Date : 20040116
Dossiers : IMM-9996-03
IMM-9995-03
IMM-10174-03
Référence : 2004 CF 53
ENTRE :
JOHANNES MEHARI MIRCHA
demandeur
et
LE SOLLICITEUR GÉNÉRAL DU CANADA
défendeur
MOTIFS DE L'ORDONNANCE
LE JUGE PINARD
[1] À l'audience tenue devant moi, les avocats des parties ont convenu que la requête en vue de l'obtention d'une injonction interlocutoire sursoyant au renvoi du demandeur en Éthiopie dans le dossier IMM-9996-03 s'appliquait également aux dossiers IMM-9995-03 et IMM-10174-03, qui ont donc été traités conjointement avec le dossier IMM-9996-03.
[2] La demande principale dans le dossier IMM-10174-03 est une demande d'autorisation et de contrôle judiciaire de l'omission de l'agent d'exécution de se demander, avant de procéder au renvoi, si l'avis de danger formulé contre le demandeur en 1996 était valable.
[3] La demande principale dans le dossier IMM-9995-03 est une demande d'autorisation et de contrôle judiciaire de la décision de Cindy Comrie qui a refusé de réexaminer l'avis de danger susmentionné.
[4] La demande principale dans le dossier IMM-9996-03 est une demande d'autorisation et de contrôle judiciaire de la décision de l'agente d'examen des risques avant renvoi (ERAR) suivant laquelle le demandeur ne serait pas en danger s'il était renvoyé en Éthiopie.
1. La question sérieuse
[5] En ce qui concerne le dossier IMM-10174-03, le demandeur n'a pas réussi à établir l'existence d'une question sérieuse, parce que le paragraphe 326(3) du Règlement sur l'immigration et la protection des réfugiés, DORS/2002-227 (le Règlement), montre clairement qu'un avis de danger formulé sous le régime de l'ancienne Loi sur l'immigration, L.R.C. 1985, ch. I-2, continue d'être valable pour l'application du paragraphe 115(2) de la Loi sur l'immigration et la protection des réfugiés, L.C. 2001, ch. 27 (la LIPR). En outre, l'article 48 de la LIPR prévoit qu'une mesure de renvoi doit être appliquée dès que les circonstances le permettent. L'agent d'exécution est donc tenu de procéder au renvoi et n'est pas autorisé à remettre en question la validité de l'avis de danger.
[6] Dans le dossier IMM-9996-03, le demandeur n'a pas réussi non plus à faire valoir une cause raisonnablement défendable, et ce, pour les motifs suivants :
a) Le demandeur n'a pas réussi à établir que l'agente d'ERAR avait fondé sa décision sur une conclusion de fait erronée, tirée de façon abusive ou arbitraire ou sans tenir compte des éléments dont elle disposait. Un examen de la preuve et des motifs de la décision de l'agente d'ERAR montre qu'elle pouvait raisonnablement tirer les conclusions qu'elle a tirées et qu'elle a procédé à un examen sérieux des observations du demandeur lorsqu'elle a décidé qu'il n'était pas en danger au sens de l'article 97 de la LIPR. Il n'appartient pas à la Cour d'apprécier de nouveau les éléments de preuve dont était saisi l'agent d'ERAR lorsque les motifs de celui-ci ne peuvent être qualifiés de déraisonnables.
b) Une lecture conjointe du sous-alinéa 113d)(i) de la LIPR et de l'alinéa 172(4)a) du Règlement montre que, si le demandeur n'est pas considéré en danger aux termes de l'article 97 de la Loi, aucune autre appréciation n'est requise.
[7] Dans le dossier IMM-9995-03, toutefois, je suis convaincu que l'omission de fournir au demandeur une possibilité raisonnable de soumettre des observations avant de rejeter sa demande de réexamen de l'avis de danger de 1996 soulève une question sérieuse d'équité procédurale. Compte tenu des circonstances, on peut raisonnablement prétendre que, malgré une courte période de moins de deux semaines après l'expiration du délai que s'était imposé lui-même le demandeur, l'équité exigeait qu'avant qu'il prenne sa décision datée du 15 décembre 2003, le décideur accuse à tout le moins réception de la demande écrite datée du 27 octobre 2003 dans laquelle l'avocate du demandeur lui demandait la possibilité de faire réexaminer l'avis de danger.
2. Le préjudice irréparable
[8] L'avocate du défendeur a concédé que les deux enfants du demandeur subiront un préjudice irréparable si le demandeur est renvoyé en Éthiopie.
3. La prépondérance des inconvénients
[9] Les parties ont convenu que, compte tenu de la conclusion suivant laquelle il existe une question sérieuse et un préjudice irréparable en l'espèce, la prépondérance des inconvénients penche en faveur du demandeur.
[10] En conséquence, l'injonction interlocutoire sursoyant au renvoi du demandeur en Éthiopie est refusée dans les dossiers IMM-9996-03 et IMM-10174-03 et elle est accordée uniquement dans le dossier IMM-9995-03.
[11] En conséquence, la Cour sursoit au renvoi du demandeur en Éthiopie jusqu'à ce qu'une décision soit rendue sur la demande d'autorisation et, si l'autorisation est accordée, jusqu'à ce qu'une décision soit rendue sur la demande de contrôle judiciaire dans le dossier IMM-9995-03.
« Yvon Pinard »
Juge
VANCOUVER (COLOMBIE-BRITANNIQUE)
Le 16 janvier 2004
Traduction certifiée conforme
Julie Boulanger, LL.M.
COUR FÉDÉRALE
AVOCATS INSCRITS AU DOSSIER
DOSSIERS : IMM-9996-03
IMM-9995-03
IMM-10174-03
INTITULÉ : JOHANNES MEHARI MIRCHA
c.
LE SOLLICITEUR GÉNÉRAL DU CANADA
LIEU DE L'AUDIENCE : VANCOUVER (COLOMBIE-BRITANNIQUE)
DATE DE L'AUDIENCE : LE 12 JANVIER 2004
MOTIFS DE L'ORDONNANCE : MONSIEUR LE JUGE PINARD
DATE DES MOTIFS : LE 16 JANVIER 2004
COMPARUTIONS :
Fiona Begg POUR LE DEMANDEUR
Brenda Carbonell POUR LE DÉFENDEUR
AVOCATS INSCRITS AU DOSSIER:
Bediako K. Buahene POUR LE DEMANDEUR
Avocat
Vancouver (Colombie-Britannique)
Morris Rosenberg POUR LE DÉFENDEUR
Sous-procureur général du Canada
Ottawa (Ontario)