Date : 20030228
Dossier : IMM-2344-00
Référence neutre : 2003 CFPI 259
Ottawa (Ontario), le 28 février 2003
EN PRÉSENCE DE MADAME LE JUGE SNIDER
ENTRE :
VLADIMIR PONOMARENKO
demandeur
et
LE MINISTRE DE LA CITOYENNETÉ ET DE L'IMMIGRATION
défendeur
MOTIFS DE L'ORDONNANCE ET ORDONNANCE
[1] Il s'agit d'une demande de contrôle judiciaire d'une décision de B. Mischuk, Deuxième secrétaire (Immigration) à l'Ambassade du Canada à Moscou en Russie (l'agent des visas à Moscou) portant la date du 30 mars 2000, qui a rejeté la demande de résidence permanente de Vladimir Ponomarenko (le demandeur).
Historique
[2] Le demandeur est originaire de Russie où il a été propriétaire d'une entreprise privée de 1982 à 1988 et associé dans deux entreprises de 1988 à 1991, à Moscou. Le demandeur détient deux passeports soit un passeport russe, valide jusqu'au 14 juin 2005 et un passeport du Commonwealth de la Dominique, valide jusqu'au 20 décembre 2005.
[3] En janvier 1998, l'avocat du demandeur a soumis, pour le compte du demandeur, une demande de résidence permanente conformément aux lignes directrices concernant les entreprises, au Consulat général du Canada à Buffalo, É.-U.. La lettre de l'avocat du demandeur accompagnant la demande disait ce qui suit :
[traduction] M. Ponomarenko se spécialise dans l'aide à ses compatriotes investisseurs en ce qui a trait à l'achat de propriétés immobilières et a agi comme intermédiaire financier pour ses clients à Moscou.
[4] Dans une lettre portant la date du 8 mars 1999, le Consulat général du Canada à Buffalo a avisé le demandeur de ce qui suit :
[traduction] Nous attendons les résultats d'enquêtes d'une autre agence gouvernementale. Sur réception du résultat, nous prévoyons acheminer ce dossier à New York pour une entrevue, comme vous en avez été avisé dans une lettre portant la date du 22 septembre 1998.
[5] Le 30 mars 1999, le dossier du demandeur a été examiné par un agent des visas à New York (l'agent des visas à New York) qui a décidé que le dossier devrait être acheminé à Moscou.
[6] Dans un lettre portant la date du 22 octobre 1999, le demandeur a été avisé du fait que l'entrevue concernant sa demande devait avoir lieu à Moscou le 20 mars 2000.
[7] En guise de réponse, l'avocat du demandeur a fait parvenir une lettre portant la date du 8 février 2000 indiquant qu'il ne lui était pas possible de se présenter à l'entrevue parce qu'il était un citoyen de la Dominique, qu'il n'avait pas de passeport russe, qu'il ne lui était pas possible d'obtenir un visa pour se rendre en Russie et qu'il n'avait pas d'intérêts commerciaux en Russie.
[8] Dans une lettre portant la date du 24 février 2000, le demandeur a été avisé qu'en vertu de la Loi sur l'immigration, L.R.C. 1985, ch. I-2 (la Loi) et du Règlement sur l'immigration de 1978, les agents des visas ont le pouvoir discrétionnaire de décider de l'endroit où les demandeurs doivent subir les entrevues. La lettre indiquait également que l'ambassade possédait des renseignements suivant lesquels le demandeur détenait un passeport russe valide et que, s'il l'avait perdu, rien ne l'empêchait d'obtenir un visa russe. La lettre avertissait le demandeur que s'il ne se présentait pas à l'entrevue, « [traduction] nous serons peut-être contraints de présumer qu'il ne s'est pas conformé à l'une de nos exigences et de refuser sa demande. »
[9] Le demandeur ne s'est pas présenté à l'entrevue prévue pour le 20 mars 2000 à l'ambassade du Canada à Moscou en Russie. Dans une lettre portant la date du 30 mars 2000, la demande de résidence permanente du demandeur a été refusée. La lettre indique que sa demande a été refusée parce qu' il ne s'est pas conformé aux exigences des paragraphes 9(2) et 9(4) de la Loi en ne se présentant pas à l'entrevue.
Analyse
[10] Pour les motifs suivants, je suis d'avis que la présente demande devrait être rejetée.
Première question en litige : La décision d'acheminer le dossier était-elle déraisonnable?
[11] La loi ne reconnaît aucun droit aux demandeurs de visas de voir leur dossier traité par un consulat donné. Bien que des efforts doivent être faits pour tenir compte des besoins des demandeurs, en fin de compte, la détermination du lieu de l'entrevue doit demeurer à la discrétion de l'agent des visas (Chen c. Canada, [1999] A.C.F. no 528 (1re inst.) (QL); Dotsenko c.Canada (Le ministre de la Citoyenneté et de l'Immigration), [2000] A.C.F. no 789 (1re inst.) (QL); Voskanova c. Canada (Le ministre de la Citoyenneté et de l'Immigration), [1999] A.C.F. no 449 (1re inst.) QL)).
[12] Les notes au dossier de résident permanent du demandeur indiquent que l'agent des visas à New York a conclu que le dossier devait être acheminé à Moscou :
[traduction] Puisque la source de sa fortune est basée en Russie, avec des actifs en France et au Canada, le bureau de Moscou est bien mieux équipé pour traiter cette demande, autant sur le plan de la langue (le demandeur indique qu'il parle l'anglais « avec difficulté » [sic]) que sur le plan de la vérification des documents. Une entrevue à Moscou est justifiée pour vérifier l'expérience, la source des fonds, la documentation d'affaires.
[13] Les motifs mentionnés dans les notes de l'agent des visas à New York pour l'acheminement du dossier ne sont pas déraisonnables et sont basés sur la preuve.
Deuxième question en litige : L'agent des visas à New York a-t-il abandonnéson pouvoir discrétionnaire en acheminant le dossier à Moscou?
[14] Le demandeur prétend que l'agent des visas à New York a abandonné son pouvoir discrétionnaire en fondant sa décision d'acheminer le dossier sur un énoncé de politique d'immigration des gens d'affaires qui exigeait que tous les dossiers de demandeurs d'origine russe soient acheminés à l'ambassade du Canada en Russie. Par conséquent, selon le demandeur, l'agent des visas à New York a rendu sa décision en suivant ces directives à la lettre sans tenir compte des faits. Je ne suis pas d'accord.
[15] D'abord, le demandeur n'a fait référence à aucune directive qui pourrait être décrite comme une politique stricte d'acheminement des dossiers.
[16] De plus, les notes de l'agent des visas à New York indiquent qu'il a bien tenu compte de facteurs pertinents en décidant d'acheminer le dossier du demandeur. Les motifs révèlent que, même s'il y avait eu une politique d'acheminement automatique des dossiers, l'agent des visas à New York a pris la décision d'acheminer le dossier en tenant compte des facteurs pertinents dans le cas particulier du demandeur et il n'a donc pas abandonné son pouvoir discrétionnaire.
Troisième question en litige : L'agent des visas à Moscou a-t-il abandonné son pouvoir discrétionnaire en refusant d'accorder une deuxième entrevue au demandeur?
[17] Le demandeur a prétendu que l'agent des visas à Moscou avait mal exercé son pouvoir discrétionnaire en décidant de ne pas accorder de deuxième entrevue et de refuser la demande de résidence permanente. Le demandeur a allégué que l'agent des visas à Moscou avait été avisé par le demandeur qu'il ne lui serait pas possible de se présenter à l'entrevue. Ensuite, après que le demandeur eut fait défaut de se présenter à l'entrevue, l'agent des visas à Moscou a d'abord eu l'intention d'accorder au demandeur une deuxième entrevue mais, après avoir lu la lettre de son supérieur indiquant que le demandeur avait été avisé qu'il était possible qu'il soit refusé s'il ne se présentait pas, il a changé d'avis et a préparé une lettre de refus. Le demandeur a fait valoir que les actes de l'agent des visas à Moscou équivalent à une omission d'exercer son pouvoir discrétionnaire.
[18] Le demandeur cite la décision Baluyut c. Canada (Le ministre de l'Emploi et de l'Immigration), [1992] 3 A.C.F. no 717 (1re inst.) (QL), au soutien de sa prétention selon laquelle l'agent des visas à Moscou a omis d'exercer son pouvoir discrétionnaire en suivant simplement les directives de son superviseur pour rendre sa décision. Cependant, il existe une distinction importante entre l'affaire Baluyut, précitée, et la présente affaire. Dans l'affaire Baluyut, précitée, l'agent des visas a demandé à son superviseur quelle mesure devait être prise puis il a simplement suivi les directives de son superviseur. Dans la présente affaire, cependant, la lettre adressée au demandeur l'avertissant que l'omission de se présenter à l'entrevue pourrait avoir comme résultat le refus de sa demande ne constituait pas une instruction ou une directive donnée à l'agent des visas à Moscou de refuser la demande.
[19] L'agent des visas à Moscou avait le droit de tenir compte de la lettre de son supérieur à titre d'élément de preuve s'appliquant au contexte de cette affaire dans son ensemble. Il a également exercé son propre pouvoir discrétionnaire en attendant de recevoir du demandeur une explication plus détaillée des raisons de son absence. Le demandeur n'a jamais communiqué avec le bureau de Moscou après la lettre du 24 février 2000. Par conséquent, je suis d'avis que l'agent des visas à Moscou a bel et bien exercé son pouvoir discrétionnaire dans cette affaire et qu'aucune erreur n'a été commise.
[20] En conclusion, je suis d'avis de rejeter la présente demande de contrôle judiciaire. Aucune question n'a été soumise pour certification.
ORDONNANCE
LA COUR ORDONNE QUE :
1. La présente demande de contrôle judiciaire soit rejetée; et
2. aucune question ne soit certifiée.
« Judith A. Snider »
Juge
Traduction certifiée conforme
Caroline Raymond, LL.L.
COUR FÉDÉRALE DU CANADA
SECTION DE PREMIÈRE INSTANCE
AVOCATS INSCRITS AU DOSSIER
DOSSIER : IMM-2344-00
INTITULÉ : VLADIMIR PONOMARENKO
c.
MCI
DATE DE L'AUDIENCE : le 27 février 2003
LIEU DE L'AUDIENCE : Toronto (Ontario)
COMPARUTIONS :
Sabrina Tozzi POUR LE DEMANDEUR
Neeta Logsetty POUR LE DÉFENDEUR
AVOCATS INSCRITS AU DOSSIER :
Stephen Green POUR LE DEMANDEUR
Green & Spiegel
121, rue King Ouest
Bureau 2200, C.P. 114
Toronto (Ontario)
M5H 3T9
Tél : 416-862-7880
Fax : 416-862-1698
Lori Hendricks POUR LE DÉFENDEUR
Ministère de la Justice
130, rue King Ouest
Bureau 3400, C.P. 36
Toronto (Ontario)
M5X 1K6
Tél : 416-972-9263
Fax : 416-954-8982