmation financière, et il incombait au demandeur de produire l'information en une forme acceptable pour l'agente des visas. De l'avis de celle-ci, il ne l'a pas fait.
[14] À mon avis, le demandeur n'a pas réussi à montrer que l'agente des visas a commis une erreur dans l'exercice du pouvoir discrétionnaire que lui conférait la loi. La demande de contrôle judiciaire est rejetée.
[15] Les avocats ont indiqué que cette demande de contrôle judiciaire ne soulève aucune question à certifier.
ORDONNANCE
[16] La demande de contrôle judiciaire est rejetée.
« Elizabeth Heneghan »
Juge
Traduction certifiée conforme
Suzanne M. Gauthier, trad. a., LL.L.
COUR FÉDÉRALE DU CANADA
SECTION DE PREMIÈRE INSTANCE
AVOCATS INSCRITS AU DOSSIER
DOSSIER : IMM-105-01
INTITULÉ DE LA CAUSE : Xiaogang Li
c.
Le ministre de la Citoyenneté et de l'Immigration
LIEU DE L'AUDIENCE : Vancouver (Colombie-Britannique)
DATE DE L'AUDIENCE : le 25 juillet 2001
MOTIFS DE L'ORDONNANCE : le juge Heneghan
DATE DES MOTIFS : le 27 juillet 2001
ONT COMPARU :
Dennis Tanack POUR LE DEMANDEUR
Helen Park POUR LE DÉFENDEUR
AVOCATS INSCRITS AU DOSSIER :
Dennis Tanack POUR LE DEMANDEUR
Sous-procureur général du Canada POUR LE DÉFENDEUR
Vancouver (Colombie-Britannique)