Date : 19990519
Dossier : IMM-2809-98
Entre :
ISAAC MASOUDI RAD et
ESHRAT FARSI,
demandeurs,
- et -
LE MINISTRE DE LA CITOYENNETÉ ET DE L'IMMIGRATION,
défendeur.
MOTIFS DU JUGEMENT
LE JUGE McGILLIS
[1] Les demandeurs ont contesté par voie de contrôle judiciaire une décision de la Commission de l'immigration et du statut de réfugié (la Commission) concluant qu'ils n'étaient pas des réfugiés au sens de la Convention. Les demandeurs sont tous deux citoyens iraniens.
[2] Dans sa décision, la Commission a conclu, notamment, que le témoignage du demandeur principal n'était pas crédible ou digne de foi. À l'appui de cette décision, la Commission a relevé deux irrégularités dans sa déposition concernant ses activités anti-gouvernementales dans les années 1980. Toutefois, la Commission a statué que cela ne constituait pas le [TRADUCTION] " coeur de la revendication ", étant donné que c'était la participation du demandeur principal à des activités anti-gouvernementales dans les années 1990 qui avait précipité leur départ d'Iran.
[3] En analysant la déposition du demandeur principal concernant ses activités politiques dans les années 1990, la Commission a donné trois exemples pour appuyer sa conclusion selon laquelle cette déposition n'était pas crédible ou digne de foi. Tout d'abord, la Commission a déclaré que la preuve concernant ses activités anti-gouvernementales dans les années 1990 n'était pas crédible parce que sa déposition concernant ses activités dans les années 1980 était " plus détaillée ". Deuxièmement, la preuve concernant ce qui s'est passé dans son appartement " créait de la confusion " et était incohérente. Troisièmement, son témoignage concernant la sommation qui lui a prétendument été délivrée par les autorités iraniennes n'était pas plausible.
[4] Après avoir tiré ses conclusions sur le manque de crédibilité du demandeur principal au sujet de ses activités anti-gouvernementales dans les années 1990, la Commission a déclaré qu'elle avait [TRADUCTION] " des doutes au sujet de la crédibilité du témoignage sur d'autres aspects ". Malgré ces doutes, la Commission a déclaré qu'elle [TRADUCTION] " [...] estimait que cela suffisait pour tirer une conclusion puisque la déposition [du demandeur principal] n'était pas crédible ou digne de foi concernant la sommation et la preuve ayant trait à sa nouvelle participation à des activités anti-gouvernementales en 1994 ".
[5] Au cours de ses plaidoiries, l'avocat du défendeur a candidement admis qu'il ne pouvait pas faire d'observations à l'appui de la conclusion de la Commission selon laquelle la déposition du demandeur principal au sujet de ses activités dans les 1990 n'était pas aussi " détaillée " que celle qui concernait ses activités dans les années 1980, ou à l'appui de sa conclusion selon laquelle la déposition " créait de la confusion " au sujet des événements qui se sont déroulés dans son appartement. Par conséquent, la seule conclusion qui demeure relativement à la crédibilité est celle qui concerne la sommation.
[6] Dans son analyse du témoignage portant sur la sommation, la Commission déclare ce qui suit :
[TRADUCTION] |
Le tribunal juge toute cette partie du témoignage non crédible. Il ne se peut pas que la famille [du demandeur], qui avait des contacts avec [lui] à l'époque où, selon leurs allégations, ils se cachaient en Iran, ne l'ait pas informé de cette sommation. Il y a de nombreux scénarios où cette décision aurait pu engendrer de graves difficultés. Au lieu de cela, ils ont tout simplement caché la sommation dans un livre (un dictionnaire) en espérant que [le demandeur] la trouve à une date ultérieure. |
[les demandeurs] |
[7] L'avocat du demandeur soutient que la Commission a mal interprété la preuve pour ce qui a trait à la sommation. Je suis également de cet avis. En résumant la preuve concernant la sommation, la Commission a jugé qu'il [TRADUCTION] " ne se [pouvait] pas " que la famille du demandeur principal ne l'informe pas de la sommation, et qu'elle cache cette sommation dans un dictionnaire " en espérant " qu'il la trouve ultérieurement. Toutefois, la preuve à l'audience indique que ce n'est pas la famille du demandeur principal qui lui avait envoyé la sommation, mais plutôt une amie de la demanderesse. Cette amie a envoyé un dictionnaire aux demandeurs au Canada, dans lequel elle avait caché la sommation. Elle a par la suite informé les demandeurs au cours d'une conversation téléphonique qu'il y avait un [TRADUCTION] " document très important " dans le dictionnaire. La conclusion de la Commission au sujet du manque de vraisemblance de la question principale concernant la sommation était donc fondée, du moins en partie, sur une mauvaise interprétation de la preuve produite à l'audience. En outre, ses deux autres conclusions sur la crédibilité concernant le " coeur " de la cause des demandeurs sont erronées, comme l'a reconnu l'avocat du défendeur. Dans les circonstances, la décision de la Commission ne peut être maintenue.
[8] La demande de contrôle judiciaire est accueillie. La décision de la Commission en date du 1er mai 1998 est infirmée et l'affaire est renvoyée à un tribunal différemment constitué pour nouvelle audience et nouvelle décision.
" D. McGillis "
Juge
Toronto (Ontario)
le 19 mai 1999
Traduction certifiée conforme
Laurier Parenteau, LL. L.
COUR FÉDÉRALE DU CANADA
Avocats et procureurs inscrits au dossier
No DU GREFFE : IMM-2809-98
INTITULÉ DE LA CAUSE : ISAAC MASOUDI RAD et |
ESHRAT FARSI
- et -
LE MINISTRE DE LA
CITOYENNETÉ ET DE
L'IMMIGRATION
DATE DE L'AUDIENCE : LE MARDI 18 MAI 1999
LIEU DE L'AUDIENCE : TORONTO (ONTARIO)
MOTIFS DU JUGEMENT : LE JUGE McGILLIS
DATE : LE MERCREDI 19 MAI 1999
ONT COMPARU :
Raoul Boulakia pour les demandeurs
Kevin Lunney pour le défendeur
PROCUREURS INSCRITS AU DOSSIER :
Raoul Boulakia
Avocat et procureur
45, rue Saint-Nicholas
Toronto (Ontario)
M4Y 1W6 pour les demandeurs
Morris Rosenberg
Sous-procureur général du Canada pour le défendeur
COUR FÉDÉRALE DU CANADA
Date : 19990519
Dossier : IMM-2809-98
Entre :
ISAAC MASOUDI RAD et
ESHRAT FARSI,
demandeurs,
- et -
LE MINISTRE DE LA CITOYENNETÉ
ET DE L'IMMIGRATION,
défendeur.
MOTIFS DU JUGEMENT