Date : 20030325
Dossier : IMM-1380-01
Référence neutre : 2003 CFPI 339
Ottawa (Ontario), le 25 mars 2003.
EN PRÉSENCE DE MONSIEUR LE JUGE KELEN
Entre :
AZAR FARAHI BOZORG
demanderesse
- et -
LE MINISTRE DE LA
CITOYENNETÉ ET DE L'IMMIGRATION
défendeur
MOTIFS DE L'ORDONNANCE ET ORDONNANCE
[1] Il s'agit d'une demande de contrôle judiciaire d'une décision de M. Thomas Richter, le gestionnaire du programme d'immigration à l'ambassade du Canada à Téhéran, datée du 19 février 2001, dans laquelle il a rejeté la demande de visa d'étudiant de Mme Farahi Bozorg. La question en litige concernant la présente demande est de savoir si la demanderesse a établi qu'elle était une véritable visiteuse et non une immigrante.
LES FAITS
La demanderesse est une citoyenne de l'Iran qui étudiait les mathématiques à l'Université de Tabriz au moment où elle a présenté sa demande. Elle désire venir au Canada pour étudier la programmation informatique au Seneca College of Applied Arts and Technologies. Le programme d'études qu'elle a l'intention de suivre comprend un programme préparatoire suivi d'un programme professionnel de 3 ans en programmation et analyse des systèmes informatiques. Le collège l'a acceptée et elle devait commencer ses études le 8 janvier 2001.
[3] Mme Bozorg a présenté une demande de visa d'étudiant à l'ambassade en octobre 2000. Dans son formulaire de demande, elle a mentionné qu'elle assumerait ses dépenses au Canada et qu'elle avait 20 000 $ à sa disposition pour son séjour au Canada. Sa demande a été rejetée en décembre 2000 parce qu'elle n'avait pas suffisamment d'économies pour trois ans d'études au Canada. L'agent de réexamen avait également des doutes quant à la question de savoir si la demanderesse avait des liens assez étroits avec l'Iran qui la contraindraient à y retourner.
[4] Le Seneca College a prolongé l'offre qu'il avait faite à la demanderesse et lui a donné une nouvelle date pour commencer ses études, soit le 7 mai 2001. Elle a présenté une nouvelle demande de visa d'étudiant et le 19 février 2001, elle s'est rendue à l'ambassade pour une entrevue. La demanderesse a fourni des renseignements additionnels sur la situation financière de ses parents ainsi que la preuve d'un compte bancaire canadien contenant 12 000 $ dont elle se servirait pendant ses études au Canada. Elle a également produit une lettre provenant du Bushehr Polymer Industrial Group, laquelle précisait que :
[traduction]
Bushehr Polymer Ind. Group parraine Mme Farahibozorg et toutes les dépenses durant son séjour au Canada seront assumées par le groupe. Bushehr Polymer Ind. Group est composé de 20 sociétés, avec un chiffre d'affaires de plusieurs millions de dollars (veuillez consulter le document joint). De plus, elle s'est engagée à retourner en Iran après avoir terminé ses études et à travailler en qualité de programmeuse et d'analyste des systèmes informatiques pour le département d'informatique au siège social de notre groupe.
Les parents de la demanderesse occupent tous les deux des postes supérieurs au sein de la société et sont des actionnaires minoritaires du Bushehr Polymer Industrial Group.
[5] Sa demande a été rejetée. L'agent de réexamen n'a pas accordé beaucoup de valeur à la lettre puisque, selon lui, elle était intéressée, et parce qu'il doutait du fait que la société pouvait garantir un emploi trois ans plus tard, particulièrement à la lumière du fait que la lettre n'était accompagnée d'aucune autre documentation qui aurait pu démontrer un engagement plus ferme. Il a également noté que les soldes des comptes d'épargne de ses parents avaient augmenté d'une manière significative depuis la première demande, d'un montant qui ne correspondait pas à leur revenu déclaré. Il a rejeté la demande de la demanderesse en raison de la faiblesse de ses liens avec l'Iran.
[6] La demanderesse sollicite maintenant l'annulation de la décision en cause pour deux motifs. Premièrement, la demanderesse prétend que l'agent a violé les principes de justice naturelle en omettant de lui faire part de ses doutes concernant l'authenticité de la lettre. Deuxièmement, la décision de l'agent était déraisonnable à la lumière de l'ensemble des éléments de preuve dont il disposait.
ANALYSE
Le paragraphe 9(1.2) de la Loi sur l'immigration, L.R.C. (1985), ch. I-2 (la Loi), impose au visiteur le fardeau d'établir qu'il ou elle n'est pas un immigrant :
Charge de la preuve
9 (1.2) La personne qui demande un visa de visiteur doit convaincre l'agent des visas qu'elle n'est pas un immigrant.
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Burden on visitors
9 (1.2) A person who makes an application for a visitor's visa shall satisfy a visa officer that the person is not an immigrant. |
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[8] La norme de contrôle concernant une demande de cette nature est la décision raisonnable simpliciter. Voir Wang c. Canada (Ministre de la Citoyenneté et de l'Immigration) (2001), 199 F.T.R. 302, Liu c. Canada (Ministre de la Citoyenneté et de l'Immigration), 2001 CFPI 751, et Guo c. Canada (Ministre de la Citoyenneté et de l'Immigration), 2001 CFPI 1353.
[9] L'agent n'a pas commis d'erreur en omettant de faire part à la demanderesse de ses doutes concernant l'authenticité de la lettre. Le demandeur ou la demanderesse a le fardeau de fournir des éléments de preuve établissant qu'il ou elle est un véritable visiteur et non un immigrant. Comme l'a déclaré M. le juge Muldoon dans Li c. Canada (Ministre de la Citoyenneté et de l'Immigration), 2001 CFPI 791, au paragraphe 50 :
Si l'on pondère les facteurs énoncés dans l'arrêt Baker, les protections procédurales exigées par l'obligation d'équité devraient être assouplies pour le traitement des demandes de permis de séjour pour étudiant par les agents de visas à l'étranger. Par conséquent, il n'y a pas de raison de prétendre qu'il y a eu manquement à l'équité dans ce processus parce qu'une agente des visas n'a pas communiqué tous ses doutes à la demanderesse, ou qu'elle ne lui a pas accordé la possibilité de dissiper ces doutes.
[10] L'agent a tiré une conclusion après avoir soupesé les éléments de preuve présentés par la demanderesse. Il ne s'est appuyé sur aucune preuve extrinsèque. Dans ces circonstances, on ne peut pas affirmer que l'agent avait l'obligation de faire part à la demanderesse de ses doutes ou de chercher à obtenir d'elle d'autres renseignements qui aurait pu soutenir sa demande.
[11] De plus, l'agent avait raisonnablement le droit de douter de l'authenticité de la lettre d'appui provenant du Bushehr Polymer Industrial Group. Dans ses notes au STIDI, l'agent a écrit : [traduction] « La note ci-dessus est plutôt intéressée. Ils peuvent garantir un emploi trois ans plus tard? » Seulement quelques mois auparavant, lorsque la demanderesse avait formulé sa demande de visa d'étudiant pour la première fois, elle avait mentionné qu'elle assumerait seule ses dépenses au Canada. Elle n'avait rien mentionné concernant le Bushehr Polymer Industrial Group. La demande a été rejetée le 30 novembre 2000 en raison des doutes relativement aux finances et du manque de liens avec l'Iran. Moins d'un mois plus tard, la demanderesse était en mesure de produire une lettre datée du 13 décembre 2000 qui portait directement sur les points mis en doute. Bien que la Cour puisse ne pas être nécessairement d'accord avec l'agent, il était raisonnable de sa part, à la lumière des circonstances, de s'interroger quant à savoir si la lettre était « intéressée » et s'il y avait une véritable offre. Il est normal de se demander pourquoi la demande initiale ne comportait aucune mention de l'engagement du Bushehr Polymer Industrial Group.
[12] En plus, la demanderesse a omis de produire des éléments de preuve documentaire confirmant sa prétention selon laquelle ses parents gagnaient l'équivalent de 2 000 $ par mois. Elle a été incapable d'expliquer de manière adéquate l'augmentation soudaine du montant d'argent dans le compte d'épargne de ses parents et où elle a obtenu les 12 000 $ qui se trouvaient dans son compte bancaire au Canada. Lorsqu'elle examine tous ces facteurs dans leur ensemble, la Cour est convaincue que la conclusion de l'agent selon laquelle la demanderesse ne s'est pas acquittée du fardeau qui lui est imposé par le paragraphe 9(1.2) de la Loi est raisonnable.
[13] Les parties ne proposent aucune question pour la certification. Aucune question ne sera certifiée.
ORDONNANCE
LA COUR ORDONNE QUE :
La présente demande de contrôle judiciaire soit rejetée.
« Michael A. Kelen »
Juge
Traduction certifiée conforme
Christian Laroche, LL.B.
COUR FÉDÉRALE DU CANADA
Avocats inscrits au dossier
DOSSIER : IMM-1380-01
INTITULÉ : AZAR FARAHI BOZORG
demanderesse
- et -
LE MINISTRE DE LA CITOYENNETÉ
ET DE L'IMMIGRATION
défendeur
LIEU DE L'AUDIENCE : TORONTO (ONTARIO)
DATE DE L'AUDIENCE : LE JEUDI 13 MARS 2003
MOTIFS DE L'ORDONNANCE
ET ORDONNANCE : LE JUGE KELEN
DATE DES MOTIFS : LE MARDI 25 MARS 2003
COMPARUTIONS :
Matthew Jeffrey Pour la demanderesse
Ian Hicks Pour le défendeur
AVOCATS INSCRITS AU DOSSIER :
Lorne Waldman Pour la demanderesse
Avocat
281, av. Eglinton Est
Toronto (Ontario) M4P 1L3
Morris Rosenberg Pour le défendeur
Sous-procureur général du Canada
COUR FÉDÉRALE DU CANADA
Date : 20030325
Dossier : IMM-1380-01
ENTRE :
AZAR FARAHI BOZORG
demanderesse
- et -
LE MINISTRE DE LA CITOYENNETÉ ET DE L'IMMIGRATION
défendeur
MOTIFS DE L'ORDONNANCE
ET ORDONNANCE