Date : 20041025
Référence : 2004 CF 1479
Toronto (Ontario), le 25 octobre 2004
EN PRÉSENCE DE Me ROGER R. LAFRENIÈRE, PROTONOTAIRE
ENTRE :
EMBAYE MELEKIN
demandeur
et
LA COMMISSION CANADIENNE DES DROITS DE LA PERSONNE
défenderesse
MOTIFS DE L'ORDONNANCE ET ORDONNANCE
[1] Un examen de l'état de l'instance a été tenu, conformément à l'article 383 des Règles de la Cour fédérale (1998) (les Règles), sur la base des observations écrites déposées le 30 septembre 2004 par le demandeur en réponse à l'avis d'examen de l'état de l'instance daté du 31 août 2004.
[2] Le demandeur, qui se représente lui-même, a présenté une demande de contrôle judiciaire le 14 janvier 2004 au sujet d'une décision de la Commission canadienne des droits de la personne (la CCDP), datée du 15 décembre 2003, laquelle a rejeté la plainte de traitement discriminatoire déposée par le demandeur à l'encontre de son ancien employeur, Bell Canada (Bell). Les motifs du rejet de la plainte du demandeur, tels qu'ils sont mentionnés dans l'avis de demande, étaient [traduction] « qu'une enquête a indiqué que les besoins du plaignant, en raison de son handicap, avaient été satisfaits au cours de la période d'emploi » et que [traduction] « selon la preuve, le plaignant a été renvoyé à la fin de la durée déterminée de son emploi pour des motifs autres que l'incapacité » .
[3] La CCDP est la seule partie désignée à titre de défenderesse à la demande, en dépit du fait qu'un tribunal dont la décision fait l'objet d'un contrôle judiciaire ne soit pas une partie défenderesse appropriée dans une demande : Yeager c. Canada (Service correctionnel), (2000), 189 F.T.R. 196. (C.F. 1re inst.). Ni le procureur général du Canada ni Bell n'ont été joints en tant que parties et rien n'indique qu'ils sont même au courant de la présente instance.
[4] Immédiatement après le début de l'instance, le demandeur a envoyé trois lettres au président-directeur général de Bell lui demandant de produire certains documents, mais il semble que ses demandes aient été rejetées. Le demandeur n'a pris aucune autre mesure pour faire avancer l'instance et celle-ci est demeurée inactive jusqu'à ce que l'avis d'examen de l'état de l'instance soit délivré, un certain nombre de mois plus tard, en août 2004.
[5] Dans la décision Baroud c. Canada (1998), 160 F.T.R. 91 (C.F. 1re inst.), le juge Hugessen a précisé les deux questions auxquelles la Cour devrait s'intéresser lors d'un examen de l'état de l'instance. Premièrement, quelles sont les raisons pour lesquelles l'affaire n'a pas avancé plus vite et justifient-elles le retard qui a eu lieu? Deuxièmement, quelles mesures le demandeur propose-t-il maintenant pour faire avancer l'affaire?
[6] Le demandeur cherche à justifier le délai en plaidant qu'il [traduction] « n'était pas au courant des contraintes de temps de 180 jours » , qu'il a été incapable de retenir les services d'un avocat et que Bell a contrecarré ses efforts pour obtenir ses dossiers de travail. Le plaidoyer d'ignorance des règles du demandeur ne peut être admis dans les circonstances. Pour commencer, tous les plaideurs ont l'obligation de se conformer aux règles, même s'ils ne sont pas représentés par un avocat. En outre, bien que cela soit un truisme, l'ignorance de la loi ne peut servir d'excuse. En l'espèce, le demandeur avait les moyens d'instituer l'instance dans le délai prescrit au paragraphe 18.1(2) de la Loi sur les Cours fédérales. En plus, dans ses lettres adressées à Bell, écrites au cours des jours qui ont suivi le début de l'instance, le demandeur fait référence à un [traduction] « délai » pour [traduction] « le dépôt au greffe de la Cour » ainsi qu'à [traduction] « l'urgence de [sa] demande et au délai prescrit [...] à observer pour déposer un dossier à la Cour » . La prétention du demandeur selon laquelle ses connaissances des règles étaient insuffisantes est gravement minée, puisqu'il semble bien connaître l'exigence selon laquelle les demandes sont sensées être instruites sommairement.
[7] En ce qui a trait à la tentative de jeter le blâme sur Bell pour le délai, le demandeur était au courant, depuis au moins le 2 mars 2004, que Bell ne coopérerait pas en produisant volontairement les dossiers de travail demandés. Pourtant, même s'il croyait que Bell [traduction] « entravait avec succès tous [ses] efforts pour obtenir une réparation en justice » , le demandeur n'a rien fait pour exiger la production de la part du tiers. De toute manière, il est loin d'être certain que les documents demandés à Bell seraient utiles puisque, en général, seuls les documents dont disposait effectivement le décideur lorsqu'il a rendu sa décision sont considérés pertinents et admissibles. Dans les circonstances, je ne suis pas convaincu que le demandeur a expliqué le délai ou justifié son inaction.
[8] Quant au deuxième élément du critère de la décision Baroud, le demandeur n'a présenté aucune mesure pour faire avancer l'instance; en fait, c'est tout à fait le contraire. Il déclare qu'il a tenté d'obtenir l'assistance d'un avocat, mais sans succès. Il prétend également qu'il n'a pas les ressources financières pour engager un avocat. Toutefois, rien n'indique à quel moment il a approché des avocats pour s'occuper de son dossier ni à quel moment il a arrêté de se chercher un avocat. En fin de compte, c'est le demandeur qui portait la responsabilité de poursuivre la demande avec diligence, avec ou sans avocat. Le fait qu'il souhaite procéder avec la demande est tout simplement insuffisant. En me basant sur les renseignements dont je dispose, je ne suis pas convaincu que le demandeur a toujours l'intention, ou même la capacité, de mener la présente demande à terme en temps opportun.
[9] En tenant compte du délai de sept mois, lequel n'a pas été expliqué de manière satisfaisante, et de l'absence de mesures concrètes pour faire avancer l'instance, je conclus que la demande devrait à juste titre être rejetée pour cause de retard.
ORDONNANCE
LA COUR ORDONNE que la demande soit rejetée pour cause de retard.
« Roger R. Lafrenière »
Protonotaire
Traduction certifiée conforme
Christian Laroche, LL.B.
COUR FÉDÉRALE
AVOCATS INSCRITS AU DOSSIER
DOSSIER : T-91-04
INTITULÉ : EMBAYE MELEKIN
c.
LA COMMISSION CANADIENNE DES DROITS DE LA PERSONNE
AFFAIRE EXAMINÉE À TORONTO (ONTARIO) EN VERTU DE L'ARTICLE 380 DES RÈGLES
MOTIFS DE L'ORDONNANCE
ET ORDONNANCE : LE PROTONOTAIRE LAFRENIÈRE
DATE DES MOTIFS : LE 25 OCTOBRE 2004
OBSERVATIONS ÉCRITES :
Embaye Melekin POUR SON PROPRE COMPTE
AVOCATS INSCRITS AU DOSSIER :
Embaye Melekin POUR SON PROPRE COMPTE
Downsview (Ontario)
COUR FÉDÉRALE
Date : 20041025
Dossier : T-91-04
ENTRE :
EMBAYE MELEKIN
demandeur
et
LA COMMISSION CANADIENNE DES DROITS DE LA PERSONNE
défenderesse
MOTIFS DE L'ORDONNANCE
ET ORDONNANCE