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Date : 20050120

Dossier : IMM-4274-04

Référence : 2005 CF 84

Montréal (Québec), le 20 janvier 2005

Présent :        Monsieur le juge Beaudry

ENTRE :

                                  CARLOS HUMBERTO MAZUERA MARULANDA

                                                                                                                    partie demanderesse

                                                                            et

                                            LE MINISTRE DE LA CITOYENNETÉ

                                                        ET DE L'IMMIGRATION

                                                                             

                                                                                                                       partie défenderesse

                                MOTIFS DE L'ORDONNANCE ET ORDONNANCE

[1]                La présente demande de contrôle judiciaire en vertu du paragraphe 72(1) de la Loi sur l'immigration et la protection des réfugiés, L.C. 2001 c.27 (Loi) a été déposée à l'encontre d'une décision de la Section de la protection des réfugiés rendue le 19 avril 2004. Dans cette décision, le tribunal a conclu que le demandeur ne satisfaisait pas à la définition de « réfugié au sens de la Convention » à l'article 96 ni à celle de « personne à protéger » à l'article 97.


QUESTIONS EN LITIGE

[2]                Les questions en litige sont les suivantes :

1.         Est-ce que le tribunal a omis de considérer la preuve documentaire ?

2.         Est-ce que le tribunal a commis une erreur manifestement déraisonnable en concluant que le demandeur n'avait pas une crainte subjective raisonnable ?

[3]                Pour les raisons qui suivent, je dois répondre de façon négative à ces deux questions.

[4]                Le demandeur est un ressortissant de la Colombie. Il allègue une crainte raisonnable de persécution pour sa vie et un risque de traitement et de peines cruels et inusités en raison de son appartenance à une famille persécutée par les groupes d'autodéfenses.

DÉCISION CONTESTÉE

[5]                Le tribunal trouve invraisemblable qu'un individu qui a quitté son pays depuis plus de 13 ans et qui n'est pas connu par la population colombienne soit persécuté par un ancien maire d'une petite ville située à des centaines de kilomètres des grandes villes de la Colombie. Il ne croit pas non plus que les unités d'autodéfense de la Colombie surveillent et fouillent tous les coins du pays incluant les aéroports et les postes frontaliers pour arrêter et tuer les membres de la famille Mazuera Marulanda.


[6]                Selon le décideur, le réclamant peut se relocaliser dans l'une des grandes villes de la Colombie et vivre une existence normale.

ANALYSE

1.         Est-ce que le tribunal a omis de considérer la preuve documentaire ?

[7]                Il est reconnu que le tribunal n'est pas tenu de faire référence dans ses motifs à la preuve documentaire qui lui a été présentée. Il existe une présomption selon laquelle la preuve documentaire a été prise en considération (Florea c. Canada (ministre de l'Emploi et de l'Immigration), [1993] A.C.F. no 598 (C.A.F) : QL). En outre, le tribunal possède la latitude de choisir, vu son rôle et son expertise, les éléments de preuve qu'il considère les plus pertinents (Tawfik c. Canada (Ministre de la Emploi et de l'Immigration)(1993), 137 F.T.R. 43, le juge.

[8]                L'examen de la décision et de la transcription de l'audience révèle que le tribunal a pris en considération de façon appropriée la preuve documentaire avant de rendre sa décision. Par exemple, le demandeur allègue avoir perdu une nièce aux mains des unités d'autodéfense en raison du fait que sa soeur Ofir Mazuera Marulanda a publiquement dénoncé le maire Hector Fabio Correa pour corruption dans l'exercice de ses fonctions. L'assassinat apparaît dans la preuve documentaire, mais rien n'est précisé quant à savoir qui en est l'auteur.


[9]                Il n'est pas suffisant pour le demandeur de démontrer qu'il existe de la preuve qui supporte le fait que certains membres de sa famille ont été victimes de persécution. Il doit démontrer que cette persécution risque raisonnablement de se concrétiser à son égard, ce qui n'est pas le cas ici.

2.         Est-ce que le tribunal a commis une erreur manifestement déraisonnable en concluant que le demandeur n'avait pas une crainte subjective raisonnable ?

[10]            En l'espèce, le tribunal est d'avis que le demandeur n'a pas démontré qu'il possédait une crainte subjective raisonnable de persécution. Le réclamant a quitté la Colombie depuis maintenant 13 ans et il n'était pas présent lors des événements qui ont eu lieu en l'an 2000. Questionné par le tribunal, il a admis que personne le connaîtrait aujourd'hui s'il devait retourner dans son pays. De plus, il a lui-même mentionné que la petite ville de Bugalagrande (lieu où la famille du demandeur a été persécutée) est située à plus de dix heures des grandes villes de Bogota et Medellin et que le maire Correa n'occupe plus son poste. Devant ces faits, il était tout à fait normal de conclure que le demandeur pouvait se relocaliser dans l'une de ces grandes villes.

[11]            Il a rajouté que son visa de travail aux États-Unis expirait et qu'il préférait demander le refuge au Canada étant donné que toute sa famille se trouve ici.

[12]            Ces raisons ne justifient en rien l'octroi du statut de réfugié.

[13]            À cet égard, les commentaires du juge Hugessen dans l'arrêt Urbanek c Canada (ministre de l'Emploi et de l'Immigration), [1992] A.C.F. no 556 sont très pertinents.

Le processus de reconnaissance du statut de réfugié au Canada vise à fournir un refuge sûr à ceux qui en ont vraiment besoin, et non pas à fournir un moyen rapide et pratique d'obtenir le droit d'établissement aux immigrants qui ne peuvent pas, ou ne veulent pas, l'obtenir de la manière habituelle.

[14]            Après avoir pris en considération la preuve présentée devant le tribunal, la transcription du témoignage du demandeur et les motifs de la décision, je suis d'avis que le tribunal n'a commis aucune erreur manifestement déraisonnable.

[15]            Les parties ont décliné de soumettre des questions à certifier. Ce dossier n'en soulève aucune.            

                                        ORDONNANCE

LA COUR ORDONNE que

Cette demande contrôle judiciaire est rejetée. Il n'y aura aucune question certifiée.

                    « Michel Beaudry »                  

                                  juge                              


                                     COUR FÉDÉRALE

                      AVOCATS INSCRITS AU DOSSIER

                                                     

DOSSIER :                          IMM-4274-04

INTITULÉ :                         CARLOS HUMBERTO MAZUERA MARULANDA

                                                                    partie demanderesse

et

LE MINISTRE DE LA CITOYENNETÉ

ET DE L'IMMIGRATION

                                                     

                                                                       partie défenderesse

LIEU DE L'AUDIENCE : Montréal (Québec)

DATE DE L'AUDIENCE :                            le 19 janvier 2005

MOTIFSDE L'ORDONNANCE ET ORDONNANCE : LE JUGE BEAUDRY

DATE DES MOTIFS :        le 20 janvier 2005

COMPARUTIONS:

Claude Brodeur                      POUR LA PARTIE DEMANDERESSE

Michel Pépin                          POUR LA PARTIE DÉFENDERESSE

AVOCATS INSCRITS AU DOSSIER:

Claude Brodeur                      POUR LA PARTIE DEMANDERESSE

Montréal (Québec)

John H. Sims                          POUR LA PARTIE DÉFENDERESSE


Sous-procureur général du Canada

Montréal (Québec)


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