Date : 20000915
Dossier : T-2556-97
ENTRE :
MAYFLOWER TRANSIT, INC.
demanderesse
(défenderesse reconventionnelle)
- et -
BEDWELL MANAGEMENT SYSTEM INC.,
MAYFLOWER MOVING SYSTEM INC. et
JAMES R. BEDWELL
défendeurs
(demandeurs reconventionnels)
MOTIFS DE L'ORDONNANCE ET ORDONNANCE
Le juge McKEOWN :
[1] À mon avis, les trois défendeurs sont coupables d'outrage au tribunal dans la présente espèce. Les trois défendeurs ont convenu d'une ordonnance sur consentement portant ce qui suit :
[TRADUCTION] « 1. Les défendeurs, leurs dirigeants, directeurs, mandataires, employés, licenciés et toute personne agissant selon les instructions ou avec le consentement ou l'autorisation des défendeurs ou de concert avec eux, sont tenus de s'abstenir, de façon interlocutoire jusqu'à la tenue du procès ou jusqu'au prononcé d'une nouvelle ordonnance de la Cour : |
... |
c) d'utiliser et/ou de distribuer de la papeterie, y compris du papier à lettre avec en-tête, des formulaires et des documents commerciaux, y compris des circulaires et des brochures, où figurent les marques Mayflower [telles que définies dans l'avis de requête] et le nom commercial Mayflower; |
... |
e) de faire mettre ou porter de quelque façon que ce soit par les employés des défendeurs des uniformes où figurent les marques Mayflower [telles que définies dans l'avis de requête] et le nom commercial Mayflower; |
... |
g) d'utiliser les marques Mayflower [telles que définies dans l'avis de requête] et le nom commercial Mayflower dans toute publicité classée, dans les Page jaunes ou dans d'autres annuaires, qui est retenue pour la première fois ou renouvelée pendant la durée de la présente ordonnance. |
[2] La demanderesse a produit des éléments de preuve à l'égard de trois manquements allégués distincts à l'ordonnance sur consentement signée par le juge Rothstein, maintenant juge de la Cour d'appel, le 19 janvier 1998. Le premier manquement allégué a trait à une circulaire personnalisée portant à la fois le nom « Bedwell Moving Systems » et la marque de commerce Mayflower. Mme Masur, agent immobilier à Ajax, a déclaré s'être occupée de la vente de l'immeuble situé au 19, Wickens Crescent, à Ajax, à l'automne de 1998. Elle ne connaissait pas Patricia Milne, la venderesse de l'immeuble, avant l'inscription de sa maison. Le 10 septembre 1998, elle se trouvait dans cette maison lorsque Mme Milne a pris son courrier. Il y avait dans son courrier une circulaire de Bedwell Moving Systems dont l'enveloppe portait la marque de commerce Mayflower. La lettre était adressée à Patricia Milne. Comme Mme Milne ne souhaitait pas retenir les services de Bedwell Moving Systems, elle a remis la circulaire à l'agent immobilier.
[3] M. Bedwell, l'un des défendeurs, a déclaré que Bedwell Management System Inc. expédiait habituellement des circulaires à des clients potentiels par l'intermédiaire d'un service d'expédition de courrier en vrac. Il a déclaré que Bedwell Management System Inc. n'avait pas expédié de circulaires personnalisées à des clients potentiels dans la région. Toutefois, selon le témoignage de Mme Masur, toutes les entreprises de déménagement de la région avaient comme politique d'obtenir une copie des nouvelles inscriptions et de leur expédier des circulaires. Je suis convaincu que le responsable des ventes ou quelqu'un au sein de Bedwell Moving Systems a pris les mesures nécessaires pour expédier cette circulaire à Mme Milne.
[4] M. Bedwell a aussi admis la possibilité que la circulaire ait pu être postée par un agent immobilier ou par un représentant de commerce, puisqu'il ne les avait pas avisés de mettre fin à la distribution de tout matériel écrit de Bedwell portant la marque de commerce Mayflower. À mon avis, cela constitue un manquement à l'ordonnance, même si M. Bedwell a produit de nouvelles circulaires et brochures en janvier 1998.
[5] La demanderesse a produit des éléments de preuve à l'égard d'un deuxième manquement allégué à l'ordonnance du juge Rothstein, à savoir le port, par un employé, d'un tee-shirt où figurait le nom « Bedwell » avec, en-dessous et en caractères beaucoup plus petits, la mention : [TRADUCTION] « Mayflower célèbre ses 50 ans de services » . Mme Hugh, réalisatrice et journaliste pour les nouvelles du réseau CTV, a déclaré s'être rendue aux bureaux des services de déménagement de Bedwell, le 26 août 1998, et y avoir filmé des séquences sur bande vidéo. Elle a aussi interviewé M. Bedwell à cette occasion. Au cours de l'entrevue, elle a manifesté son intention de photographier un chauffeur dans un des camions de Bedwell. M. Sam Williams était le chauffeur, et il portait le tee-shirt susmentionné.
[6] M. Bedwell a tenté d'expliquer cette situation en disant que M. Williams porte normalement une salopette dans ses fonctions habituelles d'entretien. Il a déclaré que dans des circonstances normales, la salopette de M. Williams aurait caché la mention de « Mayflower » sur le tee-shirt. M. Bedwell a aussi déclaré qu'il n'avait pas regardé la séquence en cause avant d'en voir des extraits des bandes vidéo aux nouvelles nationales du réseau CTV. Il a en outre déclaré avoir donné des directives enjoignant aux employés de ne plus porter les anciens tee-shirts. Il n'a toutefois pas tenté de rappeler les tee-shirts. J'accueille le témoignage de Mme Hugh selon lequel M. Williams a été présenté comme un chauffeur de Bedwell et, selon moi, cela s'est fait avec l'assentiment de M. Bedwell. Cela constitue aussi un manquement à l'ordonnance du juge Rothstein.
[7] Le troisième manquement allégué a trait à une inscription dans les Pages jaunes sur Internet où figure la mention « Aero Mayflower Transit Inc. » . Cette inscription a été trouvée lors d'une recherche effectuée le 13 octobre 1998 par M. Clifton, stagiaire en droit. La recherche effectuée par M. Clifton a aussi permis de déceler une deuxième inscription sous la mention « A Allied Bedwell Moving Systems » . Les deux inscriptions renvoyaient au même numéro de téléphone. M. Bedwell a déclaré qu'il ignorait l'existence de telles inscriptions sur Internet, et qu'à cette époque, il n'était pas nécessaire de verser quelque paiement pour être inscrit sur Internet. M. Clifton a en outre déclaré qu'il y avait une inscription dans l'annuaire téléphonique de 1998-1999 pour la région de York qui indiquait « A Allied Bedwell Moving Systems » et « Aero Mayflower Transit, Inc. » au même numéro de téléphone que celui de la grande annonce pour Bedwell Moving Systems. M. Bedwell a déclaré que les inscriptions d'une ligne pour « A Allied Bedwell Moving Systems » et « Aero Mayflower Transit, Inc. » avaient été faites à son insu, et qu'il n'y avait pas eu de paiement. Je ne suis pas convaincu que la demanderesse ait établi hors de tout doute raisonnable que M. Bedwell était au courant de ces deux inscriptions. Par conséquent, je ne conclus pas à l'existence d'un manquement à l'alinéa g) de l'ordonnance du juge Rothstein.
[8] Pour établir la peine appropriée dans la présente espèce, il me faut prendre en considération le fait que lorsque les parties donnent leur consentement à une ordonnance, il y a présomption qu'elles ont tenu compte des conséquences de l'ordonnance ainsi rendue. Par conséquent, un manquement est réputé être intentionnel; voir la décision TNT Canada Inc. c. TNT Motor Lines Ltd. (1990), 31 C.P.R. (3d) 165 (C.F. 1re inst.) à la p. 166.
[9] Il me faut aussi tenir compte de la présence de la bonne foi comme explication du manquement lorsque je dois établir la peine; voir l'arrêt Cutter (Canada) Ltd. c. Baxter Travenol Laboratories of Canada, Ltd., [1987] 2 C.F. 557 (C.A.), à la p. 564. Je note que M. Bedwell avait une entreprise constituée en personne morale nommée « Mayflower Moving System Inc. » qui était l'une des défenderesses en l'espèce, et dont il était administrateur. M. Bedwell a effectivement pris des mesures pour retirer les mentions de « Mayflower » de son édifice en enlevant un certain nombre de signes, en particulier le signe sur le haut de son édifice qui comportait formellement le nom « Mayflower » . De plus, M. Bedwell a effectivement préparé de nouvelles circulaires et de nouveaux tee-shirts à la suite du prononcé de l'injonction.
[10] Chacun des défendeurs est coupable à l'égard des deux manquements à l'ordonnance que je viens de reconnaître. Je note que M. Bedwell était partie à l'injonction sur consentement prononcée par le juge Rothstein et qu'il était l'âme dirigeante des deux sociétés. Les sociétés n'étaient pas représentées par un avocat parce qu'elles n'ont engagé aucune action par suite des ordonnances du protonotaire Lafrenière.
[11] Les défendeurs sont coupables à l'égard de la circulaire car l'ordonnance sur consentement prévoit expressément que toute action entreprise par un tiers avec le consentement des défendeurs constitue un manquement à cette ordonnance. Il ne fait pas de doute que les défendeurs n'ont pas consacré suffisamment d'efforts pour empêcher la violation de l'ordonnance.
ORDONNANCE
J'inflige par conséquent une amende de 5 000,00 $ à chacune des sociétés Bedwell Management Systems Inc. et Mayflower Moving Systems Inc., et une amende de 3 000,00 $ au défendeur James R. Bedwell. Les défendeurs devront en outre payer à la demanderesse les dépens de la présente action. Les dépens seront payables suivant la proportion dont les défendeurs peuvent convenir entre eux ou de façon proportionnelle à leurs amendes respectives.
« W.P. McKeown »
JUGE
Ottawa (Ontario)
15 septembre 2000
Traduction certifiée conforme,
Raymond Trempe, B.C.L.
COUR FÉDÉRALE DU CANADA
SECTION DE PREMIÈRE INSTANCE
AVOCATS ET AVOCATS INSCRITS AU DOSSIER
DOSSIER No : T-2556-97 |
INTITULÉ DE LA CAUSE : MAYFLOWER TRANSIT, INC. c. BEDWELL MANAGEMENT SYSTEM INC. ET AL. |
LIEU DE L'AUDIENCE : TORONTO (ONTARIO)
DATE DE L'AUDIENCE : 31 AOÛT 2000 |
MOTIFS DE L'ORDONNANCE ET ORDONNANCE DU JUGE McKEOWN
LE : 15 SEPTEMBRE 2000
ONT COMPARU :
Me MAY CHENG POUR LA DEMANDERESSE
Me CLAYTON SPENCER POUR LES DÉFENDEURS |
AVOCATS INSCRITS AU DOSSIER :
FASKEN MARTINEAU DuMOULIN POUR LA DEMANDERESSE
TORONTO (ONTARIO)
AUCUN AVOCAT INSCRIT AU DOSSIER POUR LE DÉFENDEUR