Date : 20011101
Dossier : IMM-6450-00
Référence neutre : 2001 CFPI 1186
Entre :
Rayathar THUSANANTHAN
Partie demanderesse
- et -
MINISTRE DE LA CITOYENNETÉ
ET DE L'IMMIGRATION
Partie défenderesse
MOTIFS DE L'ORDONNANCE
LE JUGE PINARD :
[1] La demande de contrôle judiciaire vise une décision rendue le 23 novembre 2000 par la Section du statut de réfugié statuant que le demandeur n'est pas un réfugié au sens de la Convention, tel que défini au paragraphe 2(1) de la Loi sur l'immigration, L.R.C. (1985), ch. I-2.
[2] Le demandeur est un jeune Tamil, âgé de 26 ans, né au Sri Lanka. La Section du statut de réfugié a conclu qu'il n'est pas un réfugié au sens de la Convention en raison de son manque de crédibilité et de son incapacité à établir son identité.
[3] Après audition des procureurs des parties et révision de la preuve, il m'apparaît, sans pour autant endosser entièrement l'analyse faite par la Section du statut de réfugié, que ce tribunal spécialisé a bien basé sa décision sur des éléments de preuve au dossier et que généralement les inférences qu'il a tirées de ceux-ci pouvaient raisonnablement l'être (voir Aguebor c. M.E.I. (1993), 160 N.R. 315 (C.F., Appel)). En outre, il était, selon moi, loisible à la Section du statut de conclure, dans le contexte des omissions et contradictions attribuées au demandeur, que le comportement de celui-ci, qui n'a quitté son pays que neuf ans après le début de la persécution alléguée, était incompatible avec l'existence d'une crainte subjective.
[4] En ce qui concerne l'argument du demandeur voulant que le tribunal ait eu tort de ne pas considérer le document qu'il lui a transmis en cours de délibéré (annexe B de l'affidavit du demandeur signé le 15 janvier 2001), il est sans mérite, la preuve révélant clairement que la décision de la Section du statut avait été rendue avant qu'elle ne puisse prendre connaissance du document.
[5] Enfin, je n'accorde aucun mérite aux prétentions du demandeur voulant que la Section du statut ait omis de motiver sa conclusion d'absence de minimum de fondement. Dans sa décision, le tribunal a carrément conclu qu'il ne trouvait pas le demandeur crédible, lui reprochant spécifiquement de nombreuses omissions et contradictions. Bien que semblable conclusion, à mon sens, n'entraîne pas automatiquement une conclusion selon laquelle la revendication n'a pas un minimum de fondement, elle peut parfois, dépendant des circonstances, s'étendre à tous les aspects du témoignage du demandeur et suffire pour conclure que sa revendication n'a pas de minimum de fondement. Cela résulte non seulement de l'arrêt Sheikh c. Canada (M.E.I.), [1990] 3 C.F. 238 (C.F, Appel), où le juge MacGuigan a écrit, à la page 244 :
Le concept de la crédibilité des éléments de preuve et celui de la crédibilité du demandeur sont évidemment deux choses différentes, mais il est évident que lorsque la seule preuve soumise au tribunal qui relie le demandeur à sa demande est celle que ce dernier fournit lui-même (outre, peut-être, les dossiers sur différents pays dont on ne peut rien déduire directement à l'égard de la revendication du demandeur), la perception du tribunal que le demandeur n'est pas un témoin crédible équivaut en fait à la conclusion qu'il n'existe aucun élément crédible sur lequel pourrait se fonder le second palier d'audience pour faire droit à la demande.
J'ajouterais qu'à mon sens, même sans mettre en doute chacune des paroles du demandeur, le premier palier d'audience peut douter raisonnablement de sa crédibilité au point de conclure qu'il n'existe aucun élément de preuve crédible ayant trait à la revendication sur lequel le second palier d'audience pourrait se fonder pour y faire droit. En d'autres termes, la conclusion générale du manque de crédibilité du demandeur de statut peut fort bien s'étendre à tous les éléments de preuve pertinents de son témoignage. Naturellement, puisque le demandeur doit établir qu'il réunit tous les éléments de la définition de l'expression réfugié au sens de la Convention, la conclusion du premier palier d'audience que sa revendication ne possède pas un minimum de fondement est suffisante.
mais en outre de l'arrêt Mathiyabaranam c. Canada (M.E.I.), (1997), 221 N.R. 351, où le juge Linden exprime, à la page 354 :
. . . une détermination relative au minimum de fondement est un aspect inhérent de la définition d'un réfugié au sens de la Convention. Elle n'impose pas au revendicateur un fardeau de preuve qui est distinct du fardeau principal qu'impose la définition elle-même ou qui s'y ajoute. . . .
[6] En l'espèce la conclusion relative à l'absence de minimum de fondement de la revendication du demandeur m'apparaît raisonnablement résulter de l'ensemble des motifs de la décision démontrant le manque de crédibilité de ce dernier.
[7] En conséquence, la demande de contrôle judiciaire est rejetée.
JUGE
OTTAWA (ONTARIO)
Le 1er novembre 2001